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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3529/2023

ATA/1314/2023 du 06.12.2023 ( FPUBL ) , REJETE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3529/2023-FPUBL ATA/1314/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 6 décembre 2023

sur effet suspensif

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Daniel KINZER, avocat

contre

COMMUNE B______ intimée
représentée par Me Steve ALDER, avocat

 



 

Attendu, en fait, que :

A. a. A______ a été engagée, le 31 mai 2022, par le Conseil administratif (ci-après : CA) de la ville B______ (ci-après : la commune) en qualité d’agente de la police municipale au sein du service sécurité. Son entrée en fonction a été fixée au 1er juillet 2022.

b. Par décision du 28 septembre 2023, déclaré exécutoire nonobstant recours, le CA a mis un terme à la période probatoire liant l’intéressée à la commune. La fin des rapports de service interviendrait le 30 novembre 2023. Le cumul des absences découlant d’empêchements de venir travailler était tel que le CA ne disposait pas d’une période d’observation suffisante lui permettant de se déterminer favorablement, cela au terme de quinze mois de rapports contractuels.

B. a. Par acte du 30 octobre 2023, A______ a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à sa réintégration dans son poste d’agente de police municipale. À titre préalable, elle a sollicité la restitution de l’effet suspensif au recours.

Aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’opposait à la restitution de l’effet suspensif puisque celle-ci permettrait simplement de maintenir le statu quo jusqu’à droit jugé. Ses intérêts privés étaient gravement menacés puisqu’elle risquait de se retrouver sans emploi dès le 1er décembre 2023 et que ses chances de succès sur le fond étaient importantes. La commune avait en effet excédé son pouvoir d’appréciation en procédant à son licenciement sur la base d’une analyse abstraite des jours d’absence effectuée par le service du personnel, alors même qu’aucune demande ou plainte n’émanait de sa hiérarchie directe. Son état de santé était en progression chaque jour, de sorte que sa capacité de travail s’améliorait en parallèle. Ensuite, la commune ne disposait pas encore d’un remplaçant, puisque le poste venait d’être mis au concours. Enfin, l’absence de missions à lui confier confirmait qu’il n’y avait aucune urgence à repourvoir le poste. Il était contraire à la pesée d’intérêts de mettre fin au contrat de travail d’une collaboratrice qui était en convalescence pour engager une nouvelle personne qu’il faudrait former et intégrer dans le groupe. La commune n’avait aucun intérêt à s’en séparer immédiatement,

b. Se déterminant sur l’effet suspensif, l’autorité intimée a conclu au rejet de la requête de restitution. En retirant l’effet suspensif à l’éventuel recours déposé par la recourante, l’autorité intimée avait manifesté son intention de ne pas la réintégrer, quand bien même son recours devait être admis. La chambre administrative ne pouvait pas faire droit à la demande de restitution de l’effet suspensif, sauf à rendre une décision allant au-delà des compétences qui seraient les siennes sur le fond vu que, à teneur de l’art. 102 du statut du personnel de la ville B______ (ci-après : le statut), elle ne pouvait imposer à la commune sa réintégration. La recourante pouvait, au demeurant, être dans l’impossibilité de rembourser le traitement perçu de manière indue. L’intérêt public à la préservation des finances de l’État primait sur l’intérêt financier à percevoir un salaire durant la procédure.

c. La recourante n’a pas répliqué sur effet suspensif dans le délai imparti à cet effet.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger sur la question de l’effet suspensif.

 

Considérant, en droit, que :

1.             Prima facie, le recours est recevable (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Les décisions sur effet suspensif et mesures provisionnelles sont prises par la présidente, respectivement par la vice-présidente, ou en cas d’empêchement de ceux‑ci, par un ou une juge (art. 21 al. 2 LPA ; 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 20 juin 2023).

3.              

3.1 Aux termes de l’art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsqu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

3.2 Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) - ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2 ; ATA/1110/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3 ; ATA/997/2015 du 25 septembre 2015 consid. 3).

Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253‑420, p. 265).

L’octroi de mesures provisionnelles présuppose l’urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l’intéressé la menace d’un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405 ; du 18 septembre 2018).

Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1).

Les décisions incidentes ne sont susceptibles de recours que si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 57 let. c LPA).

3.3 Selon l’art. 102 du statut, toute décision de fin des rapports de service peut être contestée par la voie d'un recours auprès de la juridiction administrative compétente dans un délai de 30 jours dès la notification (al. 1). Si la juridiction administrative compétente retient que la décision contestée est contraire au droit, elle peut proposer la réintégration de l'intéressé (al. 2). Si le Conseil administratif rejette cette proposition, l’autorité judiciaire fixe une indemnité dont le montant est déterminé sur la base du dernier traitement brut, à l'exclusion de tout autre élément de rémunération. L’indemnité ne peut pas être inférieure à un mois et supérieure à 6 mois de traitement pour un employé en période probatoire. Dans le cas d’un agent communal, l’indemnité maximale est fixée à 24 mois (al. 3).

3.4 En l’occurrence, dans sa détermination sur effet suspensif, l’intimée a clairement indiqué qu’elle n’entendait pas poursuivre les relations de travail avec la recourante, confirmant son intention de ne pas la réintégrer « quelle que soit l’issue de la procédure ». Dès lors, s’il était fait droit à la demande de restitution de l’effet suspensif présentée par la recourante, la chambre de céans rendrait une décision allant au-delà des compétences qui sont les siennes sur le fond, de sorte qu’il n’y a pas lieu de procéder en l’espèce à une pesée des intérêts en présence (ATA/110/2020 du 3 février 2020 consid. 6 ; ATA/411/2018 du 2 mai 2018 consid. 6 ; ATA/280/2018 du 23 mars 2018 consid. 6).

Au vu de ce qui précède, la demande de restitution de l'effet suspensif au recours sera refusée.

4.             Le sort des frais sera réservé jusqu’à droit jugé au fond.

* * * * *

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête de restitution de l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Daniel KINZER, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me Steve ALDER, avocat de la commune B______.

 

 

La présidente :

 

 

 

Valérie LAUBER

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :