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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2064/2023

ATA/1085/2023 du 03.10.2023 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2064/2023-AIDSO ATA/1085/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 octobre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1979, a bénéficié des prestations d’aide sociale financière versée par l’hospice général (ci-après : hospice) depuis le 1er avril 2011.

b. Avec ses demandes d’aide, notamment des 24 juillet 2017, 19 janvier 2018 et 10 juin 2022, il a signé le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général », par lequel il a notamment pris acte de la subsidiarité des prestations d’aide financière à toute ressource de travail et s’est notamment engagé à donner immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, d’informer immédiatement et spontanément de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière et de se soumettre en tout temps à une enquête de l’hospice sur sa situation personnelle, familiale et économique. Il a également pris acte, par sa signature, que l’hospice se réservait de réduire ou de supprimer ses prestations d’aide financière en cas de violation de la loi, notamment de cet engagement, et qu’il pouvait être amené à rembourser toute prestation exigible selon l’art. 12 al. 2 et 36 à 41 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04).

c. Dans sa demande d’aide financière du 19 janvier 2018, il a déclaré qu’il était divorcé et vivait seul dans un appartement sis B______ à Meyrin, qu’il était en incapacité totale de travailler, n’exerçait aucune activité professionnelle ni ne percevait un quelconque revenu, ne possédait pas de fortune, à l’exception d’un véhicule, et ne détenait qu’un seul compte auprès de C______.

d. À la suite du constat que son passeport avait été timbré plus de 60 fois entre avril 2011 et mars 2016 par la Croatie, l’Albanie, la Macédoine, la Hongrie, l’Italie, le Monténégro et le Kosovo, que son contrat de bail était établi à son nom et celui de D______, qu’il louait deux places de parking, était titulaire d’un compte auprès du E______, qui avait été crédité, au total, de CHF 13'904.15 entre juillet 2016 et juillet 2017 et qu’entre le 25 juillet 2011 et le 1er février 2018, il avait immatriculé 29 véhicules, dont la valeur individuelle était estimée entre CHF 0.- et CHF 6'852, l’hospice a suspendu ses prestations, par décision du 12 juin 2018, et lui a imparti un délai pour apporter tout justificatif relatif à l’achat et la vente des véhicules immatriculés durant la période d’aide financière.

e. A______ a expliqué qu’aucun des véhicules mentionnés dans le rapport de l’hospice n’avait été l’objet d’un contrat de vente, car il s’agissait d’un « hobby et passe-temps », qui ne lui rapportait pas revenu. Certains véhicules avaient terminé « à la casse », d’autres échangés ou donnés gratuitement.

f. L’hospice a ensuite repris ses prestations avec effet au 1er juin 2018.

g. Lors du renouvellement de la demande d’aide le 12 juillet 2022, le bénéficiaire a indiqué vivre seul, être en incapacité de travail, n’exercer aucune activité lucrative, ne pas percevoir de revenus et ne pas posséder de fortune. Lors de l’entretien avec son assistante sociale le même jour, il a déclaré être difficilement joignable, car il dormait souvent la journée en raison des médicaments qu’il prenait. Il ne possédait aucune voiture. Se déterminant sur la liste de quatorze véhicules immatriculés à son nom entre le 17 septembre 2019 et le 22 octobre 2021, il a expliqué qu’il les avait achetés avec l’argent et pour le compte de son frère. Il s’est excusé de ne pas avoir déclaré cette activité et a exposé qu’en raison du faible suivi par l’hospice, il n’avait pas pu évoquer le sujet. L’assistante lui a demandé de produire les contrats de ventes, d’achats et de débarras de ces véhicules.

h. Il ressort du rapport du service d’enquêtes de l’hospice (ci-après : SEC) du 13 décembre 2022 que lors des visites impromptues au domicile du bénéficiaire des 20 et 21 septembre 2022, personne n’avait répondu, alors que des bruits de voix et d’aspirateur provenaient de l’appartement. Aucune suite n’avait été donnée à la convocation mise dans la boîte aux lettres de l’intéressé. Le pli recommandé comportant un avertissement rappelant le devoir de collaborer et informant de la suspension des prestations avait été retourné avec la mention « non réclamé ». Lors du contrôle inopiné du 21 octobre 2022, le bénéficiaire ne se trouvait pas non plus à son domicile. Il avait finalement pu être auditionné le 25 octobre 2022. Il avait alors présenté son passeport qui comportait 28 timbres attestant d’une entrée ou d’une sortie de Croatie, Hongrie et Monténégro. Il avait expliqué que lors des contrôles de septembre 2022, il avait hébergé sa sœur et son beau-frère, qui étaient en vacances.

Lors de la visite domiciliaire du 25 octobre 2022, le SEC avait constaté que trois autres noms figuraient sur la boîte aux lettres de A______ : D______, F______et G______. Selon l’administré, la première était garante du bail et les deux autres utilisaient l’adresse comme boîte aux lettres. Le SEC a toutefois constaté que ces trois personnes apparaissaient comme officiellement domiciliées à cette adresse et que D______ avait épousé F______ le 16 avril 2008. Le SEC a également observé dans le domicile de nombreux effets personnels féminins (vêtements, lingerie y compris en train de sécher, chaussures, parfum, produits de maquillage, fers à friser et à lisser, documents administratifs au nom de H______ et I______).

A______ avait expliqué que les documents précités appartenaient à cette dernière, qui était sa nièce, que les effets personnels appartenaient à son ex-amie et que D______ utilisait le second parking. Rendu attentif au caractère peu crédible de ces explications, A______ n’avait rien répondu.

L’analyse des relevés de compte et de carte de crédit avait révélé que la plupart des transactions avaient lieu à l’étranger, soit à Annemasse, en Croatie, en Italie, au Kosovo et à Paris. Était également apparu un autre compte, soit un compte épargne auprès de C______, non déclaré, sur lequel avaient été crédités entre juin 2019 et décembre 2021 un montant total de CHF 23'289.97 et la plupart des retraits avaient eu lieu hors de la commune de domicile. Selon les renseignements pris auprès de l’office cantonal des véhicules, l’intéressé n’était détenteur, le 12 décembre 2022, d’aucun véhicule, alors qu’il avait immatriculé, pour des courtes périodes, quatorze véhicules entre le 27 septembre 2019 et le 22 octobre 2021. Il n’avait que très partiellement répondu à la demande de produire des pièces y relatives, ayant indiqué que douze véhicules avaient été achetés ou vendus « en espèces et sans documents » et que la plupart avaient été vendus pour l’exportation.

i. Après avoir fait à nouveau défaut à la convocation de son assistante sociale les 9 et 11 janvier 2023 sans s’excuser, il a donné suite à celle du 31 janvier 2023. Celle-ci l’a confronté aux résultats de l’enquête du SEC, lui a indiqué que les confirmations d’ordres bancaires qu’il avait produites à titre de preuve du paiement du loyer n’avaient été suivies d’aucune exécution et l’a informé de la fin de son droit aux prestations financières. A______ a confirmé qu’il vivait seul, que son adresse était utilisée par d’autres personnes pour leur correspondance et a indiqué qu’il hébergeait son cousin depuis novembre 2022.

j. Par décision du 24 février 2023, déclarée exécutoire nonobstant opposition, l’hospice a mis fin aux prestations d’aide financière à compter du 1er février 2023 au motif qu’il n’était pas en mesure de vérifier le lieu de résidence effectif du bénéficiaire sur le territoire genevois et qu’il avait caché des éléments de revenus ou de fortune.

k. Le 19 mai 2023, l’hospice a rejeté l’opposition. Lors de passages inopinés à son domicile, l’intéressé n’était jamais présent. Une visite du domicile n’avait pu avoir lieu qu’après avertissement. Elle avait révélé des signes de la présence d’une femme, alors qu’il avait toujours indiqué vivre seul. Les déclarations relatives à ce constat avaient varié et n’apparaissaient pas crédibles. Il n’avait procédé, sur la commune de son domicile, qu’à trois retraits ou paiements via le compte C______ déclaré entre le 1er janvier 2021 et le 20 mars 2023. Les seize récépissés postaux produits pour justifier du paiement du loyer ne permettaient pas d’identifier l’auteur de versements ; seuls cinq d’entre eux portaient le timbre d’une agence postale située à Meyrin. Enfin, il n’avait pas déclaré son activité d’exportation de véhicules, qui constituait une activité indépendante.

B. a. Par acte expédié le 20 juin 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre cette décision, dont il a demandé l’annulation. Il a conclu à la restitution de l’effet suspensif et, principalement, à la poursuite du versement des prestations d’aide financière.

Dès lors qu’il avait permis l’accès à son domicile, il y résidait. Il avait dépanné des amis en leur permettant d’utiliser sa boîte aux lettres. Les objets féminins appartenaient à D______, qui lui avait demandé de garder certaines affaires. Même s’ils ne vivaient plus ensemble, ils conservaient une bonne relation. Il avait rarement fait des plus-values en revendant les véhicules achetés. Il le faisait pour son frère. La majorité des retraits bancaires avait eu lieu à Vernier. Il était atteint dans sa santé. Cela expliquait que ses déclarations aient varié dans le temps. Les retraits effectués en France avaient trait aux achats alimentaires, moins chers dans ce pays. Le fait qu’il ait pu produire les récépissés relatifs aux paiements du loyer démontrait qu’il les avait effectués. La suppression des prestations violait le principe de la proportionnalité.

b. L’hospice a conclu au rejet de la requête en restitution de l’effet suspensif et du recours.

Les conclusions prises sur restitution de l’effet suspensif tendaient à anticiper l’arrêt au fond. Le recourant n’apportait aucun élément concret démontrant que sa situation financière s’était dégradée depuis le 1er février 2023. Les arguments développés au fond ne permettaient pas de corroborer la présence effective et continue du recourant à Meyrin. Celui-ci avait produit des confirmations d’ordres bancaires pour justifier faussement du paiement du loyer. Les effets personnels utilisés au quotidien, notamment des sous-vêtements en train de sécher et les documents administratifs au nom de tiers contredisaient les explications du recourant. Les transactions bancaires effectuées en dehors de Meyrin, notamment à l’étranger, montraient que le recourant, qui prétendait y vivre depuis quinze ans, n’y avait pas ses habitudes. Les rapports du SEC établissaient que l’activité d’exportation de véhicules que le recourant – qui indiquait être gravement atteint dans sa santé – exerçait était importante, compte tenu de la durée et des investissements financiers, du suivi administratif et des déplacements à l’étranger.

c. Le recourant ne s’est pas manifesté dans le délai imparti pour répliquer sur effet suspensif.

d. L’hospice a produit un complément de rapport du SEC daté du 3 août 2023. Selon celui-ci, le compte facebook ouvert sous le profil « J______ » est relié à K______, domiciliée et garante du logement si rue B______ à Meyrin. Sur ce profil, plusieurs photos représentant le bénéficiaire, en couple et en famille avec trois enfants. À la suite de la découverte de ces nouveaux éléments, A______ avait été convoqué à un entretien, par plis recommandés envoyés à son domicile ainsi qu’à l’adresse professionnelle de son avocat. L’administré ne s’était ni présenté ni excusé.

e. Ce complément de rapport a été transmis au recourant et les parties ont – par erreur – été informées le 8 août 2023 que la cause était gardée à juger sur effet suspensif et sur le fond. Une communication rectificative leur a été adressée, le 16 août 2023, fixant au recourant un délai de réplique sur le fond au 7 septembre 2023 et informant les parties que la cause était gardée à juger sur effet suspensif uniquement.

f. Par courrier du 23 août 2023, le conseil du recourant a informé la chambre administrative qu’il cessait d’occuper et révoquait l’élection de domicile.

g. Le recourant ne s’est pas manifesté dans le délai imparti.

h. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Est litigieux le bienfondé de la décision mettant fin à l'aide financière accordée au recourant.

2.1 Aux termes de l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

2.2 En droit genevois, la LIASI et son règlement d'exécution du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) mettent en œuvre ce principe constitutionnel.

À teneur de son art. 1 al. 1, la LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel. Conformément à l'art. 9 al. 1 in initio LIASI, les prestations d'aide financière sont subsidiaires à toute autre source de revenu.

2.3 Selon l'art. 11 al. 1 LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière prévues par cette loi, les personnes qui : ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève (let. a) ; ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien (let. b) ; répondent aux autres conditions de la loi (let. c).

2.4 La LIASI impose un devoir de collaboration et de renseignement (ATA/768/2015 du 28 juillet 2015 consid. 7a ; ATA/1024/2014 du 16 décembre 2014 consid. 4 ; ATA/864/2014 du 4 novembre 2014 consid. 4). Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » concrétise notamment l'obligation de collaborer du demandeur en exigeant de sa part de transmettre immédiatement et spontanément toute information nécessaire à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, d’informer de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière et de se soumettre en tout temps à une enquête du service des enquêtes de l’hospice sur sa situation personnelle, familiale et économique.

2.5 L'art. 35 LIASI décrit six cas dans lesquels les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées.

Tel est notamment le cas lorsque le bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la LIASI (art. 35 al. 1 let. a LIASI), lorsqu'il ne s'acquitte pas intentionnellement de son obligation de collaborer telle que prescrite par l'art. 32 LIASI ou lorsqu'il refuse de donner les informations requises, donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles (art. 35 al. 1 let. d LIASI).

2.6 De jurisprudence constante, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu, alors qu'il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/195/2021 du 23 février 2021 consid. 7c et les références citées).

2.7 La suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit au surplus être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193 ; ATA/1271/2017 du 12 septembre 2017 consid. 6c ; ATA/357/2017 du 23 mars 2017 consid. 7c).

2.8 En l’espèce, le recourant a signé à plusieurs reprises le document « Mon engagement » et s’est ainsi engagé à donner immédiatement et spontanément à l’hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, de signaler spontanément tout fait nouveau de nature à modifier le montant des prestations d’aide financière et de se soumettre en tout temps à une enquête du service des enquêtes de l’hospice, notamment en autorisant en tout temps un contrôle à son domicile, avec ou sans préavis.

Lors du renouvellement de la demande d’aide le 12 juillet 2022, le recourant avait indiqué vivre seul, être en incapacité de travail, n’exercer aucune activité lucrative, ne pas percevoir de revenus et ne pas posséder de fortune. Or, confronté à une liste de quatorze véhicules immatriculés à son nom entre le 17 septembre 2019 et le 22 octobre 2021, il a expliqué qu’il les avait achetés avec l’argent et pour le compte de son frère. Le recourant a alors présenté des excuses à l’assistante sociale pour ne pas avoir déclaré cette activité. Cela étant, conformément à l’engagement pris en requérant l’aide sociale, il lui appartenait d’informer spontanément l’hospice de cette activité, quand bien même elle ne lui aurait rapporté que de faibles revenus comme il le soutient.

Par ailleurs, le devoir de collaborer du recourant a été lacunaire. Celui-ci n’a, à plusieurs reprises, pas répondu aux convocations que ce soit du SEC ou de son assistante sociale. Il a, en sus, omis de déclarer l’existence d’un compte épargne auprès de C______, sur lequel un montant total de CHF 23'289.97 a été crédité entre juin 2019 et décembre 2021. Il n’a que très partiellement répondu à la demande de produire des pièces relatives à son activité d’achat et d’exportation de véhicules, au motif que douze véhicules avaient été achetés ou vendus « en espèces et sans documents ». De surcroît, le recourant a tenté d’induire en erreur l’hospice en produisant des ordres de virements bancaires censés démontrer qu’il s’acquittait du loyer de l’appartement sis rue B______ à Meyrin, dont il s’est ensuite avéré, dans le cadre des investigations menées par le SEC, qu’ils n’avaient jamais été exécutés.

En outre, l’hospice a retenu, à juste titre, que le domicile en Suisse du recourant n’était pas établi. En effet, celui-ci ne se trouvait pas à l’appartement sis rue B______ à Meyrin lors de plusieurs passages inopinés du SEC. Le pli recommandé comportant un avertissement rappelant le devoir de collaborer et informant de la suspension des prestations avait été retourné avec la mention « non réclamé ». Son passeport comportait 28 timbres attestant d’une entrée ou d’une sortie de Croatie, Hongrie et Monténégro. Par ailleurs, lors de la visite domiciliaire du 25 octobre 2022, le SEC avait constaté que trois autres noms figuraient sur la boîte aux lettres de A______ : D______, F______et G______. Ces trois personnes apparaissaient comme officiellement domiciliées à cette adresse et D______ avait épousé F______le 16 avril 2008. Le SEC a également observé dans le domicile de trois pièces de nombreux effets personnels féminins (vêtements, lingerie y compris en train de sécher, chaussures, parfum, produits de maquillage, fers à friser et à lisser, documents administratifs au nom de H______ et I______).

À cela s’ajoute qu’il ressort de l’analyse des relevés de compte et de carte de crédit effectuée par le SEC que la plupart des transactions ont lieu à l’étranger, soit à Annemasse, en Croatie, en Italie, au Kosovo et à Paris. La plupart des prélèvements effectués sur le compte épargne C______ ont également eu lieu hors de la commune de domicile du recourant. Afin de prouver qu’il occupait effectivement l’appartement indiqué comme domicile, celui-ci a produit à l’hospice des ordres de virements relatifs au paiement du loyer, qui n’ont cependant jamais été exécutés. Il a produit des récépissés de paiement du loyer, mais n’a pas fourni d’explications au sujet des ordres de paiement non-exécutés. En outre, il n’explique pas pour quel motif il n’a pas produit les récépissés postaux relatifs au paiement du loyer plus tôt, étant précisé que, comme le relève l’hospice, le paiement peut avoir été effectué par D______, dont le nom figure également sur les bulletins de versement préimprimés. Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’autorité intimée n’a pas commis d’abus de son pouvoir d’appréciation ni violé la loi en considérant que le domicile genevois du recourant n’était pas établi.

De surcroît et comme indiqué plus haut, la collaboration lacunaire du recourant et le fait d’avoir omis de signaler des faits de nature à modifier le montant des prestations d’aide financière justifient, à eux seuls, la suppression des prestations versées par l’hospice.

Enfin, les problèmes de santé que le recourant semble invoquer pour excuser ses manquements à l’égard de l’hospice ne permettent nullement de retenir un lien de cause à effet entre ceux-ci et ceux-là. Il ne ressort, en particulier, d’aucune attestation médicale produite que les problèmes de santé du recourant (diabète, hernie inguinale, réaction dépressive, notamment) étaient de nature à l’empêcher de fournir, sur requête ou spontanément, les informations nécessaires à la détermination de son droit aux prestations d’aide sociale. Ces problèmes de santé n’ont, au demeurant, nullement empêché le recourant de procéder à l’acquisition et à la vente de véhicules automobiles ni à entreprendre de très nombreux voyages à l’étranger, notamment au volant des véhicules vendus.

Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, l’hospice était fondé à mettre un terme à l’aide sociale qu’il versait au recourant.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

3.             Le présent arrêt rend sans objet la demande de restitution d’effet suspensif.

4.             Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu. L’issue du litige s’oppose au versement d’une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 juin 2023 par A______ contre la décision de l’Hospice général du 19 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Gaëlle VAN HOVE, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :