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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2551/2022

ATA/595/2023 du 06.06.2023 ( CPOPUL ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2551/2022-CPOPUL ATA/595/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 6 juin 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé



EN FAIT

A. a. A______, née ______ le ______ 1989, a épousé, le 21 octobre 2011, B______. C______, né le ______ 2011, est issu de cette union.

En réponse à une question de l’office cantonal de la population (ci-après : OCPM) du 26 octobre 2011, les époux ont confirmé vivre chacun chez leurs parents, dans l’attente de trouver un logement. A______ habitait alors dans un appartement de cinq pièces au D______ à Veyrier chez E______, son père.

Le 2 mai 2012, A______ a informé l’OCPM que le couple et leur enfant faisaient domicile commun au F______ depuis le 21 avril 2012.

Selon la convention de divorce signée le 8 mars 2016, A______ conservait le domicile conjugal de quatre pièces avec son fils. Le divorce a été prononcé par jugement du 17 mai 2016. La jouissance exclusive du domicile conjugal était toutefois attribuée à B______. L’autorité parentale et la garde sur C______ étaient confiées à A______, domiciliée chez son père.

b. Les 23 mai et 5 décembre 2016, A______ a annoncé à l’OCPM être retournée vivre, avec son fils depuis le 17 mai 2016, au D______. À la demande de l’OCPM, E______ a confirmé que sa fille résidait dans son logement.

c. A______ et G______ se sont mariés le ______ 2017 à Veyrier.

Trois enfants sont issus de leur union, soit H______, née le ______ 2017, I______, née le ______ 2017 et J______, né le ______ 2019.

d. G______ a vécu à Annemasse, dans un appartement de trois pièces de 80 m2 du 5 avril 2016 au 9 novembre 2018, date à laquelle il s’est établi au K______ à Arthaz-Pont-Notre-Dame (ci-après : Arthaz).

e. Les époux G______, à teneur de l’acte notarié « demeurant ensemble à Arthaz », ont acheté, le 20 janvier 2020, à L______, né le ______ 1953, résidant à Arthaz, père de G______, 80% de son bien immobilier, sis K______ à Arthaz, pour le prix de EUR 200'000.-. Le vendeur conservait une chambre et une salle d’eau situées au premier étage.

f. Selon le « questionnaire servant à déterminer le domicile fiscal » que le couple a rempli en janvier 2021, A______ était domiciliée à Genève et son époux à Arthaz. Celle-là et ses enfants allaient occasionnellement à Arthaz, environ deux jours par semaine et les fins de semaine. G______ passait un à deux jours par semaine à Genève. Il y travaillait à 100% dans la restauration au sein des Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG), alors que son épouse avait un emploi à 10% comme agente de distribution à Genève. Ils avaient pris des domiciles distincts le ______ 2017 [date de leur mariage] car A______ ne souhaitait pas quitter la Suisse. La situation était temporaire jusqu’à mi-2022. Ils ne désiraient pas avoir, pour l’instant, un seul domicile. Être à Veyrier ou Arthaz dépendait de leurs envies et de leurs besoins. Les enfants aimaient être avec leur grand-père maternel, mais appréciaient d’être en France l’été au vu de la piscine. Aucun des deux époux ne participait pas à la vie associative sur son lieu de résidence.

B. a. Fin 2021, A______ a informé son assurance-maladie de son souhait de quitter la Suisse, ce dont celle-ci a pris acte, en lui fournissant quelques renseignements complémentaires, par pli du 14 décembre 2021.

b. Le 20 janvier 2022, le service de l’assurance-maladie (ci-après : SAM) a demandé à l’OCPM une enquête sur la domiciliation d’A______ pour calculer les subsides.

c. Le rapport d’entraide administrative interdépartementale du 3 février 2022 établi par la cellule infrastructure logistique et enquêtes (ci-après : CILE) de l’OCPM a relevé que :

- aucun ordre de réexpédition, de changement d’adresse ou de garde de courrier n’avait été établi par l’intéressée auprès de la poste ;

- elle n’était pas connue de l’office cantonal des véhicules ;

- pour les Services industriels de Genève (ci-après : SIG), les père et mère d’A______ étaient titulaires de l’abonnement correspondant au D______ ; la mère de l’intéressée n’habitait plus à cette adresse depuis le 1er novembre 2017 ; la consommation énergétique prévue pour une famille de cinq personnes était de 4'030 kWh/an ; or, selon le relevé du 17 juin 2014 au 15 juin 2021, la consommation du logement avait été d’environ 2'880 kWh/an ;

- l’administration de la commune de Prévessins Moëns, où G______ avait été domicilié avant de vivre à Annemasse, a indiqué ne pas connaître A______ ;

- une régie d’Ecublens a confirmé qu’un bail, en vigueur depuis 1990, était au nom des parents d’A______ ; la régie ignorait les motifs pour lesquels le nom de leur fille était mentionné sur la plaquette d’entrée ;

- différentes visites domiciliaires ont été effectuées : personne n’avait répondu le 1er février 2022 à 8h25 au D______ ; le nom d’A______ était sur la boîte aux lettres et sur la porte d’entrée ; le concierge avait indiqué qu’à sa connaissance, l’intéressée résidait en France voisine avec son époux et ses enfants, mais rendait visite quotidiennement à son père, âgé de 68 ans, qui s’occupait de ses petits-enfants et accompagnait ceux qui étaient scolarisés à l’école ; E______ était présent le 2 février 2022 à 11h55 ; il était évasif à la question de savoir où se trouvait sa fille ; les deux enfants plus jeunes, âgés de 4 et 5 ans, étaient présents ; après que l’attention d’E______ a été attirée sur les conséquences en cas d’informations erronées, ce dernier avait précisé que sa fille avait résidé chez lui quelque temps, à la suite de sa séparation, qu’il lui « arrivait occasionnellement de dormir chez lui, mais qu’elle n’y résidait pas à demeure », qu’elle vivait avec son époux, dans leur maison à Arthaz et qu’il ne connaissait pas son adresse ;

- le rapport a conclu qu’A______ résidait au K______ à Arthaz ; la domiciliation en Suisse était fictive.

d. Dans ses observations à l’OCPM, suite au rapport d’enquête, A______ a relevé que l’Hospice général (ci-après : l’hospice) avait procédé à un contrôle surprise en 2017. Il avait conclu qu’elle était effectivement domiciliée au D______. Conformément à la demande de l’OCPM, elle fournissait un document signé par quatre personnes qui confirmaient sa présence régulière, avec ses quatre enfants, au domicile de son père. Sortant d’une relation abusive et violente, elle avait souhaité continuer à vivre avec son père à l’issue de son divorce, bénéficiant ainsi d’un soutien moral et éducatif pour ses enfants. Elle avait délibérément adopté un style de vie discret à la suite des violences qu’elle avait subies de la part de son ex-conjoint et dont elle était encore traumatisée. Elle n’avait par la suite pas estimé nécessaire de modifier l’équilibre qu’elle avait trouvé et de rejoindre son époux en France pendant la semaine. La famille s’était confinée deux mois et demi en France, l’école étant interrompue, et était revenue à Veyrier dès la mi-mai 2020. Elle passait au maximum 174 jours annuels en France (quatorze semaines de vacance et 38 week-ends). Toutes ses attaches étaient en Suisse, son enfance, ses amis, sa famille, la scolarité de ses enfants, son emploi. L’inspecteur de l’OCPM avait tenu des propos inadéquats à son père, l’accusant de mentir et le menaçant. Or, le couple avait été transparent avec toutes les administrations : ainsi, par exemple, l’acte de vente de la maison leur avait été adressé. Elle avait annoncé son départ de Suisse en 2021 tant au SAM qu’à l’administration fiscale cantonale. Celle-ci avait d’ailleurs « autorisé le couple à demeurer séparément sans les considérer comme séparés de fait ». Elle était taxée en Suisse, les revenus de son époux s’ajoutant aux siens pour déterminer le taux d’imposition. Son mari faisait de même avec ses revenus en France. Elle n’avait pas d’avantages financiers à déclarer un domicile suisse fictif. Se marier en France ou obtenir des cartes d’identité aurait été gratuit dès lors qu’elle était binationale. Elle n’en avait pas bénéficié vu son domicile en Suisse. De même, les assurances-maladie auraient été plus avantageuses en qualité de frontalière (CHF 724.-). Or, elle s’acquittait dûment des primes suisses (CHF 1'063.90). Selon la réponse de l’assistante sociale qui avait géré son dossier à l’époque à l’hospice, le rapport d’enquête ne pouvait pas être transmis, étant confidentiel. Elle autorisait l’OCPM à prendre contact avec ladite institution pour essayer de l’obtenir directement. Elle joignait des photos prises au D______ après le passage de l’enquêteur qui n’avait pas souhaité y procéder lui-même.

e. A______ a annoncé son départ de Suisse à l’OCPM pour Arthaz le 23 mars 2022 pour le 4 avril 2022, avec ses quatre enfants.

f. Par décision du 15 juillet 2022, l’OCPM a informé A______ que, dès sa décision entrée en force, il enregistrerait son départ de Suisse, ainsi que celui de C______, pour Arthaz avec effet rétroactif au 5 décembre 2016. Ses enfants H______, I______ et J______ n’avaient jamais résidé de manière effective en Suisse.

Aucun élément probant du dossier n’indiquait qu’elle avait, dans les faits, élu domicile au D______ chez son père et qu’elle y avait vécu avec ses quatre enfants. Tout portait à penser que sa prise de résidence à cette adresse ne l’avait été que pour des raisons de convenance administrative et non de manière effective. Le document, accompagné des témoignages, n’était pas daté et les signatures apposées n’étaient pas toutes identifiables. Dès lors que son père s’occupait des enfants quotidiennement, il était légitime de penser que des affaires leur appartenant étaient visibles. En revanche, rien sur les photos ne la concernait directement.

C. a. Par acte du 13 août 2022, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre cette décision. Elle a conclu à son annulation et à ce que son départ soit enregistré à la date du 4 avril 2022.

La date du 5 décembre 2016 ne reposait sur aucune preuve. L’inspecteur n’avait pas visité l’appartement. L’OCPM ignorait le résultat de l’enquête de l’hospice, prouvant sa présence au domicile de son père après le 5 décembre 2016. Elle n’avait aucun avantage à affirmer qu’elle résidait en Suisse au vu des coûts supplémentaires que cela induisait. Le 5 décembre 2016 elle ignorait l’adresse d’Arthaz. Elle n’était pas mariée. Son époux n’y avait résidé qu’à partir de novembre 2018. Le relevé des SIG ne représentait que la consommation de la lumière et des appareils électroménagers. L’eau chaude et le chauffage (au fioul) n’apparaissaient que sur les charges communes de l’immeuble. Elle n’avait pas jugé utile d’ouvrir les armoires pour photographier ses vêtements dans un placard. Toutefois, sur l’une des photos, ses produits de douche étaient visibles alors que sa veste et son sac à main l’étaient sur une autre. La mention « résidant ensemble » sur l’acte notarié avait été faite pour faciliter les démarches, la France ne reconnaissant pas de domicile distinct pour des époux non séparés. Seul le numéro fiscal de son époux figurait sur la taxe foncière du bien. Elle n’avait jamais caché partager son temps entre la Suisse et la France. Toutefois, compte tenu de son passé avec son
ex-conjoint, elle n’arrivait pas à vivre de manière continue avec un autre homme. Si elle pouvait comprendre que cette situation peu conventionnelle pouvait surprendre, la situation d’un couple marié, conservant deux domiciles distincts sans pour autant être séparés de fait ou de corps, n’était toutefois pas si extraordinaire. Le caractère temporaire de la situation avait été dûment annoncé aux administrations, y compris le projet de s’établir en France pour le milieu de 2022. L’OCPM avait délibérément ignoré les preuves à son avantage.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours. Ces arguments avaient déjà été examinés. Les conclusions de l’enquête domiciliaire diligentée dans le cas d’espèce ainsi que les déclarations du père de la recourante notamment permettaient de retenir avec vraisemblance que celle-ci et son fils n’avaient jamais pris résidence effective au D______.

c. Dans sa réplique, la recourante a persisté à soutenir qu’il était impossible qu’elle ait quitté le territoire suisse en décembre 2016 pour Arthaz, soit allée vivre avec son beau-père qu’à cette époque elle ne connaissait même pas, alors que son époux résidait à Annemasse. Elle transmettait copie du bail à loyer de celui-ci, valable du 5 avril 2016 au 9 novembre 2018.

d. À la demande de la juge déléguée, l’hospice a transmis copie des rapports d’enquête des 15 décembres 2016 et 2 février 2017 ainsi que de sa décision du 19 février 2018.

Il en ressort que des contrôles terrain ont été effectués le 7 décembre 2016, tant au F______ qu’au D______. Personne n’avait répondu. Le 12 décembre 2016, E______ avait ouvert et déclaré que sa fille était souvent chez son ami. L’inspecteur n’avait pas obtenu plus de renseignements. L’usagère avait contacté l’hospice deux jours plus tard et déclaré qu’elle était dans l’impossibilité de se déplacer, certificat médical à l’appui, remis à son assistante sociale, à cause d’une grossesse difficile. La convocation de l’intéressée le 19 décembre 2016 avait été annulée et la procédure interrompue jusqu’au terme de la grossesse. Le 31 janvier 2017, personne n’avait répondu au F______. La voisine de palier avait déclaré que seul un homme habitait dans le logement. Le même jour, E______ était présent au D______ et avait indiqué que sa fille et son conjoint étaient chez le pédiatre avec leur nouveau-né. Le 2 février 2017 à 10h30, A______ était présente au D______. Elle avait permis l’exécution de la visite domiciliaire. Son père et sa fille, née le 10 janvier 2017, étaient présents. Le logement était composé de trois chambres, un WC, une salle de bains, une cuisine, un salon/coin à manger. L’une des chambres était occupée par le père de l’usagère, la deuxième par l’usagère, son fils et sa fille et la dernière chambre servait de débarras. A______ avait déclaré qu’elle était de temps en temps chez son concubin, père de son deuxième enfant, en France et qu’ils devaient se marier prochainement. Ils cherchaient un logement commun, mais ne savaient pas si cela allait être en Suisse ou en France.

Par décision du 19 février 2018, l’hospice avait mis fin aux prestations d’aide financière d’A______. Son mari faisait partie du groupe familial et était soumis à l’obligation d’entretien. Le fait qu’ils ne vivent pas ensemble ne permettait pas à l’hospice de lui octroyer une aide financière. Lorsqu’un couple marié vivait dans deux logements séparés sur Genève, il n’y avait pas d’intervention financière. Il en était de même lorsque l’un des conjoints vivait de l’autre côté de la frontière. Le subside partiel accordé par le SAM était maintenu jusqu’à la fin de l’année en cours.

e. À la demande de la juge déléguée, la recourante a produit différentes pièces dont le contenu sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

f. Lors de l’audience de comparution personnelle des parties et d’enquêtes du 1er juin 2023, A______ a précisé qu’elle avait annoncé à l’OCPM, au moment du jugement de divorce, qu’elle retournait vivre chez son père, mais il manquait un document, raison pour laquelle elle avait refait un avis en fin d’année. Le D______ était un immeuble. En 2016, elle n’avait pas d’activité professionnelle. Elle avait pris un emploi à 10% à compter de février 2021, puis, rajouté un emploi à temps partiel en septembre 2022 qui lui garantissait « entre 0 et 17 heures » par semaine. L______, père de son époux, avait quitté la maison d’Arthaz en novembre 2020. Les 20% restants de la propriété avaient été donnés à son mari, conformément à ce qui était prévu dans l’acte notarié. Son mari avait fait des travaux dans la maison, sauf erreur en été 2020. La consommation électrique élevée de 2021 s’expliquait notamment par un hiver froid et le passage du chauffage au fioul à l’électrique dès août 2020. Ses trois aînés étaient scolarisés à l’école du ______ à Veyrier. J______ était gardé par son père, comme précédemment, pendant qu’elle travaillait. Elle produisait plusieurs pièces en lien notamment avec l’achat et l’immatriculation de son véhicule à Genève en 2017.

E______ a précisé qu’au moment de sa séparation, sa fille voulait garder l’appartement sis au F______, raison pour laquelle, dans un premier temps, il avait accueilli B______ au D______. Cela ne s’était pas très bien passé. Il avait décidé, d’entente avec sa fille, qu’il était préférable qu’elle revienne habiter avec lui et laisse l’appartement conjugal à son ex-conjoint, ce qui s’était fait dès le prononcé du divorce. La plaque de la boîte aux lettres avait été modifiée. Sa fille participait aux commissions et au ménage. C’était principalement lui qui préparait les repas, étant cuisinier professionnel à la retraite. Sa fille faisait par contre ses lessives, principalement en France. Il allait amener ou chercher les enfants à l’école. Quand il avait répondu à l’enquêteur qu’elle n’était pas à demeure chez lui, cela signifiait qu’elle y dormait deux à trois nuits environ par semaine, comme ses enfants. Son mari venait parfois dormir. Il arrivait, de temps en temps, que seuls les enfants dorment chez lui. Il n’y avait pas eu d’évolution entre 2016 et début 2022. La présence de sa fille et de ses enfants était restée stable. Elle avait passé le confinement, en tous cas en partie, chez lui, car elle ne pouvait « pas trop aller sur France ». Son mari venait aussi parfois puisqu’il travaillait aux HUG. Sa fille avait une crainte par rapport à son beau-père et préférait que les enfants ne cohabitent pas avec ce dernier. Elle avait préféré que son beau-père ait quitté la maison familiale avant d’aller s’y établir. La famille avait quitté l’appartement en avril 2022. Cela lui avait fait un « gros trou » car il vivait seul depuis. Jusque-là, il voyait sa fille tous les jours. Il n’y avait jamais eu de déménagement de meubles, ni en 2016 ni en 2022. C’était essentiellement des vêtements qui se trouvaient au D______. Depuis le déménagement, il ne voyait les enfants plus que le mercredi. Ils dormaient chez lui le mercredi soir et il amenait les grands à l’école le jeudi matin. J______ restait avec lui le jeudi et sa fille les récupérait quand elle avait fini de travailler. Il voyait nettement moins ses petits-enfants. Il avait été ébranlé par l’attitude de l’enquêteur de l’OCPM qui lui avait semblé avoir des idées préconçues, avait été moralisateur, voire agressif et était resté dans le hall, contrairement au contrôleur de l’hospice qui avait fait le tour de l’appartement.

M______, patrouilleuse scolaire à Veyrier, connaissait A______ depuis longtemps. Elle discutait un peu avec elle sur le chemin de l’école. C’était principalement le grand-papa qu’elle voyait avec les enfants, à l’exception du matin, où c’était souvent A______ qui les amenait. Selon les conversations qu’elle avait eues avec eux, A______ avait déménagé en avril 2022 pour s’établir en France. Préalablement, elle habitait avec son père. Elle l’avait par ailleurs croisée de temps en temps au D______.

N_______ était en classe à l’école primaire avec A______. Elles s’étaient retrouvées aux alentours de 2011, quand cette dernière avait emménagé au F______ où elle avait habité jusqu’en 2016. Elles s’étaient ensuite reperdues de vue jusqu’en fin 2021, date à laquelle elles avaient repris contact en lien avec leurs enfants, scolarisés dans le même établissement, à l’école du ______. Elle la voyait arriver depuis le quartier ______. Elle n’avait jamais été chez elle. Il était arrivé que leurs enfants jouent ensemble, principalement dans le parc à Veyrier, quelques fois chez elle. Elle n’avait pas le souvenir que leurs fils aient joué chez A______. Elle connaissait G______. Il leur était arrivé de faire des grillades « chez lui », en France. Elle ne savait pas pourquoi elle avait dit « chez lui ». A______ était en France les week-ends, mais pendant la semaine, elle était à Veyrier. Aujourd’hui, cette dernière avait déménagé en France. Elle ignorait depuis quand : la plaque de sa voiture avait changé. Sinon, il n’y avait pas grand-chose qui avait changé. Elle ne la voyait plus arriver depuis ______, à pied, mais elle venait en voiture. Elles se croisaient toutefois moins souvent à Veyrier, à part à l’école. Entre 2016 et 2021, elles se croisaient à Veyrier, mais ne se parlaient pas.

g. À l’issue de l’audience, les parties ont renoncé à produire des écritures supplémentaires et ont été informées que la cause était gardée à juger rapidement.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Est litigieuse, la question de l'enregistrement dans les registres de l'OCPM du départ de la recourante et de son fils C______ le 5 décembre 2016 pour la France et l’absence de tout enregistrement en Suisse de ses trois autres enfants.

2.1 Depuis le 1er janvier 2008, la tenue des registres cantonaux et communaux est soumise aux dispositions de la loi fédérale sur l'harmonisation des registres des habitants et d'autres registres officiels de personnes du 23 juin 2006 (loi sur l'harmonisation de registres - LHR - RS 431.02) et de l'ordonnance sur l'harmonisation de registres du 21 novembre 2007 (OHR - RS 431.021), ainsi qu'à sa législation cantonale d'exécution, soit dans le canton de Genève à la loi d'application de la LHR du 3 avril 2009 (LaLHR - F 2 25).

2.2 Parmi les registres soumis à la LHR, figurent les registres cantonaux et communaux des habitants (art. 2 al. 2 let. a LHR), dont le registre des habitants, géré par l'OCPM (art. 2 let. a LaLHR ; art. 4 de la loi sur le séjour et l'établissement des Confédérés du 28 août 2008 - LSEC - F 2 05). L'OCPM est notamment l'autorité compétente pour corriger d'office, si nécessaire en collaborant avec d'autres services de l'État, les données inscrites dans le registre cantonal de la population, s'il s'avère que les renseignements ne correspondent pas à la situation de fait (art. 4 al. 4 let. d LSEC).

2.3 La LHR vise à ce que les différents registres soumis à cette loi contiennent des données actuelles, exactes et complètes (art. 5 LHR) en rapport avec chaque personne établie ou en séjour (art. 6 LHR).

2.4 Est tenu de s'annoncer ou de communiquer toute modification de données le concernant celui qui : a) arrive dans le canton ; b) réside ou séjourne dans le canton ; c) entend s'établir hors du canton ou mettre fin à son séjour (art. 5 al. 1 LaLHR). Toute annonce ou communication doit être faite auprès de l'OCPM (art. 5 al. 2 LaLHR) dans les quatorze jours dès la survenance du fait (art. 5 al. 3 LaLHR).

3.             Les notions d'établissement et de séjour sont définies à l'art. 3 LHR.

3.1 Selon l'art. 3 let. b LHR, la commune d'établissement est celle dans laquelle une personne réside, de façon reconnaissable pour des tiers, avec l'intention d'y vivre durablement et d'y avoir le centre de ses intérêts personnels. Elle est réputée être établie dans la commune où elle a déposé les documents requis et ne peut avoir qu'une seule commune d'établissement. Selon l'art. 3 let. c LHR, la commune de séjour est celle dans laquelle une personne réside dans un but particulier sans avoir l'intention d'y vivre durablement, mais pour une durée d'au moins trois mois consécutifs ou répartis sur une même année, notamment une commune dans laquelle une personne séjourne pour y fréquenter les écoles ou est placée dans un établissement d'éducation, un hospice, un hôpital ou une maison de détention.

La notion d'établissement (au sens étroit), selon l'art. 3 let. b LHR, et celle de séjour au sens de l'art. 3 let. c LHR constituent les deux facettes de celle d'établissement (au sens large), laquelle constitue une notion de police (arrêts du Tribunal fédéral 2C_599/2011 du 13 décembre 2011 consid. 2.4 ; 2C_478/2008 du 23 septembre 2008 consid. 4.4 ; ATA/283/2021 du 2 mars 2021 consid. 4a).

3.2 Le domicile civil de toute personne est au lieu où elle réside avec l'intention de s'y établir (art. 23 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210). Lorsque la détermination du domicile d'une personne soulève des difficultés, tant le critère de l'intention de s'établir que la notion de centre de vie commandent de recenser tous les facteurs qui pourraient s'avérer importants. Chacun de ces facteurs, pris en lui-même, ne constitue donc rien de plus qu'un indice. Ainsi, le dépôt des papiers au contrôle de l'habitant, l'établissement du permis de séjour, l'exercice des droits politiques, le paiement des impôts ne sont jamais déterminants en eux-mêmes pour fonder le domicile civil volontaire (ATF 136 II 405 consid. 4.3 ; 133 V 309 consid. 3.3 ; 125 III 100 consid. 3).

Nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles (art. 23 al. 2 CC), mais chacun doit en avoir un. Ainsi, en l'absence d'un domicile volontaire et légal, l'art. 24 CC établit des règles subsidiaires qui permettent de définir un domicile fictif (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2008 précité consid. 3.4 ; ATA/204/2018 du 6 mars 2018 ; ATA/551/2016 du 28 juin 2016).

3.3 Si la notion d'établissement (au sens large) contenue dans la LHR s'appuie sur celle de domicile au sens de l'art. 23 CC, elle s'en distingue par le but différent poursuivi par cette loi (arrêts du Tribunal fédéral 2C_599/2011 précité consid. 2.4 ; 2C_478/2008 précité consid. 4.4). L'établissement et le séjour au sens de l'art. 3 let. b ou c LHR d'une part, le domicile civil et les domiciles spéciaux des art. 23 ss CC d'autre part, sont déterminés par des autorités différentes dans des procédures distinctes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_173/2012 du 23 août 2012 consid. 3.2 ; 2C_791/2011 du 4 avril 2012 consid. 1.3 ; 2C_478/2008 précité consid. 3.5 ; ATA/283/2021 précité consid. 4c).

Contrairement à ce qui vaut pour le domicile civil, il n'existe pas, selon la LHR, d'obligation d'être établi en un lieu, de sorte que, dans des cas certes exceptionnels, l'établissement peut faire défaut. En particulier, il ne peut, au sens de cette loi, y avoir d'établissement fictif, seule la résidence effective étant de nature à constituer l'établissement (au sens large ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_478/2008 précité consid. 3.5 ; 2C_413/2012 du 13 avril 2012 consid. 3.1 ; ATA/283/2021 précité consid. 4c ; ATA/551/2016 précité).

Le critère à prendre principalement en considération par les autorités chargées de la tenue du registre pour déterminer le contenu des rubriques relatives à l'adresse et à la commune d'un habitant du canton (art. 6 let. b et g LHR) est le lieu où celui-ci réside effectivement au sens de l'art. 3 let. b ou c LHR (ATA/389/2020 du 23 avril 2020 consid. 6 ; ATA/204/2018 précité ; ATA/551/2016 précité).

3.4 En l’espèce, l’autorité intimée considère que, dès le 5 décembre 2016, la recourante et son fils étaient domiciliés en France. Ni la décision, ni les écritures ultérieures n’expliquent le choix de la date du 5 décembre 2016 ni n’indiquent dans quel lieu les intéressés auraient habité en France.

La date du 5 décembre 2016 n’emporte pas conviction. Elle semble ressortir de l’avis d’annonce faite par la recourante à l’autorité intimée de sa domiciliation chez son père. Or, il ressort du dossier de l’intimé qu’une telle annonce avait déjà été effectuée le 23 mai 2016. Cette date coïncide avec le jugement de divorce et l’attribution, dans celui-ci, de la jouissance exclusive du domicile conjugal sis F______ au conjoint, alors que la convention de divorce du 8 mars 2016 prévoyait que la recourante le conserve.

Ledit jugement mentionne d’ailleurs l’adresse du domicile conjugal pour l’époux alors qu’il indique que la recourante est d’ores et déjà domiciliée chez son père. Le retour de la recourante chez son père, au prononcé du jugement de divorce, alors qu’il était prévu deux mois auparavant qu’elle conserve le domicile conjugal, n’apparaît pas surprenant, ce d’autant moins qu’elle était en charge de l’enfant du couple. Cette domiciliation lui permettait par ailleurs de rester sur la commune où elle avait grandi, avec son père, et dans laquelle son enfant était à la crèche. E______ a par ailleurs confirmé en audience le choix d’accueillir sa fille au moment de son divorce plutôt que son ex-gendre, qu’il avait momentanément hébergé à la séparation du couple.

La solution d’aller vivre chez son père n’était de surcroît pas surprenante, au vu des pièces du dossier qui confirment qu’en 2011/2012 déjà, la recourante vivait chez lui, faisant domicile séparé avec son époux en raison de difficultés à trouver un logement commun, alors même que leur mariage venait d’être célébré.

L’annonce à l’OCPM le 23 mai 2016 est en conséquence cohérente avec la procédure de divorce. Dans ces conditions, l’avis fait par l’intéressée à l’OCPM le 5 décembre 2016 était redondant. Replacée dans le contexte de la séparation, la domiciliation de l’intéressé chez son père dès mai 2016, alors même que la garde et l’autorité parentale sur l’enfant du couple lui étaient confiées et qu’elle ne conservait plus le domicile conjugal, apparaît conforme à la réalité.

La recourante a, par ailleurs, été constante dans ses déclarations quant aux motifs ayant entraîné sa domiciliation, discrète, chez son père, évoquant un nécessaire soutien moral et éducatif par ce dernier. Le rôle d’E______ auprès de ses petits-enfants n’est pas contesté, ce dont même la concierge du D______ a attesté. Les photos et l’enquête menée par l’hospice le confirment aussi.

L’enquête de l’hospice a de même prouvé que l’ancien domicile conjugal du
F______ avait été conservé exclusivement par l’ex-mari de la recourante, la voisine de palier ayant déclaré à l’enquêteur de l’hospice, le 31 janvier 2017, que seul un homme habitait dans le logement.

La date du 5 décembre 2016 est en conséquence sans fondement.

Il n’est pas contesté que la recourante et les quatre enfants sont domiciliés à Arthaz depuis le 4 avril 2022, ce qu’elle a officiellement annoncé à l’autorité intimée le 23 mars 2022. Au préalable, elle a fait part de son intention de quitter la Suisse à mi-2022 à différentes administrations, ce qui a suscité l’enquête à l’origine de la présente procédure.

La question se pose de savoir si, entre mai 2016 et le 4 avril 2022, l’intéressée aurait transféré son domicile en France, ne laissant qu’un domicile fictif en Suisse.

S’agissant de son mari, elle a produit le bail de l’appartement de G______, au 4, rue ______ à Annemasse, pour un appartement de trois pièces conclu dès le 7 avril 2016. Le 5 avril 2016, EDF a confirmé à G______ l’activation de son contrat pour ladite adresse. La confirmation d’une reconnaissance avant la naissance, du 18 octobre 2016, mentionne aussi le domicile d’Annemasse.

L______ a confirmé que son fils l’avait rejoint à Arthaz et s’était acquitté de son premier loyer pour la période du 10 novembre au 31 décembre 2018.

Il ressort de la production de l’entier de l’acte de vente que le bien immobilier acheté par le couple consiste en la maison familiale du mari de la recourante. Le père de son époux y vivait et a vendu au couple le 80% du bien immobilier. Postérieurement à la vente, il était prévu qu’il y demeure au premier étage, au bénéfice d’une chambre et d’une salle de bain. En conséquence, le père de la recourante vivait au D______ alors que le beau-père de la recourante vivait à Arthaz avec son fils. Ce fait conforte la vraisemblance des allégations de la recourante, les deux époux vivant auprès de leur père, chacun dans la maison de famille.

La recourante a, par ailleurs, été constante dans ses déclarations quant aux violences subies lors de son précédent mariage, lesquelles auraient justifié de ne pas reprendre une vie commune immédiatement avec son nouvel époux.

Les pièces du dossier sont en adéquation. L’acte de mariage, du 13 décembre 2017, indique des domiciles distincts, soit Veyrier pour l’épouse et Annemasse pour son futur mari. Les actes de naissance des trois enfants des ______ 2017,
______ 2017 et ______ 2019 font tous mention des domiciles distincts des parents. Les enfants sont par ailleurs tous nés à Genève.

Les décomptes SIG pour l’appartement du D______ témoignent d’une consommation moindre qu’une famille de cinq personnes. L’intéressée et ses enfants passant aussi du temps en France, cette conclusion n’est pas surprenante. La consommation est constante, ce qui tend à démontrer qu’il n’y a pas eu de modifications dans l’occupation de l’appartement entre 2016 et 2021. Enfin, la recourante n’a pas été contredite lorsqu’elle a indiqué que ce document n’était que partiel, les charges étant décomptées pour l’immeuble.

Les comparaisons des consommations d’électricité à Arthaz ont augmenté de façon importante en 2021. La recourante a indiqué que la famille s’était principalement confinée en France, ce qui devrait induire une consommation supérieure en 2020 qu’en 2021, la consommation devant théoriquement remonter dès avril 2022, date de l’emménagement officiel de la recourante et ses enfants à Arthaz.

Or, il résulte des relevés les consommations d’électricité suivantes, en kWh :

- 29.1.2020 au 2.12.2021 : semaine : 3'022 we : 1'879 mercredi : 941

- 4.12.2020 au 3.12.2021 : semaine : 5'642 we : 3'565 mercredi : 3’490

- 4.12.2021 au 4.12.2022 : semaine : 5'253 we : 3'490 mercredi : 1'447.

Même si deux mois d’hiver manquent à la première période (décembre 2019 et janvier 2020) pour une meilleure comparaison, aucune augmentation n’apparaît en 2022. La recourante a toutefois expliqué lors de l’audience du 1er juin 2023 que le système de chauffage de la maison d’Arthaz avait été modifié en août 2020 pour passer du fioul à l’électrique et que l’hiver 2021 avait été rigoureux. Ces explications sont compatibles avec les chiffres susmentionnés.

L’hospice avait conclu, lors d’une enquête réalisée fin 2016 et début 2017, que la recourante vivait à Veyrier. De même, par décision du 19 février 2018, l’hospice retenait que chacun des membres du couple vivait dans son propre logement.

L’enquête de l’OCPM, à l’origine de la décision, n’emporte pas conviction. Elle est fausse sur la question du véhicule. Les pièces versées à la procédure lors de l’audience confirment que l’intéressée était titulaire d’une plaque genevoise. La visite domiciliaire est incomplète, l’enquêteur s’étant limité à rester dans le hall sans faire le tour de l’appartement litigieux. Enfin, le père de l’intéressée, dont les propos sont crédibles, a eu le sentiment que l’enquêteur s’était déjà forgé une opinion avant la reddition de son rapport et n’avait pas œuvré en toute objectivité. Sa force probante doit en conséquence être relativisée.

Les déclarations, détaillées, faites tant par la recourante que par son époux, à l’administration fiscale, en janvier 2021, sur le formulaire de quelques pages, sont rationnelles. Le couple n’a jamais nié se retrouver, en semaine dans l’un ou l’autre logement, et généralement le week-end à Arthaz. Il a détaillé le nombre de jours, pour chacun des époux, passés en Suisse ou en France.

Les déclarations du père de la recourante indiquant qu’elle ne vivait pas à demeure peuvent s’expliquer par le style de vie adopté par la famille. Il a, par ailleurs, détaillé en audience les différences intervenues depuis avril 2022 et le fait qu’il ne voyait plus sa fille tous les jours, qu’elle ne dormait plus chez lui plusieurs nuits par semaine, à l’instar de ses petits-enfants. Quand bien même, il a été entendu à titre de renseignement, ses déclarations sont logiques et apparaissent sincères. La légère contradiction quant au lieu du confinement n’est pas déterminante. Elle peut par ailleurs s’expliquer par l’absence de dates précises quant au « confinement ».

Le dernier témoin, crédible, conforte la solution. Elle a notamment confirmé la présence régulière de la recourante à Veyrier, en journée, entre 2016 et 2022 et le fait qu’elle amenait en 2021 ses enfants à l’école à pied le matin alors que désormais ils venaient en voiture.

Les pièces produites, notamment les échanges de correspondances avec son assurance-maladie, confirment qu’elle a annoncé sa volonté de partir s’établir en France en 2021, avant la présente procédure.

L’enquête de l’OCPM a été diligentée à la demande du SAM, celui-ci ayant été informé par la recourante elle-même de son prochain déménagement en France. Celle-ci n’est pas contredite lorsqu’elle indique qu’elle a fourni à toutes les administrations, en toute transparence, les renseignements nécessaires, notamment l’acte d’achat du bien immobilier en France et il est prouvé qu’elle a informé lesdites administrations fin 2021 déjà de son souhait de quitter le territoire suisse en milieu de 2022.

Ainsi, la recourante a régulièrement tenu informé l’OCPM de sa domiciliation. Elle est restée domiciliée chez son père lors de son premier mariage, malgré son union, expliquant à l’OCPM que le couple n’avait pas encore trouvé de logement. Elle a immédiatement informé l’autorité intimée, en mai 2016, à la suite de son divorce, de son retour chez son père. Elle a pris les devants, dès la fin 2021, auprès de différentes administrations, pour les informer de leur prochain départ en France. Elle a voté sur Veyrier, ce qui ressort du fait qu’elle s’est plainte des lenteurs de l’administration lors de son changement d’adresse qui l’empêchaient d’exercer ses droits politiques. Elle payait ses impôts en Suisse et était affiliée à la caisse maladie. Elle travaillait à Genève et ses enfants étaient scolarisés sur Veyrier. Il ressort du dossier que le mariage n’impliquait pas forcément une vie commune, à l’instar de son premier mariage. Elle a enfin été transparente avec les administrations, ne cachant pas le nombre de jours où elle rejoignait son époux, avec les enfants, pour y passer notamment les vacances d’été ou le confinement. Dans ces conditions, au vu des considérants qui précèdent, des pièces versées au dossier et des témoignages, les indices pour établir le centre de vie de l’intéressée et de ses enfants penchent en faveur de Veyrier, lieu où elle a résidé effectivement au sens de l'art. 3 let. b
ou c LHR jusqu’au 4 avril 2022.

La décision de l'OCPM qui enregistre le départ de Genève de la recourante pour la France au 5 décembre 2016 n’est pas conforme au droit.

Compte tenu de ce qui précède, le recours sera admis.

4.             Vu l'issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée, la recourante n’y ayant pas conclu et n’alléguant pas avoir encouru des frais pour sa défense (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 août 2022 par A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 15 juillet 2022 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 15 juillet 2022 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'office cantonal de la population et des migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie LAUBER et Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :