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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/470/2021

ATA/175/2021 du 18.02.2021 ( EXPLOI ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/470/2021-EXPLOI ATA/175/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 18 février 2021

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



Vu, en fait, la décision, déclarée exécutoire nonobstant recours, du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) du 29 janvier 2021 ordonnant la fermeture immédiate de l'établissement à l'enseigne « B______ », pour une durée de sept jours supplémentaires soit jusqu'au 7 mars 2021 inclus, en application de l'art. 62 al. 2 de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22);

que cette décision retient que, selon un rapport de police établi le 12 décembre 2020, l'établissement n'avait pas respecté l'heure de fermeture de 23 h la veille, le 11 décembre 2020 ; ces faits étaient constitutifs de graves troubles à la santé publique, dès lors qu'ils favorisaient la propagation du virus du Covid-19 ;

que le rapport de police avait été soumis à Madame A______, exploitante du « B______ » le 14 janvier 2021 ; qu'elle avait fait des observations le 21 janvier 2021 relevant que son établissement était fermé à l'heure litigieuse et que les cinq personnes qui se trouvaient à l'intérieur étaient employés et non clients ;

que la décision du 29 janvier 2021 relevait que les explications de l'intéressée n'étaient pas démontrées ; que si les personnes présentes à l'intérieur de l'établissement étaient des employés « la police n'aurait pas manqué de le voir » ; que « cette dernière les aurait reconnus de par leur comportement, les tâches qu'ils accomplissaient et leurs vêtements professionnels » ; que les faits étaient retenus comme avérés ; que le PCTN prononçait une fermeture immédiate de l'établissement ; que suite à la modification, le 13 janvier 2021, de l'Ordonnance du Conseil fédéral sur les mesures destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière du 19 juin 2020 et suite à l'arrêté du Conseil d'État du 20 janvier 2021 modifiant l'Arrêté du 1er novembre 2020 d'application des mesures fédérales destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière, l'exploitation des établissements de restauration était interdite jusqu'au 28 février 2021 ; que vu la gravité de faits constatés, le PCTN prononçait la fermeture immédiate de l'établissement, pour une durée de sept jours supplémentaires à compter du 1er mars 2021, soit jusqu'au 7 mars 2021 ;

attendu que par acte déposé le 10 février 2021 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) par B______, propriétaire de l'établissement, celle-ci a recouru contre la décision précitée, dont elle a demandé l'annulation ; la décision violait le droit ; les cinq personnes présentes, dont elle mentionnait les coordonnées, n'avaient même été interrogées par la police et travaillaient au sein de son établissement, lequel avait fermé le 11 décembre 2020 à 22h45 ; que ses employés n'étaient pas contraints de porter des habits professionnels et n'étaient donc pas reconnaissables ; que la sanction portait sur plus de sept jours puisque l'établissement était fermé depuis le 8 février 2021 alors même que le take away était autorisé ;

qu'elle a requis la levée immédiate de la sanction ;

que le PCTN a conclu au rejet de la requête de restitution de l'effet suspensif, relevant que l'exploitante était absente au moment des faits alors qu'elle était tenue légalement d'être présente aux heures d'exploitation ; que la restitution de l'effet suspensif amoindrirait fortement la portée de la décision querellée dès lors qu'il importait présentement et de façon urgente de prévenir la transmission de la COVID-19 et non à l'issue de la procédure ; que la recourante se contentait de produire une liste de noms, en opposant sa version des faits à celle établie par un rapport de police ; que, selon celui-ci, les personnes consommaient au bar ; que la police avait dûment distingué l'une des cinq personnes comme étant le remplaçant de l'exploitante ; que la recourante ne démontrait pas avoir fermé son établissement à 22 h 45 ; que même si l'un des agents devait avoir failli à son devoir de vérification, il ne pouvait en être de même des deux agents ayant procédé au contrôle ; que la décision ne portait que sur la période du 1er au 7 mars 2021, la vente à l'emporter et la livraison à domicile étant permises entre 6 h et 23 h ;

que, dans sa réplique du 16 février 2021, la recourante a indiqué avoir quitté l'établissement le soir concerné à 22 h 45, à la fermeture, et être retournée à son domicile, situé dans le même immeuble ; qu'elle avait fermé son établissement, conformément à la décision litigieuse, immédiatement soit dès le 29 janvier 2021 ;

considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge ;

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al. 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif - ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2) ; qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, spéc. 265) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405 ; ATA/941/2018 du 18 septembre 2018) ;

que la restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu'un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/812/2018 du 8 août 2018) ;

que la chambre de céans dispose dans l'octroi de mesures provisionnelles d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 précité consid. 5.5.1 ; ATA/941/2018 précité) ;

qu'en l'espèce, la décision querellée repose sur une perturbation importante de la santé publique, la recourante n'ayant, de prime abord, pas respecté l'arrêté du Conseil d'État du 20 janvier 2021 modifiant l'Arrêté du 1er novembre 2020 d'application des mesures fédérales destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière ;

que la recourante conteste l'infraction qui lui est reprochée, ainsi que le principe d'une sanction ;

que les constats sur lesquels se fonde le PCTN ressortent d'un rapport de police établi par un agent assermenté, qui mentionne la présence d'un autre agent au moment des faits décrits par lui ;

que la recourante soutient que son établissement était fermé à 22 h 45 et que les personnes présentes étaient ses employés ;

qu'il n'en demeure pas moins que le rapport de police qui bénéficie, a priori, d'une pleine valeur probante, retient que l'établissement « B______ » n'était pas fermé à
23 h 15 et que des clients étaient présents, tout comme le remplaçant de l'exploitante de cet établissement ;

qu'au vu de ces éléments, il n'apparaît pas d'emblée que la version soutenue par la recourante soit manifestement bien fondée, au point de pouvoir retenir que les chances de succès du recours soient évidentes ;

que les chances de succès du recours ne paraissent ainsi pas de nature à justifier la restitution de l'effet suspensif ;

que le PCTN fait valoir un intérêt supérieur à l'application immédiate de la sanction, visant à la protection de la santé publique contre la pandémie ;

qu'à ce stade de la procédure, l'intérêt privé de la recourante, à poursuivre sans attendre l'exploitation de son établissement, s'il apparaît certes important, doit céder le pas à l'intérêt public invoqué par le PCTN, à ce que les sanctions infligées aux établissements ne respectant pas les règles sanitaires soient immédiatement exécutées ;

que la décision du PCTN aurait toutefois gagné en compréhension, au vu des circonstances particulières liées à la pandémie, si elle avait précisé que l'interdiction prononcée ne portait pas sur la possibilité d'offrir des services de take away ;

que la recourante n'a toutefois pas démontré, en l'état de la procédure, qu'elle avait organisé de tels services et qu'elle en aurait été privée depuis le prononcé de la décision ;

que sa version des faits s'est modifiée dans le courant de la procédure quant à la date alléguée de la fermeture de son commerce ;

qu'elle a indiqué deux dates différentes, soit respectivement le 8 février 2021 dans son recours et le 21 janvier 2021 dans sa réplique ;

qu'au vu de ces éléments, la requête de restitution de l'effet suspensif sera rejetée ;

que les faits devant toutefois être éclaircis, notamment le statut des personnes présentes le 11 décembre 2020, un délai au 2 mars 2021 est imparti aux parties pour produire une éventuelle liste de témoins comprenant les noms, prénoms, adresses des personnes dont elles souhaiteraient l'audition ;

qu'il sera statué sur les frais de la présente décision avec l'arrêt sur le fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête de restitution de l'effet suspensif ;

impartit un délai au 2 mars 2021 aux parties pour produire leur éventuelle liste de témoins ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Madame A______ ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

 

 

Le juge :

 

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :