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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/291/2023

ATA/1165/2023 du 31.10.2023 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;FONCTIONNAIRE;DEVOIR PROFESSIONNEL;VIOLATIONS DES DEVOIRS DE SERVICE;RÉSILIATION;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;COMPORTEMENT;MOTIF;INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL)
Normes : SPVG.34.al2.leta; SPVG.34.al2.letb; SPVG.82; SPVG.83.leta; SPVG.84.leta; SPVG.84.letg
Résumé : Admission partielle du recours. L’enquête administrative n’a pas établi les faits pertinents de façon exacte et complète. Trois des quatre reproches retenus dans la décision de résiliation, sur la base du rapport d’enquête, ne sont pas établis. Le quatrième reproche, en l’occurrence justifié, ne constitue toutefois pas des manquements graves ou répétés aux devoirs de service fondant un licenciement. Ce dernier est donc contraire au droit. L’indemnité pour refus de réintégration est fixée à neuf mois du dernier salaire, compte tenu de l’ensemble des circonstances.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/291/2023-FPUBL ATA/1165/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 octobre 2023

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Alireza MOGHADDAM, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE intimée

 



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1968, a été engagée par la Ville de Genève
au poste d’assistante conservatrice aux B______ (ci-après : B______) à 50% avec effet au 1er janvier 2009, en classe 14-16 de l’échelle des traitements.

Suite à l’entrée en vigueur du nouveau statut du personnel de la Ville de Genève du 29 juin 2010 (SPVG – LC 21 151), le 31 décembre 2010, son poste a été colloqué en classe M de la nouvelle échelle des traitements.

A______ a augmenté son taux d’activité à 80% du 1er mars au
30 septembre 2010 et du 1er mars au 31 mai 2011, et à 100% du 1er juin au
31 août 2012, en raison de l’important volume de travail lié à des expositions. À partir du mois d’octobre 2012, son taux d’activité a été porté définitivement à 70%, avec une augmentation temporaire à 80% du 1er janvier au 30 novembre 2016 pour les besoins du service.

b. Le B______ comprend cinq unités, dont le secteur « C______ », auquel est rattaché le pôle des « D______».

La fonction de conservateur responsable des « D______» a été occupée par
E______ jusqu’en octobre 2011, puis par F______. Après une période de vacances de onze mois, G______ a été nommée le
1er octobre 2017 au poste de conservatrice en cheffe du domaine des
« D______», devenant ainsi la supérieure hiérarchique de A______.

H______ a occupé le poste de directeur du B______ depuis le mois de novembre 2019, succédant à I______. J______ est l’administratrice du B______ et K______ responsable du secteur des ressources humaines (ci-après : les RH) du B______.

c. Trois entretiens périodiques d’évaluation ont été menés durant les deux premières années d’activité de A______, soit les 13 mai et 13 octobre 2009, et le
4 novembre 2010. L’employée donnait entière satisfaction à sa hiérarchie, qui a relevé sa souplesse dans l’aménagement du temps de travail, son ouverture d’esprit, son organisation rationnelle et son professionnalisme. Elle exprimait ses convictions avec fermeté et intelligibilité, et savait fait preuve de franchise face à sa hiérarchie. Son travail collégial, son autonomie, sa réactivité, sa rigueur et sa précision étaient appréciés. Ses rapports étaient empreints de cordialité et de discrétion, son tempérament contribuait à cultiver un esprit d’apaisement au sein du secteur.

Par la suite, aucune évaluation n’a été réalisée dans le secteur des
« D______»,  jusqu’à l’entrée en fonction de G______.

B. a. Le 12 mars 2019, G______ a demandé à A______ des précisions sur l’avancement du « projet sur L______», le dossier sommaire préparé en septembre 2018 étant l’unique document disponible. Elle regrettait que l’employée n’ait pu répondre que cette semaine-là à la demande du Conseil scientifique de rencontrer la médiation, et s’est étonnée qu’elle pose directement des questions quant au fonctionnement et aux procédures du Conseil scientifique à la direction sans discussion préalable avec elle. On pouvait « clairement s’alerter sur le problème de rupture de confiance » entre elles.

b. Le 13 mars 2019, A______ a répondu à G______, avec copie à I______. Elle a contesté que son dossier puisse être qualifié de succinct et rappelé qu’elle lui avait proposé un projet initial en avril 2018, que la responsable n’avait pas voulu présenter au Conseil scientifique pour des raisons financières. Elle avait demandé des informations sur la nature de la médiation en septembre 2018 et il n’avait jamais été clairement défini qui était en charge de faire avancer le projet entre les différents secteurs transversaux. La réunion prévue en février 2019 avait été annulée par une tierce personne et aucune autre date n’avait pu être convenue plus tôt, malgré ses relances. Elle a également évoqué le manque de visibilité des assistantes conservatrices qui ne venaient plus présenter leurs projets au Conseil scientifique et qui recevaient les nouvelles des projets très tardivement, voire pas du tout, ce qui provoquait un grand sentiment d’incertitude et d’isolement. Malgré ses demandes de rencontre spécifique, elle n’avait pas pu aborder avec elle en profondeur ses questions liées au « projet L______ », raison pour laquelle elle s’était adressée à la direction. La grande majorité des tâches que lui assignait
G______ depuis son arrivée était très en-dessous de ses compétences ou sans rapport avec ce dont elle s’était occupée depuis dix ans au B______, et ses tentatives de travail en lien avec des expositions s’étaient soldées par des échecs. Ceci était très préoccupant et justifiait la réserve dont elle avait pu faire preuve à son égard. L’éventuelle rupture de confiance se situait du côté de la supérieure.

c. Le 14 mars 2019, G______ a écrit à A______, en mettant I______ et J______ en copie de son message. Elle a contesté les affirmations de sa collaboratrice, qui apparaissaient « inexactes ou mensongères ». Elle n’avait pas présenté le projet initial pour des contraintes de salle et elles avaient décidé d’un commun accord de le redimensionner. Elle s’étonnait que A______ ait pu ne pas comprendre qui était chargé de faire avancer le projet dont elle avait la responsabilité. Elle lui avait dit à plusieurs reprises de prendre contact avec la médiation et son agenda électronique était accessible. Elle a rappelé les missions qu’elle lui avait confiées, soit gérer l’important dossier des œuvres en dépôts extérieurs (dossier que l’employée n’avait pas commencé), gérer des dossiers de nouvelles acquisitions (ce dont A______ s’occupait régulièrement), gérer des projets scientifiques d’étude de la collection (elle n’avait reçu aucune proposition tangible de projet), assurer des visites et écrire des textes scientifiques et de vulgarisation (A______ avait toujours effectué ces tâches dont elle soulignait la qualité) et proposer des projets d’expositions dans les salles changeant au sein du parcours « D______» pour les années à venir (elle n’avait encore reçu aucune proposition). Elle a en outre procédé à une évaluation générale du travail de A______, à laquelle elle a reproché une approche « extrêmement individuelle », son incapacité ou son refus d’envisager le moindre changement, son comportement inacceptable lors des séances de travail de l’équipe, au cours desquelles elle avait manifesté de manière démonstrative son mépris et son sentiment de perte de temps, en « s’accrochant » à son smartphone ou en « feuilletant » un livre sans prendre part à la discussion. Elle ne faisait que ce qu’elle souhaitait pour rester dans sa zone de confort et existait comme un « électron libre », alors que le travail d’équipe et la polyvalence étaient indispensables.

d. Le 18 mars 2019, A______ a envoyé à sa responsable un message avec ses commentaires en pièces jointes.

Cette annexe n’est pas reproduite avec le reste des échanges (pièces 7-75 du classeur 3/3 « Enquête administrative »).

e. Le 19 mars 2019, G______ a répondu à A______. Elle est revenue sur la gestion de différents projets et expositions de son secteur, et a notamment rappelé à l’employée que son cahier des charges ne prévoyait que 25% de temps consacré à des expositions. Elle a conclu en lui proposant de discuter « en tête-à-tête » et de consigner leurs conclusions par écrit pour éviter tout nouveau malentendu, ou d’en discuter en présence d’une tierce personne, idéalement la responsable RH.

f. Le jour même, A______ a remercié sa supérieure et indiqué qu’elle préférerait être accompagnée pour cette discussion.

g. Le 29 mars 2019, J______ a écrit aux deux concernées qu’elle avait pris connaissance des derniers échanges, dont la tonalité la surprenait. Elle proposait de les rencontrer lors d’un entretien, sans autre personne.

h. Le 10 avril 2019, A______ a insisté pour pouvoir être accompagnée, compte tenu de la rupture du lien de confiance évoquée par sa supérieure.

i. Le 12 avril 2019, J______ a proposé la présence de K______.

Le dossier produit par la Ville de Genève ne comprend pas de procès-verbal de cette réunion.

C. a. Le 28 novembre 2019, G______ a procédé à un entretien périodique portant sur les activités de A______ du 1er octobre 2017 au
1er novembre 2019, en l’absence de l’intéressée.

La responsable hiérarchique a indiqué qu’elle avait trouvé une équipe « pas soudée » à son arrivée et qu’elle avait voulu en construire une « digne de ce nom » en mettant notamment l’accent sur le travail collectif, la polyvalence et la transversalité. A______ avait montré des difficultés à envisager le moindre changement dans son fonctionnement et ses habitudes de travail, refusant par exemple de participer aux projets collectifs ou de contribuer de manière constructive aux séances d’équipe. Ces réticences avaient fait l’objet de nombreux échanges écrits et oraux qui s’étaient quelque peu durcis au fil des mois, ce qu’elle regrettait. Le cahier des charges remis à l’employée le 2 octobre 2019 avait fait l’objet d’une longue discussion, celle-ci estimant que sa fonction d’origine était « dégradée ». Quelques modifications avaient été apportées depuis lors. L’entretien périodique devait initialement se dérouler le 4 novembre 2019, mais avait été reporté à la demande de l’employée afin de pouvoir discuter du cahier des charges. La nouvelle date du 28 novembre 2019 avait été maintenue malgré la demande de A______ de la repousser de plusieurs mois.

Aucun objectif formalisé n’avait été confié à A______ au cours de la période écoulée. Toutefois, il lui avait été demandé de procéder à la gestion du « dossier des œuvres en dépôt à l’extérieur », à la gestion de la brochure des salles pour la première phase du nouvel accrochage et au traitement des « dossiers d’enrichissements ». Ces objectifs n’étaient pas atteints ou seulement partiellement.

L’esprit d’équipe, la communication et l’ouverture d’esprit avaient été clairement défaillants au cours de la période évaluée. A______ avait refusé de participer aux projets collectifs du domaine, notamment à deux ou trois phases du nouvel accrochage des collections permanentes. La forme et le ton utilisés lors des conversations, en séance d’équipe ou dans les messages, étaient parfois mal vécus par les collègues en raison d’un mépris blessant. Le refus de s’ouvrir à des tâches nécessaires au bon fonctionnement du domaine, sous prétexte que celles-ci n’étaient pas de son ressort, n’était pas admissible. A______ gagnerait à optimiser le temps de travail à sa disposition, les tâches ou projets qui lui étaient confiés étant réalisés dans des délais importants, voire hors délai. Il en allait ainsi pour les articles, les cartels, les enrichissements, le nettoyage des fiches « M+ ». L’autonomie, la créativité, l’initiative et le sens des responsabilités avaient été défaillants, puisqu’une seule proposition de projet personnel d’exposition avait été présentée et aucune proposition de projet d’étude fondamentale des collections soumise. Les contributions écrites de l’employée étaient fouillées, bien construites et scientifiquement fondées. A______ n’était toutefois pas à l’aise avec les outils informatiques, notamment avec la base de données de collections « M+ ».

D’importantes difficultés de collaboration s’étaient manifestées au cours de la période évaluée, en grande partie en raison de divergences sur la manière de travailler. Celle qu’elle avait voulu instaurer dès son arrivée, soit un travail transversal et en équipe, avec de la polyvalence et de la flexibilité, ne semblait pas convenir à A______, ce qu’elle regrettait.

Pour la période à venir, étaient fixés les objectifs SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporel) suivants : mettre en ligne des collections (au minimum 20 à 30 fiches par mois selon le travail demandé par objet) jusqu’à la prochaine évaluation ; traiter le « dossier de dépôts à long terme » pour les mois de mai et juin 2020 ; assurer le pilotage du projet de réflexion et d’analyse lié au déménagement des œuvres du dépôt M______ au N______ pour fin
mars 2021 ; améliorer sensiblement sa communication et son comportement avec ses collègues jusqu’à la prochaine évaluation, en bannissant les propos méprisants qui blessaient et obligeaient sa supérieure à intervenir, en agissant de manière constructive au cours des séances, en étant une force de propositions réalistes.

b. Par courrier du 23 décembre 2019, G______ a fait parvenir à A______ le formulaire d’entretien du 28 novembre 2019, avec un délai pour apporter des commentaires, le signer et le retourner. Elle lui a également transmis une nouvelle version de son cahier des charges, que l’employée était invitée à signer et ramener dans les plus brefs délais.

c. Dans un courriel du 17 janvier 2020 adressé à sa responsable, A______ a contesté avoir refusé de se rendre à l’entretien périodique, dont elle avait demandé le report le 22 novembre 2019, sans obtenir de réponse. Rien ne justifiait de mener cet entretien in absentia, étant rappelé que deux collègues n’avaient toujours pas eu le leur. G______ aurait pu l’appeler ou venir à son bureau pour discuter d’une autre date et de leur problématique afin d’éviter une formalisation bien disproportionnée. Aucune urgence ne l’obligeait à lui envoyer le rapport d’entretien périodique à son domicile durant les vacances, ce qui était un acte « extrêmement agressif » et qui relevait du « harcèlement moral ». « Pour finir, eu égard à ta fonction de cadre, la moindre des choses aurait été de préciser, dans le cadre de la démarche bien singulière que tu effectues à mon encontre, les dispositions légales précises qui sauvegardent mes intérêts, soit notamment celles concernant les délais tant s’agissant de mes observations à l’entretien périodique que de la contestation de mon cahier des charges auprès du CA [Conseil administratif]. Dois-je en effet te rappeler que c’est une obligation juridique à laquelle tu es tenue ? ».

d. Sur une carte de compliments du B______ non datée, A______ a indiqué à K______ qu’elle n’entendait pas signer le document d’entretien périodique, compte tenu de la violation des règles relatives à son déroulement.

e. Par courriel du 29 janvier 2020, H______ a informé
A______ que le ton de son message du 17 janvier 2020 à sa responsable n’était pas toléré, quand bien même il existait entre elles des tensions et des désaccords.

f. Le 31 janvier 2020, l’employée a transmis ses observations et une annexe, dans laquelle elle a rappelé son parcours professionnel au B______.

Elle a contesté que l’équipe ne fût pas soudée à l’arrivée de G______, qui avait interprété négativement et à tort une manière trop individuelle de travailler, alors que la synergie était présente et la dynamique stimulante.

Elle avait participé avec enthousiasme au projet mis en place par sa supérieure hiérarchique, qui n’avait pas « joué le jeu du collectif ». Le comportement quotidien de G______ s’était avéré antinomique avec un travail d’équipe serein : elle ne donnait accès à son agenda qu’à certaines personnes, était très rarement présente, ne faisait pas de retour sur les activités la tenant éloignée du B______, espaçait les réunions de domaine, ne prenait pas le temps nécessaire pour aborder et discuter des questions de fond, coupait très rapidement court au dialogue, critiquait ouvertement des collaborateurs, portait des accusations sans fondement à « l’intérieur du domaine » ainsi qu’auprès d’autres collègues du B______, violait les principes éthiques et se situait à la limite de la légalité.

Elle a fait état d’un harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique.

D. a. Le 17 mars 2020, G______ a communiqué aux six membres de son équipe les priorités pour les semaines de confinement et de télétravail à venir en raison de la pandémie. Premièrement, le B______ étant fermé, il fallait investir davantage les réseaux sociaux et le web et elle demandait à ses collaboratrices de nouveaux blogs à publier sur leurs collections et des galeries pour le site de collection en ligne. Deuxièmement, il s’agissait de mettre en ligne des collections et autres projets. L’équipe était invitée à commencer les corrections des fiches « Word ». Dès que les accès seraient possibles au « M+ » depuis les ordinateurs privés, en principe d’ici une ou deux semaines ou dès le retour au travail, ces corrections pourraient être rapidement apportées vers les fiches « M+ » en faisant des « copier-coller ». Elle comprenait que c’était « un peu de travail supplémentaire », mais il n’y avait pas d’autres solutions. Elle restait à la disposition de ses collaboratrices pour discuter de ces propositions et était ouverte à toute autre suggestion ou partage d’idées pour le télétravail.

b. Le 24 mars 2020, A______ a relevé qu’il était particulièrement difficile d’effectuer le nettoyage des fiches sans « M+ » et sans accès à des ouvrages de la « BBA », mais elle pourrait effectuer un nettoyage formel pour ensuite le faire sur le fond lorsque la situation serait revenue à la normale. Elle se proposait de consacrer une partie de son temps de travail à son projet de recherche sur l’exposition « O______ » pour lequel elle avait déjà réuni une importante documentation. Elle pensait aboutir à un article sur le sujet à l’automne. Elle proposait de rendre compte à sa responsable de l’avancement de ce projet sur une base mensuelle. Elle réfléchissait en outre à des sujets pour le blog.

c. À une date non déterminée, G______ a constaté qu’il était clair que leur travail serait beaucoup plus difficile sans les accès à « M+ » et « BBA », mais qu’il fallait faire avec les moyens à disposition. Les collaboratrices étaient invitées à lui faire un bref retour sur leur travail au moins une fois par semaine.

d. Par courriel du 26 mars 2020, G______ a fait savoir à A______ qu’elle devait s’en tenir aux objectifs fixés et ne plus utiliser le temps de travail pour la réalisation de ses projets personnels, dont faisait partie « O______ » et dont elle n’avait appris l’existence que lors d’une séance à laquelle participait H______.

e. Le 26 mars 2020, G______ a transmis ces échanges à la direction du B______, avec copie à la direction du département et à K______.

f. Par courriel du 29 mars 2020, A______ a prié G______ de reconsidérer sa position. Son refus n’était motivé qu’en raison des circonstances dans lesquelles elle avait appris l’existence de son projet « O______» et le nettoyage des fiches était pratiquement impossible à mener correctement sans les accès.

g. Le 30 mars 2020, G______ a rappelé à A______ les deux priorités du secteur mentionnées dans son message du 17 mars 2020. L’employée n’avait pas respecté l’ordre hiérarchique en ne l’informant pas de son projet avant de s’en ouvrir au directeur. De plus, elle avait manifestement entrepris des recherches conséquentes sur son temps de travail, au détriment d’autres tâches confiées. Compte tenu des circonstances dues au confinement et dans un souci d’apaisement, elle l’autorisait à travailler sur ce projet, pour autant qu’elle exécute d’abord entièrement les tâches prioritaires et continue ensuite à travailler parallèlement à ces dernières, à un taux à convenir ensemble.

h. Par message du 2 avril 2020, A______ a précisé qu’elle avait voulu lui parler de son projet mais n’en avait pas eu l’occasion. Elle n’avait pas entrepris d’importantes recherches sur son temps de travail. Elle estimait nécessaire de dépasser « cette querelle stérile et de profiter de la situation pour partir sur une base constructive sur le plan professionnel » où la protection de sa personnalité au travail et les priorités de sa supérieure hiérarchique pourraient être conciliées et respectées.

i. Par courriel du 2 juin 2020, G______ a rappelé à son équipe de ne pas oublier leurs bilans habituels une fois par semaine et de lui adresser un rapport sur leurs trois mois de télétravail, dont elle ferait une synthèse.

j. Le 5 juin 2020, A______ a envoyé à G______ son compte rendu de télétravail durant les douze semaines. Il en ressort qu’elle avait consacré son temps à des lectures et recherches d’œuvres en vue de la rédaction d’une série de blogs, à la correction des fiches dans « M+ », à la préparation d’un entretien du 27 mai 2020 (cf. ci-dessous E.e) et à la rédaction d’une bibliographie sur un artiste. Elle avait envoyé un blog.

E. a. Le 3 avril 2020, G______ a demandé le soutien de sa direction, relevant qu’il était « vraiment urgent de recadrer d’une manière ou d’une autre » A______. Elle était la seule de ses collaboratrices à ne pas suivre les consignes : elle ne l’avait pas appelée une seule fois et ne lui avait transmis aucun retour sur ses activités en trois semaines. La collaboratrice avait « appliqué et raffiné cette stratégie d’usure » avec ses deux prédécesseurs. Elle n’avait jamais été sanctionnée, alors qu’elle avait notamment refusé trois modifications de son cahier des charges depuis 2008, ne s’était pas présentée à son entretien d’évaluation et avait répondu de manière inadmissible au formulaire rempli en son absence. Sa nonchalance et son attitude d’obstruction perpétuelle jamais sanctionnées et son dédain envers les membres de l’équipe suscitaient des rancœurs et nuisaient à l’ambiance générale.

b. Le 6 avril 2020, H______ a adressé un courriel à A______ concernant ses récents échanges avec G______ et l’organisation du télétravail, regrettant que son courriel du 29 janvier 2020 n’ait pas eu l’effet escompté.

Sur le fond, il tenait à souligner que c’était à la responsable et à elle seule de définir les priorités du domaine dont elle avait la charge et, partant les objectifs, clairs et mesurables, en découlant tant pour elle que pour ses collègues. A______ n’avait pas respecté cette logique avec son projet « O______ » sur lequel elle avait travaillé de manière importante sans en informer sa supérieure. Sa contribution active au nettoyage et à la mise à jour des fiches « M+ », requise dans son cahier des charges, n’était de loin pas une tâche accessoire, voire dégradante, comme elle le laissait entendre. Il lui était donc demandé de respecter strictement les objectifs confiés par G______ et de contribuer aux tâches prioritaires du domaine des « D______».

Le ton insolent et la coloration générale de ses propos étaient intolérables. La période de confinement et de travail à distance était particulièrement pénible pour tout le monde et il l’invitait à la mettre à profit, non pas pour argumenter plus avant, mais pour contribuer sereinement et activement au bon fonctionnement des « D______», et plus généralement du B______.

Il lui annonçait la tenue prochaine d’un entretien, au moment du retour des conditions de travail normalisées.

c. A______ lui a répondu le 19 avril 2020. Elle était choquée par le ton accusateur du message, dans la mesure où elle n’avait jamais été entendue sur les questions qui l’opposaient à G______.

Elle n’avait pas fait de recherches extensives pour le projet « O______ ». Elle effectuait en temps normal le nettoyage des fiches « M+ » avec beaucoup de soin, mais la situation actuelle rendait ce travail absurde. Elle n’avait eu accès à « M+ » qu’après les fêtes de Pâques. Elle avait voulu trouver un compromis avec sa cheffe afin d’utiliser son temps le plus intelligemment possible.

Depuis deux ans, elle était victime de harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique. Cette situation avait commencé peu après son arrivée et elle ne l’avait aucunement provoquée. Elle résultait uniquement du fait que jusque-là, sa mission principale était de travailler sur les expositions d’art moderne et contemporain du domaine des « D______». Sa responsable, estimant que c’était sa prérogative, avait donc cessé de lui confier des projets ou l’avait systématiquement assignée à des tâches qui étaient en-dessous ou hors de ses domaines de compétences. À cela s’étaient ajoutés un dénigrement constant de son travail auprès de ses collègues du B______, ainsi que des tentatives d’isolement par rapport aux autres collaboratrices des « D______». G______ avait également rendu impossible l’accomplissement de ses projets. Le « comble » était que, depuis mars 2019, la direction du B______ était parfaitement au courant de cette situation et n’avait pas jugé utile de prendre des mesures afin de protéger dûment sa santé.

L’entretien annoncé serait pour elle l’occasion de s’exprimer sur la situation, ce qu’elle n’avait encore jamais pu faire. Enfin, les particularités de sa relation avec sa responsable hiérarchique ne pouvaient pas être envisagées en dehors des problèmes structurels du B______.

d. Par courrier du 11 mai 2020, H______ a reproché à
A______ de ne pas respecter ses devoirs et obligations, en dépit des demandes pressantes formulées les 29 janvier et 6 avril 2020. Elle affirmait être victime de harcèlement moral de la part de sa responsable hiérarchique depuis deux ans, mettait en cause la direction du B______ qui n’aurait rien entrepris pour protéger sa santé et désignait des problèmes structurels dont souffrirait le B______ comme un facteur de graves problèmes relationnels au sein des domaines de conservation, évoquant dans ce contexte la situation de collègues des arts appliqués et des arts graphiques. Elle dénonçait le précédent directeur comme largement responsable de « dysfonctionnements managériaux ».

Ces allégations étaient trop graves et il envisageait de prononcer un avertissement à son encontre au sens des art. 93 SPVG et 107 de son règlement d’application du 14 octobre 2009 (REGAP - LC 21 152.0). La responsable hiérarchique et la direction du B______ contestaient catégoriquement tout acte de harcèlement psychologique à son encontre. Fixer des objectifs prioritaires aux membres d’une équipe, s’inscrivant dans le cadre de leur cahier des charges, ne constituait en rien du harcèlement, mais relevait de l’exercice des responsabilités des cadres. Les entretiens qui s’étaient déroulés à différents échelons dans le cadre et à la suite de sa démarche auprès du Groupe de confiance n’avaient pas permis de mettre en évidence l’existence de harcèlement psychologique à son encontre. Ils avaient par contre conclu à la nécessité de conduire diverses démarches, par étapes, visant notamment à clarifier la dynamique de l’équipe des « D______». Ces démarches comprenaient la tenue, en priorité, d’entretiens périodiques avec les membres de l’équipe, ce qui avait été mis en œuvre par G______ en accord avec sa hiérarchie.

e. Le 27 mai 2020, dans le cadre de l’exercice de son droit d’être entendue,
A______ a été reçue à un entretien par H______, en présence de sa responsable hiérarchique et des RH.

f. Le 4 juin 2020, H______ a prononcé un avertissement à l’encontre de A______ en raison des manquements graves et répétés à ses devoirs durant les derniers mois dans le cadre de ses échanges écrits avec G______ dans les contextes de l’entretien périodique de fin novembre 2019 et des objectifs confiés lors de la période de télétravail en raison de la pandémie de Covid-19.

Par ces agissements, elle avait non seulement manqué gravement et de manière répétée, malgré les demandes pressantes, à ses devoirs, mais avait également mis en péril toute démarche visant à améliorer la situation qu’elle dénonçait. Lors de l’entretien du 27 mai 2020, elle n’avait pas manifesté la moindre volonté de ne plus réitérer à l’avenir pareille attitude, que la direction estimait intolérable et
contre-productive.

G______ avait souligné que ses déclarations étaient extrêmement blessantes et portaient atteinte à son honneur et à son professionnalisme, en particulier l’accusation de harcèlement moral qu’elle avait vu apparaître pour la première fois en janvier 2020 et qu’elle réfutait vigoureusement. Si elle s’était montrée favorable à une démarche de médiation afin d’améliorer la situation lorsqu’elle avait été proposée par le Groupe de confiance, elle n’était désormais plus en mesure de se prononcer et devait d’abord pouvoir dépasser ce qu’elle avait subi ces derniers mois.

g. Dans un courriel du 9 juin 2020 adressé notamment à H______ et J______, G______ a évoqué la situation de A______ qui semblait davantage relever du « télérepos » que du « télétravail ». La collaboratrice était la seule de l’équipe à ne pas l’avoir tenue informée de l’avancée de travail et à ne pas l’avoir informée des sujets des billets de blog. Sur douze semaines de télétravail, sept semaines devaient être considérées comme du temps « non travaillé » ou perdu. En conclusion, il devait être constaté une flagrante insuffisance des prestations de l’employée. Les accusations de harcèlement moral de A______ à son égard la plaçaient dans une position délicate pour exercer ses devoirs de supérieure hiérarchique en procédant à des rappels à l’ordre, notamment un rappel des règles établies pour le télétravail. À l’inverse, toutes les autres collaboratrices avaient parfaitement répondu aux exigences du télétravail. Elle était toujours plus convaincue qu’un déplacement de A______ dans un autre service était la seule solution envisageable pour sortir de cette situation et « mettre un terme à cette affaire lourde, chronophage et usante pour tout le monde ».

F. a. A______ et G______ ont pris part à une médiation avec l’aide du Groupe de confiance, de juillet à octobre 2020.

b. Il ressort d’un courriel du 21 octobre 2021 du Groupe de confiance que les parties ont souhaité clore le processus après leur troisième séance commune, considérant que la médiation avait été « constructive » et qu’elles allaient « réfléchir ensemble afin de poursuivre le travail entamé ».

c. Dans un courriel du 23 octobre 2020, G______ a remercié
A______ pour son investissement personnel lors de l’exercice « difficile » du « grand travail de médiation », qui leur avait pris beaucoup de « forces émotionnelles ». Il était temps de continuer de construire leur relation professionnelle et « repartir sur de nouvelles bases ». L’intéressée était conviée à un entretien périodique afin de faire le bilan du travail de l’année écoulée.

G. a. L’entretien périodique s’est tenu le 12 novembre 2020. G______ a salué l’attitude positive de l’employée dans ce processus. Cependant, malgré les réflexions profondes et importantes effectuées dans le cadre de cette médiation relationnelle, les réticences professionnelles de A______ étaient toujours aussi fortes. Elle refusait de considérer les objectifs de travail fixés par sa hiérarchie, contestait les demandes et leur légitimité, n’effectuait pas les tâches fixées par sa responsable. Elle travaillait notamment sur des projets dont sa hiérarchie n’avait pas connaissance, ne faisait pas de retour sur le travail que G______ était censée superviser et remettait systématiquement en cause la hiérarchie et l’organisation du B______.

Quatre objectifs avaient été fixés à A______. Le premier, concernant la mise en ligne des collections (au moins 20 à 30 fiches par mois) : l’objectif n’était pas atteint selon l’estimation du logiciel « M+ », seules 39 fiches ayant été réalisées sur dix mois. Le deuxième, relatif au traitement du « dossier de dépôts à long terme » (mai-juin 2020) », n’était pas réalisé non plus : A______ avait refusé cette tâche, « sous prétexte » qu’elle n’était pas de sa responsabilité. Le troisième objectif consistait à assurer « le pilotage du projet de réflexion et d’analyse lié au déménagement des œuvres » du dépôt M______ au N______ (février « 2020 » [recte : 2021] - mars 2021), à savoir sortir et analyser les listes complètes en « M+ » des œuvres se trouvant au dépôt et préparer les groupes d’œuvres « avec les propositions de répartitions », puis finaliser le rapport après validation : l’objectif n’était pas atteint car A______ avait commencé ce travail à la fin du mois d’octobre 2020 et n’avait amené aucune discussion ni information préalable concernant ce sujet complexe, que ce soit avec sa supérieure ou en séance d’équipe ; elle avait expliqué ce début tardif par des arguments divers. Enfin, le dernier objectif relatif à sa communication et son comportement avec ses collègues était partiellement atteint : A______ avait banni « les propos méprisants » et agi à plusieurs reprises de manière constructive ; il n’y avait plus eu de plaintes de la part des collègues depuis la médiation, mais la communication avec sa responsable demeurait « problématique ». A______ n’apportait pas de réponses aux sollicitations, ne faisait pas de retour sur son travail ni ne donnait d’informations « directement » à sa responsable.

Dans son bilan général, G______ a conclu que la médiation n’avait pas permis d’amélioration de la situation sur le point central, à savoir la possibilité pour elle d’exercer ses devoirs de cadre supérieure. L’insuffisance de prestations et le manque d’efficience étaient également manifestes. Enfin, elle déplorait une incapacité de l’intéressée à se remettre en question et à accepter la moindre critique. Cette situation allait être reportée à la direction du B______ afin de trouver une solution, compte tenu de l’impossibilité de collaboration et du refus de l’employée de se référer aux consignes et orientation de sa responsable.

b. Sur une carte de compliments du B______ non datée, A______ a indiqué qu’elle n’entendait pas signer le document d’entretien périodique, compte tenu de la violation des règles relatives à son déroulement.

Elle a transmis des observations complémentaires à l’entretien périodique, non datées. Elle avait été choquée en découvrant les propos apposés dans le formulaire. G______ semblait incapable de travailler en collaboration et avait refusé le dialogue. Elle a pris position sur les quatre objectifs cités dans le bilan.

c. A______ a été en incapacité totale de travail à partir du
16 décembre 2020, jusqu’au mois de janvier 2023.

d. Par courriel du 7 janvier 2021 adressé à H______ et intitulé « appel urgent à l’aide », G______ a indiqué que toute collaboration était impossible à cause du comportement de A______, dont elle sollicitait le déplacement.

H. a. Lors de sa séance du 30 juin 2021, le Conseil administratif de la Ville de Genève a décidé d’ouvrir une enquête administrative à l’encontre de A______, aux motifs que cette dernière aurait adopté à réitérées reprises des comportements inadéquats et contraires à ses obligations dans le cadre de ses activités professionnelles, que ses prestations avaient été jugées insuffisantes par sa hiérarchie, qui considérait qu’elle était inapte à remplir les exigences de sa fonction. Il a en outre prononcé la suspension de l’activité jusqu’au prononcé d’une éventuelle sanction ou d’un licenciement, mesure qui serait réévaluée si elle devait se poursuivre au-delà du 31 décembre 2021.

Le recours formé contre cette décision a été déclaré irrecevable par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le
2 novembre 2021.

b. Le 9 septembre 2021, A______ a transmis au Conseil administratif une lettre de soutien, signée par 29 collaborateurs du B______, attestant de ses qualités professionnelles et personnelles.

c. Les 21 décembre 2021 et 29 juin 2022, le Conseil administratif a prolongé la suspension d’activité jusqu’au 31 décembre 2022, respectivement 30 juin 2022, étant précisé qu’un éventuel solde de vacances et jours de compensation dus pour cette période devrait être épuisé dans ces intervalles.

A______ n’a pas recouru contre ces décisions, entrées en force.

d. Les enquêteurs ont rendu leur rapport le 27 juin 2022.

Il ressort dudit document qu’ils ont procédé à 17 audiences d’enquête au cours desquelles ils ont entendu G______, P______, collaboratrice scientifique aux « D______» du B______ jusqu’en 2020, Q______, collaboratrice administrative aux « D______», R______, collaboratrice scientifique aux « D______», K______, J______, S______, responsable RH du département, et
H______. A______, au bénéfice d’un certificat médical, était absente mais représentée lors des auditions s’étant tenues en 2021, et a été assistée par son conseil à celles de 2022. Les enquêteurs ont renoncé au témoignage de T______, ancienne directrice de département, convoquée mais indisponible, et rejeté les demandes d’audition de A______.

Ils ont classé les différents griefs énoncés par le Conseil administratif en cinq catégories, dans lesquelles ils ont résumé les déclarations des témoins puis celles de A______, avant de livrer leurs conclusions intermédiaires.

Les enquêteurs ont retenu un manquement disciplinaire aux devoirs de service au sens de l’art. 83 let. a SPVG, en raison d’un comportement inapproprié et irrespectueux de A______ à l’égard de sa hiérarchie et de certains de ses collègues.

Ils ont également conclu à un manquement aux devoirs de service au sens des
art. 82 et 84 let. a et g SPVG, compte tenu de la remise en question persistante de la hiérarchie et de refus réitérés d’ordres.

Ils ont en outre retenu une insuffisance de prestations, représentant un manquement aux devoirs de service au sens des art. 82 et 84 let. a et g SPVG.

Ils ont en revanche considéré que le quatrième manquement relatif aux horaires de travail non respectés n’était pas avéré.

Enfin, les enquêteurs ont retenu un manquement aux devoirs de service au sens des art. 82, 83 et 84 let. a et g SPVG, en raison de lacunes de collaboration et de transmission d’informations avec sa supérieure et certaines collègues, contribuant ainsi de façon notable à une dégradation de l’ambiance de travail de l’équipe.

Les enquêteurs ont entendu J______ sur la question de l’avenir de
A______ auprès de la Ville de Genève. Selon la témoin, il aurait fallu agir dès 2019, puisque les difficultés existaient déjà à cette époque. Elle aurait alors préconisé une réflexion sur un possible transfert de A______ dans un autre service. L’entretien prévu n’avait pas pu avoir lieu, puisque le dossier avait été retiré de la compétence du B______, pour être repris par le département et parallèlement par le Groupe de confiance. Elle estimait que A______ ne pouvait plus poursuivre ses fonctions au B______ en raison des problèmes RH. H______ leur avait indiqué qu’il n’avait pas proposé de déplacement à A______, car il voulait examiner au préalable les compromis possibles. Il avait finalement renoncé à cette possibilité suite à l’entretien de décembre 2020, car il avait constaté que l’employée n’était pas ouverte à l’idée de respecter les objectifs fixés et qu’il n’avait remarqué aucun changement. Lors de sa comparution personnelle, A______ avait indiqué considérer que sa place demeurait au secteur des « D______», mais examinerait un transfert dans un autre service muséal si cela devait s’avérer nécessaire.

Les enquêteurs ont conclu que le conflit et les incompréhensions entre
A______ et G______ avaient eu une grande influence sur l’équipe et l’ambiance de travail du secteur des « D______». A______ n’avait de cesse de discuter les instructions, de remettre en cause le travail confié, de contester les objectifs ou son nouveau cahier des charges. Ces éléments étaient inacceptables et de son seul ressort, et n’émanaient pas du conflit avec sa supérieure. Même si elle avait travaillé en toute autonomie durant des années, elle se devait de suivre les instructions de sa nouvelle responsable. Elle était la seule de l’équipe à ne pas avoir su s’adapter aux changements. G______ quitterait le B______ dans les prochains mois, mais ce départ ne remettait pas en cause les manquements répétés de A______ à ses devoirs de service et son insuffisance de prestations. Ils avaient constaté, dans le cadre de leurs auditions, une profonde atteinte du lien de confiance entre A______ et
G______, et entre A______ et l’ensemble de sa hiérarchie, jusqu’à son plus haut niveau.

e. Par courrier du 18 août 2022, A______ a fait part de ses observations.

f. Le 12 septembre 2022, elle a été entendue par une délégation du Conseil administratif.

g. Par courrier du 21 septembre 2022, le Conseil administratif a informé l’employée qu’il avait décidé de poursuivre le processus de licenciement.

h. Par décision du 14 décembre 2022, déclarée exécutoire nonobstant recours, reçue le 16 décembre 2022, le Conseil administratif a résilié les rapports de service de A______ avec effet au 30 juin 2023 et libéré l’employée de son obligation de travailler jusqu’au terme de son délai de congé.

Il ressortait des conclusions du rapport d’enquête administrative que l’employée avait adopté à plusieurs reprises un comportement inapproprié et irrespectueux tant à l’égard de sa supérieure hiérarchique que certaines de ses collègues. Elle avait notamment entretenu des rapports difficiles avec sa responsable, alimentant le conflit qui l’opposait à elle, tenu des propos blessants à l’endroit de sa collègue, Q______, et adopté une attitude hautaine à l’égard de collègues ayant des fonctions administratives, comportement qui n’était pas propre à favoriser des relations empreintes de respect avec ses collègues.

Elle avait également remis en question de manière persistante sa hiérarchie et refusé de manière réitérée des instructions qui lui étaient données, notamment en ne suivant pas la planification du travail faite par sa supérieure durant le confinement du printemps 2020, en discutant et en remettant sans cesse en question les tâches qui lui étaient attribuées, en refusant de signer son nouveau cahier des charges, en ne participant pas à deux entretiens périodiques d’évaluation et en refusant de considérer les objectifs fixés dans le cadre de ces entretiens par sa supérieure hiérarchique.

Certaines de ses prestations avaient été considérées comme insuffisantes, notamment s’agissant du travail fourni durant la période de confinement, travail qui s’était résumé à la rédaction d’un article de blog et de quelques fiches d’inventaire. Elle n’avait également pas rempli certains des objectifs fixés par sa responsable hiérarchique en novembre 2019 et en novembre 2020 et n’avait pas réalisé la plupart des travaux demandés.

Un manque de collaboration et de transmission d’informations avait également été retenu à son encontre, tant à l’égard de sa hiérarchie que de ses collègues, dans la mesure où il lui était arrivé à plusieurs reprises de travailler sur des projets sans en informer sa hiérarchie, de refuser de participer à certaines séances alors que sa présence était requise en raison de la transversalité des tâches voulue par sa supérieure hiérarchique.

Par ses agissements, elle avait gravement porté atteinte à la considération et à la confiance dont la fonction publique devait être l’objet. Les rapports de service ne pouvaient pas se poursuivre en raison des manquements graves et répétés à ses devoirs de service.

I. a. Par acte du 30 janvier 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision de résiliation. Elle a sollicité préalablement les productions du dossier complet de l’enquête administrative, des entretiens périodiques des 4 décembre 2018 et 12 avril 2019 d’U______, ancienne conservatrice aux « D______» et des courriels adressés par R______ à G______, K______ et V______, administratrice au B______, au sujet de son entretien périodique, ainsi que son audition et celles de témoins. Principalement, elle a conclu à la constatation de la nullité de la décision entreprise, subsidiairement à son annulation et à ce qu’elle soit réintégrée dans sa fonction d’assistante conservatrice auprès du B______ ou transférée à un poste similaire. En cas de refus, elle a requis l’octroi d’une indemnité s’élevant à CHF 216’632.-. Elle a également requis, quelle que soit la conclusion alternative retenue, que l’intimée soit condamnée à lui verser
CHF 80'478.80, sous réserve d’amplification, représentant ses frais d’avocat, et à ce que soit constatée la violation illicite de ses droits de la personnalité par le Conseil administratif.

La décision était nulle, l’intimée n’ayant pas pris en considération son droit aux vacances entre le 30 juin 2021 et le 14 décembre 2022. Elle aurait ainsi dû reporter l’effet de la résiliation de l’engagement à une date ultérieure, selon toute vraisemblance au 30 septembre 2023.

Son droit d’être entendue avait été violé à plusieurs titres et il appartenait à la chambre administrative de régulariser la situation. D’une part, elle n’avait pas pu assister personnellement aux auditions de G______ et de
Q______, soit les deux principales témoins à charge. D’autre part, les témoins figurant dans sa demande complémentaire d’instruction du 14 avril 2022 n’avaient pas été entendus. Elle sollicitait ainsi leur audition devant la chambre administrative, de même que celle d’V______ et T______, et la ré-audition de R______.

Le principe de l’égalité des armes avait été violé, les enquêteurs ayant disposé de trois mois pour rédiger leur rapport alors qu’elle n’avait eu moins de 50 jours pour se déterminer à ce sujet. Les enquêteurs avaient fait montre de partialité et s’étaient uniquement fondés sur les procès-verbaux d’audition, sans tenir compte des pièces versées au dossier, dont beaucoup contredisaient les propos tenus par les témoins. Le rapport d’enquête était arbitraire et n’était qu’un « copier-coller » des procès-verbaux d’audition. Il contenait en outre de nombreuses erreurs.

Contrairement à ce qu’avait retenu ledit document, ses évaluations n’étaient pas simplement bonnes, mais excellentes. L’absence d’entretien périodique durant une dizaine d’années démontrait qu’elle avait dû définir ses propres objectifs et se fier à ses aptitudes et à sa rigueur. L’ancien directeur du B______, I______, avait assuré l’intérim avant l’entrée en fonction de G______, mais il n’avait pas été entendu. L’intimée était alors satisfaite de son autonomie, que
G______ n’avait eu de cesse de lui reprocher en 2020. Le rapport ne précisait pas les raisons des « désaccords » concernant le contenu du nouveau cahier des charges, qu’elle était en droit de discuter. Elle n’avait pas contesté l’avertissement en raison de la médiation qui était alors en cours. Le B______ et les RH avaient traité sa situation avec désintérêt et légèreté, sans rien entreprendre durant six mois avant que le Groupe de confiance ne se saisisse de l’affaire, alors que la situation était « pourrie » selon les termes de J______. Le seul processus mis en œuvre pour tenter de résoudre le conflit était la médiation qu’elle avait proposée. Aucune aide ne lui avait été apportée par les RH ou la direction du département.

Elle avait contesté son évaluation défavorable, ce qui était son droit et ne pouvait être considéré comme un « refus obstiné de toute instruction ou supervision ». Il en allait de même de son refus de signer son cahier des charges.

Aucun des manquements qui lui étaient reprochés ne s’était avéré réalisé.

Elle avait sollicité le report de son premier entretien d’évaluation car la personne en charge de la formation portant sur ces entretiens lui avait indiqué qu’il ne pouvait y en avoir en cas de conflit. En outre, un entretien in absentia ne pouvait se faire. Lors de la discussion orale précédant la remise de l’évaluation écrite du second entretien, G______ ne lui avait pas indiqué que la fin de la collaboration était envisagée. Si tel avait été le cas, sa supérieure aurait dû être accompagnée par un collaborateur des RH, et H______ en aurait été informé.

Depuis qu’elle avait signalé que le mari de G______ avait régulièrement participé à des séances de groupe, dirigé et organisé le travail des collaborateurs, des tensions étaient apparues avec sa responsable hiérarchique. Le même scénario s’était produit avec U______, qui avait été licenciée après avoir averti ses supérieurs du travail mené par l’époux de G______. Les enquêteurs ne s’étaient pas intéressés à ces éléments, pourtant de nature à expliquer la volonté de l’évincer. Ils ne les avaient même pas évoqués dans leur rapport et n’avaient pas entendu U______. En outre, de nombreux événements que G______ considérait comme des « refus d’ordre » résultaient en réalité d’une mauvaise compréhension de prétendues instructions qui manquaient de clarté. Les enquêteurs n’avaient pas relevé le ton blessant du courriel de la supérieure, envoyé dans la nuit du 12 mars 2019.

La décision entreprise était arbitraire, illégale et ne respectait pas le principe de proportionnalité. Elle devait être annulée et sa réintégration ordonnée. Un refus de l’intimée serait inopportun, puisque G______ et J______ avaient quitté leurs fonctions.

b. Par réponse du 6 avril 2023, l’intimée a conclu au rejet du recours.

Dans un souci de protection de la personnalité et de la confidentialité, elle ne produirait pas les documents concernant d’autres employés. Le cas de la recourante était au demeurant différent de celui d’U______ et les courriels de R______ étaient postérieurs au départ de G______.

Le fait que le droit aux vacances doive être épuisé durant une suspension provisoire ne constituait pas un motif de nullité ou d’annulabilité de la décision. Sa pratique, consistant à informer l’employé qu’il devait épuiser son éventuel droit aux vacances durant la suspension, avait été régulièrement confirmée par la chambre administrative.

Le droit d’être entendue de la recourante avait été respecté. Son avocat l’avait en effet représentée ou assistée à toutes les audiences d’enquêtes et elle avait été entendue à quatre reprises. Le droit d’être entendue ne comprenait en outre pas l’obligation d’entendre des témoins. Les auditions requises devant la chambre administrative n’étaient pas pertinentes pour l’établissement des faits.

S’agissant du grief tiré de l’égalité des armes, la recourante avait disposé d’un laps de temps suffisant pour déposer ses observations, étant précisé qu’elle n’avait pas sollicité de délai supplémentaire.

Le rapport d’enquête était fondé tant sur les pièces versées au dossier que sur les déclarations des différents témoins. Le raisonnement de la recourante se résumait à substituer sa propre appréciation à celle des enquêteurs.

L’ensemble des éléments qui étaient reprochés à la recourante rendait objectivement impossible la continuation des rapports de service. Le rapport d’enquête soulignait une profonde atteinte du lien de confiance entre l’intéressée et sa supérieure et entre l’intéressée et sa hiérarchie jusqu’à son plus haut niveau. Elle n’avait donc pas d’autre choix que de résilier son engagement.

Si le licenciement devait être annulé par la chambre administrative, la réintégration de la recourante serait tout simplement impossible, compte tenu du comportement inacceptable de celle-ci, comportement qui avait conduit à une rupture irrémédiable du lien de confiance entre elle et l’employeur. S’agissant de l’éventuelle indemnité à fixer, il conviendrait de tenir compte du fait que les manquements reprochés étaient d’une gravité particulière, que la recourante était âgée de 55 ans, qu’elle était titulaire d’une licence en histoire de l’art, d’un master en muséologie et d’un master of Arts, et qu’elle disposait d’une grande expérience, ce qui devrait lui permettre de retrouver un emploi. Ainsi, seule l’indemnité minimale prévue par le SPVG pourrait lui être accordée.

Enfin, les reproches de la recourante quant à une prétendue violation des droits de sa personnalité étaient dénués de tout fondement.

En fonction des témoins qui pourraient être entendus par la chambre administrative, elle se réservait le droit de solliciter les comparutions de G______ et Q______.

c. La recourante a répliqué le 31 mai 2023 et persisté dans ses conclusions. Il était illégal d’exiger d’une personne malade de prendre des vacances, de sorte que la décision était nulle.

Elle a maintenu ses demandes d’instruction et contesté les reproches formulés par l’intimée. Plus de la moitié du secteur des « D______» s’était adressée au Groupe de confiance en raison des dysfonctionnements d’ordre managérial de
G______. C’était à cette dernière qu’il convenait de reprocher un manque total d’organisation et des difficultés de collaboration et de communication.

d. Le 7 juillet 2023, la chambre de céans a procédé à une audience de comparution personnelle des parties.

L’intimée a précisé que sa pratique, consistant à demander à l’employé de prendre ses vacances durant la libération de l’obligation de travailler suite à un licenciement, s’appliquait également lorsque le collaborateur était en incapacité de travail durant toute cette période.

La recourante a maintenu sa demande d’apport des entretiens d’évaluation
d’U______, dont le témoignage était indispensable dans la mesure où il attestait d’un schéma récurrent de G______ dans sa gouvernance.
U______ avait constaté des éléments inquiétants qu’elle avait signalés, en particulier la présence du mari de G______, ce qui s’était ressenti dans ses évaluations. La chambre administrative pourrait apprécier seule ces pièces sans qu’elles ne lui soient transmises.

Le grief de partialité des enquêteurs se fondait sur plusieurs arguments. En premier lieu, l’absence d’audition de T______, convoquée par les enquêteurs, qui n’y avait pas donné de suite de « manière agressive ». Or, son témoignage était primordial, puisqu’elle s’était occupée de la problématique lorsque le B______ en avait été dessaisi. Deuxièmement, elle avait travaillé sous la direction de
I______ pendant une dizaine d’années. Il s’agissait d’un témoin direct de la qualité de son travail et de ses relations avec les collègues. Il était incompréhensible que les enquêteurs aient préféré auditionner le directeur actuel du B______ qui n’avait traité avec elle qu’à deux reprises. Les enquêteurs avaient également refusé d’entendre les signataires de la lettre de soutien, alors que ces personnes auraient pu témoigner sur la qualité de ses prestations, que ce soit au niveau transversal ou interne. Enfin, les enquêteurs avaient fait référence à des passages tronqués des témoignages et n’avaient pas réagi face au témoignage de G______, qui n’avait pas signalé des éléments importants ressortant de celui de R______.

L’intimée a rappelé que l’enquête administrative ne portait pas sur les connaissances professionnelles de la recourante. L’audition de I______ n’était pas pertinente, dans la mesure où il ne s’occupait pas de l’opérationnel et de l’évaluation de la recourante. Il n’était pas capable d’apprécier si elle répondait aux attentes de sa hiérarchie, étant précisé qu’avant l’arrivée de G______, l’équipe des « D______» fonctionnait de manière autonome et sous la hiérarchie d’une conservatrice en chef qui n’assumait pas son rôle de management. Le témoignage de T______ n’aurait rien apporté car elle n’était pas non plus dans l’opérationnel et ne pouvait pas se positionner sur les attentes et objectifs fixés par G______. Les enquêteurs pouvaient ainsi, par appréciation anticipée de preuves, renoncer à ces auditions. S’agissant des signataires de la lettre, il n’avait jamais été reproché à la recourante d’avoir failli à maintenir de bonnes relations dans ses rapports transversaux. Ces éléments sortaient dès lors du cadre de l’enquête. Enfin, la recourante n’avait jamais sollicité la récusation des enquêteurs.

Selon l’intimée, les enquêteurs avaient retenu que la recourante avait tenu des propos irrespectueux envers ses supérieurs après le 4 juin 2020. Elle s’en rapportait au rapport d’enquête sur ce point. Elle a rappelé que lors du deuxième entretien périodique, la recourante avait inscrit des propos inadéquats, laissant entendre que le déroulement de l’évaluation de 2020 serait illicite.

La recourante a contesté avoir tenu des propos inappropriés postérieurement au
4 juin 2020. Lors de l’entretien d’évaluation du 2020 avec G______, cette dernière ne lui avait pas indiqué qu’elle ne voulait plus travailler avec elle. Elle l’avait appris à réception du procès-verbal de l’entretien d’évaluation.

Lors du confinement, la tâche principale qui lui avait été attribuée par sa responsable consistait à corriger les fiches sur la base de données. Or, durant le premier mois du confinement, elle n’avait pas les accès VPN lui permettant de le faire. Elle avait ainsi proposé à sa supérieure de travailler sur une exposition historique. G______ avait refusé cette proposition et lui avait demandé de corriger les fiches sur les versions papier. Elle avait toutefois « refusé » de faire ce travail car il était inutile. Elle avait donc concentré son activité sur une autre tâche confiée par sa cheffe, à savoir la rédaction d’articles sur le blog. Elle en avait rédigé quatre durant cette période, mais ceux-ci n’avaient pu être publiés qu’en décembre 2020 en raison de la surcharge du site de la communication. Elle avait suivi les instructions de la hiérarchie quant au télétravail. Elle partageait son bureau avec P______ qui, compte tenu de son âge, était à risque. Elles avaient convenu qu’elle lui laisserait l’accès au bureau pour qu’elle puisse préparer sa retraite. Elle pensait même qu’il s’agissait d’une demande de G______. Elle contestait l’évaluation de cette dernière quant au travail réalisé pendant le confinement. Elle avait travaillé durant toute la période.

Elle n’avait jamais fait de bilan durant cette période, étant précisé qu’elles étaient en désaccord sur le travail demandé et que celui-ci lui paraissait impossible. Elle avait toutefois envoyé à sa supérieure les blogs qu’elle avait rédigés, deux à son souvenir, et avait toujours été réactive sur le groupe WhatsApp des « D______». Selon elle, la rédaction d’un blog nécessitait en moyenne sept jours de travail et non quatre. G______ avait distribué le travail de manière très différente parmi les collaboratrices et elle était la seule à n’avoir pas reçu un travail adapté à la situation de confinement. R______ avait également refusé de corriger les fiches manuscrites et travaillait en parallèle pour une exposition sur le W______. G______ ne souhaitait pas donner à Q______ des fiches à corriger durant cette période et l’avait autorisée à travailler sur son mémoire.

Les trois autres collaboratrices avaient signé leur cahier des charges, malgré leurs réticences, pour des raisons ayant trait à une procédure de réévaluation de fonction, à une négociation pour un autre poste et à un cahier des charges devenu obsolète. Elle n’avait finalement pas entamé de procédure devant le Conseil administratif pour contester ce document.

Elle avait participé au second entretien périodique en 2020. Pour le premier, en 2019, elle avait demandé des reports à deux reprises : le premier avait été accepté, mais le second n’avait reçu aucune réponse.

Le conseil de la recourante a considéré que les objectifs fixés en novembre 2019 n’avaient pas respecté le processus d’évaluation et le principe contradictoire, de sorte qu’ils étaient nuls. Sa cliente était présente au travail lorsque
G______ avait rédigé cette évaluation, mais la cheffe n’avait pas pris la peine de lui en parler. Quant à la deuxième évaluation de novembre 2020, elle fixait des délais, mais la hiérarchie n’avait pas laissé le temps à la recourante de les réaliser et cette dernière était tombée malade un mois après, puis l’enquête administrative avait été ordonnée. De plus, un conflit était pendant devant le Groupe de confiance lors de ces deux évaluations, la hiérarchie n’avait pas convoqué un membre des RH dans ce cadre.

Il avait appris que le dernier entretien d’évaluation de R______ effectué par G______ avait été déclaré nul.

L’intimée a relevé que le conflit entre la recourante et sa responsable n’excluait pas une évaluation. Il appartenait à la supérieure de fixer les objectifs, le cas échéant en discutant avec l’employée, mais discussion ne signifiait pas « écriture à quatre mains ». La rédaction d’une évaluation in absentia avait été rendue nécessaire car la recourante avait décidé « de mettre le dos au mur ». La décision de rédiger seule l’évaluation avait été prise en accord avec la hiérarchie de G______. Quant aux délais fixés dans la seconde évaluation, il est vrai que l’enquête administrative avait été mise en œuvre avant leur échéance. Compte tenu des circonstances, la direction du département avait souhaité une autre tournure à la situation de la recourante.

La recourante a indiqué avoir toujours annoncé les projets sur lesquels elle avait travaillé et contesté avoir refusé de participer à certaines réunions, précisant qu’il s’agissait de séances en lien avec la refonte d’une partie sur l’art ancien pour lequel le B______ disposait de trois spécialistes, alors qu’elle était spécialisée en art moderne et contemporain. Elle avait donc demandé à G______ de lui attribuer d’autres tâches plus utiles. Sa supérieure lui avait répondu qu’elle ne comprenait pas sa position et qu’il n’y avait plus de spécificités scientifiques, mais avait été d’accord qu’elle se retire de ce projet.

Sur question de l’intimée, elle a exposé, s’agissant de ses recherches sur « O______ » qu’elle avait pris rendez-vous aux archives de la Ville de Genève durant l’été 2019 afin d’évaluer s’il y avait matière pour faire une recherche, sans avoir demandé la permission, mais cela faisait partie de son travail. Elle avait alors du temps à consacrer à ce projet durant ses horaires de travail.

e. Le 9 octobre 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 ‑
LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l’intimée du
14 décembre 2022, par laquelle elle a résilié les rapports de service de la recourante pour motif objectivement fondé en raison d’une insuffisance de prestations et de manquements graves et répétés aux devoirs de service.

3.             La recourante sollicite à titre préalable les auditions de I______, X______, Y______, Z______, AA______, AB______, AC______, AD______, AE______, AF______, AG______, U______, T______ et R______. Elle requiert également la production des rapports des deux entretiens périodiques d’U______ et de certains courriels envoyés par R______.

De plus, dans un grief d’ordre formel, elle invoque une violation de son droit d’être entendue, les enquêteurs ayant refusé de procéder à certaines de ces auditions.

3.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 146 IV 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_27/2021 du 3 août 2021 consid. 6.2.1 et les références ; ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5a et les références citées).

Il n’empêche toutefois pas l’autorité de mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l’amener à modifier son opinion
(ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2022 du
20 avril 2023 consid. 3.1 et les références). En outre, il n’implique pas le droit d’être entendu oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 134 I 140
consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

La réparation d’un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d’être entendu, n’est possible que lorsque l’autorité dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure en fait et en droit (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1).

3.2 En l’espèce, les actes d’instruction ne sont pas nécessaires pour trancher le litige et le sort du grief de violation du droit d’être entendue peut rester indécis, pour les motifs qui seront exposés ci-après.

4.             La recourante soutient que la décision de résiliation est nulle, son droit aux vacances entre le 30 juin 2021 et le 14 décembre 2022 n’ayant pas été pris en considération.

L’existence d’un éventuel solde du droit aux vacances n’a aucune influence sur la validité d’un licenciement.

Pour le surplus, la chambre de céans se limitera à relever que la résiliation n’est pas intervenue en temps inopportun (art. 36 al. 2 et 57 SPVG), ce qui aurait constitué un motif de nullité de la décision entreprise conformément à l’art. 336c al. 2 de la loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le Code civil suisse (CO - RS 220), applicable par analogie après le temps d’essai (art. 36 al. 1 SPVG). La recourante ne soutient d’ailleurs pas que son congé aurait été notifié pendant une période de protection.

5.             La recourante conteste le bien-fondé de la résiliation de ses rapports de travail.

5.1 Conformément à l’art. 34 SPVG, après la période d’essai, un employé peut être licencié, par décision motivée du Conseil administratif, pour motif objectivement fondé pour la fin d’un mois, moyennant un délai de préavis de six mois dès la onzième année de service (al. 1 let. c). Le licenciement est contraire au droit s’il est abusif au sens de l’art. 336 CO ou s’il ne repose pas sur un motif objectivement fondé. Est considéré comme objectivement fondé tout motif dûment constaté démontrant que les rapports de service ne peuvent pas se poursuivre, notamment (al. 2) : en raison de l’insuffisance des prestations (let. a) ; d’un manquement grave ou répété aux devoirs de service (let. b).

5.2 En vertu de l’art. 82 SPVG, les membres du personnel sont tenus au respect des intérêts de la Ville de Genève et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice.

L’art. 83 SPVG prévoit que les membres du personnel doivent notamment, par leur attitude, entretenir des relations dignes et respectueuses avec leurs collègues, leurs supérieures et supérieurs et leurs subordonnées et subordonnés et faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a), justifier et renforcer la considération et la confiance dont le personnel de la Ville de Genève doit être l’objet (let. c).

Selon l’art. 84 SPVG, ils doivent notamment remplir leurs devoirs de fonction consciencieusement et avec diligence (let. a), assumer personnellement leur travail et s’abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail (let. c), s’entraider et se suppléer, notamment en cas de maladie ou de congés
(let. d), se conformer aux règlements et directives les concernant (let. f), se conformer aux instructions de leurs supérieures et supérieurs et en exécuter les ordres avec conscience et discernement (let. g).

6.             En l’espèce, il n’est pas contesté que le délai de congé de six mois a été respecté.

La décision querellée reprend les quatre griefs retenus par les enquêteurs, soit un « comportement inapproprié et irrespectueux », la « remise en question de la hiérarchie et refus d’ordre », les « prestations insuffisantes » et les « difficultés de collaboration et absence de communication », étant rappelé que le reproche relatif aux « horaires de travail non respectés » n’a pas été considéré comme avéré par les enquêteurs.

6.1 La chambre de céans relève à titre liminaire que les enquêteurs se sont souvent rapportés de façon vague « au dossier » et à « plusieurs emails », et ont cité des échanges de façon incomplète, sans se référer à des pièces précises de leur volumineux dossier composé de trois classeurs fédéraux, ce qui rend très laborieux l’examen de leur rapport. Cet exercice est encore entravé par le fait que certains échanges de courriels ont été reproduits dans la partie 2 des pièces (« Correspondance »), d’autres dans la partie 4 (« Procès-verbaux d’auditions », sans toutefois avoir été mentionnés dans le bordereau y relatif), d’autres encore dans la partie 7 (« Documents remis par la DRH et le Service », certains dans la
sous-section « Correspondance diverse » et d’autres dans la sous-section « Evaluations/Sanctions »).

Elle constate ensuite que les conclusions intermédiaires du rapport correspondent pour l’essentiel aux déclarations à charge des témoins et que les justifications de la recourante ont été systématiquement écartées, de même que les explications des témoins qui lui étaient favorables. On rappellera à ce propos que les demandes d’audition de témoins de la recourante ont été rejetées et qu’elle n’a jamais pu être directement confrontée à G______, laquelle a été entendue en 2021 uniquement, soit lorsque la recourante était en arrêt maladie et représentée par son conseil. Or, les enquêteurs n’ont que très rarement justifié la version retenue, que ce soit en discutant les positions divergentes des personnes impliquées ou en se fondant sur des documents du dossier.

De plus, le rapport d’enquête comporte plusieurs imprécisions, incohérences, voire contradictions, et certaines circonstances n’ont pas du tout été abordées. Ainsi, aucune information ne transparaît quant à l’intervention du Groupe de confiance, semble-t-il en 2019 - début 2020, et qui concernait toute l’équipe des
« D______», d’après le courrier du 11 mai 2020 de H______. Ce dernier y a mentionné que l’existence de harcèlement n’avait pas pu être mise en évidence, mais aucune explication ne lui a été demandée à ce propos par les enquêteurs. De même, ces derniers n’ont pas du tout instruit le dossier concernant les allégations de la recourante, aux termes desquelles elle avait dénoncé l’implication de l’époux de G______, ce qui aurait conduit au prononcé d’une sanction à l’encontre de sa supérieure hiérarchique. Ils n’ont ainsi pas examiné les différents reproches à la lumière du contexte professionnel de la recourante.

Enfin, les enquêteurs n’ont pas tenu compte, dans leur évaluation, du courrier de soutien signé par de nombreux membres du personnel du B______ et ont refusé de procéder aux auditions sollicitées par la recourante, dont celles de deux membres du Groupe de confiance. À cet égard, la chambre de céans relèvera que, contrairement à ce qui a été déclaré par l’intimée lors de l’audience de comparution personnelle, il a été reproché à la recourante d’avoir failli au maintien de bonnes relations dans ses « rapports transversaux », comme cela ressort de la décision litigieuse.

6.2 Il convient désormais d’examiner les différents manquements retenus dans le rapport d’enquête, soit en premier lieu l’existence d’un « comportement inapproprié et irrespectueux ».

6.2.1 S’agissant du comportement de la recourante à l’égard de
G______, les enquêteurs ont considéré que la collaboratrice avait largement « alimenté le conflit » l’opposant à sa supérieure et que son attitude n’avait « semble-t-il » pas évolué en dépit de la sanction prononcée. Ils ont ensuite relevé que l’enquête n’avait pas permis d’établir que l’employée se soit adressée à sa supérieure hiérarchique de manière irrespectueuse lors d’événements qui n’étaient pas couverts par l’avertissement du 4 juin 2020 et que, par conséquent, ce grief n’était pas retenu. Ils ont cependant encore ajouté que, selon
H______, « en dépit de la sanction prononcée, » l’attitude de la recourante « n’a semble-t-il pas évolué, ce qui a été confirmé lors de l’entretien » du 10 décembre 2020. Leur conclusion intermédiaire, selon laquelle la recourante avait manqué à ses devoirs de service en raison de son comportement inapproprié et irrespectueux à l’égard de sa hiérarchie, apparaît ainsi d’emblée incohérente.

Ce manquement n’est d’ailleurs pas établi. En effet, la supérieure hiérarchique a déclaré aux enquêteurs qu’elle avait ressenti de la « violence dans les propos tenus » par la recourante lors de leurs échanges de courriels des « 23 octobre »,
« 29 octobre » et « 30 octobre », ainsi que dans les mails envoyés après celui du « 12 mars, à 03h06 ». Le rapport ne précise pas l’année de ces messages, mais l’examen des pièces permet de conclure qu’il s’agit des courriels envoyés en octobre 2019 en vue du premier entretien périodique et des échanges de mars 2020 qui ont justifié l’intervention de H______ le 6 avril 2020. Ces faits sont donc couverts par l’avertissement du 4 juin 2020. Pour le reste, les déclarations de G______ telles que consignées dans cette partie du rapport ne font pas état d’autres comportements ou propos qu’elle aurait considérés comme inadéquats après le prononcé de la sanction disciplinaire.

Quant à l’appréciation de H______, selon laquelle il avait constaté le 10 décembre 2020 qu’il y avait « peu de changement » dans le comportement de la recourante, qui n’était pas « disposée à contribuer à la réalisation de ces objectifs », elle n’est étayée par aucune pièce ni même illustrée par un exemple faisant état d’une attitude indigne ou irrespectueuse. Elle concerne par ailleurs davantage les griefs de « remise en question de la hiérarchie et refus d’ordre », de « difficultés de collaboration et absence de communication », voire d’« insuffisance de prestations ». Mais surtout, cette entrevue de décembre 2020 faisait suite à la réception par la recourante du formulaire relatif à l’entretien périodique, document par lequel elle a appris que sa responsable estimait qu’il était impossible de poursuivre la collaboration, ce qui revenait à demander son licenciement ou son transfert, en dépit de la médiation qualifiée de « constructive ». Ceci permet d’expliquer les longues observations et contestations de la recourante.

Il n’est donc pas établi que la recourante a adopté un comportement inapproprié et irrespectueux à l’égard de G______ postérieurement au prononcé de l’avertissement.

6.2.2 S’agissant ensuite des relations entre la recourante et ses collègues, force est de retenir que celles-ci ne sont pas étayées. Les enquêteurs ont d’ailleurs indiqué qu’il n’était pas non plus « parfaitement clair » que la recourante ait entretenu des « relations véritablement difficiles » avec ses collègues, à l’exception de sa supérieure, et qu’il leur avait été difficile d’identifier la part de responsabilité de la recourante dans les « conflits ». On peine ainsi à comprendre pourquoi ce grief a néanmoins été retenu.

S’ajoute à cela que les enquêteurs n’ont pas relevé que les déclarations de
G______, qui a affirmé que la recourante entretenait des relations « compliquées » avec AH______, P______ et Q______, avaient été contredites par les auditions, en particulier celles de P______ et de R______. La première a déclaré que la recourante n’avait pas eu « de litige avec les autres membres de l’équipe », mais que la relation était « tendue » entre, d’une part, G______, et d’autre part, la recourante et R______, ajoutant qu’il fallait « être deux parties pour générer un conflit ». Elle a décrit la recourante comme une « collègue très agréable » qu’elle avait « beaucoup appréciée », « calme et intelligente », avec laquelle elle avait partagé son bureau durant dix ans.  R______ a quant à elle indiqué que la recourante n’avait pas eu « de comportement inadéquat à l’égard d’autres personnes ».
AH______ n’a pas été entendue par les enquêteurs et les autres témoins n’ont cité aucun exemple concret permettant de retenir l’existence de tensions entre la recourante et cette collaboratrice.

Quant à Q______, un seul événement a été évoqué durant l’enquête, soit la séance au cours de laquelle G______ avait suggéré des changements de bureau. La responsable hiérarchique a indiqué aux enquêteurs que la recourante s’était « violemment » opposée à ces mesures et que Q______ s’était sentie « humiliée ». K______, qui n’avait pas assisté à la scène mais en avait néanmoins eu connaissance, a confirmé que Q______ s’était sentie « dévalorisée, maltraitée ». Entendue par les enquêteurs, cette dernière a relevé que la recourante avait refusé la proposition de la supérieure en déclarant qu’il fallait « bien séparer l’administratif du scientifique » et qu’elle s’était sentie « blessée par sa réaction ». Suite à cet incident, leurs rapports étaient devenus « plus distants ». Le témoignage de la principale concernée ne rapporte donc ni propos humiliants, ni réaction violente. De plus, P______, présente lors de l’incident, a précisé que Q______ cherchait alors à faire réévaluer son poste et que c’était « un cumul de choses » qui avait « certainement exacerbé sa sensibilité ». R______, également témoin de la scène, a indiqué que Q______ était « partie en vrille » suite à la remarque de la recourante concernant la praticité de l’aménagement des places de travail et qu’elle n’avait pas ressenti de tentative de dénigrement. Enfin, il sied de souligner que la recourante s’est excusée d’avoir blessé involontairement sa collègue et qu’il s’agit du seul exemple concret cité de façon récurrente pour illustrer un prétendu comportement inapproprié et irrespectueux envers des collègues en plus de dix ans de collaboration.

J______ a déclaré qu’AH______ et Q______ s’étaient plaintes de la recourante et de R______, qui fomentaient « des révoltes contre la hiérarchie », qu’elle avait eu des retours informels de collaboratrices qui estimaient que la recourante s’adressait à elles de manière hautaine. Ceci n’a toutefois pas été confirmé par les témoins, en particulier par Q______. Cette dernière a uniquement rapporté que F______ avait mentionné que la recourante et R______ se prenaient pour « les reines de l’univers », « soit des enfants gâtées », et qu’elle partageait ce sentiment. Cela ne saurait suffire pour retenir l’existence d’un comportement inapproprié et irrespectueux envers ses collègues.

Partant, les enquêteurs ne disposaient pas d’éléments suffisants pour conclure que la recourante aurait adopté un comportement inapproprié ou irrespectueux, tant avec sa supérieure hiérarchique postérieurement à l’avertissement du 4 juin 2020, qu’avec certains de ses collègues.

6.3 Concernant la remise en question de la hiérarchie et le refus d’ordres, les enquêteurs ont considéré que la recourante, à réitérées reprises, ne s’était pas conformée aux instructions données. Dans le cadre du dossier des « prêts externes à long terme », elle estimait qu’il n’appartenait pas à une assistante conservatrice d’assumer une telle mission. De même, durant le confinement, elle avait proposé de mener des recherches sur un projet personnel au lieu de suivre la planification du travail établie par sa supérieure. Ils ont également retenu que le dossier comportait plusieurs courriels dans lesquels la recourante avait remis en question ou discutait les tâches qui lui étaient attribuées, engendrant de longs échanges chronophages avec sa supérieure.

Par ailleurs, elle avait refusé de signer le nouveau cahier des charges, ce qui était un acte « assez grave relevant de l’insubordination et de la résistance au changement » d’après l’administratrice, avis que partageaient les enquêteurs.

Elle avait également refusé de participer à un entretien périodique à deux reprises et de signer les formulaires. Malgré l’absence d’évaluation pendant plusieurs années, les contestations et refus de la recourante n’étaient pas acceptables.

En refusant de considérer les objectifs fixés par sa hiérarchie, l’intéressée ne les avait tout simplement pas remplis, entrainant de ce fait une insuffisance de prestations, « alors même que tous les témoins entendus s’accordaient à dire que l’intéressée avait d’excellentes compétences scientifiques ».

6.3.1 Les enquêteurs ont rappelé les déclarations de G______, laquelle s’est tout d’abord référée au dossier des « prêts externes à long terme » pour illustrer la posture d’insubordination de la recourante. Elle leur avait expliqué qu’elle avait distribué l’ensemble des dossiers en cours dès le début de sa collaboration et que la recourante lui avait indiqué, en février ou mars 2018, qu’elle n’avait pas encore commencé ce travail « car elle attendait l’engagement d’un stagiaire qu’elle lui avait promis ». Elle avait alors expliqué à sa collaboratrice qu’il n’était pas question qu’un stagiaire soit chargé de cette mission au-delà d’un simple support technique et la recourante lui avait répondu qu’« il n’appartenait pas à une assistante conservatrice d’assumer une telle mission ». Q______ a confirmé que A______ et R______ « estimaient qu’elles n’avaient pas à prendre en charge » le dossier des « œuvres en prêt à l’extérieur », travail qui ne correspondait pas à leurs compétences, s’« estimant au-dessus de la mêlée », ajoutant que ce dossier était auparavant « traité par une collaboratrice scientifique ». Entendue sur ce dossier, la recourante n’a pas contesté que ce travail lui avait effectivement été assigné au mois d’octobre 2017 et qu’elle ne l’avait toujours pas réalisé en novembre 2020, alors qu’il faisait clairement partie des objectifs fixés, comme cela ressort du courriel de G______ du 14 mars 2019 et de l’entretien périodique du mois de novembre 2019. Elle a en outre déclaré avoir rappelé que cette activité, qui ne requérait pas de compétences particulières, avait jadis été réalisée par une collaboratrice administrative, ce qui était encore le cas dans le département d’histoire du B______. Il peut donc être tenu pour établi que la recourante a remis en question les consignes de sa supérieure hiérarchique et n’a pas réalisé le travail demandé.

La responsable a ensuite évoqué les tâches assignées pendant le confinement et exposé que la recourante avait « proposé de mener des recherches sur un projet personnel » au lieu de suivre ses instructions, en particulier de s’adonner au nettoyage des fiches. Lors de son audition par-devant la chambre de céans, la recourante a reconnu qu’elle avait refusé de corriger les fiches sur les versions papier, au motif que ce travail était « inutile ». Elle a donc contesté les ordres donnés et refusé de les exécuter. Toutefois, il convient également de rappeler que la recourante a écrit à sa responsable le 29 mars 2020 qu’il était « pratiquement impossible de mener ce travail correctement à terme », faute d’accès à « M+ » et aux ouvrages de la « BAA ». Les enquêteurs n’ayant pas interrogé
G______ sur ces allégations, on ignore si l’employée pouvait réellement effectuer cette tâche sans disposer des outils adéquats. De plus, il peut être tenu pour établi qu’elle s’est exécutée une fois les accès obtenus, soit autour de Pâques, puisqu’elle a indiqué dans son compte rendu d’activité du 5 juin 2020 qu’elle avait travaillé à la correction des fiches dans « M+ », ce qui n’a pas été remis en cause par G______.

Enfin, la responsable a cité un troisième évènement. Elle a indiqué avoir reçu « une fin de non-recevoir en ce qui concernait les objectifs décrits lors des entretiens du 12 novembre 2020 ». Or, cet élément ne ressort pas du rapport d’entretien. Interrogée par les enquêteurs quant à « l’apparente contradiction entre le courriel encourageant du 29 octobre 2020 et l’évaluation négative du 12 novembre 2020 », G______ a répondu avoir « réalisé » que la recourante « n’acceptait pas la poursuite des objectifs » et ne se remettait pas en question. Elle n’a toutefois fourni aucun exemple concret pour étayer ses propos. Or, compte tenu de la proximité temporelle entre le courriel encourageant du 29 octobre 2020 et l’évaluation du 12 novembre 2020, la position de la supérieure est difficilement compréhensible. Pour rappel, dans son courriel du 29 octobre 2020, elle a remercié la recourante pour son « investissement personnel » lors de l’exercice « difficile » de médiation, ajoutant qu’il était temps de « continuer de construire leur relation professionnelle sur de nouvelles bases ». Il est par ailleurs étonnant que
G______ n’ait pas consigné formellement la prétendue opposition de la recourante dans le rapport d’entretien. Une telle mention se justifiait d’autant plus que les relations entre les parties étaient conflictuelles, la recourante ayant déjà été sanctionnée par un avertissement au mois de juin 2020. Il reste qu’en l’état, aucune pièce tangible ne vient confirmer les affirmations de la supérieure hiérarchique.

Les enquêteurs ont également noté que P______ leur avait « confirmé » que la recourante avait refusé « de s’occuper du dossier des œuvres en prêt en déshérence ». Ce dossier n’a toutefois pas été évoqué par G______ et n’est pas non plus mentionné dans les entretiens périodiques de la recourante. Rien ne permet ainsi de retenir qu’il aurait été assigné à la recourante et que cette dernière aurait refusé de s’en charger, étant encore observé que P______ a indiqué avoir dit à sa collègue qu’elle effectuerait cette mission.

Les enquêteurs ont en outre relevé que J______ avait évoqué une « équipe », dont faisait partie la recourante, qui s’était « soudée dans l’opposition contre la direction, la hiérarchie et les RH », qu’il y avait eu des interventions de la part du Groupe de confiance. En l’absence de tout exemple et de toute investigation de la part des enquêteurs, ce témoignage ne permet pas de conclure à une attitude insubordonnée de la part de la recourante.

Enfin, le rapport a retenu que le dossier contenait « plusieurs emails » de la recourante dans lesquels elle remettait en question ou discutait les tâches qui lui étaient attribuées, engendrant de longs échanges qui s’avéraient chronophages pour une supérieure hiérarchique. Il ressort effectivement du dossier que l’employée a envoyé de nombreux courriels dans lesquels elle discutait longuement et contestait certaines tâches, comme cela a été constaté s’agissant du dossier des « prêts externes à long terme » et du nettoyage des fiches. Cela étant, les enquêteurs n’ont pas pris en considération l’ensemble des circonstances, et plus particulièrement le conflit qui opposait la recourante à G______. Il ressort de nombreux messages que l’employée reprochait précisément à sa supérieure de lui confier à dessein de plus en plus d’activités en-dessous de ses qualifications professionnelles et qu’elle n’était pas d’accord avec le contenu de son nouveau cahier des charges, notamment en raison du fait qu’il ne précisait pas les pourcentages dévolus à chaque activité. Elle s’inquiétait donc que sa responsable puisse décider de lui attribuer uniquement des tâches en-dessous de ses compétences. Elle a également indiqué avoir dénoncé G______ en raison de l’ingérence de son époux dans le secteur. Ces allégations sont corroborées par d’autres sources. En effet, il ressort du dossier que, par courriels des 20 et 26 mars 2019, la recourante a signalé une situation difficile et demandé un rendez-vous à S______ en raison d’un conflit ouvert avec sa responsable hiérarchique. Dans un courriel du 29 avril 2019, elle a rappelé à S______ qu’il avait été signifié à G______, au printemps 2018, qu’il n’était pas acceptable qu’elle fasse travailler son mari pour le B______. Or, celui-ci, qui avait accès au serveur du B______, avait été impliqué depuis lors dans la conception de projets du B______. Les collaboratrices des « D______» étaient écartées des projets d’exposition au profit de l’époux de G______. Aucune instruction n’a été menée sur ces points. Les enquêteurs n’ont pas interrogé la responsable hiérarchique, la direction du B______ ou la collaboratrice des RH sur cette dénonciation, qui aurait entraîné le prononcé d’une sanction à l’encontre de G______.

En l’absence de toute investigation sur ces points, les reproches de remise en question de la hiérarchie et de refus d’ordres doivent être relativisés. En l’état, la chambre de céans considère que si les faits établis par le rapport d’enquête permettent de retenir une remise en question de certaines consignes ainsi que l’absence de réalisation de certaines tâches, ils ne permettent pas encore de conclure à un manquement grave ou répété aux devoirs de service.

6.3.2 S’agissant du refus de signer le cahier des charges, J______ a considéré qu’il s’agissait d’un acte grave d’insubordination.

Il sied toutefois de garder à l’esprit que toutes les personnes auditionnées ont déclaré que le refus de signer un cahier des charges n’avait aucune conséquence pratique. On rappellera également que les enquêteurs n’ont pas tenu compte du contexte professionnel évoqué ci-dessus, à savoir que la recourante estimait que sa responsable hiérarchique lui assignait volontairement des tâches moins intéressantes et qu’elle s’inquiétait que son nouveau cahier des charges ne mentionne pas le pourcentage dévolu aux différentes activités. Enfin, il convient également de rappeler que les autres assistantes conservatrices ont, dans un premier temps, adopté la même position, estimant que la version élaborée en 2010 ne reflétait pas la réalité de leurs tâches et leur était moins favorable que la précédente. K______ a d’ailleurs évoqué un « refus général de ce cahier des
charges » et R______ a expliqué l’avoir finalement signé « à regret » en 2018 car elle avait sollicité une évaluation de fonction, ce qui impliquait qu’elle signe ce document.

Dans ces conditions, la chambre administrative est d’avis que ce fait ne saurait être qualifié d’« acte grave d’insubordination » et ne justifie en tout cas pas le prononcé de la décision litigieuse.

6.3.3 S’agissant des entretiens d’évaluation, les enquêteurs ont mentionné, à tort, que la recourante avait refusé d’y participer à deux reprises, alors qu’elle était présente à celui de 2020.

Quant à l’entretien de 2019, les enquêteurs ont à nouveau retenu la version de la supérieure hiérarchique, à savoir que la recourante avait « refusé » d’y participer, en écartant les explications de l’intéressée, sans aucun examen des pièces du dossier. Il ressort d’un courriel du 23 octobre 2019 que l’employée a indiqué à sa responsable qu’elle pensait qu’il était nécessaire et opportun d’attendre la fin du processus de médiation demandée par la hiérarchie pour envisager un entretien périodique. Ce message contredit ainsi le contenu du bilan du 28 novembre 2019, dans lequel G______ a écrit que le report avait été sollicité par la recourante qui voulait discuter du cahier des charges. En outre, la recourante a précisé qu’elle n’avait obtenu aucune réponse de G______ à sa demande de nouveau report, raison pour laquelle elle ne s’était pas présentée à l’entretien, ajoutant encore qu’elle était au bureau lors de l’évaluation in absentia et que sa responsable aurait donc pu l’appeler. Aucune urgence ne justifiait que le bilan soit réalisé le jour même, puisque certaines collègues n’avaient pas encore eu le leur. Or, les enquêteurs n’ont pas du tout interrogé G______ sur ces allégations, qui ressortent en outre clairement du courriel de la recourante du 17 janvier 2020. Ils ne pouvaient donc pas, sans la moindre justification, conclure que l’intéressée avait refusé de participer à l’entretien d’évaluation.

La chambre de céans constatera encore que les enquêteurs ne se sont pas interrogés sur les choix de G______, qui avait décidé de mener l’entretien sans la personne évaluée, alors qu’aucun impératif ne le requérait, et qui n’avait pas requis la présence d’un tiers en dépit des relations déjà très difficiles. À ce propos, il est rappelé que K______ a exposé qu’un entretien in absentia lui semblait « difficilement compatible avec l’esprit même du principe de l’entretien périodique » et que J______ a déclaré qu’il aurait été nécessaire qu’un représentant des RH ou elle-même participe à l’entretien, ajoutant qu’à sa connaissance, c’était la seule fois qu’une évaluation avait été faite in absentia au sein du B______, ce qui a également été mentionné par H______.

Enfin, il ne saurait être reproché à la recourante d’avoir fait valoir ses observations de façon très détaillée suite aux entretiens périodiques, puisqu’elle n’était pas présente lors du premier et qu’elle a appris à réception du formulaire du second les intentions de sa responsable, qui ne correspondaient aucunement aux conclusions de la médiation, qualifiée quelques jours plus tôt de « constructive » et de « nouvelle base » pour la poursuite des rapports de travail.

6.4 Le troisième volet a trait à l’insuffisance de prestations. Les enquêteurs ont relevé que les compétences scientifiques de la recourante n’avaient jamais été remises en question et que leur détermination se fondait sur la période postérieure à l’entrée en fonction de la G______, faute d’entretien périodique préalable. Ils ont retenu que diverses critiques avaient été émises à l’égard de la gestion administrative et financière de divers projets menés par la recourante. Le « projet L______ » avait donné lieu à d’importantes divergences entre l’employée et sa supérieure, avec des quiproquos constants. L’exposition « AI______ » avait conduit au paroxysme des problèmes tant sur le plan des engagements financiers que des engagements extérieurs, l’employée n’ayant pas suivi les instructions et directives administratives du B______ en la matière, étant toutefois constaté que les engagements financiers et les divers mandats extérieurs avaient finalement été approuvés par la direction. Ils ont fait état d’une certaine carence dans l’encadrement administratif des commissaires et de la recourante en particulier. La hiérarchie a également fait état d’une insuffisance de prestations durant la période de confinement. À l’issue de celle-ci, le travail de la recourante se résumait à la rédaction d’un article de blog et de quelques fiches d’inventaire, alors que les collaborateurs disposaient de tous les accès nécessaires au début du mois d’avril. La recourante était du reste la seule à ne pas avoir effectué le retour hebdomadaire de l’activité déployée à sa supérieure. Enfin, l’intéressée n’avait pas rempli deux des trois objectifs qui lui avaient été fixés lors de son entretien d’évaluation du 12 novembre 2020.

6.4.1 À nouveau, les témoignages rapportés par les enquêteurs apparaissent lacunaires, confus, voire contradictoires, et ceux-ci n’ont pas interrogé
G______ sur les explications données par la recourante.

Concernant le « projet L______ », il ressort du rapport que G______ a expliqué que la recourante avait envoyé son projet le 19 avril 2018, « soit bien après les autres projets, soit deux ou trois mois plus tard » et proposé « des œuvres sur papier ou sur prêt », n’appliquant pas les consignes données. Sur la base de ces déclarations, il n’est toutefois pas possible de comprendre quand le travail aurait dû être rendu, ni s’il devait être terminé en même temps que les « autres projets » mentionnés. La recourante a pour sa part expliqué que sa supérieure avait refusé son projet initial et qu’elle lui avait en conséquence apporté des modifications en septembre 2018. Ainsi, en l’absence d’information quant au travail que la recourante était supposée réaliser, et dans quels délais, il n’est pas possible de retenir l’existence d’un manquement ou d’un retard dans l’exécution du travail.

G______ a ensuite indiqué qu’elle avait reçu le dossier en septembre 2018 et que la recourante, suite aux instructions du directeur, devait prendre contact « avec la médiation ». En janvier 2019, elle avait réalisé qu’elle n’avait toujours rien reçu depuis la séance du 16 octobre 2018 et la recourante lui avait alors déclaré « qu’elle s’attendait à qu’elle prenne contact avec la médiation et qu’elle lui fasse un retour alors que c’était le contraire qui devait être fait ». Ces propos ne sont pas compréhensibles et confortent les déclarations de la recourante, qui a évoqué un malentendu, précisant qu’elle n’avait reçu qu’en février 2019 le document du dossier d’exposition issu du conseil scientifique qui exigeait une concertation avec la médiation, par l’assistante de H______, qu’elle n’avait pas été informée du suivi de ce dossier, étant encore précisé que les assistantes conservatrices ne venaient plus présenter leurs projets au Conseil scientifique. Tous ces désaccords ont fait l’objet de plusieurs échanges de courriels, que les enquêteurs n’ont pas pris la peine d’examiner et de commenter. Ils ne semblent cependant pas avoir retenu l’existence d’une prestation insuffisante en lien avec ce dossier, puisqu’ils ont fait état de « quiproquos constants ». Or, ces derniers ne sauraient être imputés à la recourante exclusivement.

S’agissant des problèmes survenus dans le cadre de l’exposition, « AI______ », il convient de relever le manque de cohérence des enquêteurs qui ont affirmé que le rapport ne portait que sur les éventuels manquements après l’entrée en fonction de G______, alors que cette exposition a débuté en décembre 2016. Cela étant, J______ a indiqué durant son audition que I______ avait validé les choix induits par le dépassement budgétaire, et indiqué que le directeur du B______ n’avait pas voulu prendre de mesures à l’encontre de la recourante. Ces affirmations ressortent en outre des pièces de l’intimée. Les enquêteurs ont ainsi constaté à juste titre que la direction avait approuvé les choix, critiqués, de la recourante et relevé des carences de la part de sa hiérarchie. Aucun manquement ne saurait dès lors être reproché à la recourante dans ce dossier.

G______ a déclaré avoir constaté, à la fin du confinement, que les collaborateurs avaient produit un excellent travail concernant le blog, que le stagiaire avait rédigé son article en trois jours alors que la recourante avait pris deux mois pour un travail similaire. L’employée avait pris beaucoup de temps pour mener ses recherches et écrire un article de blog. La recourante a contesté l’appréciation de la responsable concernant la quantité insuffisante de travail fourni durant cette période, affirmant notamment avoir rédigé quatre articles pour le blog, lesquels n’avaient pu être publiés qu’en décembre 2020 en raison de la surcharge du site de la communication. R______ a précisé qu’après le confinement, elles avaient été amenées à fournir une synthèse de leur activité à leur responsable. Les enquêteurs n’ont pas requis la production de ces documents, qui auraient permis une comparaison rapide et fiable des activités déployées par les collaboratrices des « D______» et d’étayer les reproches formulés à l’encontre de la recourante. Pour le reste, les déclarations de R______, qui a indiqué qu’elle avait prévu cinq articles pour le blog, mais que vu le nombre d’articles produits par leurs collègues, la recourante et elle avaient été « stoppées dans leur élan », corroborent celles de la recourante. Dans ces conditions, le témoignage de G______ ne saurait suffire pour conclure à une insuffisance de prestations durant la période de confinement.

S’agissant enfin de la conclusion des enquêteurs, qui ont noté que la recourante « avait été la seule », selon sa hiérarchie, à ne pas effectuer le « retour hebdomadaire » durant le confinement, elle relève davantage du dernier grief relatif au manque de collaboration et de communication. Cela étant, il peut d’ores et déjà être observé que R______ a indiqué que G______ leur avait demandé de la tenir au courant de l’avancée de leurs travaux, « à son souvenir », entre mars et mai 2020, ce qui remet en cause les affirmations de la supérieure hiérarchique aux termes desquelles elle attendait un compte rendu hebdomadaire.

6.4.2 Le rapport d’enquête indique que G______, interrogée sur l’entretien périodique du 12 novembre 2020, avait répondu qu’elle avait considéré que l’employée avait progressé dans sa communication, puisqu’elle avait accepté de participer à une médiation, mais qu’elle n’avait pas atteint « deux des trois objectifs » fixés. À la phrase suivante, les enquêteurs ont noté que « Trois objectifs se sont révélés non atteints et un partiellement atteint ». Là encore, le rapport apparaît incohérent.

C’est le lieu de rappeler les quatre objectifs fixés dans l’entretien de 2019, soit mettre en ligne des collections (au minimum 20 à 30 fiches par mois selon le travail demandé par objet) jusqu’à la prochaine évaluation ; traiter le « dossier de dépôts à long terme » pour les mois de mai et juin 2020 ; assurer le pilotage du projet de réflexion et d’analyse lié au déménagement des œuvres du dépôt M______ au N______ pour fin mars 2021 ; améliorer sensiblement sa communication et son comportement avec ses collègues jusqu’à la prochaine évaluation, en bannissant les propos méprisants qui blessaient et obligeaient sa supérieure à intervenir, en agissant de manière constructive au cours des séances, en étant une force de propositions réalistes.

Concernant la mise en ligne des collections, la recourante a contesté le décompte de sa supérieure et relevé, dans ses commentaires relatifs au formulaire d’évaluation, qu’en interrogeant directement « M+ », sa responsable ne pouvait avoir que le résultat des fiches que personne d’autre n’avait modifiées après elle et non l’ensemble des fiches sur lesquelles elle était intervenue. Ce point n’a pas du tout été instruit durant l’enquête. Il n’est donc pas possible de tirer des conclusions fiables s’agissant de cet objectif.

S’agissant du « dossier de dépôts à long terme », il a déjà été constaté que la recourante sourcillait à effectuer ce travail.

Il ne peut lui être reproché de ne pas avoir réalisé l’objectif lié au pilotage du déménagement des œuvres, puisqu’il ressort du dossier qu’elle avait un délai à fin mars 2021 pour ce faire.

Enfin, G______ a noté que la recourante avait amélioré sa communication et son comportement avec ses collègues, mais pas avec elle. Cette appréciation manque de substance. Les enquêteurs ne se sont référés à aucun document ou exemples postérieurs à la médiation, confortant les indications de la responsable, aux termes desquelles la recourante ne faisait pas de retour sur son travail ni ne lui donnait d’informations directement.

En définitive, sur les quatre objectifs fixés à la recourante à l’issue du bilan de novembre 2019, un seul pouvait être considéré comme non atteint en
novembre 2020. Par ailleurs, comme déjà souligné, le rapport d’enquête ne tient pas compte du contexte général, en particulier de l’important conflit qui opposait la recourante à sa responsable. Dans ces circonstances, la chambre de céans considère que l’insuffisance de prestations n’est pas établie à satisfaction. Ce d’autant plus que d’autres tâches ont été réalisées par la recourante, ce qui ne ressort même pas du rapport d’enquête. Ainsi, dans son courriel du 14 mars 2019,
G______ a relevé que la recourante s’occupait régulièrement des dossiers des nouvelles acquisitions, et qu’elle assurait les visites et écrivait des textes scientifiques et de vulgarisation, dont elle soulignait la qualité. Les enquêteurs n’ont pas mentionné ces différentes tâches, exécutées à l’entière satisfaction de la hiérarchie, tâches qui ne ressortent pas non plus des rapports d’évaluation.

6.5 Enfin, le dernier grief retenu porte sur les difficultés de collaboration et l’absence de communication. Les enquêteurs ont conclu qu’il était arrivé à la recourante de travailler sur des projets sans en informer sa hiérarchie. Après avoir collaboré avec enthousiasme à des séances portant sur la période contemporaine, elle avait refusé de participer aux réunions portant sur les périodes antérieures, alors que G______ avait insisté sur la transversalité des tâches plutôt que sur les spécialisations de chacune, ce qui paraissait « sain » à certaines collaboratrices. La responsable avait découvert une partie des activités réalisées par l’employée durant les dernières années lorsque celle-ci en avait communiqué une liste après son entretien in absentia. Le comportement « en roue libre » de la recourante était constitutif d’un manque patent de volonté de collaboration.

6.5.1 À nouveau, la chambre de céans constate que les enquêteurs ont tenu pour avérés les faits rapportés par G______, sans que ceux-ci soient attestés par des pièces, et sans qu’ils résultent d’une analyse critique de chaque témoignage.

S’il ressort effectivement du dossier que la recourante a travaillé sur des projets sans en informer G______, notamment sur le projet « 8 artistes
afro-américains », les enquêteurs n’ont cependant pas pris en considération qu’il incombait également à la recourante d’écrire des « textes scientifiques » et de « proposer des projets d’exposition », et que la responsable a reproché à la recourante, dans son bilan de 2019, un manque d’autonomie, de créativité et d’initiative, dès lors qu’une seule proposition de projet personnel d’exposition avait été présentée. À défaut de toute motivation de la part des enquêteurs, on ne peut pas savoir si ce projet « personnel » s’inscrivait ou pas dans le cadre des activités de la recourante.

S’agissant du refus de participer à certaines réunions, G______ a indiqué qu’elle avait « accepté la proposition » de la recourante de se retirer des séances du projet, ce dont les enquêteurs n’ont pas tenu compte.

Enfin, comme déjà mentionné, les enquêteurs n’ont pas examiné ce grief à la lumière du contexte global, en particulier de l’important conflit qui opposait la recourante à sa responsable. Ils n’ont pas non plus tenu compte d’un manque de rigueur certain de la part de G______. Cette dernière a affirmé qu’elle était rarement au courant de ce que faisait la collaboratrice et qu’elle lui en avait fait la remarque à plusieurs reprises, oralement ou par écrit. Or, son témoignage laisse plutôt penser qu’elle s’est désintéressée des activités de la recourante et qu’elle l’a laissée travailler « en roue libre ». Concernant le dossier des « prêts externes à long terme », la supérieure a ainsi indiqué qu’elle avait appris en février - mars 2018 que la recourante n’avait pas commencé ce travail attribué à l’automne 2017. Elle n’a donc sollicité aucun renseignement sur l’avancement de ce dossier durant plusieurs mois. De même, elle a indiqué avoir « réalisé » en janvier 2019 qu’elle n’avait rien reçu depuis la séance du 16 octobre 2018 concernant le « projet L______ ». S’agissant des activités réalisées pendant le confinement, on ne peut que s’étonner que, durant toute cette période, la supérieure hiérarchique n’ait adressé aucun message à la recourante pour lui demander de l’informer sur ses activités, voire de lui envoyer un compte rendu hebdomadaire, ce qui était prétendument requis des autres collaboratrices. On pourra encore relever que R______ a précisé qu’elle remettait à sa supérieure une liste de dossiers sur lesquels elle travaillait tous les deux mois, mais qu’elle ignorait si ses collègues avaient la même méthode. En l’absence d’instructions claires et valables pour l’ensemble de l’équipe, le manque de communication de la recourante ne saurait être constitutif d’un manquement grave et répété.

Enfin, la recourante a sollicité l’audition de plusieurs collaborateurs du B______ œuvrant dans d’autres secteurs, ce qui aurait permis de se rendre compte de son implication dans les projets transversaux et de sa collaboration avec l’ensemble des membres du personnel.

6.5.2 En réalité, les problèmes de communication imputés à la recourante semblent essentiellement liés au conflit qui l’opposait à sa supérieure hiérarchique directe, dont l’origine n’a pas été investiguée par les enquêteurs. Ces derniers ne pouvaient pas considérer que ces difficultés relevaient d’un manquement aux devoirs de service, sans avoir préalablement instruit les propos relatés par la recourante, en particulier sa dénonciation et les conséquences qui en auraient résulté pour G______.

De même, ils ne pouvaient retenir que le comportement de la recourante avait notablement contribué à la dégradation de l’ambiance de travail de l’équipe, alors que leur dossier ne contient aucune information quant à l’intervention du Groupe de confiance. Pour rappel, la recourante a affirmé que plus de la moitié du secteur des « D______» avait saisi ledit Groupe en raison d’un « dysfonctionnement managérial » de G______.

6.6 En conclusion, la chambre de céans ne peut que constater que les faits ont été établis de façon incomplète dans le rapport d’enquête. En l’absence d’appréciation des moyens de preuve et de la prise en considération du contexte précis, il ne peut être retenu, comme le conclut le rapport, que les faits sont établis conformément à l’art. 20 LPA. La décision querellée, laquelle se limite à reprendre les conclusions du rapport, ne remplit a fortiori pas la condition d’un établissement des faits pertinents exact et complet, au sens de l’art. 61 al. 1 let. b LPA.

Sans nier l’importance des difficultés de collaboration entre G______ et la recourante, qui était notamment opposée à la modification de son cahier des charges, ce qui a engendré de nombreux et prolixes courriels quant aux tâches confiées, dont certaines n’ont pas été exécutées, l’enquête administrative ne permet pas de conclure à l’existence d’un motif de licenciement objectivement fondé.

En effet, les reproches relatifs au comportement inapproprié et irrespectueux suite au prononcé de l’avertissement, à l’insuffisance de prestations et aux difficultés de collaboration et de communication ne sont pas établis. Quant au reproche de remise en question de la hiérarchie et de refus d’ordres, en l’occurrence justifié, il ne constitue pas des manquements graves ou répétés aux devoirs de service fondant un licenciement. Ce dernier est donc contraire au droit.

7.             Selon l’art. 105 SPVG, si la chambre administrative de la Cour de justice retient qu’un licenciement est contraire au droit, elle peut proposer au Conseil administratif la réintégration de la personne intéressée. D’un commun accord, les parties peuvent convenir d’un transfert de la personne intéressée dans un poste similaire (al. 1). En cas de refus du Conseil administratif, la chambre administrative de la Cour de justice alloue à la personne intéressée une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à 3 mois et supérieur à 24 mois du dernier traitement brut (al. 2).

Le principe de l’art. 105 SPVG est similaire à l’art. 31 al. 3 et 4 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) sous réserve que l’indemnité minimale selon la LPAC est d’un mois.

7.1 Pour fixer l'indemnité, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas, et de les apprécier sans donner une portée automatiquement prépondérante à certains aspects, comme le fait d'avoir ou non retrouvé un emploi en cours de procédure (ATA/879/2023 du 22 août 2023 consid. 2 ; ATA/274/2015 du
17 mars 2015 consid. 9b ; ATA/744/2014 du 23 septembre 2014 consid. 4b et les références citées). Cette jurisprudence a été confirmée par le Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 8C_472/2014 du 3 septembre 2015 consid. 11.2 ; 8C_421/2014 du 17 août 2015 consid. 3.4.2 ; 8C_436-437/2014 du 16 juillet 2015 consid. 9.2).

La chambre administrative a pour pratique de fixer l'indemnité pour refus de réintégration à un certain nombre de mois du dernier traitement brut de l'employé, conformément à l'art. 31 al. 4 LPAC (ATA/879/2023 du 22 août 2023 consid. 2 ; ATA/1042/2016 du 13 décembre 2016 consid. 13c ; ATA/258/2014 du
15 avril 2014 consid. 7). L'indemnité fondée sur cette disposition comprend le treizième salaire au prorata du nombre de mois fixés et n'est pas soumise à la déduction des cotisations sociales (ATA/1042/2016 précité consid. 13c ; ATA/590/2016 du 12 juillet 2016 consid. 17). En l'absence de conclusion sur ce point, les intérêts moratoires n'y sont pas additionnés (art. 69 al. 1 LPA ; ATA/879/2023 du 22 août 2023 consid. 2 ; ATA/273/2015 du 17 mars 2015
consid. 17c ; ATA/193/2014 du 1er avril 2014 consid. 17).

7.2 Dans une cause dans laquelle le licenciement avait été prononcé en l’absence de motifs fondés, la chambre administrative a notamment tenu compte de l’absence de tout reproche envers la recourante pendant près de quatre ans à compter de son engagement, de l’atteinte de longue durée à sa santé liée aux conditions de travail, de l’attitude déplacée de la collaboratrice, pouvant toutefois s’expliquer par l’attitude peu constructive et peu compréhensive de la part de sa hiérarchie, de l’absence de cohérence et d’empathie de la part de la nouvelle hiérarchie de l’intéressée face au contexte professionnel global, de l’absence de mesures prises par la hiérarchie afin de permettre à la collaboratrice de pouvoir maintenir son employabilité après sa longue maladie, de la durée des rapports de service de sept ans, du refus de réintégration, de la violation grave commise par l’autorité intimée en prononçant un licenciement en l’absence de motifs fondés et des conséquences sur les perspectives professionnelles futures de la collaboratrice, âgée de
45 ans. Elle a ainsi arrêté l’indemnité à douze mois (ATA/347/2016 du 26 avril 2016 consid. 11d). Cet arrêt n’a pas fait l’objet d’un recours auprès du Tribunal fédéral.

Dans le cas d’une résiliation des rapports de service contraire au droit, la chambre administrative a fixé le montant de l’indemnité à 21 mois de traitement, en tenant compte du caractère matériellement infondé du licenciement du recourant pour insuffisance de ses prestations et pour disparition durable d’un motif d’engagement, de la longueur des procédures, de plus de deux ans, de l’investissement du recourant dans son travail, de la qualité de son travail, du fait qu’il était au service de l’État de Genève depuis 40 ans au moment de son licenciement, du fait que l’autorité intimée l’a suspendu, l’a libéré de son obligation de travailler et a déclaré le licenciement exécutoire nonobstant recours, de l’absence de suite à sa demande « d’aide » dans une situation personnelle difficile, des incapacités de travail du recourant, auxquelles les procédures menées à son encontre avaient contribué, et le fait qu’âgé de 62 ans, il aurait vraisemblablement de grandes difficultés à retrouver du travail même s’il devait récupérer une capacité de travail suite à la fin de la procédure et de l’existence de quatre griefs partiellement fondés à son encontre (ATA/589/2018 du 12 juin 2018 consid. 31 confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 8C_547/2018 du 14 juin 2019 consid. 10.2).

Neuf mois ont été accordés à un fonctionnaire pour lequel il avait été tenu notamment compte du caractère matériellement infondé du licenciement pour insuffisance de ses prestations et pour inaptitude à remplir les exigences du poste, du contexte difficile dans lequel se trouvait le service, du comportement isolé, des excellentes compétences métier, son investissement, ainsi que son sens de l'initiative relevés dans ses différents entretiens d’évaluation ; du fait que le Conseil d'État l’avait libéré de son obligation de travailler et avait déclaré le licenciement exécutoire nonobstant recours, que l’intéressé n’avait pas retrouvé d'emploi, de son âge (49 ans) et de ses années de service au sein de l'État (presque dix ans) ainsi que de l’existence de six reproches fondés ou partiellement fondés à l’encontre du recourant (ATA/1176/2018 du 6 novembre 2018 consid. 26 confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 8C_15/2019 du 3 août 2020).

Récemment, la chambre de céans a octroyé six mois à un fonctionnaire en tenant compte en particulier de la durée des rapports de service, de trois ans, du fait que le travail fourni par le recourant avait donné entière satisfaction, du résultat de l’enquête administrative et de sa mise à l’écart lors des premières auditions, du retrait de l’effet suspensif à la décision de révocation immédiate, du caractère infamant de la sanction prise par les intimés et de la reprise d’une activité un mois après la décision entreprise (ATA/587/2023 du 6 juin 2023 consid. 5.3).

Plus récemment encore, elle a fixé à huit mois l’indemnité d’un médecin qui avait retrouvé un emploi dans un État étranger cinq mois après la décision entreprise. Compte tenu de l’ensemble des circonstances, en particulier de la durée des rapports de service, de près de quatre ans, du fait que le travail fourni par le recourant avait donné entière satisfaction, du résultat des enquêtes menées par la chambre administrative, du caractère non fondé du licenciement, du retrait de l’effet suspensif à la décision attaquée et de la reprise d’une activité cinq mois après la décision entreprise (ATA/751/2023 du 11 juillet 2023 consid. 7.5, non définitif).

Dans un autre arrêt rendu très récemment, la chambre administrative a considéré que l’âge du recourant, soit 53 ans au moment de la décision d’ouverture de l’enquête administrative et 56 ans au moment du refus de la Ville de Genève de le réintégrer, ainsi que la durée de la procédure qui avait amenuisé ses possibilités de retrouver un emploi devaient être pris en compte pour la fixation du montant de l’indemnité. Elle a également rappelé que le recourant avait travaillé au service de la commune pendant 30 ans et que la qualité de son travail n’avait pas été remise en cause, ce dont l’autorité intimée n’avait pas tenu compte. Le rapport d’enquête administrative et la décision litigieuse n’ayant pas établi les faits pertinents, elle n’avait pas pu analyser l’application de l’art. 105 SVPG à un complexe de faits précis. Elle n’avait donc pas constaté l’absence de motifs fondés de licenciement, mais que l’absence de l’établissement correct et complet des faits relevait de la seule responsabilité de l’autorité intimée. Dès la décision d’ouverture de l’enquête administrative, la procédure avait fait l’objet de nombreux incidents soulevés par le recourant, à l’instar des huit demandes de récusation des enquêteurs, toutes rejetées, du nombre de témoins dont le recourant avait sollicité l’audition voire la réaudition à plusieurs reprises, des nombreuses tensions ressortant des procès-verbaux quant au bien‑fondé des questions posées et leur retranscription ainsi que celle des réponses, l’important échange de correspondance entre le recourant et les enquêteurs en marge de l’enquête, témoignaient de conditions peu favorables à un établissement serein et efficient des faits pertinents, conditions essentiellement dues à l’attitude du recourant. De plus, le comportement de l’intéressé sur son lieu de travail avait fait l’objet de reproches constants tout au long de son contrat, ce qui tendait à démontrer une absence de prise de conscience de la problématique par l’intéressé ou de volonté d’en changer. La chambre a cependant retenu, en faveur du recourant, un contexte de tensions importantes au sein du service, datant de nombreuses années, sans avoir été résolu par les responsables hiérarchiques. De même, aucun entretien d’évaluation n’avait été mené pendant de nombreuses années, alors même que leur importance avait été mise en évidence, et l’autorité intimée a refusé de le réintégrer. L’indemnité a été fixée à douze mois du dernier traitement mensuel brut du recourant (ATA/879/2023 du 22 août 2023).

7.3 En l’espèce, l’intimée a d’ores et déjà informé la chambre de céans qu'elle refuserait de réintégrer la recourante. Il convient donc de fixer le montant de l’indemnité.

La recourante est âgée de 55 ans. Elle a été en arrêt de travail de décembre 2020 à décembre 2022. Suspendue dès le 30 juin 2021 pendant toute la procédure d’enquête administrative, elle a été libérée de son obligation de travailler jusqu’à l’échéance du délai de congé, le 30 juin 2023, et son licenciement a été déclaré exécutoire nonobstant recours.

Ses premiers bilans ne font état d’aucune réserve, mais ses prestations n’ont pas été évaluées entre les mois de novembre 2010 et novembre 2019, ce qui empêche donc de tirer des conclusions quant à la qualité de son travail et de ses relations. Cela étant, il ressort des faits de la cause que la recourante était récalcitrante à la modification de son cahier des charges, que cette position a sans aucun doute alimenté le conflit qui l’a opposée à sa hiérarchie, et qu’elle a fait l’objet d’un avertissement en raison de propos peu courtois adressés à sa responsable. Elle n’a en outre pas traité le projet des « prêts externes à long terme » et a refusé d’exécuter le nettoyage des fiches sur papier au début du confinement. Son comportement n’est donc de loin pas exempt de tous reproches.

Compte tenu des nombreuses lacunes relevées dans le rapport d’enquête administrative et du fait que ce document, tout comme la décision litigieuse, n’ont pas établi les faits pertinents, l’existence d’un motif fondé au licenciement n’est pas établie.

Il sied toutefois de tenir compte, en faveur de la recourante, qu’elle a saisi la responsable RH du département en mars 2019 en raison de la situation difficile liée à son « conflit ouvert » avec G______, qu’elle a semble-t-il sollicité, avec d’autres collègues du secteur des « D______», l’intervention du Groupe de confiance, et qu’elle a souhaité participer à une médiation avec sa responsable, mesure qui a été qualifiée de « constructive » par le médiateur.

Il convient également de tenir compte des déclarations de J______, qui a expliqué aux enquêteurs qu’il aurait fallu agir dès 2019, puisque les difficultés existaient déjà à cette époque. Elle aurait alors préconisé une réflexion sur un possible transfert de la recourante dans un autre service muséal. L’entretien prévu n’avait pas pu avoir lieu, puisque le dossier avait été retiré de la compétence du B______, pour être repris par le département et parallèlement par le Groupe de confiance. H______ a indiqué qu’il n’avait pas proposé de déplacement à l’intéressée, car il voulait examiner au préalable les compromis possibles. Il avait finalement renoncé à cette possibilité suite à l’entretien de décembre 2020, car il avait constaté que la recourante n’était pas ouverte à l’idée de respecter les objectifs fixés et qu’il n’avait constaté aucun changement. C’est donc dire que ni la direction du B______, ni celle du département, n’ont entrepris de démarches concrètes jusqu’à la médiation débutée en été 2020 et qu’un licenciement aurait peut-être pu être évité, au profit d’un transfert interne.

Compte tenu de toutes ces circonstances, l’indemnité sera fixée à neuf mois du dernier traitement mensuel brut de la recourante. Elle comprendra le treizième salaire au prorata du nombre des mois fixés, à l'exclusion de tout autre élément de rémunération. Elle n'est pas soumise à la déduction des cotisations sociales.

La demande en fixation d’indemnité est ainsi partiellement admise.

8.             Enfin, la recourante conclut au versement d’une indemnité de CHF 80'478.80 représentant ses frais d’avocat.

8.1 En vertu de l'art. 87 al. 2 LPA, la juridiction administrative – qui statue sur les frais de procédure, indemnités et émoluments dans les limites établies par règlement du Conseil d'État et conformément au principe de la proportionnalité (art. 87
al. 1 et 3 LPA ; ATA/1484/2017 du 14 novembre 2017 et les références citées) – peut, sur requête, allouer à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours.

8.2 À teneur de l'art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la juridiction peut allouer à une partie pour les frais indispensables occasionnés par la procédure, y compris les honoraires éventuels d'un mandataire, une indemnité de CHF 200.- à CHF 10'000.-.

8.3 La juridiction saisie dispose d'un large pouvoir d'appréciation également quant à la quotité de l'indemnité allouée et, de jurisprudence constante, celle-ci ne constitue qu'une participation aux honoraires d'avocat (ATA/46/2022 du
18 janvier 2022 consid. 1 ; ATA/1042/2021 du 5 octobre 2021 ; ATA/688/2020 du 21.07.2020 consid. 2), ce qui résulte aussi, implicitement, de l'art. 6 RFPA dès lors que ce dernier plafonne l'indemnité à CHF 10'000.-. La garantie de la propriété
(art. 26 Cst.) n'impose nullement une pleine compensation du coût de la défense de la partie victorieuse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_152/2010 du 24 août 2010 ; ATA/1361/2019).

Pour déterminer le montant de l'indemnité, il convient de prendre en compte les différents actes d'instruction, le nombre d'échanges d'écritures et d'audiences. Le montant retenu doit intégrer l'importance et la pertinence des écritures produites et de manière générale la complexité de l'affaire (ATA/1042/2021 précité ; ATA/1031/2018 du 2 octobre 2018 consid. 2b).

8.4 En l’espèce, la recourante obtient partiellement gain de cause, de sorte qu’une indemnité doit lui être octroyée.

Son recours comprend 101 pages et sa réplique 20, dont font partie les nombreuses conclusions. En outre, comme relevé par la recourante elle-même, le volume de son recours s’explique en partie par la taille de la police utilisée. De plus, le choix du rédacteur, qui a répété à chaque mention de nom la fonction complète de la personne citée, rallonge inutilement ses écritures. Ces dernières sont en outre agrémentées de moult digressions, sans pertinence aucune pour la solution du litige. On rappellera que la recourante n’a pas motivé à satisfaction sa conclusion tendant à la constatation de la nullité de la décision et qu’elle n’a pas non plus favorisé la compréhension des faits et de ses griefs, en présentant un exposé peu clair et imprécis.

En conséquence, la pertinence des écritures de la recourante doit être relativisée. On ajoutera que la préparation du bordereau de pièces a été limitée à la reproduction du dossier d’enquête, dont le désordre a déjà été relevé.

Partant, quand bien même l’élaboration du recours a impliqué l’analyse des résultats de l’enquête administrative, l’affaire n’était pas particulièrement complexe, la recourante ayant pu reprendre presqu’intégralement ses explications déjà longuement développées lorsqu’elle a contesté les reproches formulés à son endroit, avant et pendant l’enquête.

Enfin, la chambre de céans a procédé à une audience de comparution personnelle.

En conséquence, une indemnité de procédure CHF 1'500.- tient équitablement compte du fait que la recourante n’obtient que partiellement gain de cause, que la procédure n’a comporté qu’une seule audience, et que la longueur de ses écritures, prolixes, ne se justifiait pas.

Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée à la recourante, à la charge de l’intimée (art. 87 al. 2 LPA).

9.             Compte tenu des conclusions du recours et vu l’échelle des traitements de l’intimée, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 janvier 2023 par A______ contre la décision de la Ville de Genève du 14 décembre 2022 ;

au fond :

l’admet partiellement  ;

constate que le licenciement de A______ prononcé par décision de la Ville de Genève du 14 décembre 2022 est contraire au droit ;

dit que la Ville de Genève doit verser à A______ une indemnité d’un montant correspondant à neuf mois de son dernier traitement brut, treizième salaire compris, à l’exclusion de tout autre élément de rémunération, au sens des considérants ;

l’y condamne en tant que de besoin ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à A______, à la charge de la Ville de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, avenue du Tribunal-Fédéral 29, 1005 Lausanne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Alireza MOGHADDAM, avocat de la recourante, ainsi qu’à la Ville de Genève.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, Eleanor McGREGOR, Catherine GAVIN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :