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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2209/2022

ATA/837/2023 du 09.08.2023 sur JTAPI/133/2023 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : ÉMOLUMENT;ÉMOLUMENT ADMINISTRATIF;CONTRIBUTION CAUSALE;EXIGIBILITÉ;COORDINATION FORMELLE ET MATÉRIELLE;SUSPENSION DE LA PROCÉDURE
Normes : LPA.12A; LPA.14; LCI.154; RCI.254; RCI.255
Résumé : Recours contre un jugement du TAPI portant sur l’exigibilité de l’émolument relatif à une demande d’autorisation de construire, avant que cette dernière ne soit entrée en force. Cette contribution publique représente une contre-prestations pour l’activité déployée. L’émolument administratif est dû que l’autorisation de construire soit délivrée ou refusée, et qu’elle soit refusée immédiatement par l’autorité administrative ou accordée puis annulée par l’autorité de recours. La notification séparée des décisions relatives à l’autorisation de construire et à l’émolument ne viole par le principe de coordination des procédures. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2209/2022-LCI ATA/837/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 août 2023

3ème section

 

dans la cause

 

A______ recourantes
B______
C______

représentées par Me François BELLANGER, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
2 février 2023 (JTAPI/133/2023)


EN FAIT

A. a. Le 2 juin 2022, le département du territoire (ci-après : le département) a délivré à la B______ (ci-après : B______) et à A______ (ci-après : A______) l’autorisation de construire DD 1______ portant sur quatre bâtiments comprenant 19 immeubles de logements et surfaces commerciales, parkings souterrain et extérieur, aménagements extérieurs, déchetterie enterrée, terrain de sport, places de jeux, abattage d’arbres, sur les parcelles nos 2'787 et 3'431 sises sur la commune de D______, appartenant au domaine public de la commune, à la B______ et à C______ (ci-après : C______).

b. La B______ et C______ ont saisi le Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) d’un recours, concluant à la modification du chiffre 5 de l’autorisation de construire DD 1______.

c. Trois autres recours ont été déposés auprès du TAPI contre cette autorisation par plusieurs voisins.

d. Ces recours ont été joints sous le numéro de cause A/2199/2022, en cours d’instruction.

B. a. Par décision du 3 juin 2022, le département a notifié à la B______ et à A______ un bordereau d’émoluments, facture n°110-422003171-1716903 (ci-après : le bordereau), d’un montant total de CHF 238'050.- comprenant CHF 250.- de taxe d’enregistrement, CHF 73'700.- d’émolument « HLM-LUP, HLM, HM (29484m2=2948UX50 à 50%) », CHF 130'400.- d’émolument « ZDLOC, PPE, Commerces (26087m2=2608UX50) » et CHF 33’700.- d’émolument « Sous-sol, Parking (13486m2=1348UX50 à 50%) ».

b. Le 4 juillet 2022, la B______, A______ et C______ ont interjeté recours auprès du TAPI contre cette décision.

Elles entendaient préserver leurs droits vu le risque de violation du principe de coordination des procédures. En effet, si l’autorisation de construire devait être annulée totalement ou partiellement, l’émolument pourrait devenir sans objet ou à tout le moins être réduit. Il ne pourrait toutefois plus être annulé, faute d’avoir été contesté à temps. Si une nouvelle autorisation de construire devait être déposée et acceptée, elles seraient amenées à payer deux émoluments considérables pour finalement n’obtenir qu’une seule autorisation de construire. Il était donc nécessaire de suspendre la présente procédure, étant précisé qu’elles ne contestaient pas devoir payer l’émolument en cause si l’autorisation de construire DD 1______ devenait définitive.

c. Le département a conclu au rejet du recours et considéré qu’il n’y avait pas lieu de suspendre l’instruction de la cause.

d. Dans leur réplique, B______, A______ et C______ ont ajouté que si l’autorisation de construire devait être annulée et une nouvelle demande déposée, les dépenses occasionnées à l’administration par la prestation concrète, soit l’examen de la nouvelle demande d’autorisation, ne s’élèveraient aucunement au montant de la contribution exigée, vu que le dossier et les bases du projet redéposé seraient déjà connus de lui. Le principe de l’équivalence serait violé.

e. Le département a dupliqué. Le principe de coordination ne s’opposait pas à ce qu’il rende deux décisions distinctes pour autant qu’elles soient suffisamment coordonnées et non contradictoires, ce qui était le cas, puisque le contenu de l’autorisation de construire avait servi de base de calcul pour déterminer l’émolument. La fixation de la contribution en cas de nouvelle requête dépendrait notamment du contenu du nouveau projet qui serait déposé. Tout grief à son encontre était prématuré.

f. Par jugement du 2 février 2023, notifié le 7 février 2023, le TAPI a rejeté le recours. Le montant de l’émolument facturé suite à la délivrance de l’autorisation de construire restait dû, même si cette dernière pouvait être annulée ou réformée à l’issue de la procédure A/2199/2022 ou pour tout autre motif, comme la renonciation à ladite autorisation. Si le département devait être amené à instruire à nouveau le dossier, le montant de ce nouvel émolument pourrait alors être contesté.

C. a. Par acte du 9 mars 2023, la B______, A______ et C______ ont interjeté recours contre le jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative). Elles ont conclu, préalablement, à la suspension de la présente procédure, en application du principe d’économie de la procédure, jusqu’à ce que l’autorisation de construire DD 1______ soit définitive, et, principalement, à l’annulation du jugement entrepris et à ce que la décision du 3 juin 2022 soit subordonnée à l’entrée en force de ladite autorisation.

L’art. 254 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01) précisait que les émoluments étaient dus pour toute autorisation ou refus d’autorisation délivrée en application de la loi et de ses règlements d’application. Or, une autorisation de construire n’était annulée par une juridiction que lorsque le département n’avait pas dûment appliqué la loi et ses règlements. Compte tenu des principes de la bonne foi, de l’interdiction de l’arbitraire, de l’équivalence des contributions causales et de la coordination des procédures, il allait de soi que les émoluments étaient uniquement dus lors de l’application correcte de la loi et de ses règlements, y compris en cas de refus d’autorisation. Une demande d’autorisation de construire refusée par le département n’était pas comparable à une autorisation de construire annulée par une juridiction, notamment en termes de couverture des coûts et des principes régissant les contributions publiques. Lorsqu’une autorisation était refusée, les requérants devaient l’émolument, puisqu’ils avaient soumis un dossier défaillant et que le département avait retenu que les dispositions légales n’étaient pas respectées. À l’inverse, en cas d’annulation par une juridiction d’une autorisation de construire, c’était l’examen du dossier par le département qui était défaillant et sa décision était infondée ou à tout le moins erronée. Considérer que l’activité de l’État devait être rémunérée en toutes circonstances, même en cas d’erreur de sa part, était insoutenable. La pratique consistant à notifier deux décisions distinctes intrinsèquement liées n’était pas conforme aux principes régissant les contributions causales, le financement de l’activité de l’État, et de coordination des procédures. L’autorité intimée qui facturait son activité même lorsque son résultat n’était pas conforme aux dispositions applicables était également contraire aux principes constitutionnels de la proportionnalité, de la garantie de la propriété et de la liberté économique.

b. Dans sa réponse, l’autorité intimée a conclu au rejet de la requête en suspension du recours. L’annulation d’une autorisation de construire par une juridiction signifiait que le département aurait dû la refuser, ce qui ne changeait rien du point de vue de l’émolument, dont le calcul était identique. Le caractère non-autorisable de la requête ne serait pas la conséquence d’une défaillance de sa part lors de l’instruction, mais de celle de son requérant, dans la conception de son projet. Lui-même avait l’obligation de délivrer l’autorisation de construire sollicitée s’il estimait que le projet était autorisable. Il ne pouvait donc pas exiger du requérant la présentation d’une variante qui apparaitrait plus opportune ou juridiquement moins risquée. Toute la responsabilité de l’illégalité d’une requête en autorisation de construire incombait au seul requérant. L’émolument était identique en cas de refus, ce qui le rendait prévisible.

c. Dans une réplique, les recourantes ont relevé que le respect du principe de la légalité incombait à l’intimée, en sa qualité d’autorité administrative. Le requérant payait un émolument pour recevoir une décision conforme au droit, dont le respect était une prérogative de toute activité étatique. Considérer que le même émolument devait être payé pour une décision conforme au droit ou pour une décision annulée sur recours violait le principe de l’équivalence. Il fallait que les contributions causales soient répercutées sur les contribuables proportionnellement à la valeur des prestations qui leur étaient fournies ou des avantages économiques qu’ils en retiraient. Si l’autorisation de construire devait être annulée sur recours, la valeur objective de la prestation fournie par l’État serait le prononcé d’une décision violant les dispositions légales applicables. Une telle prestation n’était pas en adéquation avec l’émolument facturé.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Il est recevable.

2.             Préalablement, les recourantes requièrent la suspension de la présente procédure.

2.1 Selon l’art. 14 al. 1 LPA, lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions.

La formulation potestative employée dans cette disposition légale laisse un large pouvoir d’appréciation à l’autorité. Une décision de suspendre une procédure administrative comme dépendant de l’issue d’une autre procédure, qui est de nature à en prolonger la durée, doit être utilisée de manière restrictive et dans un but d’économie de procédure. Elle est envisageable lorsque la décision qui doit intervenir conditionne son issue ou qu’elle permet d’économiser des mesures d’instruction (ATA/280/2023 du 21 mars 2023 consid. 3 ; ATA/923/2014 du 25 novembre 2014 consid. 6).

La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d’une autre autorité serait utile à l’autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend. Une procédure ne saurait dès lors être suspendue sans que l’autorité saisie n’ait examiné les moyens de droit qui justifieraient une solution du litige sans attendre la fin d’une autre procédure. Il serait en effet contraire à la plus élémentaire économie de procédure et à l’interdiction du déni de justice formel fondée sur l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101) d’attendre la décision d’une autre autorité, même si celle-ci est susceptible de fournir une solution au litige, si ledit litige peut être tranché sans délai sur la base d’autres motifs (ATA/906/2022 du 12 septembre 2022 et les références).

2.2 En l’occurrence, le litige porte sur la question de savoir si l’émolument relatif à une autorisation de construire est dû lorsque ladite autorisation pourrait ultérieurement être annulée par l’autorité judiciaire.

Si le jugement entrepris dans la présente cause devait être confirmé par la chambre de céans, le montant de l’émolument facturé resterait dû, que l’autorisation de construire DD 1______ devienne définitive ou soit annulée dans le cadre de la procédure pendant devant le TAPI. Ainsi, et compte tenu des développements qui suivent, l’issue de la présente procédure ne dépend pas de celle de la cause A/2199/2022, de sorte qu’il ne sera pas donné suite à la demande de suspension.

3. Les recourantes ne contestent ni le calcul, ni le montant de l’émolument retenu dans le bordereau litigieux. En revanche, elles remettent en cause l’exigibilité de cet émolument et soutiennent que l’autorité intimée n’aurait pas dû établir un bordereau séparé de la décision d’autorisation de construire, laquelle pourrait être annulée ou réformée, d’où une incidence sur le montant de l’émolument facturé.

3.1 Le principe de coordination formelle et matérielle est ancré à l’art. 25a de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700). Selon cet article, une autorité chargée de la coordination est désignée lorsque l’implantation ou la transformation d’une construction ou d’une installation nécessite des décisions émanant de plusieurs autorités (al. 1). L’autorité chargée de la coordination peut prendre les dispositions nécessaires pour conduire les procédures (let. a), veille à ce que toutes les pièces du dossier de requête soient mises en même temps à l’enquête publique (let. b), recueille les avis circonstanciés relatifs au projet auprès de toutes les autorités cantonales et fédérales concernées par la procédure (let. c) et veille à la concordance matérielle ainsi que, en règle générale, à une notification commune ou simultanée des décisions (let. d ; al. 2). Les décisions ne doivent pas être contradictoires (al. 3). Ces principes sont applicables par analogie à la procédure des plans d’affectation (al. 4).

Selon l’art. 3A de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables à un projet de construction, la procédure directrice est celle relative aux autorisations de construire, à moins qu’une loi n’en dispose autrement ou sauf disposition contraire du Conseil d’État (al. 1). En sa qualité d’autorité directrice, le département coordonne les diverses procédures relatives aux différentes autorisations et approbations requises et veille à ce que celles-ci soient délivrées et publiées simultanément dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (al. 2).

L’art. 12A LPA rappelle le principe général selon lequel les procédures doivent être coordonnées lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables à un projet.

3.2 Le Tribunal fédéral a dégagé les principes imposant une coordination matérielle et formelle des décisions impliquant l’application de plusieurs dispositions légales différentes pour la réalisation du même projet. S’il existe entre celles-ci une imbrication telle qu’elles ne sauraient être appliquées indépendamment les unes des autres, il y a lieu d’en assurer la coordination matérielle (ATF 118 IV 371 consid. 4d ; 118 Ib 326 ; 117 Ib 35 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_14/2011 du 26 avril 2011 consid. 2.1 ; ATA/251/2018 du 20 mars 2018 consid. 10b). De l’exigence de coordination matérielle naît une obligation de coordination formelle.

Le principe de la coordination est également applicable lorsque plusieurs décisions émanent d’une même autorité (arrêts du Tribunal 1C_536/2019 et 1C_537/2019 du 16 septembre 2020 consid. 7 et la référence citée).

La loi ne tend pas à une coordination maximale, mais doit assurer une coordination suffisante, ce que précisent les textes allemand et italien de l’art. 25a al. 1 LAT. Le contenu ou l’ampleur d’une coordination « suffisante » ressort des principes généraux (notamment de la nécessité d’effectuer une pesée globale des intérêts, dans la mesure où elle est exigée dans le droit de la construction et de l’aménagement) ou de prescriptions spéciales (arrêt du Tribunal fédéral 1C_242/2019 du 7 avril 2020 consid. 2.1 et les références citées).

3.3 Ces principes développés dans le cadre de l’application du droit fédéral valent, par analogie, dans tous les cas où un projet relève de dispositions légales cantonales étroitement imbriquées. La chambre administrative a d’ailleurs déjà eu l’occasion d’indiquer qu’en matière d’autorisation de construire, l’autorité devait prendre en compte toutes les dispositions légales pertinentes et, par conséquent, peser les intérêts y relatifs (ATA/251/2018 du 20 mars 2018 consid. 10a ; ATA/1068/2016 du 20 décembre 2016 consid. 12b et les références citées).

4.             4.1 Selon l'art. 1 al. 1 LCI, sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment : élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a) ; modifier même partiellement le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation (let. b) ; démolir, supprimer ou rebâtir une construction ou une installation (let. c) ; modifier la configuration du terrain (let. d).

4.2 L’art. 154 LCI prévoit que le département perçoit un émolument pour toutes les autorisations et permis d’habiter ou d’occuper qu’il délivre, ainsi que pour les recherches d’archives ayant trait aux autorisations de construire (al. 1). Ces émoluments sont fixés par le Conseil d’État (al. 2).

À teneur de l’art. 254 RCI, le département perçoit, lors de la constitution des dossiers et notamment pour toute autorisation ou refus d’autorisation qu’il délivre en application de la loi et de ses règlements d’application, les émoluments calculés selon les dispositions du présent chapitre. Exceptionnellement, l’émolument peut être réduit lorsqu’il paraît manifestement trop important par rapport à l’objet de la demande d’autorisation de construire. L’autorité statue librement. L’émolument relatif aux remises de copies et aux recherches de documents est calculé conformément aux art. 10 et 10A du règlement sur les émoluments de l’administration cantonale du 15 septembre 1975 (REmAC - B 4 10.03 ; al. 1). Exceptionnellement, l’émolument peut être réduit jusqu’à 50% pour des projets d’intérêt général, en particulier lorsque ceux-ci sont présentés par la Confédération, le canton ou les communes, ou par des établissements publics qui en dépendent, ainsi que pour les projets de constructions de logements subventionnés par les pouvoirs publics (al. 2). Sont notamment considérés d’intérêt général, les écoles, les garderies d’enfants, les églises, les cliniques, les hôpitaux, les centres sportifs et les installations techniques des services publics (al. 3).

L’art. 255 RCI prévoit que le département notifie également un bordereau relatif à l’émolument administratif dont le recouvrement est effectué selon le chapitre II du titre VI de la loi.

4.3 En l’espèce, le bordereau litigieux concerne une contribution publique qui correspond à la rémunération d’une activité étatique, en l’occurrence le travail fourni par l’autorité intimée dans le cadre de l’examen de la demande d’autorisation de construire DD 1______. Cet émolument administratif représente une contre-prestation pour l’activité déployée et est dû dès que cette dernière a été effectuée. Il ne dépend pas du résultat auquel parvient l’autorité, mais de son travail, raison pour laquelle il est dû que l’autorisation soit accordée ou refusée par le département.

Les recourantes ne soutiennent pas que l’autorité intimée aurait traité leur requête d’autorisation de façon lacunaire ou avec négligence, en omettant par exemple de solliciter les préavis requis ou en ne procédant pas à une analyse consciencieuse de leur dossier. Au contraire, elles reconnaissent devoir le montant facturé en cas d’entrée en force de l’autorisation de construire.

Elles contestent en revanche que cette même contribution puisse également être réclamée en cas d’annulation de la décision du département par une juridiction, puisque ladite décision serait alors infondée et rendue en violation des dispositions légales et règlementaires applicables. Or, comme déjà mentionné, l’émolument administratif constitue une contre-prestation financière à l’activité déployée par l’administration. Il ne tend pas à rétribuer une application correcte de la législation en vigueur. En outre, l’annulation d’une autorisation de construire ne signifie pas pour autant que l’autorité intimée aurait abusé de son pouvoir d’appréciation ou violé le droit.

Dans le cas présent, les recourantes n’exposent pas en quoi l’autorité intimée aurait agi en dehors du cadre légal ou appliqué de manière arbitraire le droit en leur délivrant l’autorisation de construire attaquée devant le TAPI. Elles ne prétendent pas non plus que cette décision reposerait sur une appréciation insoutenable des circonstances pertinentes, violerait gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurterait le sentiment de la justice et de l’équité. Enfin, aucune violation du principe de la bonne foi ne saurait être retenue, l’autorité intimée n’ayant pas fait preuve d’une attitude déloyale et ne tirant aucun avantage de la situation.

Les recourantes n’expliquent pas non plus les raisons pour lesquelles une demande d’autorisation refusée par le département ne serait pas comparable, en termes d’activité déployée dans le cadre de son instruction, à une autorisation de construire octroyée par l’autorité compétente, puis annulée par une autorité judiciaire. Comme précédemment observé, l’émolument administratif est dû que l’autorisation de construire soit délivrée ou refusée et son montant est identique dans ces deux cas, puisqu’il y a la fourniture d’une prestation étatique qui aboutit à la prise d’une décision. Partant, que l’autorisation de construire soit immédiatement refusée par l’autorité administrative ou subséquemment annulée par l’autorité de recours est sans pertinence, puisque cela ne change rien à l’activité déployée par l’administration.

Enfin, les recourantes soulèvent que dans l’hypothèse où l’autorisation de construire en cause devait être annulée, les dépenses occasionnées à l’administration dans le cadre de l’examen d’une nouvelle demande ne s’élèveraient pas au montant de la contribution exigée, l’autorité intimée ayant déjà connaissance du dossier. Comme justement retenu par le TAPI, cette argumentation est prématurée, dans la mesure où le bordereau fixant le nouvel émolument pourra être contesté au moment de sa notification.

Partant, la notification séparée des décisions relatives à l’autorisation de construire et à l’émolument ne viole pas le principe de coordination des procédures, étant encore relevé qu’aucune disposition ne s’oppose à cette manière de faire. Au contraire, l’art. 255 RCI prévoit que le département notifie « également » un bordereau relatif à l’émolument administratif, ce qui implique donc le prononcé de deux décisions sujettes à recours.

Au vu de ce qui précède, l’autorité intimée était fondée à notifier le bordereau d’émolument litigieux sans attendre l’issue de la procédure de recours relative à l’autorisation de construire en cause.

Le recours, mal fondé, sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge solidaire des recourantes qui succombent (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 mars 2023 par A______, la B______ et C______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 février 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge solidaire de A______, de la B______ et de C______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me François BELLANGER, avocat des recourantes, au département du territoire-OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :