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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2699/2022

ATA/465/2023 du 02.05.2023 sur JTAPI/129/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2699/2022-PE ATA/465/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mai 2023

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant
représenté par Me Gazmend Elmazi, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
1er février 2023 (JTAPI/129/2023)


EN FAIT

A. a. Monsieur A______, né le ______ 1993, est ressortissant kosovar.

b. Par décision du 29 octobre 2019, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé de délivrer une autorisation de séjour à
M. A______ et prononcé son renvoi de Suisse. La décision a été confirmée par un jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) du
14 juillet 2020 et arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) du 13 avril 2021.

c. Dans le cadre d’une enquête domiciliaire, l’OCPM a constaté que M. A______ n’avait pas quitté le territoire dans le délai imparti. Un ultime délai au 31 mars 2022 lui a été accordé.

d. Le 30 mars 2022, M. A______ a sollicité de l’OCPM la reconsidération de la décision du 29 octobre 2019.

Le 16 février 2021, il avait créé sa propre société « B______», active dans le domaine de la peinture, du placo-plâtre et de la pose de fenêtres, portes, carrelages et parquets. Cette entreprise, qui avait réalisé en 2021 un bénéfice net de CHF 31'630.75, avait été déclarée auprès des autorités compétentes. Il s’acquittait de cotisations sociales personnelles, disposait d’une assurance facultative pour chefs d’entreprises, versait des contributions professionnelles à la commission paritaire des métiers du bâtiment et payait des impôts dans le canton, de sorte qu’il contribuait au développement économique de celui-ci. Trois sociétés, dont les déclarations écrites étaient jointes, avaient indiqué apprécier ses qualités professionnelles et être disposées à lui sous-traiter du travail, de sorte que son intégration professionnelle était exceptionnelle. Son renvoi aurait pour conséquence la perte de sa société et des investissements financiers y relatifs.

e. Par décision du 23 juin 2022 déclarée exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur cette demande de reconsidération, au vu de l’absence de faits nouveaux et importants.

B. a. Par acte du 24 août 2022, M. A______ a interjeté recours auprès du TAPI contre la décision de l’OCPM du 23 juin 2022 concluant, principalement, à son annulation et au renvoi de la cause à cet office pour nouvelle décision avec instruction de préaviser favorablement sa demande de titre de séjour et à ce qu’il soit dit que son renvoi de Suisse ne saurait être exécuté jusqu’à droit jugé sur la présente procédure.

Il a repris ses précédents arguments et indiqué qu’il séjournait désormais en Suisse depuis une durée plus longue que lors de sa demande de titre de séjour et que son intégration s’était améliorée au fil du temps. Cette modification notable des circonstances constituait un motif de reconsidération.

b. Par décision incidente du 26 septembre 2022, non contestée, le TAPI a rejeté la demande de mesures provisionnelles.

c. Par jugement du 1er février 2023, le TAPI a rejeté le recours interjeté contre la décision du 23 juin 2022.

C. a. Par acte du 9 mars 2023, M. A______ a recouru devant la chambre administrative contre ce jugement. Il a conclu à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour.

Il était en Suisse depuis onze ans, soit depuis une longue période, condition qu’il ne remplissait pas lors de la première procédure. Son intégration s’était améliorée au vu de la création de son entreprise. L’art. 48 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) avait été violé.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours. Les arguments développés devant la chambre de céans étaient identiques à ceux discutés devant le TAPI.

c. Le 31 mars 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2.             Le recourant conclut à l’annulation du jugement et à l’octroi d’une autorisation de séjour.

2.1 L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours, les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. En d'autres termes, l'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; ATA/123/2019 du 5 février 2019 consid. 5).

2.2 En l'espèce, la décision querellée est un refus d'entrer en matière sur la demande de reconsidération du 30 mars 2022. Conformément à la jurisprudence précitée, le seul objet du présent recours consiste à vérifier la bonne application de l'art. 48 LPA.

Les conclusions tendant à ordonner à l'OCPM d'autoriser le séjour seront déclarées irrecevables.

3.             Le recourant fait valoir que les circonstances ont changé, ce qui justifierait une reconsidération de la décision de l’OCPM de lui refuser une autorisation de séjour et de prononcer son renvoi.

3.1 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 5b).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1
let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux », c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/830/2016 du 4 octobre 2016 consid. 2a).

3.2 Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b). La procédure de reconsidération ne constitue pas un moyen de réparer une erreur de droit ou une omission dans une précédente procédure (ATF 111 Ib 211).

3.3 Saisie d'une demande de reconsidération, l'autorité examine préalablement si les conditions de l'art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n'est pas le cas, elle rend une décision de refus d'entrer en matière qui peut faire l'objet d'un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2 ; 109 Ib 246 consid 4a). Si lesdites conditions sont réalisées, ou si l'autorité entre en matière volontairement sans y être tenue, et rend une nouvelle décision identique à la première sans avoir réexaminé le fond de l'affaire, le recours ne pourra en principe pas porter sur ce dernier aspect. Si la décision rejette la demande de reconsidération après instruction, il s'agira alors d'une nouvelle décision sur le fond, susceptible de recours. Dans cette hypothèse, le litige a pour objet la décision sur réexamen et non la décision initiale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_319/2015 du 10 septembre 2015 consid. 3 ; 2C_406/2013 du 23 septembre 2013 consid. 4.1).

3.4 L’écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socioprofessionnelle ne peuvent être qualifiés d'éléments notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/318/2023 du 28 mars 2023 consid. 4.6 ; ATA/1171/2022 du 22 novembre 2022 consid. 3.1.1 et les références citées).

3.5 En l’espèce, le recourant invoque des faits nouveaux « nouveaux », soit survenus après l’arrêt de la chambre de céans, à savoir la plus longue durée de son séjour et la création de son entreprise. Ces deux éléments sont toutefois liés au seul écoulement du temps et au non-respect des décisions et jugements précédemment prononcés. Les conditions pour une entrée en matière pour une reconsidération ne sont en conséquence pas remplies, conformément à la jurisprudence précitée, étant pour le surplus précisé que la création d’entreprise n’est pas une modification importante de l’état de fait.

Au vu de ce qui précède, la décision de l’OCPM refusant d’entrer en matière sur la demande de reconsidération du 30 mars 2022 est conforme au droit et ne consacre aucun abus ou excès de son pouvoir d’appréciation, ce que le TAPI a confirmé à bon droit.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87
al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 9 mars 2023 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er février 2023 ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gazmend Elmazi, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.