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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1418/2023

ATA/574/2023 du 01.06.2023 sur JTAPI/529/2023 ( MC ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.07.2023, rendu le 27.07.2023, REJETE, 2C_370/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1418/2023-MC ATA/574/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er juin 2023

En section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Dina BAZARBACHI, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 mai 2023 (JTAPI/529/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : A______), né le ______ 1972, est originaire d'B______.

Il est également connu sous de nombreux alias, parmi lesquels C______, né le ______ 1972, originaire d'B______.

b. Le 1er novembre 2002, il s'est marié, à Genève, avec D______, née E______ le ______ 1968 à F______, de nationalité G______ et au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse.

c. Ils sont les parents de H______, né le ______ 2004.

d. Par acte du 24 novembre 2008, D______ a saisi le Tribunal civil de première instance (ci-après : TPI) d'une demande de divorce.

e. Par jugement du 20 septembre 2011, le TPI a dissous par le divorce le mariage contracté par les conjoints.

B. a. Par décision de non-entrée en matière du 2 octobre 1998, l'office fédéral des étrangers, devenu entre-temps le secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM), a rejeté la demande d'asile de A______ formée le 26 mai 1998 et ordonné son renvoi de Suisse.

b. Interpellé le 9 décembre 2002 dans le cadre d'un trafic de stupéfiants, A______ a déclaré à la police s'appeler C______ et être célibataire, sans charge de famille.

c. Le 10 décembre 2002, A______, sous son alias de C______, s'est vu notifier par l’officier de police une décision d'interdiction de pénétrer sur la totalité du territoire genevois pour une durée de six mois.

d. Entendu par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) le 17 décembre 2002, il a notamment affirmé n'avoir jamais déposé de demande d'asile en Suisse.

e. Par décision prenant effet au 1er novembre 2002, une autorisation de séjour lui a été délivrée, valable jusqu'au 31 octobre 2003, en vue de regroupement familial.

f. Le 26 janvier 2003, A______ a été interpellé une nouvelle fois par la police, laquelle a pu établir le lien entre sa réelle identité et son alias de C______.

g. Par décision exécutoire nonobstant recours du 20 février 2003, l'OCPM a révoqué l’autorisation de séjour de A______, les services de police étant en outre mandatés pour exécuter sans délai son renvoi de Suisse.

h. Le 3 mars 2003, l’intéressé a sollicité l'octroi d’une autorisation de séjour avec autorisation d'exercer une activité lucrative.

i. Il a déposé une nouvelle demande d'autorisation de séjour le 1er mars 2004.

j. Par décision du 9 mars 2004, la Commission cantonale de recours de police des étrangers (ci-après : CCRPE) a rejeté le recours formé contre la décision de l'OCPM du 20 février 2003. Le 7 avril 2005, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé le contre la décision de la CCRPE.

k. Par courrier du 26 avril 2005, l'OCPM a imparti à A______ un délai au 30 juin 2005 pour quitter la Suisse.

l. Le 6 mai 2005, le SEM a étendu à l'ensemble du territoire suisse la décision de renvoi prise par l'OCPM.

m. L’administré a déposé une nouvelle demande de renouvellement de son autorisation de séjour le 15 mai 2006.

n. Le 23 août 2006, les services de police ont en vain tenté de procéder à son refoulement de Suisse en B______, l’intéressé ayant refusé de monter à bord de l'avion devant le ramener dans son pays.

o. Le 4 octobre 2006, invoquant la nationalité suisse récemment acquise par son épouse et leur fils, A______ a sollicité l'OCPM de reconsidérer sa décision du 20 février 2003 ordonnant son renvoi du pays.

p. Par décision portant la date erronée du 28 février 2006 et reçue par son destinataire le 26 octobre 2006, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération. Le 26 janvier 2007, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par A______ contre la décision de la CCRPE du 5 décembre 2006 déclarant irrecevable son recours contre la décision de l'OCPM du 28 février 2006.

q. L’administré fait l'objet d'une décision des autorités allemandes du 7 juin 2008 lui interdisant l'entrée dans l'espace Schengen jusqu'au 7 mai 2014.

r. Entendu par l'OCPM le 20 avril 2010, A______ a déclaré qu'il ne possédait pas de passeport et ne quitterait pas la Suisse, où il travaillait au noir.

s. Le 15 juin 2010, l'OCPM a requis les services de police de procéder au renvoi de du précité, celui-ci n'ayant pas finalisé son départ de Suisse.

t. Le 4 novembre 2010, l’intéressé a sollicité de l'OCPM la reconsidération de sa décision lui refusant le renouvellement de son autorisation de séjour.

u. Le 5 mai 2011, il a, indiquant pour toute adresse « poste restante Mont-Blanc 1211 Genève 1 », déposé une nouvelle demande d'octroi d’autorisation de séjour avec autorisation d'exercer une activité lucrative.

v. Par acte du 23 mai 2011, les services de police ont informé l'OCPM que l’administré n'avait pas répondu aux convocations qui lui avaient été adressées et demeurait introuvable malgré leurs recherches.

w. Le 31 mai 2011, l'OCPM a répondu à l'employeur indiqué dans la demande d'autorisation de séjour du 5 mai 2011 qu'il ne pouvait donner une suite favorable à cette requête.

x. A______ a été contrôlé le 23 avril 2012 par les gardes-frontière et s'est avéré porteur d'un passeport B______ en cours de validité, émis le 18 mars 2009.

y. Le 25 mai 2019, A______ s'est vu notifier une interdiction d'entrer en Suisse prononcée le 22 mai 2019 par le SEM et valable jusqu'au 21 mars 2022.

C. a. Il été condamné à huit reprises, essentiellement pour vol (art. 139 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0) et infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), notamment les 26 mars 2015, 18 juillet 2018 et 22 septembre 2021 par le Tribunal de police de Genève, et les 24 novembre 2016 et 9 septembre 2017 par le Ministère public.

b. A______ a été contrôlé le 6 août 2007 alors qu'il effectuait illégalement le transport professionnel de personnes.

c. Le 29 avril 2009, son ex-épouse a déposé auprès de la police une plainte pénale contre lui pour menaces d'enlèvement de leur fils H______.

d. Le 7 avril 2022, il a été interpellé par les services de police lors de son entrée en Suisse au passage frontière de I______, démuni de tout document d'identité. Il a été constaté qu’il faisait l'objet de deux parutions RIPOL pour des mandats d'arrêt.

e. Prévenu d'infraction à la LEI, A______ a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public.

f. Il a ensuite été écroué en raison de mandats.

g. Par jugement du 31 août 2022, le Tribunal d'application des peines et des mesures a refusé sa libération conditionnelle.

D. a. Par jugement du 17 janvier 2013, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a confirmé l'ordre de mise en détention administrative précité du 14 janvier 2013 pour une durée de trois mois.

b. Le 24 janvier 2013, A______ s'est opposé à son renvoi vers l'B______ prévu par vol de ligne.

c. Par arrêt du 6 février 2013, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) a rejeté le recours contre le jugement précité.

d. Le 25 mars 2013, l’administré s'est opposé une nouvelle fois à son renvoi à destination de l'B______ prévu par vol de ligne avec escorte policière.

e. Le 3 avril 2013, un nouvel ordre de mise en détention administrative, basé sur l'art. 78 LEI, a été prononcé par l'officier de police pour une durée d'un mois.

f. Le 25 avril 2013, A______ a été libéré de détention administrative.

g. Libéré le 13 octobre 2022 à la suite d’une peine purgée, A______ a été remis entre les mains des services de police.

h. Le 15 novembre 2022, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois. Cette décision indiquait que A______ était inscrit aux auditions consulaires (counselling) prévues le 21 décembre 2022 en vue de la délivrance d'un laissez-passer.

Entendu dans ce cadre, A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi.

i. Devant le TAPI, il a indiqué qu'il n'avait en réalité jamais quitté la Suisse. Il avait dû exécuter une détention pénale de six mois en lien avec une ancienne condamnation contre laquelle il avait fait opposition, sans qu'il ne reçoive aucune décision suite à cette opposition.

Il a conclu à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à ce que la durée de la détention soit réduite à six semaines. Il souffrait de différentes maladies, notamment d'un diabète de type 2 en raison duquel un rendez-vous médical aurait lieu le 29 novembre 2022.

j. Par jugement du 17 novembre 2022, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative jusqu'au 14 février 2023 inclus.

k. Le 21 décembre 2022, le SEM a informé l’OCPM que lors des auditions consulaires avec l'B______ du même jour, l’intéressé avait affirmé avoir un enfant en Suisse. Pour cette raison et dans l'attente d'une preuve confirmant cette information, les autorités B______ n’avaient pas délivré de laissez-passer et continuaient à examiner le dossier.

l. Le 31 janvier 2023, le SEM a informé l’OCPM qu’il était toujours dans l'attente d'une réponse du consulat d’B______. Il relevait que, dans les cas où un enfant était impliqué, plusieurs mois pouvaient se passer avant que les autorités B______ ne prennent une décision. Il informerait l’OCPM dès qu'une décision serait prise.

m. Par requête du 2 février 2023, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative pour une durée de trois mois.

n. Lors de l'audience du 7 février 2023, l’administré a déclaré au TAPI ne pas avoir d'éléments nouveaux à communiquer depuis son audition du 17 novembre 2022. Il était détenu administrativement à J______, ce qui ne permettait plus à sa famille et notamment à son fils de venir lui rendre visite. Il avait indiqué aux autorités consulaires B______, lors de son audition du 21 décembre 2022, qu'il avait un fils de 19 ans. Il n'entendait pas demander de laissez-passer aux autorités B______ car il ne souhaitait pas être séparé de son fils. Il avait fait sa vie en Suisse et s'opposait à son renvoi. Avant sa détention administrative, il vivait à la Jonction. Une amie lui avait sous-loué une chambre. Son ex-femme vivait à Genève et était disposée à le loger chez elle s'il était remis en liberté. Il n'avait pas d'attestation le confirmant, mais elle pourrait le confirmer au TAPI si besoin.

La représentante de l'OCPM a indiqué que, renseignements pris la veille auprès du SEM, ce dernier était toujours dans l'attente d'une réponse des autorités B______. Si A______ demandait un laissez-passer aux autorités B______, il pourrait l'obtenir à bref délai. Il avait été transféré à J______ conformément à un accord intercantonal passé entre Genève et J______ en cas de manque de places de détention. Il n'y avait pas de critères pour ce type de transfert, mais l'OCPM privilégiait le transfert de personnes dont le renvoi n'était pas envisageable dans l'immédiat. Dès l'obtention de l'accord sur le principe de la délivrance d'un laissez-passer par les autorités B______, un vol avec escorte policière pourrait être réservé, un délai de quatre semaines étant toutefois nécessaire pour ce faire. Le retour de A______ au centre de détention de Frambois n'était pas envisagé à brève échéance, à sa connaissance.

A______ a conclu à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à ce qu'une mesure moins coercitive soit prononcée, par exemple une assignation à résidence auprès de son amie à la Jonction, dont il ne souhaitait pas communiquer le nom, ou de son ex-épouse, plus subsidiairement encore que la durée de la détention soit réduite à quatre semaines et à ce qu'il soit transféré à l’établissement concordataire de détention administrative Frambois LMC afin que sa famille puisse continuer à lui rendre visite.

o. Par courriel du même jour, l’intéressé a transmis au TAPI une attestation signée par son ex-épouse s’engageant à le loger chez elle, ce qui permettrait également à son fils de passer du temps avec son père, avec lequel il entretenait de très bonnes relations.

p. Par jugement du 8 février 2023, le TAPI a prolongé la détention administrative pour une durée de trois mois, soit jusqu’au 13 mai 2023.

La légalité de la détention avait déjà été examinée. Elle n’avait pas à être à nouveau examinée. L’assurance du renvoi répondait à un intérêt public certain. Aucune mesure moins incisive ne pouvait être envisagée pour garantir la présence du justiciable jusqu’à son refoulement et l’engagement de son ex-épouse de l’héberger n’y changeait rien. Les principes de proportionnalité, de diligence et de célérité étaient respectés. La durée de la détention respectait le cadre légal. La détention à J______ apparaissait conforme au droit. Dès lors que A______ ne pouvait plus recevoir de visite de sa famille, l’OCPM était invité à envisager la possibilité de le retransférer à Genève si une place devait se libérer.

q. Par arrêt du 3 mars 2023, la chambre administrative a rejeté le recours formé par l'intéressé contre ce jugement.

L’intéressé avait fait l’objet d’une décision de renvoi en 2005 et été condamné à plusieurs reprises pour des vols, soit des crimes, par les autorités pénales genevoises. Les conditions légales justifiant la détention administrative étaient remplies, ce qu’il ne contestait pas, pas plus que les autorités chargées de son renvoi avaient agi avec diligence et célérité.

Il lui était loisible de rentrer rapidement en B______ pour peu qu’il coopère à son renvoi, de sorte qu’il ne pouvait se prévaloir d’une éventuelle impossibilité. Sa situation familiale, soit la présence de son fils, âgé de 19 ans, en Suisse, si elle pouvait jouer un rôle dans le temps employé par les autorités B______ pour examiner sa situation, était sans portée sur le fait qu’il pourrait à bref délai quitter la Suisse sur une base volontaire. Le fait que son ex-épouse et son fils soient disposés à l’accueillir démontrait sa volonté constamment affichée de s’opposer ou de se soustraire à son renvoi, de sorte que sa détention apparaissait comme la seule mesure apte à garantir sa présence et l’exécution de son renvoi le jour où un laissez-passer serait délivré et un vol réservé.

La durée de trois mois de la prolongation prononcée par le TAPI apparaissait nécessaire pour permettre la délivrance du laissez-passer et l’organisation d’un vol, et la durée maximale permise par la loi n’était, de loin, pas atteinte.

r. Par courriel du 27 avril 2023, le SEM a informé l’OCPM qu’il était toujours sans réponse des autorités B______ concernant la délivrance d'un laissez-passer pour l'intéressé.

E. a. Par requête du 28 avril 2023, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de A______ pour une durée de trois mois. Il a produit un courriel du SEM du 27 avril 2023 indiquant qu’il n’avait pas pu obtenir de réponse du Vice-Consul, raison pour laquelle il s’était adressé par courriel directement au Consulat. Dès qu’une réponse lui parviendrait, il la transmettrait.

b. Lors de l'audience du 10 mai 2023, A______ a déclaré au TAPI être toujours opposé à son renvoi. Il n'avait entrepris aucune démarche en ce sens. Il était en Suisse depuis 1997 et avait quitté son pays en 1994. Son fils habitait avec sa maman : ils avaient déménagé depuis une année, mais il ne connaissait pas l'adresse. Il a conclu au rejet de la demande de prolongation de la détention administrative et à sa mise en liberté au motif que son renvoi était impossible.

La représentante de l'OCPM a indiqué qu'elle n'avait pas d'informations complémentaires à transmettre.

c. Par jugement du 10 mai 2023, le TAPI a prolongé la détention administrative de A______ de trois mois, soit jusqu’au 13 août 2023.

La légalité de celle-ci avait déjà été admise. Aucun changement des circonstances pertinentes n’étant intervenu, il était renvoyé aux motifs des précédentes décisions.

L'assurance de l'exécution du renvoi de l’intéressé répondait à un intérêt public certain et aucune autre mesure moins incisive ne permettait de garantir sa présence au moment de l'exécution de son refoulement, au vu notamment de son refus maintes fois allégué et démontré de retourner en B______. Le fait que son ex-épouse s’engageait à le loger chez elle n’y changeait rien, la présence de cette dernière et de son fils à Genève ne l’ayant pas, jusqu’ici, dissuadé de ne pas se soumettre aux décisions de l’autorité. La détention respectait le principe de la proportionnalité. Il n’en allait pas différemment du principe de diligence et célérité, le temps pris en vue de finaliser le renvoi de l'intéressé n’étant pas imputable aux autorités suisses, étant souligné que si A______ entreprenait lui-même des démarches auprès du Consulat B______, le laissez-passer pourrait être rapidement obtenu et son renvoi effectué, ce qui mettrait fin à sa détention administrative.

La durée de la détention respectait le cadre légal. Le fait que les autorités B______ prenaient du temps pour répondre à la demande des autorités au motif que l’intéressé était père d’un enfant majeur ne signifiait pas encore que ces dernières refuseraient de délivrer le laissez-passer sollicité et que le renvoi se révélerait dès lors impossible.

F. a. Par acte déposé le 22 mai 2023 au greffe universel du Pouvoir judiciaire, A______ a recouru contre ce jugement, dont il a demandé l’annulation, concluant à sa mise en liberté immédiate.

Il vivait en Suisse depuis 1997 et n’avait jamais disparu. Cela faisait 20 ans que les autorités helvétiques n’avaient pas pu obtenir de laissez-passer. Il avait deux belles-filles, qu’il avait élevées et considérait comme les siennes. Il formait à nouveau un couple avec son ex-épouse. Il était notoire que les autorités B______ ne délivraient pas de laissez-passer lorsque l’intéressé avait noué des liens plus forts dans un autre pays. L’obligation de diligence et de célérité avait été violée. Il était également inopportun de détenir à grands frais une personne en vue de son renvoi alors qu’elle vivait en couple et disposait d’une adresse à Genève.

Il a produit un courrier de son fils du 19 mai 2023 demandant la reconsidération du « cas » de son père, indiquant avoir besoin de lui, et que celui-ci soit transféré à Genève afin de pouvoir lui rendre visite. Il a également joint deux courriers de ses belles-filles, exposant le considérer comme leur père, leur père biologique étant décédé, et souhaiter qu’il puisse voir grandir ses petites-filles.

b. L’OCPM a rappelé que le refoulement du recourant avait déjà échoué trois fois, les 23 août 2006, 24 janvier 2013 et 25 mars 2013, en raison du refus de celui-ci de monter à bord de l’avion devant le ramener dans son pays. Il ne faisait ménage commun ni avec son fils adulte ni avec son ex-épouse. Le SEM continuait depuis la présentation du recourant le 21 décembre 2022 au Consulat d’B______, d’intervenir sans relâche en vue d’obtenir le laissez-passer nécessaire à l’exécution du renvoi. Il était loisible au recourant d’obtenir celui-ci à bref délai s’il manifestait son accord.

Il a produit un courriel du 5 mai 2023 de l’OCPM au TAPI indiquant que le recourant avait été transféré de J______ à K______ et un courriel du SEM du 24 mai 2023 à l’OCPM, confirmant qu’il soumettait régulièrement la situation du recourant au Consulat général d’B______, la prochaine étant prévue la semaine prochaine. Le cas était « classé comme prioritaire ».

c. Le recourant n’a pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Selon l’art. 10 al. 2 1ère phr. de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 22 mai 2023 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

À teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger (al. 3 1ère phr.).

3.             Le recourant ne conteste pas que les conditions de la détention administrative, fondée sur l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, qui renvoie à l'art. 75 al. 1 let. h LEI, sont remplies. Comme l’a relevé le TAPI, celles-ci ont déjà été examinées et confirmées dans ses jugement des 17 novembre 2022 et 8 février 2023, puis l’arrêt de la cambre administrative du 3 mars 2023 et aucune circonstance nouvelle ne nécessite de les réexaminer.

En revanche, le recourant se plaint de la violation de l’art. 76 al. 4 LEI et du principe de l’opportunité.

3.1 Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 al. 2 et 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

3.2 Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

3.3 La détention doit être levée notamment si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI). L'exécution du renvoi est impossible lorsque le rapatriement est pratiquement exclu, même si l'identité et la nationalité de l'étranger sont connues et que les papiers requis peuvent être obtenus (arrêt du Tribunal fédéral 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1 et les références).

Tant que l’impossibilité du renvoi dépend de la volonté de l’étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne peut se prévaloir de cette impossibilité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011). Cette jurisprudence, rendue dans le cadre d’une détention pour insoumission, en rapport avec l’obligation de collaborer de l’art. 78 al. 6 LEI, est a fortiori valable dans un cas de détention en vue du renvoi, phase à laquelle s’applique l’obligation de collaborer de l’art. 90 al. 1 let. c LEI (ATA/1436/2017 du 27 octobre 2017 consid.6a ; ATA/881/2015 du 28 août 2015 et les références citées).

3.4 Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; ATA/1305/2022 du 21 décembre 2022 consid. 4d ; ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 5a). Le principe de célérité est violé si les autorités compétentes n'entreprennent aucune démarche en vue de l'exécution du renvoi ou de l'expulsion pendant une durée supérieure à deux mois et que leur inactivité ne repose pas en première ligne sur le comportement des autorités étrangères ou de la personne concernée elle-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1).

3.5 En l’espèce, il ressort du dossier que les autorités helvétiques ont entrepris les démarches nécessaires à l’octroi d’un laissez-passer en faveur du recourant. Le retard que l’établissement de celui-ci a pris ne leur est pas imputable. Selon les renseignements transmis par le SEM, une nouvelle rencontre avec le Consulat général d’B______ est agendée la semaine prochaine, en vue de l’obtention dudit laissez-passer. Le principe de diligence et de célérité a donc été observé.

Le fait que le laissez-passer n’ait pas encore été établi ne constitue nullement une circonstance permettant de considérer que l’exécution du renvoi serait impossible. En effet et comme l’a relevé le TAPI, si le recourant entreprenait lui-même les démarches auprès du Consulat d’B______, le laissez-passer serait rapidement établi et son renvoi pourrait être exécuté, de sorte que sa détention prendrait fin. Ainsi, en l’état, il n’existe aucune impossibilité à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 80 al. 6 let. a LEI.

La question de savoir si, au regard des liens affectifs que le recourant soutient entretenir avec son fils adulte, son ex-épouse et les deux filles adultes de celle-ci devrait justifier l’octroi d’une autorisation de séjour ne ressortit pas à l’objet du litige. Celui-ci est limité au bien-fondé de la détention administrative. En outre et contrairement à ce que le recourant laisse entendre, ces seuls liens, même s’ils étaient établis, ne permettraient pas de considérer que la détention administrative ne respecte pas le principe de la proportionnalité. En effet, le recourant ne s’est conformé à aucune décision de renvoi et se soustrait avec obstination depuis 2006 à son renvoi. Celui-ci a échoué les 23 août 2006, 24 janvier 2013 et 25 mars 2013, en raison de son refus de monter à bord de l’avion devant le ramener en B______. Il persiste à s’opposer à son renvoi. Ainsi, aucune mesure moins incisive que la détention administrative ne paraît apte à assurer sa présence lorsque le laissez-passer sera établi par les autorités consulaires B______ et une place réservée sur un vol à destination de l’B______.

L’exécution de son renvoi répond à un intérêt public certain, l’intéressé ayant commis des crimes en Suisse et ne respectant pas les décisions de renvoi et d’interdiction d’entrée rendues par les autorités suisses. L’opportunité de son maintien en détention administrative en vue de l’exécution des décisions de renvoi ne fait ainsi pas de doute. Pour le surplus et comme déjà évoqué, il est loisible au recourant de requérir un laissez-passer aux autorités de son pays et de contribuer ainsi, au travers de l’exécution de son renvoi, à sa propre mise en liberté.

Par ailleurs, son récent transfert de J______ à Genève tient dûment compte de la demande de ses proches de pouvoir lui rendre visite pendant sa détention administrative.

Enfin, la durée de celle-ci jusqu’au 13 août 2023 reste compatible avec le cadre légal, soit l’art. 79 LEI.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

4.             La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 mai 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Dina BAZARBACHI, avocate du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations ainsi qu'à K______, pour information.

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. SPECKER

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :