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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2581/2021

ATA/1258/2022 du 13.12.2022 sur JTAPI/141/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2581/2021-PE ATA/1258/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 décembre 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______
représentés par Me Lida Lavi, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 février 2022 (JTAPI/141/2022)


EN FAIT

1) Monsieur B______, né le ______ 1977, et Madame A______, née le ______ 1981, tous deux ressortissants algériens, se sont mariés le 30 mai 2007 en Algérie.

De leur union sont nés C______, le ______ 2009, D______, le ______ 2012, E______, le ______ 2015, et F______, le ______ 2019.

2) Le 15 novembre 2014, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a délivré à M. B______ une autorisation d’entrée pour un séjour de 120 jours sur une période de 12 mois, en qualité de manager de la société G______ SA.

3) Le 3 février 2016, l’OCIRT a rendu une décision favorable à la demande d’octroi de M. B______ d’une autorisation de séjour valable 12 mois. Toutefois, sa prolongation était subordonnée à la réalisation des objectifs annoncés et à l’approbation du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM).

Le SEM a approuvé cette décision le 12 février 2016, l’autorisation étant délivrée pour une durée de 12 mois, et pouvant être prolongée par l’autorité cantonale si les objectifs annoncés étaient atteints.

4) Le 23 février 2016, une autorisation d’entrée et de séjour valable 12 mois a été délivrée à M. B______ en sa qualité de directeur commercial de la société G______ SA, ainsi qu’aux membres de sa famille dans le cadre du regroupement familial.

5) La famille B______ est arrivée en Suisse le 9 mai 2016.

6) Le 20 mai 2016, un titre de séjour valable jusqu’au 8 mai 2017 a été octroyé à M. B______, ainsi qu’à sa famille, et a été régulièrement renouvelé jusqu’au 31 décembre 2020.

7) Par décision du 25 mars 2021, l’OCIRT a refusé la demande de prolongation de l’autorisation de séjour de M. B______. En effet, les objectifs annoncés par la société n’avaient pas été atteints, ni en 2018, ni en 2019, ni en 2020, tant au niveau du chiffre d’affaires et du bénéfice, que des engagements.

8) a. Le 7 avril 2021, Mme A______ et M. B______ ont sollicité de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur pour leur famille.

Ils étaient arrivés en Suisse le 9 mai 2016. Leurs enfants étaient scolarisés à Genève et maitrisaient la langue française. La famille était bien intégrée. Lui-même était employé par G______ SA par contrat de durée indéterminée, et percevait une rémunération annuelle de CHF 120'000.-, tandis que son épouse était
gérante-associée de la société H______ Sàrl. Ils étaient financièrement indépendants et leur comportement n’avait jamais donné lieu à des plaintes.

Ils ont joint à leur demande de nombreuses pièces, soit notamment des copies de leurs passeports et de ceux de leurs enfants, de leurs permis de séjour, de leurs diplômes, de leur contrat de bail, ainsi que de leurs contrats de travail et les attestations de scolarité 2020-2021 pour C______, D______ et E______, des extraits, vierges, de leur casier judiciaire, des extraits du registre des poursuites, attestant qu’ils ne faisaient l’objet d’aucune poursuite et une attestation de l’Hospice général (ci-après : HG), selon laquelle ils ne percevaient pas de prestations financières, ainsi que des polices d’assurance-maladie pour toute la famille, conclues à compter de mai 2016.

b. Par courrier du 17 mai 2021, l’OCPM a informé Mme A______ et M. B______ de son intention de refuser de leur octroyer les autorisations sollicitées et de prononcer le renvoi de la famille de Suisse.

c. Le 17 juin 2021, Mme A______ et M. B______ ont présenté des observations, conformément à leur droit d’être entendus.

M. B______ exerçait le métier « d’import-export de matières premières » de l’Algérie vers d’autres pays. Genève était une place incontournable en Europe du trading mondial et du négoce. Il était le fondateur et associé de la société qui l’employait. Le siège de son employeur était à Genève. Il avait joué un rôle majeur dans la conclusion d’un contrat de vente récent avec une société en Algérie. Il existait donc un lien spécifique entre sa profession et la Suisse. Son renvoi l’exposait à de graves conséquences financières du fait de la perte d’un tel contrat et des répercussions sur l’avenir de la société.

C______ était arrivée en Suisse à l’âge de 8 ans, et était aujourd’hui, à 13 ans, en pleine adolescence. Elle avait d’excellents résultats scolaires.

D______ souffrait de troubles de l’attention et d’hyperactivité
(ci-après : TDAH) et suivait une thérapie auprès de l’office médico-pédagogique (ci-après : OMP). Son trouble nécessitait des aménagements scolaires et un traitement avec de la Ritaline, non commercialisée en Algérie.

Ils ont joint à leur courrier plusieurs pièces, soit notamment un certificat établi par une psychologue de Batna, rédigé le 17 juin 2021, qui attestait que la Ritaline était un produit non commercialisé en Algérie, ainsi que des articles de presse indiquant que l’Algérie souffrait de diverses pénuries de médicaments.

d. Le 21 juin 2021, ils ont encore transmis à l’OCPM plusieurs documents, concernant leurs deux premiers enfants, soit notamment un rapport détaillé de l’OMP du 20 juillet 2020, ainsi qu’un certificat médical du 23 avril 2021 concernant D______, et une attestation médicale du 10 juin 2021 pour C______, selon laquelle elle était suivie en soutien pour la gestion des émotions, à la suite de harcèlement scolaire subi en Algérie.

Selon l’anamnèse familiale figurant dans le rapport de l’OMP précité, les enfants étaient arrivés en Suisse en août 2019, afin de rejoindre leur père qui travaillait à Genève depuis plusieurs années et qui rentrait en Algérie le week-end. Madame A______, à teneur de ce document, était enseignante d’anglais à l’université. D______ souffrait de TDAH, sans comorbidité objectivable à ce stade, mais des signes « d’une légère souffrance (mauvaise estime de soi, toute puissance) étaient décelables ». L’OMP préconisait la mise en place de mesures scolaires, soit d’installer le bureau de l’enfant loin des fenêtres, et proche de l’enseignant et qu’il puisse bénéficier d’aménagements temporels au moment des évaluations, ainsi que de la médication et la poursuite du suivi psychologique.

9) Par décision du 2 juillet 2021, l’OCPM a refusé d’octroyer à Mme A______ et à M. B______, ainsi qu’à leurs quatre enfants les autorisations de séjour sollicitées et a prononcé leur renvoi de Suisse. Un délai au 2 septembre 2021 leur était imparti pour quitter le pays.

Les requérants ne remplissaient pas les critères d’un cas d’extrême gravité. Leur séjour sur le territoire était relativement court, et leur intégration correspondait au comportement ordinaire qui pouvait être attendu de toute personne d’origine étrangère souhaitant régulariser ses conditions de séjour.

Les attaches créées avec la Suisse n’étaient pas si durables et profondes qu’il ne puisse plus être raisonnable d’exiger un retour en Algérie. Leur situation différait des personnes démunies de titre de séjour et en séjour illégal sur le territoire depuis de nombreuses années, car la famille avait bénéficié depuis son arrivée d’une autorisation de séjour et de travail avec regroupement familial. L’intérêt économique n’était pas démontré au vu de la décision négative de l’OCIRT du 25 mars 2021. Les connaissances professionnelles acquises n’étaient pas si spécifiques qu’elles ne pouvaient être mises en œuvre dans le pays d’origine.

Enfin, s’agissant des enfants, C______ était tout juste âgée de 13 ans et au début seulement de sa formation au cycle d’orientation. Un retour en Algérie ne devait pas constituer un déracinement la concernant. D______ était certes suivi médicalement, mais un éventuel départ de Suisse ne constituait a priori pas une mise en danger de sa santé. Les autres enfants étaient âgés de respectivement 5 ans et 1 an et demi, de sorte que leur intégration en Suisse n’était pas déterminante. En bonne santé, leur réintégration dans leur pays d’origine ne devait pas poser de problèmes insurmontables.

10) Par acte du 4 août 2021, Mme A______ et M. B______ ont interjeté recours contre la décision précitée, auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), concluant principalement à son annulation.

Ils séjournaient en Suisse depuis plus de 5 ans, et leurs enfants ne maitrisaient que la langue française. C______ était arrivée en Suisse à l’âge de 8 ans et avait aujourd’hui 13 ans. Elle était en pleine adolescence, avait toujours été scolarisée à Genève et avait d’excellents résultats scolaires. Elle était actuellement suivie en raison de difficultés dans la gestion des émotions, en lien avec son parcours scolaire en Algérie, où elle avait été harcelée en classe.

D______ souffrait de TDAH et était suivi par l’OMP depuis 2019. Il bénéficiait de mesures spécifiques d’aménagements scolaires et était traité avec la Ritaline, médicament qui n’était pas commercialisé en Algérie.

Leurs enfants mineurs n’avaient, pour certains d’entre eux, connu aucun autre pays que la Suisse. Leur renvoi dans un pays dont ils ne maitrisaient pas la langue provoquerait nécessairement un déracinement.

Ils étaient titulaires de plusieurs diplômes universitaires obtenus dans leur pays d’origine. Lui-même était employé par la société G______ SA à Genève, par un contrat de durée indéterminée et percevait une rémunération annuelle brute de CHF 120'000.- depuis le 11 décembre 2015. Il était très bien intégré et la société qui l’employait était active dans le négoce international. Son épouse avait repris une activité lucrative en décembre 2020 après avoir été femme au foyer, auprès de la société H______ Sàrl, dont elle était salariée. Leurs casiers judiciaires respectifs étaient vierges, ils n’avaient pas de dettes et n’avaient jamais bénéficié de l’aide sociale depuis leur arrivée en Suisse.

Le refus de leur octroyer une autorisation de séjour violait l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

Ils ont joint à leur recours diverses pièces, soit notamment des attestations médicales concernant les enfants, des copies de leurs diplômes et de leurs contrats de travail, des bulletins scolaires concernant C______, et des attestations scolaires pour D______ et E______, ainsi que des copies de documents déjà transmis dans le cadre de leur demande d’autorisation de séjour (extraits de leurs casiers judiciaires vierges, du registre des poursuites et une attestation de l’HG).

11) Par jugement du 21 février 2022, le TAPI a rejeté le recours.

Les parents ne pouvaient se prévaloir d’un séjour d’une longue durée. S’ils respectaient l’ordre public suisse, maîtrisaient le français, étaient financièrement indépendants et n’avaient jamais émargé à l’aide sociale, leur intégration professionnelle et sociale ne pouvait pas être qualifiée d’exceptionnelle. Nés en Algérie, où ils avaient passé leur enfance, leur adolescence et la majeure partie de leur vie d’adulte, ils avaient certainement conservé des attaches dans leur pays d’origine. Aucun élément permettait de considérer qu’ils se trouveraient dans une situation de détresse personnelle devant justifier l’octroi d’une exception aux mesures de limitation.

S’agissant de C______, même à retenir un début de scolarisation en 2016, ce qui ne ressortait pas du dossier, elle ne pouvait se prévaloir, au vu de son âge, d’une forte intégration, respectivement de difficultés de réintégration en cas de départ de Suisse. Elle n’était qu’au seuil de son adolescence et encore intégralement dépendante de ses parents. Il en allait de même de ses frères et sœur D______, E______ et F______, âgés respectivement de 9, 6 et 2 ans. Ils ne risquaient pas d’être déracinés au sens de la jurisprudence. S’agissant spécifiquement de l’état de santé de D______, qui souffrait d’un TDAH diagnostiqué en 2020, il n’apparaissait pas que ses soins et son suivi médical ne puissent pas être assurés en Algérie de manière adéquate.

Aucun membre de la famille nucléaire des recourants ne séjournait en Suisse au bénéfice d’un titre de séjour, de sorte qu’ils ne pouvaient valablement invoquer le droit au respect de leur vie familiale.

Quant au renvoi, aucun élément au dossier ne permettait de retenir que D______ ne pourrait pas recevoir les soins essentiels garantissant les conditions minimales d’existence au sens de la jurisprudence.

12) a. Par acte du 24 mars 2022, Mme A______ et M. B______ ont recouru par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation, à ce qu’il soit constaté qu’ils remplissaient les conditions d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur et à l’octroi d’une autorisation de séjour. Préalablement, ils ont conclu à l’octroi de l’effet suspensif et sollicité une audience de comparution personnelle.

C’était à tort que l’autorité intimée avait considéré que leur parcours professionnel n’était pas exceptionnel. Mme A______ avait créé sa propre société durant plusieurs mois. M. B______ était associé d’une société de trading, étant précisé que la Suisse constituait une place incontournable du trading mondial. Il avait récemment signé un contrat important d’achat et de vente de matières premières avec une société en Algérie, contrat qui aurait pour effet de pérenniser et de développer son activité sur plusieurs années.

Il ressortait des Directives LEI qu’une présence de cinq ans devait être reconnue comme valeur indicative. Les enfants étaient scolarisés à Genève depuis plusieurs années et obtenaient de très bons résultats. Ils ne maîtrisaient quasiment que la langue française. C______ était en pleine adolescence et était actuellement suivie en consultation de soutien en raison d’une difficulté dans la gestion de ses émotions en lien avec son parcours scolaire passé en Algérie. Elle avait subi du harcèlement de la part de ses camarades de classe dans son pays d’origine. D______ souffrait d’un trouble neurobiologique important, nécessitant des mesures spécifiques d’aménagement scolaire. Il était traité par Ritaline, soit un médicament non commercialisé en Algérie. Ce pays souffrait d’ailleurs d’une pénurie généralisée de médicaments.

À l’appui de leur recours, ils ont notamment produit une attestation de l’OMP du 10 juin 2021 concernant C______, ainsi que plusieurs documents médicaux de l’OMP concernant D______, dont un rapport médical du 24 juin 2020 attestant de l’introduction du médicament Ritaline et précisant que le médicament ne devait être « débuté qu’après l’autorisation du pédiatre ».

b. Par réponse du 23 mai 2022, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

La famille ne pouvait ignorer que son statut en Suisse était lié à celui de M. B______ et aux résultats de son employeur. L’argument selon lequel il avait récemment signé un contrat important avec une société en Algérie n’était pas pertinent dans le cadre de la présente procédure. Il pourrait cas échéant fonder une nouvelle demande auprès de l’OCIRT.

Les recourants savaient que le séjour en Suisse des enfants pouvait être temporaire. Leur situation ne différait pas de celle des enfants titulaires d’une carte de légitimation. Concernant D______, la pièce 22 mentionnait l’introduction de la Ritaline uniquement après autorisation du pédiatre. Il n’était à aucun moment confirmé que le traitement avait débuté. Il existait du reste un autre médicament pour traiter les symptômes de TDAH, commercialisé en Algérie sous le nom de « Strattera ». Si D______ avait effectivement besoin d’un suivi médicamenteux, celui-ci pourrait se poursuivre en Algérie. Enfin, il existait, en Algérie, au moins une association œuvrant pour l’aide des enfants hyperactifs et leurs familles.

c. Par réplique du 27 juin 2022, les recourants ont persisté dans leurs conclusions.

Le médicament « Strattera » commercialisé en Algérie ne contenait pas la même substance active que la Ritaline et était d’ailleurs indisponible dans les pharmacies en Algérie du fait du retrait de sa commercialisation en France depuis le 13 juillet 2012. L’association mentionnée par l’OCPM était située à Boumerdès, soit à près de 370 km de leur ville d’origine (Batna). Il semblait qu’elle n’était plus active, son numéro n’étant plus attribué.

13) Le 29 juin 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieux le refus de l’OCPM de préaviser favorablement la demande d’autorisation de séjour des recourants et prononçant leur renvoi.

3) Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’Ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit.

4) L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 88 a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour
(ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 
124 II 110 consid. 2).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266). Seules les années passées au bénéfice d'une autorisation sont déterminantes, à l'exclusion notamment de celles au bénéfice d'une simple tolérance (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2022 du 2 février 2022 consid. 6.3).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

Afin de tenir compte de la situation spécifique des familles, une présence de cinq ans en Suisse doit être retenue comme valeur indicative (directives LEI, ch. 5.6.10.4). Comme pour les adultes, il y a lieu de tenir compte des effets qu'entraînerait pour les enfants un retour forcé dans leur pays d'origine. Il faut prendre en considération qu'un tel renvoi pourrait selon les circonstances équivaloir à un véritable déracinement, constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité. Pour déterminer si tel serait le cas, il faut examiner plusieurs critères. La situation des membres de la famille ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global (ATF 123 II 125 consid. 4a ; ATA/434/2020 du 30 avril 2020 consid. 10a).

Lorsqu'il y a lieu d'examiner la situation d'une famille sous l'angle de
l'art. 30 al. 1 let. b LEI, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément mais en relation avec le contexte familial global. Le sort de la famille formera en général un tout. Il serait en effet difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi, le problème des enfants est un aspect, certes important, de l'examen de la situation de la famille, mais il ne constitue pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d'ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille
(ATF 123 II 1245 consid. 4a). D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du Tribunal administratif fédéral [TAF] C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée ; ATA/91/2022 du 1er février 2022 consid. 2d). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/878/2022 du 30 août 2022 consid. 6e).

En l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, l'aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d'origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l'octroi d'un permis humanitaire pour cas de rigueur ; le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l'examen de la licéité et de l'exigibilité de l'exécution du renvoi (arrêts du Tribunal administratif fédéral
[ci-après : TAF] C-2712/2012 du 9 juillet 2014 consid. 5.7 ; C-3216/2010 du
29 janvier 2014 consid. 3.6 ; C-5710/2011 du 13 décembre 2013 consid. 5.1). En d'autres termes, une grave maladie (à supposer qu'elle ne puisse pas être soignée dans le pays d'origine) ne saurait justifier, à elle seule, la reconnaissance d'un cas de rigueur au sens des dispositions précitées, l'aspect médical ne constituant qu'un élément parmi d'autres (durée du séjour, intégration socioprofessionnelle et formations accomplies en Suisse, présence d'enfants scolarisés en Suisse et degré de scolarité atteint, attaches familiales en Suisse et à l'étranger, etc.) à prendre en considération (ATF 128 II 200 consid. 5.4 ; arrêts du TAF F-4125/2016 du
26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ;
C-5450/2011 du 14 décembre 2012 consid. 6.4). Les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l'exécution du renvoi au sens de l'art. 83 al. 4 LEI et une personne qui ne peut se prévaloir que d'arguments d'ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d'origine et souffrant de la même maladie (arrêts du TAF F-4125/2016 précité consid. 5.4.1 ; C-912/2015 précité consid. 4.3.2 ; C-5450/2011 précité consid. 6.4).

Le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par
l'art. 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 2 novembre 1989 (CDE - RS 0.107) (arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 ; 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; ATA/1004/2021 du 28 septembre 2021 consid. 3d ; ATA/434/2020 du 30 avril 2020 consid. 10a).

5) Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille. Pour qu'il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, il doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1).

Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2). Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance – par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours – ne sont en revanche pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_603/2019 précité consid. 6.2).

6) En l’espèce, il n’est pas contesté que le recourant est arrivé en Suisse dans le courant du printemps 2016, soit il y a plus de six ans. Ainsi que le relèvent les recourants, une telle durée excède la valeur indicative de cinq ans retenue par les directives LEI afin de tenir compte de la situation spécifique des familles. Il n’est toutefois pas établi que l’arrivée en Suisse des enfants remonte également au printemps 2016. Comme l’a relevé le TAPI, seules les polices d’assurance-maladie et autorisations de séjour corroborent cette information. Dans leur attestation du 20 juillet 2020, les médecins de l’OMP ont relevé que les enfants et leur mère n’avaient rejoint le recourant à Genève qu’à compter du mois d’août 2019. Cela est d’ailleurs confirmé par l’ensemble des pièces scolaires au dossier – qui ne remontent qu’à l’année 2020/2021 –, ainsi que par l’attestation de l’OMP du 10 juin 2021, dans laquelle la scolarisation de C______ n’est mentionnée que dès la rentrée 2019-2020. Dans leurs écritures devant la chambre de céans, les recourants n’ont produit aucune pièce supplémentaire permettant d’établir la présence des enfants, et de leur mère, en Suisse entre 2016 et 2019. Dans ces conditions, il convient de retenir, à l’instar de l’instance précédente, que la durée de la présence en Suisse des recourants ne saurait être considérée comme longue.

Ils n’ont certes jamais émargé à l’assistance sociale, respectent l’ordre public suisse, maîtrisent le français et sont financièrement indépendants. Ces éléments ne suffisent toutefois pas à retenir que leur situation constitue un cas individuel d'une extrême gravité, comme on le verra ci-après.

S’agissant d’abord des parents, et ainsi que l’a retenu l’intimé, leur intégration professionnelle ne saurait être qualifiée d’exceptionnelle. Le recourant a certes travaillé au sein d’une société active dans le trading mondial. Il ressort toutefois du dossier que l’OCIRT a refusé de prolonger son autorisation de séjour, au motif que les objectifs annoncés par la société n’avaient pas été atteints, ni en 2018, ni en 2019, ni en 2020, tant au niveau du chiffre d’affaires et du bénéfice, que des engagements. On ne saurait, dans ces conditions, retenir qu’il ait fait preuve d’une ascension professionnelle remarquable au point de justifier la poursuite de son séjour en Suisse. Par ailleurs, et dans la mesure où le recourant travaille notamment avec des partenaires en Algérie, il y a tout lieu de penser que les connaissances acquises en Suisse pourraient être mises en pratique dans son pays d’origine. Contrairement à ce que soutient le recourant, le seul fait d’avoir récemment signé un contrat de vente important – élément qui pourrait tout au plus justifier une demande auprès de l’OCIRT – ne modifie pas cette appréciation.

Quant à la situation professionnelle de la recourante, celle-ci fait valoir, sans toutefois l’étayer, avoir créé sa propre société « durant plusieurs mois ». Devant l’incertitude quant à la poursuite de son séjour en Suisse, elle aurait préféré « se séparer de son commerce » et s’occuper de ses quatre enfants. La recourante ne précise toutefois ni la date de création, ni la durée, ni le secteur d’activité de son commerce. Cette seule allégation, toute générale, ne permet ainsi pas de modifier l’appréciation du TAPI sur l’absence d’intégration professionnelle.

Quant à leur intégration sociale, celle-ci n’est pas exceptionnelle, ce que les recourants ne contestent pas.

S’agissant des possibilités de réintégration dans leur pays d’origine, les recourants sont nés en Algérie, où ils ont passé leur enfance, leur adolescence et la majeure partie de leur vie d’adulte. Ils ont certainement conservé des attaches familiales dans leur pays d’origine. Ils sont encore jeunes et en bonne santé. Les compétences acquises en Suisse tant en français que dans le domaine professionnel du recourant pourront être mises en valeur en Algérie. Leur réintégration n’apparait ainsi pas fortement compromise.

Reste à examiner la situation des enfants, étant rappelé que, selon la jurisprudence précitée, celle-ci est un aspect, certes important, de l'examen de la situation de la famille, mais ne constitue pas le seul critère.

C______ est actuellement âgée de 13 ans et est scolarisée à Genève, où elle a obtenu de bons résultats. Elle a ainsi déjà entamé le début de son adolescence, soit une période importante du développement personnel. Elle ne se trouve toutefois qu’au début de cette période, de sorte qu’on ne saurait traiter sa situation de la même manière que les enfants ayant vécu toute leur adolescence dans le pays et qui peuvent ainsi se prévaloir d’une intégration sociale accrue pour ce motif. Par ailleurs, ayant vécu en Algérie jusqu’à l’âge de 11 ans, voire 8 ans selon les recourants, elle est familière de la langue et culture du pays. Si son retour en Algérie nécessitera de sa part un grand effort d’adaptation, dont l’importance ne saurait être sous-estimée, il ne faut pas perdre de vue qu’elle sera accompagnée de sa famille. Quant à son état de santé, il ne ressort pas du dossier qu’un diagnostic médical ait été posé. Si un suivi psychologique est certes recommandé pour lui permettre de mieux gérer ses émotions, il n’est pas établi qu’elle ne pourrait en bénéficier en cas de retour en Algérie. Sa réintégration parait ainsi également possible.

D______, E______ et F______, âgés respectivement de 10, 6 et 3 ans, pourront compter sur l’aide de leurs parents – et de leur sœur C______ – pour s’adapter à leur nouveau mode de vie, la langue du pays ne devant au surplus pas leur être étrangère. Ces considérations valent à plus forte raison pour F______, âgé de 3 ans et qui n’est pas encore scolarisé, de sorte que son processus d’intégration en Suisse n’est pas à ce point avancé qu’il serait irréversible. S’agissant en particulier de la situation de D______, atteint de TDAH, il y a lieu de relever que, selon la jurisprudence précitée, une maladie – même grave – ne saurait justifier, à elle seule, la reconnaissance d’un cas de rigueur, l’aspect médical ne constituant qu’un élément parmi d’autres. À cela s’ajoute que, pour les motifs qui seront développés ci-après, il n’apparait pas que les soins et le suivi médical de l’intéressé ne pourraient pas être assurés en Algérie de manière adéquate.

Enfin, les recourants ne peuvent rien tirer des droits découlant de
l’art. 8 CEDH. Compte tenu en particulier de la durée de leur présence en Suisse et de leur intégration socio-professionnelle – qui, comme on l’a vu, ne saurait être qualifiée d’exceptionnelle –, ils ne réunissent pas les conditions restrictives d’une autorisation de séjour sur la base du droit au respect de leur vie privée. Quant à la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, les recourants ne font pas valoir qu’un membre de leur famille nucléaire séjournerait en Suisse au bénéfice d’un titre de séjour.

Au vu de ce qui précède, les recourants ne se trouvent pas dans un cas d'extrême gravité au sens de la loi. L'OCPM n'a donc pas violé la loi ni commis un excès ou un abus de son pouvoir d'appréciation en refusant de préaviser favorablement une autorisation de séjour en faveur des recourants auprès du SEM.

7) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).  L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

S'agissant plus spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d'origine, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêt du TAF E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées ; arrêt du TAF E-689/2019 du 30 novembre 2020 ; ATA/1160/2020 du 17 novembre 2020 consid. 7b).

L'art. 83 al. 4 LEI est une disposition exceptionnelle. Il ne saurait faire échec à une décision de renvoi au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical prévalant en Suisse correspondent à un standard élevé non accessible dans le pays d'origine ou le pays tiers de résidence. Il ne suffit pas en soi de constater, pour admettre l'inexigibilité de l'exécution du renvoi, qu'un traitement prescrit sur la base de normes suisses ne pourrait être poursuivi dans le pays de l'étranger. Ce qui compte, en effet, c'est l'accès à des soins, le cas échéant alternatifs, qui, tout en correspondant aux standards du pays d'origine, sont adéquats à l'état de santé de l'intéressé, même s'ils sont d'un niveau de qualité, d'une efficacité de terrain (ou clinique) et d'une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine de l'étranger concerné, l'exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l'absence de possibilités de traitement adéquat, si l'état de santé de l'intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/3161/2020 précité).

b. En l’occurrence, D______ bénéficie d’un suivi de l’OMP, qui implique notamment des aménagements scolaires et un suivi psychologique. Si la médecin de l’OMP a certes recommandé l’introduction de la Ritaline dans son avis du 24 juin 2020, elle a soumis la prise de ce médicament à l’autorisation préalable du pédiatre. Or, le dossier ne contient aucune pièce attestant que ce dernier aurait autorisé la prise de ce médicament ou que D______ suivrait effectivement un traitement à base de Ritaline. Au demeurant, il n’apparait pas que les soins et le suivi médical ne pourraient être assurés en Algérie de manière adéquate, et cela quand bien même la Ritaline ne serait pas distribuée en Algérie. Dans sa réponse devant la chambre de céans, l’OCPM a d’ailleurs relevé qu’il existait un autre médicament pour traiter les symptômes du TDAH en Algérie (le Strattera). Quoi qu’ils en disent, les pièces produites par les recourants, qui portent uniquement sur la situation en France, ne permettent pas de démontrer que ce médicament ne serait pas distribué en Algérie. Les éventuels aménagements scolaires nécessités par son trouble de l’attention ne suffisent pas à faire obstacle à son renvoi.

Il s’ensuit que l’état de santé de D______ ne constitue pas une cause rendant l’exécution du renvoi illicite, impossible ou non-exigible.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

Le présent arrêt rend sans objet la demande visant l’effet suspensif au renvoi.

8. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 550.- sera mis à la charge des recourants, pris solidairement, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA), et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 mars 2022 par Madame A______ et Monsieur B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 février 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 550.- à la charge de Madame A______ et Monsieur B______, pris solidairement,

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Lida Lavi, avocate des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.