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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1220/2023

ATA/783/2023 du 18.07.2023 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1220/2023-FORMA ATA/783/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juillet 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

INSTITUT E______ intimé

 



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1998 en B______, a obtenu en 2018 un baccalauréat en économie et en science politique au C______ de l’université de D______.

b. Elle s’est inscrite, au semestre d’automne 2021, en maîtrise en économie internationale à l’Institut E______ (ci-après : l’institut).

c. Le programme comprenait notamment le cours obligatoire « Econometrics I », valant 6 crédits et se déroulant durant un semestre d’automne.

B. a. A______ a suivi une première fois à l’institut le cours « Econometrics I » au semestre d’automne 2021-2022.

b. En janvier 2022, elle a obtenu la note de 3.5 et n’a pas bénéficié des crédits assortissant la réussite des évaluations.

c. Elle s’est réinscrite au cours « Econometrics I » au semestre d’automne 2022-2023.

d. Elle a alors obtenu les notes de 1.0 pour le projet à réaliser à la maison individuellement ou en groupe (pondération 20 %), 3.25 pour l’examen en classe (pondération 40 %) et 4.25 pour le projet individuel final à réaliser à la maison (pondération 40 %), soit une moyenne de 3.2 arrondie à 3.25.

e. Par décision du 13 février 2023, la directrice de l’institut constatant que A______ n’avait pas obtenu les crédits d’enseignement d’un cours obligatoire prévu par le curriculum de la maîtrise, a prononcé son élimination définitive de l’institut.

Selon le procès-verbal annexé, daté du 6 février 2023, elle avait acquis 75 crédits et son diplôme n’était pas obtenu.

f. Le 13 février 2023, A______ a fait opposition à son élimination (« appeal against elimination »), demandant à être entendue.

Elle avait une formation en économie et en sciences politiques et avait acquis une expérience en travaillant dans le domaine du développement économique en B______. Elle avait choisi l’institut pour sa renommée et ses liens avec les organisations internationales.

Des difficultés personnelles avaient porté atteinte à ses performances académiques. Elle était boursière et avait des ressources financières limitées. Elle avait dû se battre pour s’intégrer à ses pairs. Elle avait réalisé que ses acquis interdisciplinaires n’étaient pas en sa faveur et que la pente devant elle était raide. Tout cela avait affecté sa santé mentale et elle avait échoué à satisfaire aux exigences du cours « Econometrics I ».

Le style d’enseignement de la professeure en charge durant le premier semestre, consistant à poser des questions en classe aux étudiants, lui avait causé une grande anxiété sociale, lui faisant craindre d’être humiliée devant ses camarades, comme elle n’avait jusque-là jamais étudié cette matière. Ses psychiatres avaient par la suite diagnostiqué chez elle un trouble généralisé de l’anxiété (« Generalized Anxiety Disorder (GAD) »).

Elle avait commencé à manquer les cours de l’enseignement « Econometrics I » du second semestre d’automne 2022-2023 et négligé d’utiliser les ressources que celui-ci offrait. Elle pensait pouvoir étudier par elle-même, mais rétrospectivement, elle avait compris qu’il s’agissait d’une terrible erreur. Ses résultats de 3.25 et 4.25 montraient ses efforts, malgré ses graves problèmes de santé. Elle avait obtenu la note de 5.0 en « Econometrics 2 » et sa moyenne semestrielle, compte non tenu de la note d’« Econometrics I », était de 5.625. Cela démontrait ses capacités de compréhension et la possibilité de refaire l’examen d’« Econometrics I » lui offrirait l’occasion de réaliser la même performance.

Elle joignait un certificat médical établi en anglais le 19 janvier 2023 par la Dre F______, psychiatre à G______, en B______, certifiant qu’elle avait été diagnostiquée avec un trouble anxieux généralisé depuis septembre 2022, la date exacte du début des consultations étant le 12 septembre 2022 selon le dossier. Elle suivait à présent des sessions de thérapie en ligne avec elle, sous la supervision du Dr H______ et de leur équipe de conseillers I______.

g. Par décision du 8 mars 2023, la directrice de l’institut a rejeté l’opposition, se fondant sur le préavis de la commission des oppositions de la veille, qu’elle annexait, et a écarté la demande d’audition.

A______ avait obtenu la note insuffisante de 3.5/6 au cours « Econometric I » suivi au semestre d’automne 2021 et avait donc dû suivre le même cours donné au semestre suivant par un autre enseignant. Au terme de ce semestre, elle avait à nouveau obtenu une note insuffisante, de 3.25/6. Seules deux tentatives étant permises, elle avait échoué définitivement à un cours obligatoire et devait être éliminée.

Les griefs adressés aux enseignements et à la charge de travail étaient infondés. Poser des questions en cours était légitime. Aucun autre élève ne s’était plaint. L’argument relatif aux résultats dans les autres cours n’était pas pertinent, dès lors que ses résultats insuffisants attestaient qu’elle n’avait pas acquis les connaissances du cours « Econometrics I ».

Elle avait manqué la plupart des « lectures » et toutes les « review sessions » lors du semestre d’automne 2022 et n’avait pas utilisé les ressources mises à disposition par l’enseignante, notamment les examens « en blanc » (« mock exams ») destinés à préparer les trois évaluations. Elle n’avait pas rendu le « take home project » (20 % de la note). Ses manquements avaient été légitimement sanctionnés et elle avait elle-même admis avoir commis une terrible erreur.

L’argument du stress, de l’anxiété et de la dépression dont elle aurait souffert devait être écarté. Elle avait fourni un certificat médical daté du 19 janvier 2023 attestant d’un diagnostic de trouble anxieux généralisé posé le 12 septembre 2022. Celui-ci était formellement recevable et il n’y avait pas lieu de remettre en cause le diagnostic. Cela étant, elle avait été en mesure de suivre les autres cours sans rapporter de difficulté et avait réussi les examens, avec pour certains de bons résultats, de sorte qu’il paraissait difficile de justifier l’échec par un problème de santé mentale l’empêchant de mener à bien ses études, de venir aux cours et de remettre ses travaux.

C. a. Par acte remis au greffe le 6 avril 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce qu’elle soit autorisée à « repasser l’examen ou le cours et d’obtenir son diplôme ».

Elle avait obtenu la note de 5 au cours « Econometrics II », qui était une continuation à certains égards plus avancée de « Econometrics I ».

Elle avait reçu un diagnostic de trouble anxieux généralisé au début du semestre d’automne 2022 et lorsqu’elle avait dû reprendre le cours, sa santé mentale l’en avait empêchée. Elle estimait en outre que les examens avaient été sévèrement notés. Elle joignait les transcriptions, qui montraient qu’elle avait compris des aspects essentiels de la matière malgré son état de santé.

Elle avait expliqué dans son opposition pourquoi elle avait développé une anxiété excessive au cours « Econometrics I », soit parce qu’elle avait déjà échoué au premier examen. L’anxiété pouvait être spécifique à certains objets particuliers. Une consultation de la commission des oppositions avec un professionnel de la santé l’aurait convaincue du bien-fondé de ces arguments.

La commission avait retenu à tort qu’elle n’avait pas pu répondre aux questions en cours. En réalité aucune question ne lui avait été posée dès lors qu’elle ne pouvait participer aux cours.

La professeure ne l’avait pas rencontrée après les résultats de l’examen à domicile, contrairement aux autres étudiants, de sorte qu’elle avait subi une différence de traitement.

Le 12 janvier 2023, alors qu’elle avait demandé un réexamen et parlé au professeur J______, celui-ci s’était entretenu avec l’enseignante et avait décidé que pour que le processus reste équitable, ils ne pouvaient pas laisser un seul étudiant repasser un examen, à moins que la commission le recommande. J______ lui avait en outre assuré qu’il ne siégerait pas dans la commission, car il serait partial, or il apparaissait y avoir siégé avec une voix décisionnelle.

Les deux enseignements successifs et les examens du cours « Econometrics I » étaient très différents. Les enseignants étaient différents. Le premier examen comportait des questions à choix multiples et le second des problèmes comportant des calculs. Elle avait ainsi échoué à deux cours différents et elle méritait une chance de repasser l’examen.

b. Le 8 mai 2023, l’institut a conclu au rejet du recours.

Le cours « Econometrics I » avait une approche plus théorique de la matière et visait à acquérir une solide compréhension de la théorie économétrique sous-tendant les modèles économétriques basiques. Le cours « Econometrics II » avait une approche plus pratique et se concentrait sur les intuitions et les applications pratiques des différentes techniques économétriques. Les deux cours ne formaient pas une continuité et il était possible de réussir ou de rater l’un d’eux indépendamment de l’autre.

La recourante n’était jamais venue à aucun cours « Econometrics II » durant tout le semestre d’automne 2022. Durant ces cours, les évaluations étaient présentées et les questions des étudiants discutées. L’enseignante et son assistante se tenaient en outre à disposition des étudiants pour répondre à leurs questions.

Elle avait obtenu la note de 1.0 à la première évaluation, étant précisé qu’elle avait décidé de réaliser cet examen individuellement et qu’elle s’était limitée dans son travail à reprendre les prémisses des questions posées. L’examen avait été évalué séparément par l’enseignante et son assistante, qui avaient chacune attribué la note 1.0. La recourante n’avait jamais demandé à les rencontrer après avoir obtenu le résultat.

Après la troisième évaluation, la recourante avait demandé à rencontrer l’enseignante. Une réunion avait eu lieu en présence de J______ et de l’enseignante, et celle-ci lui avait expliqué les opportunités qui lui étaient offertes pour obtenir un soutien académique dans le cadre de son cours.

C’était pour la première fois dans son opposition du 13 février 2023 que la recourante avait invoqué un trouble de l’anxiété qui l’aurait empêchée de suivre le cours « Econometrics I » et de réussir les évaluations qui y étaient attachées.

L’échec successif aux deux semestres du cours « Econometrics I » entraînait l’élimination. Aucune circonstance exceptionnelle ne pouvait être retenue. La recourante avait annoncé le trouble psychique tardivement. La causalité entre celui-ci et l’échec ne pouvait être établie, dès lors qu’elle avait réussi les autres examens.

Enfin, la recourante se plaignait de la sévérité des évaluations mais n’exposait pas en quoi ses résultats auraient été appréciés arbitrairement. Ses mauvaises notes faisaient suite à un manque d’implication de sa part dans le second cours « Econometrics I ».

c. Le 22 juin 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions.

L’institut lui reprochait de ne pas avoir consulté ses professeurs, mais elle aurait fait le nécessaire si on l’avait informée. Elle était boursière et originaire d’un pays en développement, et n’avait pas conscience qu’elle pouvait s’ouvrir sur sa santé mentale auprès de ses enseignants.

K______ lui avait affirmé que la présentation d’un certificat médical devant la commission des oppositions serait suffisante. La commission avait d’ailleurs reconnu que le certificat médical était conforme aux prescriptions de l’institut.

Elle souhaitait souligner les règlements de l’institut et la manière dont ils éliminaient les étudiants en leur offrant un « avenir sombre » après seulement deux échecs dans un cours, par comparaison aux « universités publiques standard » comme l’Université de Genève, où les étudiants étaient autorisés à passer l’examen trois fois.

d. Le 5 juillet 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 22 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l’institut du 27 mai 2016 - RIO-IHEID - https://www.Graduateinstitute.ch /sites/internet/files/2019-04/Procedure-opposition.pdf).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision sur opposition de l’institut du 8 mars 2023 confirmant la décision d'élimination.

3.             La situation est régie par la loi sur l'université du 13 juin 2008 (LU - C 1 30), le statut, le programme de master et règlement d’études de l’institut du 1er septembre 2022 (ci-après : RE), le RIO-HEID et la LPA.

3.1 Pour obtenir la maîtrise, les étudiants doivent réunir un total de 120 crédits ECTS en suivant notamment les enseignements requis (art. 5 RE), dont les enseignements obligatoires, et obtenir pour ces derniers et les enseignements à option, 90 crédits ECTS avant la fin du quatrième semestre ainsi que 18 crédits au moins par semestre (art. 6 ch. a RE). Une note supérieure ou égale à 4.0 dans un enseignement donne droit à l’octroi des crédits correspondants (art. 8 ch. 5 RE). Une note inférieure à 4.0 ne donne pas droit à l’octroi de crédits (art. 8 ch. 4 RE). La durée des études est en principe de quatre semestres consécutifs (art. 10 ch. 1 RE). Les étudiants qui ont acquis 120 crédits ECTS conformément au RE, notamment aux conditions fixées aux art. 5 à 9 RE, et en respectant le délai prévu à l’art. 10 RE, obtiennent le diplôme de maîtrise (art. 12 ch. 1 RE). Est définitivement éliminé l’étudiant qui ne satisfait pas aux conditions de réussite des art. 5 à 9 RE ou ne respecte pas les délais prévus à l’art. 10 RE (art. 13 ch. 1 RE).

3.2 En l’espèce, la recourante ne conteste pas que ses deux échecs successifs au même examen doivent entraîner son élimination définitive de l’institut.

4.             La recourante fait valoir que sa santé mentale l’aurait empêchée de suivre le cours « Econometrics I » au semestre d’automne 2021-2022 et de réussir les évaluations qui y étaient attachées.

4.1 L’art. 13 RE, qui prévoit les cas d’élimination de l’institut, mentionne à son deuxième alinéa que la décision est prise par le directeur de l’institut, qui tient compte des situations exceptionnelles.

4.2 Selon la jurisprudence constante, l'admission d'une situation exceptionnelle doit se faire avec restriction. Il en va de l'égalité de traitement entre tous les étudiants s'agissant du nombre de tentatives qu'ils sont autorisés à effectuer pour réussir leurs examens. N'est ainsi exceptionnelle que la situation particulièrement grave et difficile pour l'étudiant, ce tant d'un point de vue subjectif qu'objectif. Les effets perturbateurs doivent avoir été dûment prouvés par l'étudiant et être en lien de causalité avec l'événement. Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d'un large pouvoir d'appréciation, dont l'autorité de recours ne censure que l'abus. La chambre de céans n'annule donc le prononcé attaqué que si l'autorité intimée s'est laissée guider par des motifs sans rapport avec l'examen ou d'une autre manière manifestement insoutenable (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/427/2022 du 26 avril 2022 consid. 3b ; ATA/281/2021 du 3 mars 2021).

Ont ainsi été considérées comme des situations exceptionnelles le décès d'un proche s'il est établi qu'il a causé un effet perturbateur en lien de causalité avec l'échec de l'étudiant, de graves problèmes de santé ou encore l'éclatement d'une guerre civile avec de très graves répercussions sur la famille de l'étudiant. En revanche, des difficultés financières, économiques ou familiales ainsi que l'obligation d'exercer une activité lucrative en sus des études ne constituent pas des circonstances exceptionnelles, même si elles représentent une contrainte. Ces difficultés sont certes regrettables, mais font partie d'une réalité commune à de très nombreux étudiants (ATA/281/2021 précité ; ATA/459/2020 du 7 mai 2020 consid. 5b ; ATA/250/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b et les références citées).

4.3 Les candidats qui ne se sentent pas aptes, pour des raisons de santé, à se présenter à un examen doivent l’annoncer avant le début de celui-ci. À défaut, l’étudiant accepte le risque de se présenter dans un état déficient qui ne peut justifier par la suite l’annulation des résultats obtenus. Un motif d'empêchement ne peut, en principe, être invoqué par le candidat qu'avant ou pendant l'examen (ATA/128/2023 du 7 février 2023 consid. 2.2.1 ; ATA/345/2020 du 7 avril 2020 consid. 7b ; ATA/250/2020 du 3 mars 2020 consid. 4c ; ATA/192/2020 du 18 février 2020).

4.4 Des exceptions au principe évoqué ci-dessus permettant de prendre en compte un certificat médical présenté après l'examen ne peuvent être admises que si cinq conditions sont cumulativement remplies : la maladie n'apparaît qu'au moment de l'examen, sans qu'il ait été constaté de symptômes auparavant, le candidat à l'examen acceptant, dans le cas contraire, un risque de se présenter dans un état déficient ne saurait justifier après coup l'annulation des résultats d'examens ; aucun symptôme n'est visible durant l'examen ; le candidat consulte un médecin immédiatement après l'examen ; le médecin constate immédiatement une maladie grave et soudaine qui, malgré l'absence de symptômes visibles, permet à l'évidence de conclure à l'existence d'un rapport de causalité avec l'échec à l'examen ; l'échec doit avoir une influence sur la réussite ou non de la session d'examens dans son ensemble (ATA/128/2023 du 7 février 2023 consid. 2.2.2 et les références citées).

4.5 En l’espèce, la recourante n’a fait état que le 13 février 2023 du certificat médical établi le 19 janvier 2023 par sa psychiatre à G______ et attestant d’un trouble diagnostiqué en septembre 2022 et d’un traitement entrepris depuis lors.

Or, en février 2023, elle avait subi les trois évaluations dont les résultats insuffisants allaient entraîner son élimination de l’institut. Elle n’avait par ailleurs fréquenté aucune des séances du cours « Econometrics I » depuis le début du semestre d’automne 2022-2023.

Il appartenait à la recourante d’invoquer le trouble anxieux généralisé dès son apparition et son diagnostic, ce d’autant plus qu’il l’aurait selon elle empêchée de fréquenter un cours. Faute de l’avoir fait à temps, elle ne pouvait, selon la jurisprudence constante, invoquer son état de santé comme circonstance exceptionnelle à l’appui d’une demande de suivre un troisième cours « Econometrics I » et subir à nouveau les examens correspondants.

Aucune exception à l’obligation de présenter un certificat avant l’examen ne peut par ailleurs être prise en compte dès lors que le trouble et ses effets tels que décrits par la recourante ne sont pas apparus après un examen mais étaient connus au début du semestre déjà.

Les différences entre les systèmes d’enseignement supérieur en B______ et en Suisse invoquées par la recourante et le fait qu’elle aurait ignoré qu’elle pouvait faire état de sa santé mentale avec ses professeurs ne lui sont d’aucun secours s’agissant de l’application du droit suisse, étant observé que c’est vers une psychiatre indienne qu’elle s’est tournée dès le mois de septembre 2022 et que c’est de celle-ci qu’elle a obtenu un certificat médical à l’appui de son opposition.

Le fait que la commission ne lui ait pas demandé un certificat médical détaillé, comme elle s’en plaint, est en outre sans effet sur le fait qu’elle a invoqué son trouble tardivement.

C’est ainsi à bon droit que l’institut n’a pas tenu compte de l’état de santé de la recourante, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la question de la causalité de celui-ci sur l’aptitude à suivre les cours et les résultats atteints, en particulier à la lumière des performances obtenues dans les autres disciplines.

5.             La recourante fait valoir qu’elle a obtenu des bons résultats au cours « Econometrics II », ce qui établirait de manière générale ses compétences et démontrerait que le trouble anxieux avait produit ses effets sur le cours « Econometrics I ». Elle soutient par ailleurs que les deux cours « Econometrics I » qu’elle a suivis adoptaient des didactiques et des évaluations différentes.

Elle perd de vue que chaque discipline est enseignée et évaluée individuellement, indépendamment de la répétition d’un cours ou de l’éventuelle continuité entre deux cours – cette dernière ayant d’ailleurs été niée par l’intimé. Pour le surplus, la question des éventuels effets ciblés du trouble psychique sur certaines parties des études, que le certificat médical n’aborde pas, peut demeurer sans réponse dès lors que la tardiveté de l’allégation excluait à elle seule qu’il fût tenu compte du trouble.

Le moyen tombe à faux.

6.             La recourante fait valoir qu’elle aurait été traitée différemment des autres élèves.

6.1 Une décision viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) lorsqu’elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’elle omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 145 I 73 consid. 5.1 ; 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_231/2021 du 3 mai 2021 consid. 5.1 ; 2C_538/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.2).

6.2 En l’espèce, la recourante se plaint de ne pas avoir rencontré les enseignants pour recevoir des explications alors que les étudiants qui avaient obtenu comme elle de mauvais résultats avaient été reçus par ces derniers. L’intimé conteste que tous les étudiants ayant obtenu des mauvais résultats auraient été reçus.

Il ressort du dossier que les enseignants se tenaient à disposition des étudiants, et la recourante ne soutient pas avoir demandé en vain à les rencontrer. La recourante ne soutient pas non plus qu’elle aurait fréquenté les cours ou les séances de travail de l’enseignement « Econometrics I ». Sa situation n’est donc pas comparable à celle des autres étudiants, de sorte que le grief tombe à faux.

7.             La recourante évoque l’assurance qu’elle aurait reçue de J______ qu’il ne siégerait pas dans la commission des oppositions.

7.1 Aux termes de l'art. 29 al. 1 Cst. – applicable lorsque l'impartialité des membres d'une autorité non judiciaire est invoquée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_643/2010 du 1er février 2011 consid. 5.1 ; 2C_36/2010 du 14 juin 2010 consid. 3.1) –, toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. Selon la jurisprudence, ce droit permet notamment d'exiger la récusation des membres d'une autorité administrative dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute sur leur indépendance ou leur impartialité. Il tend à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire ne puissent influencer une décision en faveur ou au détriment de la personne concernée. La récusation peut s'imposer même si une prévention effective du membre de l'autorité visée n'est pas établie, car une disposition interne de sa part ne peut pas être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Cependant, seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération, les impressions purement individuelles d'une des personnes impliquées n'étant pas décisives (ATF 142 III 521 consid. 3.1.1 ; 131 I 24 consid. 1.1 ; 127 I 196 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_629/2015 du 1er décembre 2015 consid. 3.1). La récusation doit demeurer l'exception (ATF 116 Ia 14 consid. 4). Un risque de prévention ne doit dès lors pas être admis trop facilement, mais doit se justifier par des motifs particulièrement importants (ATF 122 II 471 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.267/2006 du 17 juillet 2006 consid. 2.1).

Au niveau cantonal, l'art. 15 al. 1 LPA prévoit que les membres des autorités administratives appelés à rendre ou à préparer une décision doivent se retirer et sont récusables par les parties s'ils ont un intérêt personnel dans l'affaire (let. a), s'ils sont parents ou alliés d'une partie en ligne directe ou jusqu'au troisième degré inclusivement en ligne collatérale ou s'ils sont unis par mariage, fiançailles, par partenariat enregistré, ou mènent de fait une vie de couple (let. b), s'ils représentent une partie ou ont agi pour une partie dans la même affaire (let. c) et s'il existe des circonstances de nature à faire suspecter leur partialité (let. d).

7.2 L'opposition (ou réclamation) constitue un moyen de droit ordinaire qui a pour effet de contraindre l'autorité qui a rendu la décision attaquée à se prononcer à nouveau sur l'affaire (art. 50 al. 1 LPA ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2014, p. 435). L'opposition est pourvue d'un effet dévolutif complet ; la nouvelle décision que l'autorité prend au terme de la procédure d'opposition se substitue à la décision attaquée et est seule susceptible de recours (Benoît BOVAY, op. cit., p. 436). En droit genevois, la loi définit les cas où une réclamation (ou une opposition) doit être présentée avant que les juridictions administratives ne puissent être saisies par la voie d’un recours (art. 50 al. 3 LPA).

7.3 En l’espèce, l’institut a contesté les allégations de la recourante et indiqué que J______ lui aurait seulement dit qu’il n’était pas compétent pour se prononcer sur un recours et que cela était du ressort de la commission des oppositions.

La recourante n’étaie pas ses allégations. Elle ne demande pas la récusation de J______. Elle n’indique par ailleurs pas en quoi J______ serait partial parce que « personnellement impliqué ».

Cela étant, il résulte du RIO-IHEID que l’opposition est instruite par la commission des oppositions (art. 15 al. 1 RIO-IHEID), et que celle-ci émet un préavis à l’intention de l’autorité qui a pris la décision litigieuse (art. 15 al. 6 RIO-IHEID). C’est ensuite l’autorité qui a pris la décision litigieuse qui statue sur l’opposition à celle-ci (art. 16 al. 2 RIO-IHEID). La commission des oppositions n’a ainsi pas de pouvoir décisionnel. Le fait que celui-ci y ait siégé ne peut ainsi réaliser un cas de prévention ou d’apparence de prévention, étant rappelé qu’il revenait in fine à la directrice de l’institut de statuer sur l’opposition à sa propre décision, soit une situation typique de la procédure horizontale d’opposition.

Le grief de partialité sera écarté.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

8.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 avril 2023 par A______contre la décision de l’institut E______ du 8 mars 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17  juin  2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'Institut E______.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Florence KRAUSKOPF, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :