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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2110/2021

ATA/171/2022 du 17.02.2022 sur JTAPI/763/2021 ( ICC ) , REJETE

Descripteurs : AVANCE DE FRAIS;LA POSTE;ENVOI RECOMMANDÉ;NOTIFICATION DE LA DÉCISION;DÉLAI DE GARDE;DÉFAUT DE PAIEMENT;FORCE MAJEURE;DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ
Normes : LPA.65; LPA.86; LPA.16.al1
Résumé : Confirmation du jugement d'irrecevabilité du TAPI pour défaut de paiement de l'avance de frais dans le délai imparti. Le recourant ne prouve pas ne pas avoir reçu le recommandé envoyé par le TAPI, de sorte que la demande de paiement a été valablement notifiée. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2110/2021-ICC ATA/171/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 février 2022

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 juillet 2021 (JTAPI/763/2021)


EN FAIT

1) Par décision du 18 mai 2021, l'administration fiscale cantonale a admis partiellement la réclamation que Monsieur A______ avait formée à l'encontre de sa taxation pour l'année fiscale 2019.

2) Par acte du 17 juin 2021, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

3) Par courrier du 21 juin 2021, envoyé sous pli recommandé à l'adresse mentionnée sur l'acte de recours, le TAPI a imparti à M. A______ un délai échéant le 21 juillet 2021 pour procéder au versement d'une avance de frais de CHF 700.-, sous peine d’irrecevabilité de son recours, précisant qu'en cas de ressources insuffisantes, il lui était possible de solliciter l'assistance juridique au moyen d'un formulaire disponible auprès de son greffe ou en ligne, sur les pages internet du Pouvoir judiciaire.

4) Selon les données du « suivi des envois » de la Poste, un avis annonçant la communication de ce pli a été distribué à M. A______ le 22 juin 2021, avec indication du délai pour son retrait au guichet, échéant le 29 juin 2021. Dans la mesure où il n'avait pas été retiré à cette date, la Poste l'a retourné au tribunal avec la mention « non réclamé ».

5) L’avance de frais n’a pas été effectuée dans le délai imparti.

6) Par jugement du 29 juillet 2021, le TAPI a déclaré le recours irrecevable pour défaut de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.

7) Par acte déposé le 7 septembre 2021, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Il a conclu à l’annulation de ce jugement afin qu’on lui laisse la possibilité de faire valoir ses droits au fond devant le TAPI.

Il avait formé recours le 17 juin 2021 et il ne s’attendait pas, compte tenu de la situation sanitaire actuelle, à recevoir si vite une réponse. Il ne savait pas ou ne s’attendait pas à devoir payer des avances de frais ou devoir recourir à une assistance juridique en cas de difficultés financières. Depuis quatre mois, il devait s’occuper de sa mère âgée de 78 ans à laquelle on avait diagnostiqué une maladie neurologique nécessitant un soutien important de sa part. Ses soucis familiaux l’avaient détourné de la gestion des aspects administratifs. Par ailleurs, il n’avait jamais reçu dans sa boîte aux lettres d’avis de dépôt. Étant abonné aux notifications de la poste, il recevait par courriel un avis de tous recommandés et lettres contre signature et n’avait pas reçu de notification concernant le pli recommandé du 21 juin 2021. Par ailleurs, le jugement du TAPI du 29 juillet 2021, également envoyé par recommandé ne lui était jamais parvenu, ni d’avis de retrait ou de notification par courriel, de sorte qu’il en avait pris connaissance après son envoi par courrier simple le 11 août 2021, reçu le 13 août 2021. Par ailleurs, les cinq derniers envois recommandés ne lui avaient pas été notifiés par la poste. Il produisait à ce sujet un extrait de son compte auprès de la poste du 7 septembre 2021. Y figuraient quatre envois recommandés ainsi qu’un acte de poursuites, tous retournés à l’expéditeur sans que l’on connaisse les détails ni les dates de ces envois.

Il était étonnant que le TAPI ne lui ait pas renvoyé par pli simple son recommandé du 21 juin 2021 comme il l’avait fait avec le jugement du 29 juillet 2021.

8) Par courrier du 27 octobre 2021, l’administration fiscale cantonale s’en est rapportée à la justice quant à la recevabilité et au fond du litige.

9) La cause a été gardée à juger le 2 novembre 2021, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) L’exigence de la motivation au sens de l’art. 65 al. 2 LPA a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre. Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse. L’exigence de la motivation est considérée comme remplie lorsque les motifs du recours, sans énoncer les conclusions formelles, permettent de comprendre aisément ce que le recourant désire (ATA/1076/2015 précité consid. 2c et les références citées).

En l’espèce, le recourant ne conteste pas ne pas avoir effectué l’avance de frais dans le délai imparti par le TAPI, mais allègue que des problèmes familiaux l’ont empêché d’être attentif aux courriers provenant du TAPI. Il prétend également que l’avis de ce courrier recommandé du 21 juin 2021 n’a jamais été mis dans sa boîte aux lettres et s’étonne qu’il n’ait pas été envoyé par pli simple par le TAPI. Le recours est par conséquent recevable.

3) Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI du 29 juillet 2021 déclarant irrecevable le recours de l’intéressé du 17 juin 2021 contre la décision prise à son encontre par l’administration fiscale cantonale le 18 mai 2021.

a. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de
non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).

b. En vertu de l'art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l'avance de frais n'intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l'al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d'appréciation à l'autorité judiciaire saisie (ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid 2c ; ATA/881/2010 du 14 décembre 2010 consid. 4a).

c. Le fardeau de la preuve de la notification d'un acte incombe à l'autorité, qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 129 I 8 consid. 2.2). Lorsque le destinataire d'un envoi recommandé n'est pas atteint et qu'un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres, cet envoi est considéré comme notifié au moment où il est retiré. Si le retrait n'a pas lieu dans le délai de garde de sept jours, il est réputé notifié le dernier jour de ce délai (ATF 134 V 49 consid. 4 ; 130 III 396 consid. 1.2.3). Cette fiction de notification n'est applicable que lorsque la communication doit être attendue avec une certaine vraisemblance, ce qui est le cas lorsqu’une procédure est pendante (ATF 139 IV 228 consid. 1.1).

d. La jurisprudence établit la présomption réfragable que l'employé postal a correctement inséré l'avis de retrait dans la boîte aux lettres du destinataire et que la date de ce dépôt, telle qu'elle figure sur la liste des notifications, est exacte. Cette présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire : si ce dernier ne parvient pas à établir l'absence de dépôt dans sa boîte au jour attesté par le facteur, la remise est censée être intervenue en ces lieu et date. Le destinataire ne doit cependant pas apporter la preuve stricte de l'absence de remise, s'agissant d'un fait négatif ; il suffit d'établir qu'il existe une vraisemblance prépondérante que des erreurs se soient produites lors de la notification (ATF 142 IV 201 consid. 2.3).

La présomption du dépôt régulier de l'avis de retrait a été considérée renversée dans un cas où des erreurs de distribution des avis de retrait dans les cases postales avaient eu lieu à plusieurs reprises au sein de l'office de poste en question, lorsque la mention « avisé pour retrait » ne figurait pas dans le résultat des recherches effectuées par la Poste au moyen du système de suivi des envois ou encore lorsque la date du dépôt de l'avis de retrait enregistrée dans le système de suivi ne correspondait pas à la date du dépôt effectif dudit avis dans la case postale du recourant (arrêts du Tribunal fédéral 1C_552/2018 du 24  octobre 2018 consid. 3.1 ; 5A_28/2015 du 22 mai 2015 consid. 3.1.2 et les références citées).

e. Selon la jurisprudence constante, il convient d'appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l'art. 16 al. 1 LPA afin d'examiner si l'intéressé a été empêché sans sa faute de verser l'avance de frais dans le délai fixé (ATA/158/2020 du 11 février 2020 ; ATA/38/2020 du 14 janvier 2020 ; ATA/636/2017 du 6 juin 2017 consid. 4b et les références citées).

f. En l’espèce, le recourant n’invoque aucun cas de force majeure l’ayant empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai imparti. Il prétend toutefois n’avoir pas reçu le recommandé envoyé par le TAPI le 21 juin 2021.

Or, il résulte des pièces versées au dossier que le recommandé n° 1_______ a bien été envoyé le 21 juin 2021 au recourant qui a été avisé pour retrait le 22 juin 2021 à 11h00. L’avis pour retrait a donc été mis à cette date dans sa boîte aux lettres et l’envoi acheminé à l’office de distribution qui l’a reçu le 22 juin 2021 à 16h24. L’envoi n’ayant pas été retiré dans le délai de sept jours, il a été renvoyé à l’expéditeur le 30 juin 2021. Le TAPI l’a reçu en retour le 2 juillet 2021.

Le recourant allègue ne pas avoir reçu l’avis de retrait, qui ne serait pas non plus apparu sur son courrier électronique de notification ouvert auprès de la Poste. Il produit l’extrait de la notification sur lequel figure également le numéro de recommandé précité. Or, cet élément ne suffit pas à renverser la présomption selon laquelle l’avis de retrait a correctement été déposé dans sa boîte aux lettres.

Dès lors, le recourant ne prouve pas ce qu’il allègue et l’extrait de son compte postal avec les envois recommandés retournés à l’expéditeur ne lui est d’aucun secours. Au contraire, l’on en déduit que quatre lettres recommandées et un acte de poursuites ont été retournés à leurs expéditeurs car le recourant ne les a pas retirés. Enfin, ayant formé recours devant le TAPI, le recourant devait s’attendre à recevoir une communication de celui-ci. La fiction de la notification de la demande d’avance de frais lui est ainsi pleinement opposable.

4) a. De jurisprudence constante la sanction de l’irrecevabilité du recours pour défaut de paiement à temps de l’avance de frais ne procède pas d’un excès de formalisme ou d’un déni de justice, pour autant que les parties aient été averties de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le versement et des conséquences de l’inobservations de ce délai (ATF104 I 105 ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 263 ss et art. 86 LPA).

b. En l’espèce, le recourant n’a pas procédé à l’avance de frais dans le délai requis. Dès lors, le TAPI était fondé à déclarer son recours irrecevable pour défaut de paiement de l’avance de frais.

5) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 septembre 2021 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 juillet 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'administration fiscale cantonale ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Knupfer, Mme Tombesi, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :