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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2096/2023

ATA/799/2023 du 24.07.2023 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2096/2023-FORMA ATA/799/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 juillet 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______, agissant par sa mère B______ recourant
représenté par Me Romain JORDAN, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé

 



EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : l’élève), né le ______2007, a intégré le cycle d’orientation C______ à Thônex (ci-après : école C______) à la rentrée 2020-2021.

b. Le 26 novembre 2021, l’école C______ a informé les parents d’élèves de 10ème année qu’elle avait reçu la confirmation du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) que les élèves de 11ème littéraire-scientifique (LS) auraient dorénavant des examens d’entrée à l’enseignement secondaire II. Les élèves qui désiraient aller au Collège de Genève, à l’École de culture générale (ECG) ou à l’École de commerce auraient tous les mêmes examens. Les points obtenus détermineraient dans quelle école ils pourraient continuer leur scolarité. Les examens de français, de mathématiques, d’allemand et d’anglais auraient lieu fin mars. Ils allaient déjà adapter leur programme de 11ème année afin de se concentrer dès janvier sur le champ de ces examens.

c. À la rentrée 2022-2023, l’élève a commencé la 11ème année LS à l’école C______.

d. En date des 22 et 23 mars 2023, il s’est présenté aux tests d’admission pour une rentrée en 1ère année du Collège de Genève à la rentrée 2023.

e. Par courriel du 24 mars 2023, la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES) a informé l’élève qu’il était « non admissible à l’enseignement secondaire II (ESII) ». Il avait obtenu les résultats suivants :

-          Mathématiques : 24 points, soit un échec ;

-          Français : 51 points, soit un seuil maturité ;

-          Anglais : 34 points, soit un seuil maturité ;

-          Allemand : 21 points, soit un échec.

Ce procès-verbal ne contenait pas d’indication de voies de recours.

f. Par courrier du 11 avril 2023, l’élève, par l’intermédiaire de ses parents, a contesté les résultats obtenus aux tests d’admission auprès de la DGES.

g. Le 8 mai 2023, l’élève, représenté par un avocat, a formé un « recours hiérarchique » devant la DGES, invoquant notamment une violation de l’art. 46 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA ‑ E 5 10) en raison de l’absence d’indication de voies de recours dans le procès-verbal du 24 mars 2023.

h. Par décision du 17 mai 2023, la DGES n’a pas autorisé l’élève à accéder en 1ère année du Collège de Genève, de l’ECG ou d’apprentissage d’employé de commerce ou encore en classe préparatoire, étant précisé qu’une admission par dérogation n’était règlementairement pas possible. Il était invité à intégrer le centre de formation préprofessionnelle.

Sur les quatre tests présentés, il n’avait pas obtenu les seuils requis en allemand et en mathématiques. Le fait que l’école C______ ait été autorisée à dispenser un programme comparable à celui du cycle d’orientation ne signifiait pas que la qualité de l’enseignement correspondait à celui exigé dans le système public. Il n’existait aucun motif pour une réévaluation des barèmes de mathématiques ou d’allemand.

B. a. Par acte expédié le 21 juin 2023, l’élève, représenté par sa mère, a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant, sur mesures provisionnelles, à son admission provisoire en 1ère année au sein de l’ECG jusqu’à ce qu’une décision soit rendue. Sur le fond, il a conclu à l’annulation de la décision entreprise et à ce qu’il soit admis en 1ère année de l’ECG dès la rentrée scolaire 2023/2024, subsidiairement en classe préparatoire. Plus subsidiairement, il a demandé à pouvoir repasser les examens d’allemand et de mathématiques lors de la session de rattrapage prévue en août 2023. À titre préalable, il a sollicité l’audition d’E______, chargé de mission auprès du DGES et F______, professeur de mathématiques auprès de l’école C______.

La décision violait les principes de la bonne foi, de la proportionnalité et de l’interdiction de l’arbitraire. Lors de sa première rentrée scolaire, l’école C______ bénéficiait des normes d’admission. Or, ce changement de législation impliquait la mise en place d’un régime transitoire ayant pour but de permettre aux personnes de maintenir les dispositions qu’elles avaient prises de bonne foi sur la base de l’ancienne réglementation. Il se trouvait dans l’impossibilité de redoubler sa 11ème année du cycle d’orientation au sein de l’école publique en raison de son âge, de sorte qu’il était privé de toute possibilité de construire un futur en accord avec ses aspirations.

La décision était en outre contraire au principe de l’égalité de traitement, puisqu’elle refusait d’offrir des chances équivalentes aux élèves issus des différentes filières, sans qu’aucun motif ne le justifie. Les élèves issus de l’école publique se trouvaient dans une situation beaucoup plus favorable que celle du recourant. Ils étaient en effet évalués sur l’ensemble de leur année scolaire et, en cas d’échec, pouvaient faire l’objet d’une dérogation fondée sur la prise en compte de leur situation particulière.

Il se situait très proche du seuil d’admission en classe préparatoire, soit à deux points en mathématiques. Son échec était entièrement dû au temps excessivement court octroyé pour chaque question, dès lors que les questions en elles-mêmes ne lui avaient pas paru excessivement difficiles. L’autorité intimée se devait ainsi d’examiner les circonstances concrètes du cas d’espèce.

Enfin, la décision entreprise violait son droit d’être entendu, sous l’angle du défaut de motivation, dès lors que l’autorité précédente avait écarté, pour des motifs erronés son grief tiré de l’art. 46 LPA.

b. Par réponse du 6 juillet 2023, la DGES a conclu au rejet du recours.

Il n’y avait eu aucun changement de législation entre l’entrée de l’élève à l’école C______ et sa demande d’admission dans l’enseignement secondaire II. Le recourant ne pouvait nullement se prévaloir de la non-rétroactivité du règlement dans la mesure où celui-ci octroyait la compétence au département de modifier les normes. Les normes de l’école C______ avaient été supprimées en septembre 2021 avec effet pour la rentrée 2022, de sorte qu’il lui aurait été loisible de s’inscrire au cycle d’orientation pour effectuer sa 11ème année et ainsi rejoindre l’enseignement secondaire sur la base de ses résultats. L’école C______ avait été dûment informée de cette situation et il lui appartenait de communiquer avec les élèves.

c. Par réplique du 13 juillet 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions. Les parents n’auraient pas pu anticiper un tel échec et réorienter leur fils au sein du système public. En refusant de tenir compte de l’ensemble des circonstances, l’autorité avait violé les principes de la bonne foi et de la proportionnalité.

Il a produit une attestation de son pédiatre datée du 6 juillet 2023, posant le diagnostic de trouble spécifique du langage écrit : dyslexie-dysorthographie avec un déficit en mémoire de travail ainsi qu’une dysgraphie. Selon le pédiatre, il était nécessaire qu’il bénéficie d’aménagements au niveau scolaire, dont du temps supplémentaire.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger sur mesures provisionnelles et au fond, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA ; art. 40 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 [REST - C 1 10.31]).

2.             Le recourant sollicite l’audition du chargé de mission de la DGES et du professeur de mathématiques de l’école C______.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l’administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas la juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285
consid. 6.3.1). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que la juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 142 III 433
consid. 4.3.2 ; 141 III 28 consid. 3.2.4). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l’occurrence, le recourant n’explique pas en quoi l’audition des deux témoins serait utile à la solution du litige. On ne trouve pas, dans la partie « en fait » de son mémoire de recours, d’offres de preuve en ce sens. S’agissant de l’audition du professeur de mathématiques, le dossier contient une attestation rédigée par la directrice de l’école C______, selon laquelle deux enseignants de mathématiques avaient effectué le test d’admission de mathématique et avaient eu besoin, chacun, de 25 minutes. Le recourant n’explique pas en quoi l’audition d’un professeur de mathématiques serait susceptible d’apporter des éléments supplémentaires par rapport à cette pièce. Quant à l’audition du chargé de mission de la DGES, le recourant ne précise pas sur quoi pourrait porter son témoignage, étant précisé que le dossier contient une comparaison des résultats des tests d’admission en 2022 et 2023.

On relèvera également, dans la mesure où la déclaration des parties est proposée comme preuve de certains faits, sans que le recourant ne conclue formellement à une comparution personnelle, qu’il n’a pas le droit à être entendu oralement. Son audition n’apparaît, au demeurant, pas à même d’apporter un éclairage supplémentaire sur les divers éléments qu’il a relevés dans ses écritures.

La chambre de céans dispose ainsi d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause, de sorte que ni la comparution personnelle des parties, ni l'audition des témoins sollicitée n'apparaissent nécessaires. Il ne sera donc pas donné suite à ces offres de preuves.

3.             Le recourant se plaint de l’absence de motivation de la décision querellée.

3.1 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse en saisir la portée, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 133 III 439 consid. 3.3 et les arrêts cités). Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision ; il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à ceux qui lui apparaissent pertinents (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 136 V 351 consid. 4.2 et les références).

3.2 Selon l’art. 46 al. 1 LPA, les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délai de recours. Cependant, la jurisprudence n'attache pas nécessairement la nullité à l'existence de vices dans la notification: la protection des parties est suffisamment garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1010/2020 du 26 février 2021 consid. 4.3; 8C_130/2014 du 22 janvier 2015 consid. 2.3.2 publié in SJ 2015 I 293). Il y a lieu d'examiner, d'après les circonstances du cas concret, si la partie intéressée a réellement été induite en erreur par l'irrégularité de la notification et a, de ce fait, subi un préjudice. Il convient à cet égard de s'en tenir aux règles de la bonne foi qui imposent une limite à l'invocation du vice de forme (ATF 122 I 97 consid. 3a/aa; arrêt du Tribunal fédéral 9C_863/2013 du 9 mai 2014 consid. 3.2).

3.3 Devant la chambre de céans, le recourant se plaint de ce que l’autorité intimée aurait écarté, pour des motifs erronés, le grief relatif à l’art. 46 LPA qu’il avait invoqué dans son « recours hiérarchique » du 8 mai 2023.

Il ressort toutefois de la décision entreprise que l’autorité intimée a dûment examiné le grief invoqué par le recourant. Elle a considéré que son courriel du 24 mars 2023 communiquant les résultats obtenus aux tests d’admission ne respectait pas la forme requise pour la notification d’une décision. Dans la mesure où la DGES était l’auteure de ce procès-verbal et qu’à teneur de l’art. 40 REST, les décisions de la DGES pouvaient être contestées devant la chambre administrative, le « recours hiérarchique » formé par le recourant devait être considéré comme une demande de reconsidération. Enfin, la décision entreprise répondait à toutes les conditions d’une décision formelle, de sorte que l’éventuelle violation du droit d’être entendu devait être considérée comme réparée.

Il apparaît ainsi que la décision entreprise contient tous les éléments permettant de la contester en toute connaissance de cause, ce que le recourant a d’ailleurs fait. Le recourant semble confondre le défaut de motivation, qui relève du droit d’être entendu, avec son désaccord au sujet de la motivation présentée par l’autorité intimée. Or, quoi qu’il en dise, l’éventuelle irrégularité dans la notification des résultats d’examen ne lui a causé aucun préjudice, puisqu’il a été en mesure de la contester, ce qu’il a d’ailleurs admis. L’acte attaqué répond en effet à toutes les exigences formelles et matérielles auxquelles sont soumises les décisions. Enfin, le recourant n’a pas été privé d’un degré de juridiction, les décisions de la DGES faisant l’objet d’un recours direct devant la chambre administrative (art. 40 REST).

Le grief tiré d’un défaut de motivation de la décision entreprise doit ainsi être rejeté.

4.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de la DGES de refuser d’admettre le recourant en 1ère année du Collège de Genève, de l’ECG, d’apprentissage d’employé de commerce ou en classe préparatoire.

4.1 La formation est obligatoire jusqu’à l’âge de la majorité au moins (art. 194 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 -
Cst-GE - A 2 00).

Le degré secondaire II est composé notamment des établissements scolaires du Collège de Genève, du collège pour adultes, de l’école de culture générale et de l’école de culture générale pour adultes (art. 84 al. 1 let. a de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 - LIP - C 1 10).

Les conditions d’admission, de promotion et d’obtention des titres sont fixées par voie réglementaire (art. 85 al. 1 LIP).

4.2 Les élèves issus d'une école ou d’une section n’étant pas au bénéfice de normes d’admission sont astreints à des tests d’admission (art. 30 RAES-II).

Selon l’art. 31 al. 1 RAES-II, les élèves visés à l'art. 30 RAES-II sont soumis à des tests d'admission en 12ème année permettant de différencier leur admissibilité dans les filières suivantes, classées par ordre décroissant d'exigences : en filière maturité, mention bilingue, gymnasiale ou professionnelle pendant la formation professionnelle initiale d'employé de commerce en voie plein temps (let. a) ; en filière gymnasiale ou formation professionnelle initiale d'employé de commerce en voie plein temps, filière maturité professionnelle pendant la formation professionnelle initiale (let. b) ; en formation professionnelle initiale d'employé de commerce en voie plein temps, profil E (let. c) ; à l'école de culture générale ou en formation professionnelle initiale d'employé de commerce en voie plein temps, profil B (let. d).

Les élèves visés à l'art. 30 RAES-II sont admis en 12ème année à l’ECG (art. 32 RAES-II) et au Collège de Genève (art., 33 RAES-II ), ainsi qu’au 1er semestre de formation professionnelle initiale d’employé de commerce en voie plein temps (art. 35 RAES-II ), pour autant qu'ils réussissent au moins 3 trois des tests suivants : français, anglais et mathématiques, voire allemand lorsqu'ils ont préalablement étudié cette langue.

Selon l’art. 36 RAES-II, le résultat des tests d'admission est uniquement valable pour la rentrée scolaire suivant immédiatement la session. Les élèves échouant aux tests d’admission peuvent se représenter une seconde et dernière fois l’année suivante (art. 39 RAES-II).

4.3 Selon l’art. 27 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 (REST – C 1 10.31), les élèves sont évalués notamment par des travaux effectués en classe, des interrogations écrites ou orales, des travaux personnels ou de groupe (al. 1). La valeur des travaux des élèves est exprimée selon l’échelle suivante : 6 = excellent ; 5 = bon ; 4 = suffisant ; 3 = faible, insuffisant ; 2 = très faible ; 1 = nul (annulé). Les notes égales ou supérieures à 4,0 sont suffisantes et celles inférieures à 4,0 sont insuffisantes (al. 2).

4.4 Selon l’art. 3 al. 1 du règlement relatif à l’enseignement privé du 10 mai 2023 (REPriv – C 1.10.83), est considérée comme une école privée au sens du présent règlement la structure qui répond aux conditions cumulatives suivantes : située dans le canton, elle comprend des locaux, une direction et un corps enseignant ainsi qu’un ou plusieurs programmes d'enseignement (let. a) ; l’enseignement ne s’adresse pas à un cercle fermé de personnes (let. b) ; l'enseignement est collectif et dispensé à un groupe d'au moins six élèves (let. c).

Selon l’art. 8 al. 1 REPriv, les personnes physiques ou morales qui souhaitent ouvrir et exploiter une école privée doivent déposer une demande préalable d'autorisation écrite auprès de l'autorité de surveillance pour obtenir une autorisation d’exploiter une école privée.

L’autorisation d’exploiter une école privée ne constitue pas une reconnaissance du département quant à la valeur de l’enseignement. En aucun cas elle ne peut être utilisée à des fins publicitaires. Demeurent réservées les écoles privées dispensant des formations débouchant sur des titres reconnus (art. 13 al. 1 REPriv).

4.5 En l’espèce, il n’est pas contesté que l’école C______ est une école privée au sens de l’art. 3 al. 1 REPriv, autorisée à dispenser un programme comparable à celui du cycle d’orientation. Il n’est pas non plus contesté qu’elle n’est plus au bénéfice de normes d’admission depuis le mois de septembre 2021 et que ce changement a été effectif dès la rentrée scolaire 2022-2023. C’est ainsi à bon droit que le recourant a été soumis à des tests d’admission pour la rentrée scolaire 2023-2024 en 12ème année à l’ECG, ce qu’il ne conteste pas. Il a toutefois échoué aux tests de mathématiques et d’allemand. Or, en application des art. 32 (admission à l’ECG), 33 (admission à l’école de Genève) et 35 RAES-II (admission en formation professionnelle initiale d’employé de commerce en voie plein temps), il lui incombait de réussir au moins trois des quatre tests de français, anglais, mathématiques et allemand.

Dans ses écritures, le recourant se plaint de ce que les seuils de réussite ne résultent pas du règlement, de sorte qu’ils seraient discrétionnaires. L’intimée a toutefois expliqué, dans sa réponse devant la chambre de céans, que les seuils répondaient aux principes posés par l’art. 29 REST, selon lequel les notes inférieures à 4.0 étaient insuffisantes. Ainsi, pour les tests de français, allemand et anglais, le seuil fixé pour la maturité était de 66%, correspondant à un 4.0 sur l’échelle de notation et le seuil certificat était de 50% correspondant à un 3.0. Pour les mathématiques, le seuil maturité était fixé à 66% et celui du certificat à 60%. S’agissant du seuil pour la classe préparatoire, il avait été calculé sur le référentiel des résultats devant être obtenus par les élèves de 11ème année du cycle d’orientation, section langues vivantes et communication, soit l’obtention d’un 3.5 dans les disciplines principales.

Ces explications sont conformes aux critères fixés par le REST et le RAES-II pour l’admission dans l’enseignement secondaire II, et le recourant ne les conteste pas dans sa réplique. Il se contente de relever que l’autorité intimée n’aurait pas tenu compte de l’ensemble des circonstances de son cas, en particulier du fait qu’il ne se situe qu’à deux points en mathématiques de la filière préparatoire de l’ECG et qu’il a atteint le niveau maturité, soit le niveau le plus élevé, en français et en anglais. Son échec au test de mathématiques serait par ailleurs dû au temps excessivement court octroyé pour chaque question, comme en témoignait l’attestation de l’école du 9 juin 2023. Il se prévaut également des commentaires de ses professeurs sur sa capacité à intégrer sans difficulté la filière convoitée et du trouble spécifique du langage écrit attesté par son pédiatre.

De telles circonstances ne sauraient toutefois être prises en compte. Pour des raisons d’égalité de traitement entre élèves, les critères d’admission sont fixés de manière stricte. Il n’est dès lors pas possible de déroger au texte clair des art. 32, 33 et 35 RAES-II qui soumettent l’admission en 12ème année à la réussite de trois tests (cf. ATA/904/2015 du 1er septembre 2015 consid. 5), étant précisé qu’à teneur du règlement applicable, aucune dérogation n’est accordée en cas d’échecs aux tests d’admission. L’art. 39 RAES-II prévoit en effet uniquement la possibilité de se représenter une seconde et dernière fois l’année suivante.

S’agissant de l’attestation médicale de son pédiatre, force est de relever que
celle-ci a été rédigée le 6 juillet 2023, soit après la session d’examens. La chambre de céans rappellera au demeurant que, selon la jurisprudence développée en matière d’examens, les candidats qui ne sentent pas aptes, pour des raisons de santé, à se présenter à un examen doivent l’annoncer avant le début de celui-ci. À défaut, l’étudiant accepte le risque de se présenter dans un état déficient qui ne peut justifier par la suite l’annulation des résultats obtenus (ATA/128/2023 du 7 février 2023 consid. 2.2.1 ; ATA/345/2020 du 7 avril 2020 consid. 7b ; ATA/250/2020 du 3 mars 2020 consid. 4c ; ATA/192/2020 du 18 février 2020). Ainsi, dans la lignée de cette jurisprudence, il appartient à l’élève présentant un trouble spécifique du langage écrit dûment diagnostiqué d’en informer l’autorité au préalable afin qu’il puisse bénéficier des aménagements appropriés. Il ne peut s’en prévaloir après coup en cas d’échec aux examens.

Les arguments du recourant seront partant écartés.

5.             Invoquant une violation du principe de la bonne foi, le recourant reproche à l’intimée de n’avoir pas prévu de régime transitoire lui permettant de prendre ses dispositions afin de garantir la poursuite de sa formation.

5.1 Le principe de la bonne foi protège le justiciable, à certaines conditions, dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration. Un renseignement ou une décision erronés de l'administration agissant dans les limites de ses compétences peuvent obliger
celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur. Il faut pour cela (1) que l'autorité qui a donné les renseignements soit compétente en la matière ou que le justiciable puisse, pour des raisons suffisantes, la considérer comme compétente, (2) que les renseignements fournis par l'autorité se rapportent à une affaire concrète touchant le justiciable, (3) que celui-ci n'ait pas pu se rendre compte facilement de l'inexactitude des renseignements obtenus, (4) qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (5) que le contexte juridique à ce moment-là soit toujours le même qu'au moment où les renseignements ont été donnés (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1; 143 V 341 consid. 5.2.1; 141 I 161 consid. 3.1). Dans tous les cas, l'intérêt à une correcte application du droit ne doit pas se révéler prépondérant sur la protection de la confiance (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2; 129 I 161 consid. 4.1). 

5.2 Selon les circonstances le principe de la bonne foi peut imposer en cas de changement de législation un régime transitoire (ATF 134 I 23 consid. 7.6.1 ; 130I 26 consid. 8.1). Ainsi, un délai transitoire doit pouvoir permettre aux intéressés d'adapter leur train de vie à une éventuelle réduction de leurs revenus (ATF 130 V 18 consid. 3.3 et les références citées). Ce régime doit toutefois permettre aux administrés de s'adapter à la nouvelle réglementation et non pas de profiter le plus longtemps possible de l'ancien régime plus favorable (ATF 134 I 23 consid. 7.6.1 précité; 123 II 385 consid. 9).

5.3 En l’occurrence, ainsi que l’a relevé l’intimée, la mise en place d’un régime transitoire implique une modification législative. Or celle-ci fait précisément défaut en l’espèce. Le fait que l’école C______ ne bénéficie plus des normes d’admission, alors qu’elle en bénéficiait lors de l’intégration du recourant à l’école en 2020 ne constitue pas une nouvelle réglementation. Le RAES-II distingue en effet clairement la situation des écoles privées au bénéfice des normes d’admission de celles qui n’en bénéficient pas, aucun changement n’ayant été adopté à ce titre. S’agissant du grief tiré de la bonne foi, force est de retenir que le recourant a été dûment averti du changement de statut de son école par courrier du 26 novembre 2021. Contrairement à ce qu’il soutient, ce courrier indique clairement que les élèves de 11ème année seraient soumis à des tests d’admission s’ils souhaitaient poursuivre leur formation au collège, à l’ECG ou à l’école de commerce. Le recourant ne prétend pas qu’en dépit de ce courrier, il aurait reçu des assurances de la part de l’intimée quant à une admission automatique en fin de 11ème année. Par ailleurs et comme le relève l’intimée, à réception dudit courrier, le recourant était encore en 10ème année d’école obligatoire de sorte qu’il lui aurait été loisible de s’inscrire à l’école publique pour effectuer sa 11ème année et rejoindre l’enseignement secondaire sur la base de ses résultats. Dans la mesure où il a choisi de poursuivre sa scolarité à l’école privée, ce qui impliquait qu’il serait astreint à des tests d’admission, il ne saurait se plaindre, après avoir échoué à deux tests sur les quatre présentés, du changement de statut de son école.

Le grief tiré d’une violation de la bonne foi doit partant être rejeté.

6.             Invoquant une violation de l’égalité de traitement, le recourant reproche à l’autorité intimée de traiter différemment les élèves issus de l’école publique, qui peuvent bénéficier d’une admission sur dérogation (art. 16 RAES-II) des autres élèves, qui n’y auraient pas droit.

6.1 Selon l’art. 16 al. 1 RAES-II, les élèves n'ayant pu valider que deux trimestres de 11ème année en raison de justes motifs, tels que la maladie ou un accident, peuvent être admis en 12ème année d'une filière pour laquelle ils remplissent les conditions d'admission. Par valider, il faut comprendre que les élèves ont été évalués de manière significative dans toutes les disciplines. Selon l’al. 2, peuvent être admis à titre exceptionnel dans l'enseignement secondaire II après analyse du dossier par la direction générale de l'enseignement secondaire II et pour autant qu'ils ne puissent pas redoubler : les élèves n'ayant pas validé deux trimestres de 11ème année (let. a) ; ou les élèves n'ayant pas de justes motifs tels que visés à l'alinéa 1 pour n'avoir pas validé un des trois trimestres (let. b).

6.2 En l’occurrence, contrairement à ce que prétend le recourant, cette disposition s’applique aussi bien aux élèves de l’école publique qu’aux élèves issus d’une section de 11ème année HarmoS d’une école privée membre de l’Association genevoise des écoles privées (ci-après : AGEP) au bénéfice de normes d’admission (art. 27 al. 3 RAES-II) et aux élèves issus d’une école publique française ou privée reconnue par le ministère français de l’Education nationale (art. 29 al. 3 RAES-II). Ainsi, si l’art. 16 al. 1 RAES-II ne s’applique pas à la situation du recourant, c’est en raison du fait que son école n’est pas au bénéfice des normes d’admission. Dans cette mesure, sa situation n’est pas comparable à celle des autres situations visées par cette disposition, ce qui justifie un traitement différent. Par ailleurs,
l’art. 16 al. 1 RAES-II n’a pas pour vocation d’octroyer une dérogation aux élèves n’obtenant pas les résultats scolaires suffisants pour accéder à une filière donnée. Elle permet uniquement aux élèves évalués partiellement, en raison d’un problème de santé ou d’une intégration tardive, d’accéder à une filière pour laquelle ils ont pu valider deux semestres. Cette hypothèse ne vise ainsi pas la situation du recourant qui a échoué aux tests d’admission.

6.3 Le grief tiré de la violation de l’égalité de traitement doit partant également être rejeté.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

7.             Le présent arrêt rend sans objet la requête de mesures provisionnelles.

8.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 550.- sera mis à la charge de la mère du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 juin 2023 par A______, agissant par sa mère B______, contre la décision de la direction générale de l’enseignement secondaire II du 17 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge d’B______ un émolument de CHF 550.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat du recourant ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Florence KRAUSKOPF et Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

S. CARDINAUX

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :