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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1631/2023

ATA/1268/2023 du 24.11.2023 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1631/2023-EXPLOI ATA/1268/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 novembre 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Martine STÜCKELBERG, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL intimé



EN FAIT

A. a. A______ est la mère de deux enfants, nés en 2001 et 2004. Elle s’est séparée de leur père en 2005 et a obtenu leur garde. Le couple est aujourd’hui divorcé.

b. Elle a habité, avec ses enfants, dans un appartement de 123 m² à l’avenue B______ jusqu’en 2015, date à laquelle elle a déménagé dans un appartement d’environ 180 m² au __, chemin des C______ à Champel.

Ses parents sont domiciliés à proximité, dans un appartement de 115 m2.

c. En janvier 2010, A______ a engagé D______, née le ______ 1970, d’origine philippine, sans qualifications professionnelles, en qualité de femme de ménage.

D______ a démissionné le 30 août 2021.

d. A______ vit avec E______, son compagnon.

e. Pendant la pandémie de Covid-19, le fils ainé de A______ a habité dans le studio de E______, situé au rez-de-chaussée de l’immeuble ______, chemin des C______.

B. a. Le 5 octobre 2021, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci‑après : OCIRT) a informé A______ et E______ qu’il procédait à des contrôles et conditions de travail dans les ménages privés. Différents documents leur étaient demandés.

E______ a rapidement été exclu de la procédure, n’étant pas concerné.

b. Par pli du 26 octobre 2021, A______ a confirmé avoir employé D______. Celle-ci avait pour tâche de s’occuper du nettoyage, du repassage, parfois de faire les courses et quelquefois les repas. En août 2010, elle travaillait environ 35 heures par semaine en moyenne pour un salaire mensuel net de CHF 2’100.-. À cette période, elle s’occupait également de la prise en charge des enfants à leur retour de l’école, au domicile de la famille, entre 17h30 et 19h00. À partir de 2015, les enfants ayant grandi, D______ travaillait 30 heures par semaine environ contre paiement d’un salaire mensuel net de CHF 2’000.-. À cette époque, A______ avait déménagé dans un appartement de 180 m². Elle avait toujours payé le salaire en espèces, son employée ne disposant pas de compte bancaire. Elle n’avait malheureusement pas de preuve des salaires versés. D______ était par ailleurs logée et nourrie dans un studio meublé indépendant. Elle avait reçu, une fois, un supplément d’environ CHF 1'500.- pour compléter sa rémunération. Elle bénéficiait de plus de quatre semaines de vacances par an, la famille étant absente de Genève pendant les vacances scolaires, à l’exception de la période liée à la pandémie de Covid-19. Son employée avait été fréquemment absente pendant les cinq dernières années notamment pour se rendre à l’étranger. Son salaire mensuel était toutefois resté inchangé compte tenu de leur relation. Elle avait malheureusement accepté de ne pas la déclarer aux assurances sociales, l’intéressée y étant fortement opposée. Elle le regrettait. Elle restait dans l’attente des démarches à entreprendre pour régulariser la situation auprès desdites assurances.

c. Le 21 décembre 2021, à la demande de l’OCIRT, elle a détaillé les horaires de travail, les vacances, le salaire perçu par son employée et les prestations en nature octroyées. Elle a joint copie de notes manuscrites prises entre 2015 et 2021 concernant les jours de travail et d’absence de son employée, une attestation de la régie relative à la chambre qu’elle lui sous-louait et un échange de messages WhatsApp des 16 et 17 octobre 2019, évoquant un salaire mensuel de CHF 2'000.- versé à D______.

d. Par pli du 4 mars 2022, l’OCIRT a informé A______ qu’après analyse des documents, il n’avait pas été en mesure d’établir avec certitude les faits pertinents nécessaires au contrôle, notamment la durée du travail exacte. Ils avaient auditionné D______. Copie de sa déclaration était jointe.

Selon cette dernière, en l’absence de contrat de travail écrit, ses horaires avaient été convenus oralement : du lundi au vendredi de 7h00 à 20h00, samedi de 9h00 à 20h00 dont deux heures de pause par jour soit 64 heures travaillées par semaine au total. Elle indiquait avoir perçu mensuellement CHF 2'100.- nets, en espèces, somme à laquelle s’ajoutait la valeur de son logement de fonction. Elle contestait avoir été nourrie et n’avait jamais utilisé l’argent qui lui avait été remis pour les courses familiales pour ses propres achats. Elle n’avait jamais vu les relevés horaires transmis le 21 décembre 2021 par son employeur. Celui-ci connaissait ses horaires, d’autant plus qu’elle était payée au mois et non à l’heure. Elle était choquée d’apprendre que son employeur alléguait une durée hebdomadaire de travail entre 20 et 30 heures par semaine alors qu’elle exigeait d’elle une présence de plus de 60 heures par semaine. Elle avait suggéré de visualiser les caméras de surveillance de l’immeuble pour établir ses heures d’arrivée et de départ.

L’OCIRT rappelait les salaires minima impératifs du contrat type de l’économie domestique (ci-après : CTT-EDom) pour les employés de maison. Un délai était imparti à A______ pour se déterminer sur les déclarations de son employée, produire les documents que l’autorité listait ainsi que fournir des renseignements et justificatifs relatifs à toute autre personne ayant travaillé dans son ménage, notamment les dénommés F______, G______ et H______.

e. Dans sa réponse du 11 avril 2022, A______ a relevé que D______ ne lui avait jamais fait part d’une éventuelle insatisfaction. Ses déclarations étaient farfelues. La chambre qu’elle louait pour son employée coûtait entre CHF 285.- et 330.- par mois. Elle ne vérifiait pas si son employée se servait effectivement dans la cuisine familiale. Dès 2018, elle avait engagé un couple, H______ et I______, qu’elle payait CHF 25.- par heure. Ils étaient déclarés à Chèque-service. La dénommée F______ était venue remplacer D______ en mars 2019. Elle avait travaillé cinq jours ouvrables, trois à quatre heures chaque fois, pour un salaire horaire de CHF 25.-. A______ détaillait les conditions de travail de D______ et précisait lui avoir prêté au total CHF 30'212.- entre 2020 et 2021. Il était convenu qu’elle la rembourserait tous les mois, d’un montant variable. Seuls CHF 5'900.- avaient été remboursés ce qui laissait une dette de CHF 24'312.-, montant qu’elle entendait réclamer au vu des circonstances.

Elle joignait des attestations de J______, K______, de ses parents, le calendrier de l’école internationale, des factures relatives au loyer du studio loué pour son employée, un tableau relatif aux remboursements du prêt ainsi que les certificats de salaire du couple I______.

f. L’OCIRT a auditionné cinq personnes entre le 8 mars et le 17 juin 2022.

fa. L______ était voisine, depuis 2013, de A______. Elle sortait son chien vers 7h00, 12h00, 16h00 et 21h00. C’était les créneaux horaires de D______ qu’elle croisait quasiment tous les jours. Elle avait été choquée par les horaires de celle-ci, présente déjà tôt le matin et qui partait de l’immeuble très tard le soir, tous les jours, y compris les week-ends. Elle l’avait vue plusieurs fois pleurer dans l’entrée de l’immeuble, tard le soir. Il y avait quatre ou cinq ans, elle l’avait vue, se déplaçant péniblement avec un déambulateur, tout en tirant un caddie plein de courses. Cette image l’avait marquée. D______ était constamment chargée, portant de gros sacs poubelle, des courses, des bagages de la famille, des corbeilles à linge, etc. Elles s’étaient parlé, pour la première fois, un an auparavant. D______ lui avait indiqué qu’elle travaillait énormément, était épuisée et mal payée. Elle avait précisé ne pas percevoir de salaire quand elle était malade, n’avoir pas pris de vacances depuis son arrivée à Genève et de ce fait de n’avoir pas revu ses enfants depuis douze ans. Elle avait mentionné gagner CHF 2'000.- mensuels payés en espèces, en deux fois par mois. Elle logeait dans une chambrette dans le quartier pour laquelle l’employeur lui demandait un loyer, déduit de son salaire. Elle avait bénéficié d’un prêt de son employeur, qu’elle remboursait mensuellement.

fb. J______était concierge de l’immeuble où vivait A______. Il croisait D______ fréquemment, lorsqu’elle arrivait pour travailler, sortait la poubelle ou allait faire des courses. Elle lui demandait parfois de l’aide pour des tâches qu’elle ne pouvait pas effectuer elle-même notamment nettoyer les bouches d’aération en hauteur ou descendre une poubelle trop lourde, voire « l’aider avec le balcon ». En sa qualité de concierge, il ne lui appartenait pas de se rendre chez les propriétaires, mais il souhaitait être « gentil » et disponible. Il travaillait cinq jours par semaine, en principe de 7h00 à midi. Il arrivait régulièrement en même temps que D______ au travail. Il ignorait à quelle heure elle finissait le soir, n’étant plus dans les locaux. À sa connaissance, elle ne faisait pas le ménage. Il la voyait descendre avec la lessive, la mettre à sécher dans un local à l’entresol, ou parfois avec un chariot revenant des courses. Il ignorait les tâches qu’elle effectuait l’après-midi. Il voyait souvent les parents de A______. C’était probablement eux qui cuisinaient. Les enfants étaient grands et n’avaient pas besoin d’être gardés. C’était généralement le grand-père qui les véhiculait pour les amener à l’école.

fc. M______ était voisine de A______. Elle avait discuté avec D______ car elle parlait quelques mots dans sa langue, le tagalog. Elle la voyait surtout à la buanderie, où elle travaillait souvent. Active dans le domaine de la santé, elle s’était inquiétée de son état. D______ lui avait expliqué que sa boiterie, temporaire, était liée à une opération et que sa prise de poids était due à des médicaments, lui précisant être bien suivie sur le plan médical. Elle avait vu D______ plusieurs fois en 2021 à l’entrée de l’immeuble lorsqu’elle revenait de la crèche et de l’école, entre 8h30 et 8h45. N’ayant pas d’horaires fixes elle ne croisait pas ses voisins à des heures régulières. Vers 2020 – 2021, D______ lui avait proposé de venir travailler chez elle, souhaitant quitter A______. Elle avait refusé, n’ayant pas suffisamment d’heures à lui proposer et par égard aux parents de A______ avec qui elle avait davantage de contacts qu’avec cette dernière. D______ lui avait proposé une connaissance, puis sa cousine. Les deux expériences avaient été négatives, ce dont D______ s’était excusée mais qui l’avait mis mal à l’aise.

fd. N______, voisine de A______, croisait souvent D______ dans l’immeuble, à toute heure de la journée et même de la soirée. Elle l’avait vue, à plusieurs reprises, faisant la lessive le week-end à la buanderie commune au premier sous-sol de l’immeuble. Elle avait été frappée par sa présence car il s’agissait de la seule femme de ménage qu’elle voyait travailler le week-end et celle qu’elle voyait le plus fréquemment. Pendant le confinement dû au Covid en 2020, elle la voyait très souvent entrer et sortir du studio, alors occupée à temps plein par les enfants de la famille A______, nettoyer la terrasse, les stores, étendre le linge notamment. Même avant le Covid, elle s’y trouvait très souvent, alors que le studio était inhabité. Elle en avait déduit qu’elle devait probablement y effectuer des travaux qu’elle ne pouvait pas faire dans l’appartement principal et qui devaient déranger ses employeurs. D______ descendait plusieurs fois par jour pour aller à la buanderie, toujours en habit de travail, à savoir un tablier de femme de ménage.

fe. O______était voisine et amie de la famille de A______. Leurs enfants se connaissaient depuis l’école. Ils ne se voyaient pas tout le temps, son mari ainsi que A______ et son compagnon étant souvent en voyage. Lorsque les quatre étaient présents, ils s’invitaient à manger. A______ lui avait confié que D______ était partie. Elle ne savait pas pourquoi et s’en étonnait car elle faisait partie de la famille. L’appartement, d’à peine 180 m², était petit. Ce n’était pas une grande maison qui nécessitait beaucoup de travail. Elle ignorait ce qu’elle pouvait faire plus de quelques heures par jour. D______ n’avait pas l’air très occupée. Elle donnait l’impression qu’elle avait le temps, qu’elle était « zen ». Lorsqu’elle était invitée chez ses voisins, ce n’était pas D______ qui cuisinait ni qui servait, mais, la plupart du temps, le mari ou le père de A______. D______ était parfois là mais ne restait pas avec eux. Elle ne se souvenait plus si elle était présente le week-end.

g. Par courrier du 4 juillet 2022, l’OCIRT a informé A______ qu’il ressortait des auditions de son employée et des cinq personnes susmentionnées, d’une analyse approfondie des conversations WhatsApp entre D______ et la famille A______, et des autres notes manuscrites, que D______ avait travaillé à des jours et des heures que l’employeur avait indiqués comme « non travaillés ». Le document manuscrit de l’employeur avait en conséquence été reconstitué, a posteriori, et devait être écarté car ne permettant pas d’établir les faits. Les dires de son employée concernant ses horaires avaient été confirmés par plusieurs témoins et corroboré par les messages WhatsApp qui démontraient incontestablement qu’elle travaillait à plein temps avec des horaires « ordinaires » de 7h00 à 20h00 du lundi au vendredi et de 9h00 à 20h00 le samedi. Elle avait ainsi travaillé 64 heures par semaine de janvier 2010 à août 2021. Le salaire mensuel net convenu et payé effectivement était de CHF 2'100.- pendant toute la durée des rapports de travail. Elle était logée dans une chambre de bonne, ce salaire en nature étant valorisé à CHF 345.- par mois selon la norme AVS. Les salaires minimaux de la CTT-EDom n’avaient pas été respectés. L’employeur était invité à déclarer rétroactivement les salaires avec effet au 1er janvier 2011 et à les corriger à partir du 1er janvier 2013. Un délai au 25 juillet 2022 lui était imparti pour se mettre en conformité.

h. Le 22 juillet 2022, sous la plume d’un conseil, A______ a transmis à l’OCIRT copie de ses déclarations à l’office cantonal des assurances sociales (ci‑après : OCAS) et à la fondation institution supplétive LPP. Les déclarations avaient été établies sur la base d’un temps de travail de 34 heures par semaine, soit six heures par jour en semaine et quatre heures par jour en moyenne le samedi en tenant compte des salaires minimaux de la CTT-EDom. Elle compensait le solde de CHF 16'857.- en faveur de D______ avec le montant de CHF 24'312.- que cette dernière restait lui devoir.

i. A______ a sollicité de l’OCIRT la suspension de la procédure dans l’attente de l’issue de la procédure prud’homale introduite par D______ le 13 juillet 2022.

L’OCIRT a refusé le 5 septembre 2022, les faits étant établis.

Le recours interjeté contre ce refus par A______ devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a été déclaré irrecevable par arrêt du 28 novembre 2022.

Suite à cet arrêt, l’OCIRT a fixé un délai au 20 décembre 2022 à l’employeur pour se mettre en conformité.

j. Par courrier des 20 et 22 décembre 2022, A______ a fait valoir son droit d’être entendue et a joint les copies des factures finales de l’OCAS relatives aux cotisations 2017 - 2021, le décompte de la fondation institution supplétive LPP portant sur la même période ainsi qu’un extrait du procès-verbal d’audience du 13 décembre 2022 relatif à la transaction intervenue devant l’autorité de conciliation prud’homale, A______ versant une indemnité forfaitaire, pour solde de tout compte et de toute prétention de CHF 100'000.- bruts à D______.

k. Le 16 janvier 2023, l’OCIRT a adressé à A______ un avertissement avant sanction. Le Tribunal civil n’ayant pas établi les faits, l’OCIRT n’était pas tenu par l’accord transactionnel et n’entendait pas classer le dossier. Le montant brut de CHF 100'000.- serait porté en déduction du montant total de la sous-enchère salariale constatée dans le courrier du 4 juillet 2022 à savoir CHF 317’512.53.

l. Par décision du 28 mars 2023, l’OCIRT a prononcé, à l’encontre de A______ et E______ une amende de CHF 20'800.- en application de l’art. 9 al. 2 let. f de la loi fédérale sur les conditions minimales de travail et de salaire applicables aux travailleurs détachés en Suisse et sur les mesures d'accompagnement du 8 octobre 1999 (Ldét - RS 823.20).

Au vu du versement des CHF 100'000.- bruts à D______, CHF 217’512.53 restaient dus.

Les versements inférieurs aux salaires minimaux étaient intervenus entre le 1er janvier 2013 et le 31 août 2021. La sanction administrative était prononcée selon le nouveau droit. La moitié environ de l’infraction avait été commise entre le 1er janvier 2013 et le 31 mars 2017, soit 49.5 % de la période visée, cet élément étant pris en compte « dans un sens atténuant dans le prononcé de l’amende ». Le montant total s’élevait à CHF 317’512.53 bruts. Malgré la demande de mise en conformité du 4 juillet 2022, seul un rattrapage partiel de CHF 100'000.- bruts avait été effectué. Il convenait de tenir compte des « circonstances particulièrement déplorables dans lesquelles la sous-enchère constatée par l’office a[vait] été pratiquée. En effet, il [était] établi que les rapports de travail s’inscrivaient dans un contexte de vulnérabilité et de dépendance économique d’une travailleuse migrante en situation irrégulière. C’[était]précisément ce contexte qui expliqu[ait] pourquoi [son] employée a[vait] accepté un emploi si contraignant pour un salaire très inférieur aux minima légaux. De plus, il [était] rappelé qu’[elle] ne l’av[ait] pas affiliée aux assurances sociales durant les onze années et demi des rapports de travail, en infraction aux règles légales, la privant ainsi de prestations sociales futures ».

L’OCIRT relevait la mauvaise collaboration à l’établissement des faits, les intéressés ayant employé au moins trois autres domestiques sans les déclarer et sans avoir été en mesure de fournir les éléments nécessaires au contrôle. Ces éléments justifiaient une amende de CHF 20'800.-, quand bien même il s’agissait de la première infraction en la matière constatée par l’office, ce montant correspondant à la sévérité voulue par le législateur lors du durcissement du dispositif de sanction entré en vigueur au 1er avril 2017.

C. a. Par acte du 11 mai 2023, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative contre cette décision. Elle a conclu à son annulation, subsidiairement à l’annulation de l’amende prononcée à son encontre et à l’encontre de E______ et au prononcé d’une amende exclusivement à son encontre de CHF 2'000.-.

E______ n’avait jamais été l’employeur de D______. Ses enfants avaient été scolarisés dans une école privée avec journée continue, mercredi compris, et ne rentraient à la maison qu’aux alentours de 17h00 ou 18h00 selon leurs activités. D______ n’avait donc pas eu de rôle de garde d’enfants, d’autant moins que les grands-parents conduisaient les enfants à l’école, les ramenaient, et s’occupaient de ces derniers en fin de journée. Ses tâches consistaient à effectuer le ménage de l’appartement, les lessives et le repassage pour une famille de trois puis quatre personnes, dont deux jeunes étudiants, les courses hebdomadaires et les repas étant pris en charge soit par Dimitrios A______, père de la recourante, soit par E______. D______ ne se chargeait que de préparations simples pour le repas du soir (légumes à préparer, soupes notamment) et de quelques courses d’appoint. Deux fois par an, elle nettoyait l’appartement des parents de la recourante et, dès l’automne 2019, le studio du rez-de-chaussée une fois par semaine. Son temps de travail hebdomadaire se montait à 34 heures. Elle bénéficiait de quatre semaines de vacances payées par an et de deux à quatre semaines supplémentaires pendant lesquelles elle ne travaillait qu’occasionnellement (grands nettoyages et préparation du repas pour le jour de retour de la famille), la famille passant chaque année cinq à six semaines en été en Grèce et une à deux semaines à la montagne en hiver. Pendant ces absences, il n’y avait ni animaux à nourrir, ni plantes à arroser, ni courriers à relever. Son salaire mensuel s’élevait à CHF 2’100.-, plus CHF 400.- en nature (logement et nourriture). D______ disposait de son propre logement, loué par son employeur, entièrement rénové avant son arrivée. S’agissant de la nourriture, il avait été convenu que l’employée pouvait se servir dans la cuisine familiale et faire quelques achats pour elle-même lors des courses pour la famille. D______ s’était absentée, dès 2016, en Italie aux fins d’obtenir un permis de séjour au sein de l’union européenne. Son salaire lui avait été payé pendant ses absences.

Elle contestait les dépositions des personnes entendues par l’OCIRT. D______ n’avait, par exemple, jamais travaillé avec un déambulateur, ce qui aurait été impossible. Entre le déménagement en 2015 et le 30 août 2021, elle n’avait travaillé que sept dimanche au total, pour des occasions particulières. L’analyse des messages WhatsApp ne permettait pas de confirmer les horaires étendus allégués par l’employée.

Contrairement à ce qu’avait retenu l’OCIRT, elle avait collaboré tout au long de l’instruction, répondant aux courriers dans les délais impartis, fournissant les explications complètes et détaillées, produisant les justificatifs dont elle disposait et des attestations de personnes ayant régulièrement côtoyé D______.

Son droit d’être entendue avait été violé. Il convenait d’appliquer l’ancien droit, plus favorable, subsidiairement de tenir compte dans la fixation de l’amende du fait qu’une grande partie des faits s’était déroulée sous l’ancien droit qui prévoyait une amende maximale de CHF 5'000.-. Une partie des faits relatifs à la sous-enchère salariale était prescrite. Elle contestait le principe du prononcé de l’amende et les critères retenus pour en fixer le montant.

b. Par décision du 25 mai 2023, l’OCIRT a reconsidéré la décision litigieuse en ce sens que seule A______ était employeur et était sanctionnée d’une amende de CHF 20'800.-. La décision était révoquée en ce qui concernait E______. Il s’agissait d’une erreur. La décision ne lui avait d’ailleurs pas été notifiée.

c. Le 30 mai 2023, A______ a interjeté recours contre la décision sur reconsidération du 25 mai 2023 en ce qu’elle la condamnait à une amende de CHF 20'800.-.

d. L’OCIRT a conclu au rejet des recours.

e. Dans sa réplique, A______ a persisté dans ses conclusions.

f. Sur ce, les parties ont été informées le 22 août 2023 que la cause était gardée à juger.

g. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours contre la décision du 28 mars 2023 et la décision sur reconsidération du 25 mai 2023 sont recevables (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La prescription est une question de droit matériel qu’il y a lieu d’examiner d'office lorsqu'elle joue en faveur de l’administré (ATF 138 II 169 consid. 3.2 ; ATA/917/2021 du 7 septembre 2021).

2.1 Ni la loi fédérale sur les conditions minimales de travail et de salaire applicables aux travailleurs détachés en Suisse et sur les mesures d'accompagnement du 8 octobre 1999 (Loi sur les travailleurs détachés - LDét - RS 823.20), ni la LPA ni la loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 (LIRT - J 1 05) ne contiennent de disposition réglant la question de la prescription.

Il s’agit d’une lacune proprement dite, dès lors que le législateur s’est abstenu de régler un point qu’il aurait dû fixer et qu’aucune solution ne se dégage du texte ou de l’interprétation de la loi, laquelle doit être comblée par le juge (ATA/1308/2020 précité). Il y a lieu de faire application, par analogie, de l’art. 109 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), à teneur duquel la prescription de l'action pénale est de trois ans pour les contraventions, soit les infractions passibles d’une amende (art. 103 CP ; ATA/917/2021 précité et les références citées).

Selon l’art. 98 CP, la prescription court, alternativement, dès le jour où l'auteur a exercé son activité coupable (let. a), dès le jour du dernier acte si cette activité s'est exercée à plusieurs reprises (let. b) ou encore dès le jour où les agissements coupables ont cessé s'ils ont eu une certaine durée (let. c).

L'art. 98 let. c CP règle le début de la prescription pour les délits continus (Robert ROTH/Gilbert KOLLY, in Alain MACALUSO/Nicolas QUELOZ/ Laurent MOREILLON/Robert ROTH [éd.], Commentaire romand du code pénal I, 2ème éd., 2021, n. 28 ad. art. 98 CP). Le délit continu se caractérise par le fait que la situation illicite créée par un état de fait ou un comportement contraire au droit se poursuit. Il y a infraction continue lorsque les actes qui créent la situation illégale forment une unité avec les actes qui la perpétuent ou avec l'omission de la faire cesser, pour autant que le comportement visant au maintien de l'état de fait délictueux soit expressément ou implicitement contenu dans les éléments constitutifs de l'infraction. L'infraction est consommée dès que tous ses éléments constitutifs sont réalisés, mais n'est achevée qu'avec la cessation de l'état de fait ou du comportement contraire au droit (ATF 135 IV 6 consid. 3.2 ; 132 IV 49 consid. 3.1.2.2). Le délit continu ne se prescrit pas tant qu'il dure (Robert ROTH/Gilbert KOLLY, op. cit., n. 29 ad. art. 98 CP).

2.2 En l’espèce, les contraventions reprochées à la recourante, consistant en des versements inférieurs aux salaires minimaux à une employée entre janvier 2013 et fin août 2021 doivent être considérés comme ayant cessé le 31 août 2021. C'est dès lors à partir de cette date que la prescription a commencé à courir, de sorte que celle-ci n'est pas encore acquise et la poursuite administrative pas éteinte.

3.             La recourante soutient que l’ancien droit serait applicable, les faits reprochés ayant débuté en janvier 2013 et le nouvel art. 9 al. 2 let. f LDét, plus sévère, étant entré en vigueur, ultérieurement, le 1er avril 2017.

3.1 Le principe de la lex mitior s’applique aussi en droit pénal administratif (ATF 123 IV 84 consid. 3a ; 116 IV 258 consid. 3b).

Dans cette perspective, la notion de droit pénal de délit continu peut être rapprochée sous l’angle du droit administratif du concept de « fait duratif », soit un fait qui dure dans le temps ou se répète, peut poser des difficultés d’attribution temporelle lorsqu’il se trouve à cheval sur l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi. La question qui se pose alors est celle de savoir laquelle, de la loi ancienne ou de la nouvelle loi, doit s’appliquer. Ce sont des questions que doivent résoudre les dispositions de droit intertemporel dans la mesure du possible ou, en l’absence de telles dispositions, le principe de l’effet immédiat de la loi ou celui de non-rétroactivité des lois (Milena PIREK, L’application du droit public dans le temps : la question du changement de loi, 2018, n. 468 et 469). Il y a rétroactivité improprement dite lorsque la loi doit s’appliquer à un fait survenu sous l’empire de l’ancien droit mais perdurant au moment de l’entrée en vigueur. Cette rétroactivité n’est en principe compatible avec le droit constitutionnel que si des droits acquis ne s’y opposent pas (ATF 138 I 189 = JdT 2013 I 195 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 419 ; Milena PIREK, op. cit., n. 495). La rétroactivité improprement dite concerne les cas où la nouvelle loi s’applique, une fois entrée en vigueur, à des faits duratifs nés dans le passé et impose par conséquent de cette façon le règne exclusif de la loi nouvelle une fois celle-ci entrée en vigueur (Milena PIREK, op. cit., n. 468). La nouvelle loi s’applique ainsi aux faits duratifs antérieurs à son entrée en vigueur et leur attribuera pour la partie de leur déroulement postérieur à sa date d’entrée en vigueur la conséquence juridique qu’elle attache aux faits en question (Milena PIREK, op. cit., n. 494).

La théorie du fait duratif conduit au même résultat que l’application des principes généraux du droit pénal applicables (ATA/917/2021 précité consid. 3 et les nombreuses références citée).

3.2 En l’espèce, l’art. 9 al. 2 let. f LDét, dans sa teneur actuelle, entrée en vigueur le 1er avril 2017, prévoit comme sanction administrative le paiement d'un montant de CHF 30'000.- au plus en cas d’infraction aux dispositions relatives au salaire minimal d’un contrat-type de travail au sens de l’art. 360a de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (Code des obligations - CO - RS 220) par l’employeur qui engage des travailleurs en Suisse. Dans sa teneur en vigueur avant cette date, la situation était réglée à l’art. 9 al. 2 let. c aLDét : l’employeur qui avait commis de tels faits était passible d’une amende d’un montant de CHF 5'000.- au plus. Les faits qui sont concernés par la décision contestée ont débuté en janvier 2013, avant l’entrée en vigueur de la modification précitée qui a aggravé la sanction prévue en cas de contravention sus-rappelée. Ils se sont poursuivis néanmoins sous le régime du nouveau droit. Ils constituent ainsi des faits duratifs qui imposent l’application du régime de la nouvelle loi une fois celle-ci entrée en vigueur.

Partant, pour trancher le présent litige, il sera fait application de l’art. 9 al. 2 let. f LDét dans sa teneur entrée en vigueur le 1er avril 2017.

Les références mentionnées par la recourante (ATA/1308/2020 du 15 décembre 2020), antérieures aux développements qui précèdent de l’arrêt de la chambre de céans du 7 septembre 2021, d’ailleurs aussi mentionné, à juste titre, par la recourante, ne sont en conséquence pas pertinents.

4.             La recourante se plaint d’une violation de son droit d’être entendue, dès lors qu’elle n’a pas été conviée à participer aux auditions par l’OCIRT des cinq personnes entendues entre mars et juin 2022.

4.1 Selon l’art. 28 al. 1 LPA, lorsque les faits ne peuvent être éclaircis autrement, les autorités suivantes peuvent au besoin procéder à l’audition de témoins : le Conseil d’État, les chefs de départements et le chancelier (let. a) ; les autorités administratives qui sont chargées d’instruire des procédures disciplinaires (let. b) ou les juridictions administratives (let. c). L’art. 42 al. 1 LPA prévoit que les parties ont le droit de participer à l’audition des témoins, à la comparution des personnes ordonnées par l’autorité ainsi qu’aux examens auxquels celle-ci procède.

4.2 Il découle de ce qui précède que les cinq personnes n’ayant pas été entendues par une autorité au sens de l’art. 28 al. 1 LPA, ne peuvent être considérées comme des témoins, ce que la chambre de céans a déjà précisé (ATA/1151/2020 du 17 novembre 2020  consid. 4b). L’OCIRT n’était en conséquence pas tenu de convier la recourante aux auditions. Cela étant, les procès‑verbaux de ces auditions ont été adressés à la recourante avant le prononcé de la décision et elle n’a pas sollicité l’audition de ces personnes par la chambre de céans. En outre, si tant est qu’il faille admettre une violation de son droit d’être entendue, celle-ci a été réparée devant la chambre de céans, la recourante ayant pu se déterminer sur ces auditions devant celle-ci, étant relevé que la chambre administrative dispose d’une pleine cognition en fait et en droit (art. 61 al. 1 LPA).

Un même raisonnement, tenu dans l’arrêt précité de la chambre de céans a été confirmé par le Tribunal fédéral (2C_34/2021 du 30 mai 2022 consid. 4.2.2) lequel a précisé que s’il était vrai que, comme le relevaient les recourantes, l'argument tiré de l'absence de la qualité de témoin n'était pas forcément décisif, dès lors que pouvait exister un droit de participer à l'audition de personnes appelées à fournir des renseignements par exemple, la jurisprudence retenait notamment, en procédure fédérale, qu'il n'y avait pas de violation du droit d'être entendu lorsque la partie avait eu la possibilité de prendre connaissance du procès-verbal des auditions et de se déterminer à ce sujet (arrêt du Tribunal fédéral 1C_534/2010 du 1er mars 2011 consid. 3.2 et les références citées).

La recourante ne démontre pas que le droit de procédure cantonal offrirait des garanties plus étendues. Elle a reçu les procès-verbaux des auditions, a pu se prononcer, avant que la décision ne soit rendue, puis dans le cadre du recours devant la chambre de céans. Elle aurait pu demander l'audition desdites personnes devant la chambre de céans, ce qu'elle n'a pas fait, la question de la nécessité de procéder à leur audition au vu du dossier restant réservée. Dans ces conditions, le droit d'être entendue de la recourante a été respecté.

5.             La recourante conteste le prononcé d’une amende et son montant.

5.1 La LDét règle le contrôle des employeurs qui engagent des travailleurs en Suisse et les sanctions qui leur sont applicables en cas de non‑respect des dispositions relatives aux salaires minimaux prévus par les contrats-types de travail au sens de l’art. 360a de la loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220).

Le contrôle du respect des conditions fixées dans la LDét incombe, pour les dispositions prévues par une convention collective de travail étendue, aux organes paritaires chargés de l’application de la convention (let. a), pour les dispositions relatives aux salaires minimaux au sens de l’art. 360a CO prévues par un contrat‑type de travail, aux commissions tripartites instituées par les cantons ou la Confédération (art. 360b CO ; let. b), pour les dispositions prévues par des actes législatifs fédéraux, aux autorités compétentes en vertu de ces actes (let. c), pour les autres dispositions : aux autorités désignées par les cantons (let. d ; art. 7 al. 1 LDét). Sur demande, l’employeur remet aux organes visés à l'art. 7 al. 1 LDét tous les documents attestant que les conditions de travail et de salaire des travailleurs sont respectées (art. 7 al. 2 LDét). Si les documents nécessaires ne sont pas ou plus disponibles, l’employeur doit établir le respect des dispositions légales à moins qu’il ne puisse démontrer qu’il n’a commis aucune faute dans la perte des pièces justificatives (art. 7 al. 3 LDét).

Les organes de contrôle annoncent à l’autorité cantonale compétente toute infraction à la LDét (art. 9 al. 1 LDét). L'autorité cantonale visée à l'art. 7 al. 1 let. d LDét peut, en cas d’infraction aux dispositions relatives au salaire minimal d’un contrat-type de travail au sens de l’art. 360a CO par l’employeur qui engage des travailleurs en Suisse, prononcer une sanction administrative prévoyant le paiement d’un montant de CHF 30'000.- au plus (art. 9 al. 2 let. f LDét).

5.2 Si, au sein d’une branche économique ou d’une profession, les salaires usuels dans la localité, la branche ou la profession font l’objet d’une sous-enchère abusive et répétée et qu’il n’existe pas de convention collective de travail contenant des dispositions relatives aux salaires minimaux pouvant être étendue, l’autorité compétente peut édicter, sur proposition de la commission tripartite visée à l’art. 360b, un contrat-type de travail d’une durée limitée prévoyant des salaires minimaux différenciés selon les régions et, le cas échéant, selon les localités, dans le but de combattre ou de prévenir les abus (art. 360a al. 1 CO).

La Confédération et chaque canton instituent une commission tripartite composée en nombre égal de représentants des employeurs et des travailleurs ainsi que de représentants de l’État (art. 360b al. 1 CO).

Il ne peut pas être dérogé à un contrat-type de travail au sens de l’art. 360a en défaveur du travailleur (art. 360d al. 2 CO).

Lorsque le rapport de travail a été convenu pour une durée indéterminée ou pour plus d’un mois, l’employeur doit informer le travailleur par écrit, au plus tard un mois après le début du rapport de travail, sur les points suivants : le nom des parties (let. a), la date du début du rapport de travail (let. b), la fonction du travailleur (let. c), le salaire et les éventuels suppléments salariaux (let. d), la durée hebdomadaire du travail (let. e ; art. 330b al. 1 CO). Lorsque des éléments faisant l’objet de l’information écrite obligatoire au sens de l’al. 1 sont modifiés durant le rapport de travail, les modifications doivent être communiquées par écrit au travailleur, au plus tard un mois après qu’elles ont pris effet (art. 330b al. 1 CO).

5.3 La loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 (LIRT - J 1 05) précise la mise en œuvre, dans le canton de Genève, de la LDét (art. 1 al. 2 LIRT).

Le contrôle des salaires minimaux prescrits par un contrat-type de travail, au sens de l’art. 360a CO, relève de la compétence du conseil de surveillance, conformément à la LDét. L'OCIRT procède aux contrôles auprès des entreprises. L’inspection paritaire a également la faculté de procéder à des contrôles (art. 34A al. 1 LIRT). L'OCIRT est l’autorité compétente pour prononcer les mesures et sanctions administratives prévues à l'art. 9 LDét (art. 34B al. 1 LIRT). Demeurent réservées les compétences décisionnelles de l’OCIRT fondées sur d’autres dispositions fédérales ou cantonales (art. 34B al. 2 LIRT).

5.4 Sont considérés comme travailleurs de l'économie domestique, au sens du contrat-type de travail avec salaires minimaux impératifs de l’économie domestique du 13 décembre 2011 (CTT-EDom - J 1 50.03), les travailleuses et travailleurs occupés dans un ménage privé (art. 1 al. 1 let. a CTT-EDom, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022). Le CTT-EDom s’applique à tout le personnel affecté aux activités domestiques traditionnelles ou nouvelles, notamment aux maîtres d'hôtel, gouvernantes, cuisiniers, cuisinières, valets de chambre, femmes de chambre, chauffeurs, jardiniers, jardinières, ainsi qu’aux autres employés de maison affectés notamment au nettoyage, à l’entretien du linge, aux commissions, à la prise en charge d’enfants, de personnes âgées, de personnes handicapées et de malades, à l’assistance aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux malades dans la vie quotidienne (art. 1 al. 2 CTT-EDom, dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2022).

Le salaire minimum pour un employé non qualifié était de CHF 3'625.- en 2013.- (art. 10 al. 1 let. e CTT-EDom, dans sa teneur en 2013). Depuis le 1er janvier 2016, lorsque le travailleur accomplit des veilles de nuit, les salaires minimaux sont majorés d’une indemnité de CHF 7.55 par heure de veille, pour les heures entre 20h00 et 7h00 (art. 10 al. 1bis CTT-EDom, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2016). Les montants ci-dessus comprennent le salaire en nature pour le logement et pour la nourriture. S’il est logé ou nourri par l’employeur, le travailleur reçoit en espèces la différence entre ces montants et la valeur du logement ou de la nourriture selon les normes AVS en vigueur (art. 10 al. 3 CTT-EDom, dans sa teneur depuis 2013). Le salaire en espèces est versé pendant les heures de travail au plus tard le dernier jour du mois ou, si ce dernier jour tombe un dimanche ou un jour férié, le jour ouvrable précédent (art. 10 al. 4 CTT-EDom, dans sa teneur depuis 2013). Un décompte détaillé mentionnant les composantes du salaire (notamment salaire brut, heures supplémentaires), ainsi que les retenues (notamment AVS, assurances, impôt à la source) est remis chaque mois au travailleur (art. 10 al. 6 CTT-Edom dans sa teneur depuis 2013). Les salaires minimaux prévus aux al. 1 et 1bis ont un caractère impératif au sens de l’art. 360a CO pour une durée hebdomadaire de 45 heures. En cas de travail partiel, le salaire minimum est calculé prorata temporis (art. 10 al. 7 CTT-EDom, dans sa teneur depuis 2013).

Il est recommandé d’établir le contrat de travail par écrit avant l’entrée en fonction (art. 10bis al. 1 CCT-EDom, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2016). Le travailleur peut exiger la confirmation écrite du contrat de travail (art. 330b CO ; art. 10bis al. 2 CTT-EDom, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2016). L’employeur tient un registre des heures de travail et des jours de repos effectifs. Le travailleur peut s’informer en tout temps sur ses heures de travail, jours de repos, jours fériés et vacances qui lui restent à prendre (art. 10bis al. 3 CTT-EDom, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2016). Si l'employeur faillit à son obligation de tenir un registre, l'enregistrement de la durée du travail faite par le collaborateur vaut moyen de preuve en cas de litige (art. 10bis al. 4 CTT‑EDom, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2018).

L'OCIRT est l'organe de surveillance (art. 24 al. 1 CTT-EDom, dans sa teneur depuis 2013). Il est chargé notamment de contrôler le respect des salaires minimaux, les conditions de travail des jeunes gens et des personnes en formation ainsi que la sécurité des installations (art. 24 al. 2 CTT-EDom).

5.5 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d'autres moyens de preuve (art. 20 LPA). Mais ce principe n’est pas absolu, sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 128 II 139 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_454/2017 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; 2C_524/2017 du 26 janvier 2018 consid. 4.2 ; ATA/880/2021 du 31 août 2021 consid. 3a et les références citées).

En procédure administrative, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction, en analysant la force probante des preuves administrées, dont ni le genre, ni le nombre n'est déterminant, mais uniquement la force de persuasion (art. 20 al. 1 LPA ; ATA/382/2023 du 18 avril 2023 consid. 5b ; ATA/109/2021 du 2 février 2021 consid. 12b).

De jurisprudence constante, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu, alors qu'il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/184/2023 du 28 février 2023 consid. 3.3).

5.6 En l'espèce, l'autorité intimée a retenu que, de janvier 2010 à août 2021, l'employée avait travaillé 64 heures par semaine pour la recourante, de 7h00 à 20h00 du lundi au vendredi et de 9h00 à 20h00 le samedi pour un salaire net de CHF 2'100.-, inférieur au salaire brut minimum pour un employé domestique de CHF 3'900.- en 2013, CHF 3'969.- en 2014 et 2015, compte tenu de l’expérience professionnelle de l’intéressée dans les ménages privés, CHF 4'029.- en 2016 et 2017, CHF 4'077.- de 2018 à octobre 2020, CHF 4'485.- en novembre et décembre 2020 et CHF 4'512.- en 2021, portant la sous-enchère salariale à CHF 317’512.53 sous imputation de CHF 100'000.- versés dans le cadre de l’accord trouvé devant l’autorité de conciliation civile.

La recourante conteste que son employée ait travaillé 64 heures hebdomadaires. Elle se fonde sur ses propres notes, les échanges de messages WhatsApp, les déclarations de ses parents ainsi que « des témoins les plus favorables à son employée ». L’employeur soutient que son employée a travaillé 34 heures par semaine, les heures supplémentaires occasionnelles étant compensées par un horaire très allégé pendant les périodes d’absence de la famille. Elle établit le total de la sous-enchère salariale à CHF 18'284.-.

Les faits avancés par la recourante ne concordent toutefois pas avec les déclarations de l'employée qui évoque un horaire convenu oralement du lundi au vendredi de 7h00 à 20h00, samedi de 9h00 à 20h00 dont deux heures de pause par jour soit 64 heures travaillées par semaine au total. Les propos de l’employée à l’OCIRT sont conformes aux déclarations qu’elle avait faites précédemment aux voisins entendus par l’OCIRT. Elle n’a ainsi jamais caché l’existence d’un prêt ni contesté avoir régulièrement perçu son salaire. Ses propos sont en conséquence cohérents et nuancés et apparaissent donc crédibles.

Ces allégations de l’employée sont de surcroît compatibles avec les déclarations des voisins entendus par l’OCIRT. Ainsi L______ a déclaré habiter dans l’immeuble depuis 2013, sortir son chien vers 7h00, 12h00, 16h00 et 21h00, soit les créneaux horaires de D______ qu’elle croisait quasiment tous les jours. Elle avait été choquée par les horaires de celle-ci, présente déjà tôt le matin et qui partait de l’immeuble très tard le soir, tous les jours, y compris les week-ends. Elle l’avait vue plusieurs fois pleurer dans l’entrée de l’immeuble, tard le soir. Cette déposition, précise, confirme les horaires avancés par la travailleuse et fait référence à des rencontres quasi quotidiennes entre les deux femmes. Elle a de ce fait une valeur probante importante. De même, J______, concierge de l’immeuble a confirmé qu’il croisait l’employée fréquemment, lorsqu’elle arrivait pour travailler, sortait la poubelle ou allait faire des courses. Il travaillait cinq jours par semaine en principe de 7h00 à midi et arrivait régulièrement en même temps que D______ au travail. Cette déposition confirme les heures d’arrivée le matin de l’employée. M______, autre voisine, s’était inquiétée l’état de santé de l’employée. D______ lui avait proposé de venir travailler chez elle, souhaitant quitter la recourante. N______, voisine, a aussi indiqué qu’elle croisait souvent D______ dans l’immeuble, à toute heure de la journée et même de la soirée. Elle l’avait vue, à plusieurs reprises, faisant la lessive le week-end à la buanderie commune au premier sous-sol de l’immeuble. Elle avait été frappée par sa présence car il s’agissait de la seule femme de ménage qu’elle voyait travailler le week-end et celle qu’elle voyait le plus fréquemment.

À cela s’ajoutent les échanges de messages sur WhatsApp de l’employée avec chacun des membres de la famille, y compris les enfants, lesquels prouvent la disponibilité de l’intéressée entre 7h00 et 22h00 ainsi que les samedis. L’OCIRT a établi un tableau depuis le 1er janvier 2016 détaillant, sur 55 pages, les horaires qu’il retenait, jour après jour, comme ayant été travaillés par l’employée notamment en fonction des conversations WhatsApp avec la recourante, son compagnon et ses deux fils. À titre d’exemple, le 12 juin 2016, la recourante demandait à son employée de venir le lundi 13 juin 2016 à 6h30 du matin ou indiquait le 20 juin 2016 « pas besoin de venir tôt, venez à 7h du matin » (traduction libre).

L’OCIRT a par ailleurs mis en relation ces informations avec le relevé de la recourante, lequel mentionne les déplacements de l’employée en Italie et les absences de membres de la famille. Il en ressort toutefois qu’alors que l’employeur indique des vacances d’été, la recourante échange des messages avec son employée quant aux courses alimentaires à effectuer et le repas à confectionner pour son fils de 15 ans (29 et 30 juillet 2016). De même alors que l’employeur relève l’absence de son employée, en Italie, du mercredi 28 septembre au dimanche 2 octobre, il ressort de la conversation WhatsApp que l’intéressée a travaillé le dimanche pour compenser le samedi. Le samedi 14 janvier 2017 le dernier message a eu lieu à 23h25, à l’instar de la semaine qui suit où l’employée a adressé, le 17 janvier 2017 un message à 23h33 avant de recommencer à 6h30 le lendemain. Le 4 février 2017 alors que l’employeur mentionne un congé, l’employée a commencé son travail à 8h00 au lieu de 9h00, à l’instar du lundi de Pentecôte 5 juin 2017 où l’employeur mentionne un congé alors que les messages indiquent que l’employée a commencé à 8h30 du matin. Les exemples de ce type sont multiples. Il sera par ailleurs relevé que si les enfants, âgés de 12 et 15 ans en 2016 et de 16 et 19 ans en 2020 n’avaient plus besoin d’être gardés, les échanges de messages par WhatsApp avec l’employée confirment qu’elle préparait les repas, les informait du moment où ils seraient prêts, veillait à leur heure de rentrée le soir voire se coordonnait parfois avec eux pour certaines tâches ménagères, notamment pour le nettoyage.

Par conséquent, comme l'a à juste titre constaté l'autorité intimée, la version de la recourante n'est pas crédible. Pour le surplus, elle ne conteste pas dans le détail le tableau établi avec soin et précision par l’autorité intimée. Aucun élément concret ne permet en conséquence de considérer que le montant total de CHF 317’512.53 bruts retenu au titre de sous-enchère salariale pour la période concernée serait erroné.

Enfin et surtout, contrairement à ses obligations, la recourante n'a pas informé son employée par écrit, au début des rapports de travail, des éléments prévus par l'art. 330b al. 1 CO, comprenant notamment le salaire et les éventuels compléments salariaux ainsi que la durée hebdomadaire de travail. Elle n’a pas non plus tenu de registre de travail et des jours de repos effectifs ni remis à son employée de décompte de salaire comme exigé par la CTT-EDom.

La faute est en conséquence établie et est grave.

6.             La recourante conteste la quotité de la sanction et les critères retenus par l’autorité intimée.

6.1 Contrairement à ce que soutient la requérante, et conformément à ce qui précède, la prescription pénale n’est pas acquise pour la sous-enchère salariale antérieure au 28 mars 2020, le montant de la sous-enchère salariale s’élève à 317’512.53 pour la période 2013 à 2021 et non à CHF 18'284.- et est donc particulièrement important. De même, conformément aux considérants qui précèdent, le montant maximum de l’amende est de CHF 30'000.- et non de CHF 5’000.-.

À juste titre l’autorité intimée a retenu à charge de la recourante qu’elle n’avait pas déclaré son employée aux assurances sociales obligatoires. L’éventuelle requête de son employée dans ce sens n’est pas de nature à la disculper. Cette situation irrégulière en Suisse de l’employée a permis à l’employeur de violer de façon crasse des règles impératives en matière de protection des travailleurs les plus vulnérables. Contrairement à ce que soutient l’employeur qui allègue que les conditions de travail n’étaient pas mauvaises, force est de constater que les personnes auditionnées par l’autorité intimée ont indiqué avoir régulièrement vu pleurer l’employée. Elle avait de même cherché à se faire embaucher par des voisins.

La recourante se prévaut de l’absence d’antécédents et du fait que l’infraction ne porte que sur un cas. Ces seuls éléments ne permettent pas d’atténuer le montant de l’amende au vu de la longue durée de l’infraction et de l’importance des violations commises.

L’autorité intimée a, à juste titre, considéré la collaboration de la recourante comme mauvaise. L’envoi des certificats de salaire de ses deux autres employés, les réponses dans les délais et la transmission d’un « maximum d’informations et de documents en sa possession et effectuant toutes les démarches nécessaires afin de régulariser la situation » de son employée ne sont pas de nature à infléchir cette appréciation. Ce n’est que parce que l’employée a saisi les tribunaux qu’une solution a été ébauchée. Aucune proposition spontanée n’a émané de l’employeur qui a persisté à nier la réalité des faits.

L’autorité intimée a toutefois retenu qu’une partie des faits s’était déroulée sous l’ancien droit et indique avoir déjà atténué la quotité de l’amende. Il n’y a donc par lieu d’en tenir compte une seconde fois en diminuant la quotité de l’amende.

Les critères retenus par l’autorité intimée pour fixer le montant de l’amende sont en conséquence pertinents. En limitant le montant total de l’amende à deux tiers du montant maximal, il ne peut être reproché à l’autorité intimée d’avoir abusé de son large pouvoir d’appréciation.

6.2 Les cas mentionnés par la recourante dans lesquels la chambre de céans a réduit l’amende ne sont pas comparables à sa situation. Si dans l’ATA/894/2022 du 6 septembre 2022 la violation de la CTT-EDom portait sur CHF 381'701,- mais concernait cinq employées, la réduction de CHF 28'000.- à CHF 14'000.- de l’amende était notamment justifiée par la difficulté rencontrée par l’OCIRT de déterminer qui était employeur, de ses hésitations à cet égard, ainsi que de la position de la mère de la recourante qui avait d'emblée indiqué être l'employeuse. L’ATA/871/2020 a retenu, à tort, qu’une partie de la sous-enchère avait été atteinte par la prescription pénale, raison de la réduction de l’amende. La problématique de la prescription a fait l’objet de l’arrêt de principe ultérieur ATA/917/2021 précité de la chambre de céans. Enfin, la recourante se réfère à ce dernier arrêt. Or, l’autorité intimée y a, à l’instar du présent cas, tenu compte, dans un sens atténuant la fixation de la peine, qu’une partie de l’infraction avait été accomplie alors que la sanction était moins grave.

La décision est en conséquence conforme au droit et sera confirmée.

7.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’000.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevables les recours interjetés les 11 et 30 mai 2023 par A______ contre les décisions des 28 mars et 25 mai 2023 de l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail du 28 mars 2023 ;

au fond :

les rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 1’000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Martine STÜCKELBERG, avocate de la recourante ainsi qu'à l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie LAUBER, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. MARINHEIRO

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :