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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/978/2010

ATA/771/2010 du 09.11.2010 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ; EMPLOYÉ PUBLIC ; GARDIEN DE PISCINE ; COMMUNE ; RAPPORTS DE SERVICE ; ENQUÊTE ADMINISTRATIVE ; RÉSILIATION ; LICENCIEMENT ADMINISTRATIF ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE ; POUVOIR D'APPRÉCIATION
Normes : Statut du personnel de la Ville d'Onex ; CO.336c.al1.letb ; LPA.61
Résumé : Dénonciation d'un acte de voyeurisme de la part d'un gardien de piscine par une usagère de la piscine. La résiliation des rapports de travail, fondée sur une enquête n'établissant pas la responsabilité du fonctionnaire à satisfaction de droit, est arbitraire. Le recourant a droit à une indemnité tenant compte de l'ensemble des circonstances.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/978/2010-FPUBL ATA/771/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 9 novembre 2010

 

dans la cause

 

Monsieur B______
représenté par Me Patrick Udry, avocat

contre

VILLE D'ONEX
représentée par Me François Bellanger, avocat



EN FAIT

1. Monsieur B______, né le X______ 1974, domicilié à Genève, a été engagé par la Ville d'Onex (ci-après : la ville) le 5 novembre 2007 en tant que gardien de bain occasionnel pour la piscine municipale. Il s'agissait d'une mission d'une durée limitée, débutant le 6 novembre et se terminant le 7 décembre 2007.

2. Suite à la candidature de M. B______, le Conseil administratif de la ville l'a engagé, le 27 juin 2008, en qualité de gardien-technicien à 100%, toujours à la piscine d'Onex, avec entrée en fonction le 1er septembre 2008.

Son salaire annuel brut s'élevait à CHF 68'000.-, soit un salaire mensuel de CHF 5'666,65, auquel s'ajoutaient une prime annuelle correspondant à un traitement mensuel, ainsi qu'une participation mensuelle de CHF 90.- aux cotisations d'assurance-maladie. Son salaire mensuel brut s'élevait donc à CHF 6'229.-.

L'engagement prévoyait une période probatoire d'une année pendant laquelle le rapport de travail pouvait être dissout par chacune des deux parties dans le délai d'un mois pour la fin d'un mois, conformément aux dispositions pertinentes du statut du personnel de la Ville d'Onex (ci-après : le statut).

3. Le 16 juillet 2008, M. B______ a été victime d'un accident ayant entraîné un arrêt de travail du 17 juillet au 13 août 2008.

4. Le 26 janvier 2009, après six mois d'activité, M. B______ a eu un entretien d'évaluation de la période probatoire avec son responsable direct, Monsieur  N______, chef d'exploitation. Il a obtenu pour ses prestations et son comportement un résultat satisfaisant ; toutes les remarques émises étaient positives et l'appréciation de 3 sur 4 (3 équivalant à "adéquat pour le poste" et 4 correspondant à "dépasse les exigences") lui a été attribuée pour tous les points abordés lors de l'entretien. Le formulaire relatif à cet entretien a été signé par MM. B______ et N______, ainsi que par Monsieur C______, chef de service, Monsieur D______, ressources humaines, Monsieur Philippe Rochat, conseiller administratif délégué et Monsieur René Longet, conseiller administratif délégué au personnel.

5. Le 9 février 2009, M. B______ a vu son médecin suite à l'accident du 16 juillet 2008, puis a subi une opération de la hanche le 1er avril 2009. Il a été en arrêt de travail à 100% à compter de cette date jusqu'au 28 septembre 2009.

6. Le 22 avril 2009, Madame E______, usagère de la piscine, a écrit à la Mairie d'Onex pour dénoncer les faits suivants:

Elle était allée à la piscine d'Onex avec un ami, le 3 mars 2009 vers 15h, ainsi qu'elle le faisait régulièrement. Alors qu'elle se rhabillait dans une cabine des vestiaires, elle avait vu un téléphone portable noir la filmer par-dessous la cabine. Elle était sortie en culotte, un linge autour de sa poitrine et avait vu la personne qui la filmait sortir au même moment de la cabine où quelques secondes auparavant elle avait vu le téléphone. Elle avait reconnu cette personne comme étant un jeune gardien de la piscine.

Mme E______ s'était ensuite rendue au poste de police d'Onex où un agent avait noté ses doléances dans "la main courante". Elle n'avait pas déposé plainte par peur de cet homme qui avait nié tous les faits alors qu'elle l'avait pris en flagrant délit. Trois semaines après l'événement, elle avait ressenti le besoin de parler, raison pour laquelle elle était allée au centre LAVI (loi fédérale sur l’aide aux victimes d’infractions, du 23 mars 2007, loi sur l’aide aux victimes, LAVI ; RS 312.5).

7. Il s'est avéré que le gardien à qui Mme E______ faisait référence était M. B______.

8. Le 10 juin 2009, Monsieur Alain Walder, secrétaire général de la ville, a informé M. B______ de l'ouverture d'une enquête administrative suite à l'incident précité. Au vu de la gravité de cette accusation de voyeurisme, le Conseil administratif demandait à M. B______ de ne pas se présenter à son poste de travail durant l'enquête. Son traitement continuerait de lui être versé. Maître Maurizio Locciola (ci-après : l'enquêteur), avocat, avait été désigné pour mener cette enquête.

9. Le même jour, M. Walder a averti Mme E______, ainsi que M. C______ et le personnel de la piscine de l'ouverture de cette enquête administrative.

10. Le 12 juin 2009, le conseil de M. B______ a informé la ville et l'enquêteur de sa constitution pour la défense des intérêts du précité. Ce dernier, choqué par les accusations dont il faisait l'objet, affirmait avec force qu'il n'était pas l'auteur du comportement reproché.

11. Le 23 juin 2009, M. B______ a pris connaissance du contenu de la plainte de Mme E______, transmise par l'enquêteur.

12. Le 29 juin 2009, ce dernier a procédé à l'audition de Mme E______ qui a rappelé le déroulement des événements du 3 mars 2009.

Alors qu'elle se rhabillait dans une cabine du vestiaire réservé aux femmes, elle avait aperçu une partie d'un téléphone portable dépasser par-dessous la cabine, sans voir la main qui le tenait. Cet appareil était noir et l'objectif était orné d'un fil ou d'une ligne, argentée ou en métal. Choquée et apeurée, elle avait crié et était sortie par l'une des deux issues de sa cabine, un linge autour de la poitrine, afin d'essayer de voir qui allait émerger de la cabine voisine. Elle avait attendu de voir le petit loquet de la cabine voisine s'ouvrir tout doucement pour se retrouver face à un jeune gardien de la piscine, qui semblait paniqué et transpirait. Suite aux cris de la jeune femme lui demandant de montrer ce qu'il avait dans les poches de son maillot de bain, il avait prétendu n'avoir rien fait, si ce n'était être en train de ranger et nettoyer la cabine d'où il sortait. Après quelques échanges verbaux, elle lui avait fait part de son intention d'appeler la police, puis était partie dans le vestiaire des hommes pour se changer. Elle y avait rejoint son ami, Monsieur A______, qui l'accompagnait ce jour-là. Celui-ci utilisait depuis quelques minutes un sèche-cheveux d'où il pouvait voir la sortie principale du vestiaire des femmes et n'avait vu personne sortir de ceux-ci.

Mme E______ et son ami étaient arrivés à la piscine aux alentours de 14h10. Elle avait alors remarqué la présence de deux ou trois gardiens autour du bassin, un jeune et un autre un peu plus âgé. Lorsqu'elle se séchait les cheveux, elle avait constaté que le jeune gardien regardait dans sa direction avec insistance.

Après s'être entretenue avec son ami, elle s'était changée puis était allée voir l'autre gardien pour lui raconter ce qui venait de se passer. Celui-ci se trouvait vers le bassin au moment des faits décrits ci-dessus et n'avait rien pu voir. C'est alors que le jeune gardien était revenu du bureau à l'étage, présentant un I-Phone qui se trouvait être son téléphone portable. Il ne s'agissait pas du téléphone au moyen duquel elle avait été filmée.

Sur insistance de M. B______, Mme E______ et M. A______ étaient ensuite allés discuter dans le bureau des gardiens. Lorsqu'elle avait demandé au gardien ce qu'il était allé faire pendant qu'elle se changeait, il avait répondu qu'il avait couru après la personne qu'il avait vu passer, sans succès. Il était ensuite allé chercher son téléphone portable dans le bureau car il attendait un appel. M. B______ lui avait parlé de sa situation familiale pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas besoin d'adopter le comportement qu'elle lui reprochait.

Mme E______ s'était rendue, toujours accompagnée de son ami, au poste de police de la route du Pont-Butin pour relater ce qui s'était passé. Le policier qui l'avait reçue n'avait pas pu se rendre sur place car il n'y avait pas suffisamment de personnel. Lui expliquant les différentes raisons, il l'avait dissuadée de porter plainte.

Mme E______ était retournée à la piscine le lendemain des événements dans le but de voir un gardien se prénommant M______ qu'elle connaissait pour lui avoir donné par le passé des cours de natation. Après quelques explications concernant les faits de la veille, bien qu'étonné, il lui avait donné le nom du jeune gardien, M. B______, ainsi que celui du responsable de la piscine, tout en précisant qu'il ne voulait pas être mêlé à cette affaire.

Encore choquée et affectée par cet événement les semaines suivantes, elle avait consulté un médecin qui lui avait prescrit des antidépresseurs et s'était rendue au centre LAVI. Bien qu'il lui ait été conseillé de porter plainte, elle avait décidé de ne pas le faire car elle avait trop peur. Elle avait préféré signalé l'incident à la mairie d'Onex.

13. Le 29 juin 2009, l'enquêteur a également entendu M. B______.

Au moment des faits, le 3 mars 2009, il était allé dans les vestiaires des femmes pour remettre en ordre les cabines et les ouvrir pour montrer qu'elles étaient libres, ainsi que cela se fait habituellement durant les heures creuses de la journée, ce dont il avait avisé son collègue, Monsieur P______. D'une manière générale, avant de se rendre dans les cabines, les gardiens regardaient le sol de loin afin d'avoir une vue globale et de voir lesquelles étaient occupées. De cette façon, il s'était aperçu que les deux ou trois dernières cabines étaient occupées. Lorsqu'il avait ouvert la dernière cabine libre, il avait vu une ombre ou quelque chose bouger. Il avait alors traversé la cabine et en sortant il s'était retrouvé face à une jeune femme, sortie de la cabine suivante, qui l'accusait en hurlant de l'avoir filmée. Surpris et choqué par ses propos, il lui avait assuré n'avoir rien fait de tel et n'avoir pas de téléphone portable sur lui. Il était vêtu d'un t-shirt et d'un short de bain moulant muni de quatre poches. Il lui avait montré qu'il ne pouvait pas y dissimuler de téléphone.

Une directive interne non écrite précisait que les gardiens de la piscine n'avaient pas le droit d'avoir un téléphone portable au bord du bassin, raison pour laquelle il laissait le sien, lorsqu'il travaillait, soit dans ses habits, soit dans le bureau du chef, ce qu'il avait fait ce jour-là car il attendait des appels et ce bureau était le seul endroit où il y avait du réseau.

Comme les explications de M. B______ n'avaient pas suffi à calmer la jeune femme, il lui avait demandé d'attendre. Il voulait aller chercher son téléphone dans le bureau pour le lui montrer. Il ne lui avait pas fait part de son intention car l'ami qui accompagnait la jeune femme était venu à leur rencontre au moment où il partait dans le bureau. Il était redescendu avec son téléphone et avait rejoint les deux jeunes gens qui discutaient au bord du bassin avec M. P______. Alors que la femme était toujours en colère et criait, il lui avait tendu son téléphone, un I-Phone. Après l'avoir examiné, elle avait affirmé qu'il ne s'agissait pas de l'appareil qui l'avait filmée.

M. B______ possédait chez lui deux autres téléphones portables qu'il n'utilisait plus, de marques Nokia et Sony Ericsson, qu'il s'engageait à montrer à l'enquêteur.

La jeune femme ne décolérant toujours pas, il lui avait proposé, ainsi qu'à son ami, d'aller dans le bureau afin de discuter calmement. D'abord réticente, elle avait fini par accepter. Il leur avait expliqué sa situation personnelle pour leur faire comprendre qu'il n'aurait pas pris le risque de prendre des photos. Il avait ajouté que normalement, une personne qui aurait pris des photos serait partie immédiatement et n'aurait pas attendu de croiser sa victime. Elle avait déclaré vouloir se rendre à la police, ce qu'il l'avait encouragée à faire en précisant qu'il convenait de porter plainte sans pour autant se tromper de personne. Dans la mesure où il avait aperçu une ombre, la jeune femme avait certainement dit vrai.

L'incident de la veille l'ayant beaucoup affecté, M. B______ s'était rendu sur son lieu de travail le lendemain matin, quand bien même il avait congé, afin de discuter avec son chef et ses collègues. Son chef étant sorti, il avait parlé avec l'un de ses collègues, Monsieur M______, qui lui avait appris que la jeune fille, qu'il connaissait, était venue le voir pour lui poser des questions. Elle lui avait demandé si M. B______ était capable de commettre les actes dont elle l'accusait, ce à quoi il avait répondu que cela l'étonnait. Lorsqu'elle lui avait parlé de son intention de porter plainte, il l'avait encouragée à le faire mais contre la bonne personne.

M. B______ avait pu discuter avec son chef, M. N______, dans l'après-midi. Celui-ci lui avait dit que l'affaire devait dans un premier temps rester au sein de la piscine et qu'il serait avisé si une plainte était déposée auprès de la mairie ou de la police. Tout au long du mois de mars, M. N______ avait répondu par la négative lorsque M. B______ lui demandait si une plainte avait été déposée.

M. B______ était en incapacité de travail depuis le 1er avril 2009 en raison d'une intervention chirurgicale. Il n'avait jamais été entendu par la police et n'avait eu aucun contact avec la mairie.

Il avait été choqué par les graves accusations de la jeune femme, contre laquelle il n'excluait pas de porter plainte, car elles avaient des conséquences tant sur sa vie privée que professionnelle.

14. Le 11 août 2009, M. B______ a déposé auprès du Procureur général une plainte pénale contre Mme E______ pour dénonciation calomnieuse.

15. En raison de l'absence de M. B______ pour cause d'accident, la période probatoire en vue de la confirmation de son engagement a été prolongée le 18 août 2009, jusqu'au 1er janvier 2010, conformément au statut.

16. Le 31 août 2009, l'enquêteur a procédé à l'audition de M. N______, chef d'exploitation de la piscine d'Onex, supérieur hiérarchique de M. B______.

Le jour des faits, vers 16h15, il avait reçu un appel de M. B______ lui expliquant qu'il avait rencontré des problèmes avec une dame. N'étant lui-même plus au travail, il lui avait suggéré d'en reparler le lendemain. Le jour suivant, il était allé regarder la configuration des vestiaires pour voir dans quelle mesure il était possible de prendre des photos, puis avait averti son supérieur hiérarchique, M. C______, de la situation. Il s'était entretenu dans l'après-midi avec M. B______ qui lui avait relaté de manière détaillée l'incident.

Le personnel de la piscine était amené à tout moment de la journée à vérifier l'accessibilité des vestiaires au public et donc à ouvrir les portes des cabines, qui pouvaient être fermées par le haut et par le bas, sans difficulté, par n'importe qui.

Contrairement à ce que la gravité des faits l'avait amené à penser, M. N______ n'avait jamais été contacté par la femme accusant M. B______ de l'avoir filmée.

17. Le 31 août 2009, l'enquêteur a également entendu M. P______, collègue de travail de M. B______.

Il se trouvait vers le bassin au moment de l'incident du 3 mars 2009. Il avait alors vu arriver son collègue bouleversé, qui lui avait fait part, avant de repartir, des accusations d'une jeune femme. Deux jeunes gens, une femme et un homme, sont venus lui poser des questions et lui raconter ce qui s'était passé dans les vestiaires. M. B______ était revenu avec son téléphone portable. La jeune femme avait examiné l'appareil puis avait déclaré qu'il ne s'agissait pas de celui au moyen duquel elle avait été prise en photo. Toutefois, elle affirmait catégoriquement que le jeune gardien était l'auteur du comportement qu'elle lui reprochait. Elle était ensuite partie en disant qu'elle allait se rendre à la police. M. B______ avait déclaré qu'il allait téléphoner à M. N______.

Le téléphone portable que M. B______ avait montré à la jeune femme était assurément celui qu'il utilisait quotidiennement. M. P______ ne l'avait jamais vu utiliser l'un des deux autres téléphones qu'il avait amenés.

Les gardiens de la piscine se rendaient régulièrement dans les vestiaires pour ouvrir les portes des cabines et les remettre en ordre, ce que devait faire M. B______ au moment où M. P______ se trouvait seul au bord du bassin.

18. Le 31 août 2009, l'enquêteur a encore auditionné M. M______, collègue de travail de M. B______.

Il ne travaillait pas le 3 mars 2009. Le lendemain vers 12h30, Mme E______, qu'il connaissait, était venue le voir. Elle avait l'air stressée et voulait connaître le nom de son jeune collègue qu'elle accusait de l'avoir prise en photo par-dessous la cabine. Elle était catégorique, bien qu'il ait attiré son attention sur le fait qu'il s'agissait d'accusations graves. Elle n'avait pas voulu attendre l'arrivée de M. N______ et avait déclaré qu'elle irait à la mairie.

M. B______ lui avait également raconté sa version des faits.

19. L'enquêteur n'a pas pu entendre M. A______, l'ami de Mme E______, qui avait définitivement déménagé à Lyon et ne pouvait pas se présenter à une audience.

20. Le 17 septembre 2009, l'enquêteur a considéré que l'enquête était close et invité M. B______ à faire valoir ses observations.

21. Le 29 septembre 2009, M. B______ a formulé des remarques conclusives.

Il persistait à affirmer avec force qu'il n'était pas l'auteur du comportement que lui reprochait Mme E______, qui ne pouvait d'ailleurs pas déclarer l'avoir surpris en flagrant délit. Tel n'était en effet pas le cas puisqu'elle ne l'avait pas vu en train de la filmer. De plus, elle n'avait pas vu M. B______ sortir de la cabine avec un téléphone portable sur lui. Aucun de ses téléphones portables ne correspondait à celui qui avait filmé la jeune femme. Enfin, les déclarations prêtées à M. A______ n'avaient pas été confirmées et, dans le cas contraire, n'auraient pas été pertinentes.

Il ressortait du dossier comme de ses explications que les accusations de Mme E______ contre M. B______ n'étaient pas prouvées.

22. Le 14 octobre 2009, l'enquêteur a rendu son rapport.

Une divergence des versions existait entre les faits exposés par Mme E______ et ceux par M. B______. Le seul élément certain était que la jeune femme avait été filmée par-dessous la cabine dans laquelle elle se rhabillait.

Les déclarations de Mme E______ avaient toujours été concordantes. Elle s'était retrouvée en présence de M. B______ dès qu'elle était sortie de sa cabine et avait toujours affirmé que c'était ce dernier qui l'avait prise en photo ou filmée.

Il était en revanche difficile d'affirmer que le déroulement des faits tel que décrit par M. B______ était conforme à la réalité. En effet, il avait déclaré être allé dans les vestiaires afin de mettre de l'ordre dans les cabines et de les ouvrir pour montrer aux usagers qu'elles étaient libres. Il avait précisé avoir regardé le sol auparavant pour examiner s'il y avait des personnes dans les cabines et remarqué deux ou trois paires de pieds. Il s'était ensuite rendu dans la dernière cabine qu'il pensait libre et avait aperçu "une ombre ou quelque chose bouger" au moment où il avait ouvert la porte. Selon cette version, il fallait comprendre que la cabine n'était pas libre dès lors que la porte était fermée et qu'au moment où M. B______ l'avait ouverte, il avait vu une ombre fuir. Or, il avait considéré que la cabine était vide, ce qui semblait contradictoire. Il était par ailleurs curieux qu'il n'ait pas vérifié au niveau du sol si la cabine était libre ou non, ce d'autant plus que la porte était fermée. Si la version de M. B______ apparaissait peu plausible, elle n'était pas totalement invraisemblable.

En conclusion, si l'hypothèse selon laquelle M. B______ était l'auteur des faits incriminés pouvait être considérée comme possible, voire vraisemblable, un doute subsistait, vu l'absence d'un témoin et compte tenu du fait que la version de M. B______ ne pouvait être écartée sans autres. Il n'était ainsi pas possible d'affirmer avec une certitude suffisante qu'il était l'auteur des faits qui lui étaient reprochés.

23. Le 26 octobre 2009, M. B______ a réagi aux conclusions du rapport d'enquête administrative.

L'enquêteur ne disposait pas des preuves suffisantes pour justifier sa conclusion qui, par la formulation d'hypothèses vraisemblables, n'avait à tort pas blanchi M. B______ des accusations portées contre lui, avec les éventuelles conséquences, soit le licenciement ou la non nomination, que cela pouvait entraîner. De plus, le rapport était arbitrairement incomplet dans la mesure où il ne tenait pratiquement pas compte des arguments soulevés pour démontrer son innocence.

24. Le 6 novembre 2009, le Conseil administratif de la ville a informé M. B______ de son intention de ne pas le confirmer à son poste de gardien-technicien et de résilier son engagement au 31 janvier 2010, lui donnant l'opportunité de faire valoir son droit d'être entendu.

Même si l'enquêteur n'avait pu conclure définitivement à l'attribution des faits énoncés à M. B______, l'ensemble des éléments et les explications détaillées des parties laissaient planer un doute important dont la ville ne pouvait se satisfaire. Par ailleurs, M. B______ n'avait pas respecté certaines directives données au personnel.

L'attitude et le mépris qu'avait exprimé M. B______ envers la plaignante tout au long de la procédure n'était pas adéquat. Au lieu d'adopter une attitude correcte et apaisante pour simplifier l'enquête, il avait déposé une plainte pour diffamation contre Mme E______.

Le lien de confiance avec M. B______ était rompu, dans la mesure où un lieu de travail comme la piscine d'Onex ne pouvait souffrir d'un tel doute et il n'était pas possible de prendre le risque qu'un événement aussi grave ne se reproduise. Cela empêchait dès lors la poursuite des rapports de travail et M. B______ serait libéré de son activité dès la confirmation de la résiliation.

Après avoir réfléchi à une autre possibilité de placement, le Conseil administratif n'avait trouvé aucun poste adapté aux capacités et aux aptitudes de M. B______.

25. Dès le 9 novembre 2009, M. B______ a été en arrêt de travail à 100% pour une durée indéterminée, pour cause de maladie.

26. Le 18 novembre 2009, M. B______ a contesté sa responsabilité et affirmé que la résiliation éventuelle de son contrat de travail serait abusive, car fondée uniquement sur la base de soupçons non avérés.

Il s'interrogeait au sujet des directives qu'il n'avait pas respectées et se défendait d'avoir fait valoir ses droits en déposant une plainte pénale contre Mme E______. Il évoquait en outre un défaut de soutien de sa hiérarchie.

27. Le 2 décembre 2009, le Conseil administratif a précisé qu'il ne reprochait pas à M. B______ de s'être défendu, mais de n'avoir pas respecté des directives telles que ne pas pénétrer dans une cabine dont la cabine voisine est occupée ou ne pas s'enfermer dans une cabine. Considérant que son droit d'être entendu avait été respecté, la décision de licenciement était maintenue.

28. Le 14 décembre 2009, M. B______ a contesté à nouveau toute responsabilité, de même que tout irrespect des directives. Il s'opposait toujours à son licenciement qu'il estimait abusif car fondé sur des soupçons.

29. Le 16 février 2010, la ville a résilié l'engagement de M. B______, se référant à ses précédents courriers.

30. Par acte du 19 mars 2010, M. B______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif contre cette décision, concluant à principalement à son annulation et à sa réintégration, subsidiairement au versement d'une indemnité correspondant à douze mois de son traitement brut.

Le pouvoir discrétionnaire de l'autorité dans la définition des modalités des rapports de service avec leurs agents ne signifiait pas que celle-ci était libre d'agir comme bon lui semblait. Elle devait en effet tenir compte des principes constitutionnels tels que ceux de la légalité, de la bonne foi, de l'égalité de traitement, de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire.

Comme dans le droit privé, le statut prévoyait le respect des droits du personnel, raison pour laquelle il convenait de tenir compte, par analogie, du principe de la présomption d'innocence. La jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de licenciement abusif et les principes en découlant étaient applicables mutatis mutandis au licenciement d'un employé de droit public en période probatoire.

Le Conseil administratif avait certes décidé de l'ouverture d'une enquête administrative. Cependant sa décision de licenciement basée sur un soupçon d'infraction était arbitraire, contraire à la réalité et violait le principe de proportionnalité, tout comme les autres prétextes invoqués à l'appui de la résiliation des rapports de travail. En effet, M. B______ n'avait jamais méprisé Mme E______, qu'il n'avait jamais revue; il s'était limité à clamer son innocence en tentant de démontrer que les accusations qu'elle portait à son encontre n'étaient pas fondées. Le non-respect des directives données au personnel n'était en outre pas avéré.

Si la réintégration de M. B______ était refusée, la ville devrait lui verser une indemnité équivalant à douze mois de salaire se justifiant par une violation crasse de ses droits de la personnalité, par le discrédit jeté sur sa personne en maintenant le doute sur le fait qu'il s'était rendu coupable d'un comportement particulièrement répréhensible, ainsi que par les conséquences négatives que cela avait entraîné sur son avenir professionnel et son état psychique.

31. Dans sa réponse du 20 mai 2010, la ville a conclu préalablement au retrait de l'effet suspensif attaché au recours et principalement au rejet de celui-ci.

Les deux griefs invoqués par M. B______, à savoir le droit à sa réintégration et subsidiairement à une indemnité, étaient infondés. En effet, la décision de licenciement de la ville était conforme au droit dans la mesure où, selon le statut, l'engagement d'un employé pouvait être résilié librement durant la période probatoire. La question du licenciement d'un employé étant réglée de manière exhaustive par le statut, le droit privé ne s'appliquait pas par analogie.

Le licenciement ne devait être apprécié qu'au regard du principe d'interdiction de l'arbitraire. En l'occurrence, la ville avait justifié le licenciement par trois éléments.

Tout d'abord, le rapport de l'enquête administrative concluait qu'un doute subsistait quant à la responsabilité du recourant dans l'incident de voyeurisme. Comme l'enquêteur, la ville relevait des incohérences dans les explications du gardien et considérait que le doute était plus que faible. Par ailleurs, en tant que responsable de la sécurité des usagers de la piscine, la ville ne pouvait prendre le risque que ce genre d'incident ne se reproduise. Le licenciement de M. B______ était la conséquence d'événements auxquels il avait été mêlé et qui avaient rompu le lien de confiance son employeur.

Ensuite, le recourant n'avait pas respecté les directives en matière d'accès aux vestiaires des femmes. En entrant dans la cabine où il avait vu une ombre sans s'assurer qu'elle était vide, il avait pris le risque de tomber sur une femme en train de se changer.

Enfin, M. B______ avait eu, tout au long de la procédure, une attitude agressive et méprisante envers Mme E______. La plainte pénale qu'il avait déposée contre elle était considérée comme une tentative de faire pression sur l'intéressée et n'avait pas contribué à apaiser la situation. Or, selon le statut, il était du devoir d'un agent public, surtout en situation de crise, d'établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public. Le respect de cette obligation, qu'avait violée M. B______, était essentiel pour justifier et renforcer la considération et la confiance dont le service public devait être l'objet.

Pour toutes ces raisons, le licenciement de M. B______ était justifié et ne pouvait être qualifié d'arbitraire.

Dans la mesure où cette décision était fondée en droit, M. B______ n'avait droit à aucune indemnité. Dans le cas contraire, une indemnité supérieure à un mois de traitement ne se justifiait pas.

32. Le 2 juin 2010, M. B______ a déclaré s'en rapporter à justice quant à la requête de retrait d'effet suspensif.

33. Le 4 juin 2010, la ville a produit les directives non écrites, cependant spécifiées oralement aux gardiens, visées dans la procédure. D'après un courriel de M. C______ à M. Walder, il s'agissait de:

Contrôler visuellement l'utilisation des cabines, douches et sanitaires (vision des pieds par-dessous les éléments de séparation);

Signaler oralement sa présence avant d'entrer dans un de ces lieux;

Ne pas y pénétrer si c'est utilisé;

Ne pas pénétrer dans une cabine vide à côté d'une cabine utilisée.

En l'occurrence, les directives n° 2 et 4 n'avaient pas été respectées par M. B______.

34. Par décision du 10 juin 2010 de la présidente du Tribunal administratif, l'effet suspensif au recours a été retiré.

35. Le 11 juin 2010, M. B______ a contesté d'une part que les comportements énumérés dans le courriel de M. C______ auraient fait l'objet de directives et d'autre part que sa hiérarchie les lui aurait spécifiées oralement.

36. Le 3 septembre 2010, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

Chacune des parties a persisté dans ses explications et conclusions.

En cas d'admission du recours, la ville n'était pas en mesure de réintégrer M. B______. Une éventuelle indemnisation ne saurait dépasser un mois de traitement. Seule l'hypothèse selon laquelle Mme E______ aurait tout inventé pouvait permettre de considérer différemment l'incident qui s'était produit.

M. B______ était en arrêt pour cause d'accident et n'avait pas exercé d'activité lucrative depuis son licenciement. Il ignorait quelle suite avait été donnée à la plainte pénale qu'il avait déposée et devait se renseigner à ce sujet. Il n'avait jamais eu connaissance de directives concernant les vestiaires.

Il ne s'était jamais enfermé dans une cabine et n'aurait eu aucune raison de le faire.

A la suite de l'incident, la ville avait décidé de formaliser ces directives, orales jusqu'ici. Elles étaient toutefois communiquées à tous les collaborateurs et tombaient sous le sens. Le fait de ne pas s'enfermer dans une cabine tombait encore plus sous le sens que les autres indications.

Un délai a été fixé au 4 octobre 2010 aux parties pour solliciter d'éventuels actes d'instruction.

37. A l'issue du délai imparti, aucune des parties n'a sollicité d'autres actes d'instruction. Le juge délégué s'est renseigné auprès du Ministère public sur l'état de la procédure pénale relative à la plainte de M. B______. Celle-ci a été classée le 8 février 2010, faute de prévention suffisante, pour défaut d'élément subjectif de l'infraction. Les parties en ont été avisées.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A al. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 102 du statut ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Collaborateur de la ville, le recourant est soumis au statut de celle-ci (art. 1). Le statut distingue les employés (art. 4) des agents communaux (art. 5).

Selon l'art. 16 du statut, l'employé est engagé pour une période d'une année, qui vaut période probatoire en vue de la confirmation en qualité d'agent communal. Cette période peut être prolongée en cas d'absence pour cause de maladie, d'accident, de maternité, d'accomplissement d'une obligation légale ou d'une modification d'affectation.

3. a. Aux termes de l’art. 18 du statut, à la fin de la période probatoire, le Conseil administratif procède à la confirmation, prolonge la période probatoire jusqu'à deux fois six mois ou résilie l’engagement en observant le délai prévu à l’art. 24. Une fois confirmé, l'engagement est conclu pour une durée indéterminée. En cas de résiliation, l'intéressé doit être informé des motifs par le conseiller administratif dont il relève, qui lui offre la possibilité de s'exprimer.

Selon l'art. 24 du statut, l'engagement des employés peut être librement résilié durant la période probatoire, dans un délai d'un mois pour la fin d'un mois pendant la première année de service, puis de deux mois dès la deuxième année. Dans tous les cas, l'intéressé doit être informé des motifs par son supérieur hiérarchique, qui lui offre la possibilité de s'exprimer.

L'art. 25 du statut prévoit que les agents communaux peuvent être licenciés moyennant un délai de trois mois pour la fin d'un mois, lorsque la poursuite des rapports de service n'est plus possible. La possibilité de s'exprimer leur est offerte.

b. Les rapports de travail du personnel de la fonction publique ne sont en principe pas soumis aux dispositions du droit du contrat de travail à l'exception des art. 331a à 331e de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le code civil suisse (CO - RS 220). Ils sont régis par les dispositions légales et réglementaires de la Confédération, des cantons, des communes ou des corporations de droit public auxquels ils sont soumis (C. BRUNNER, J.-M. BUEHLER, J.-B. WAEBER, Commentaire du contrat de travail, Lausanne 1996, p. 277).

c. Aux termes de l'art. 342 CO, les dispositions de droit privé fédéral concernant la résiliation du contrat de travail ne sont pas directement applicables au droit public communal. Il convient de se référer à ces dispositions à titre de droit public communal supplétif (ATA/479/2009 du 9 septembre 2009).

En l'espèce, le statut contient des dispositions réglant la fin des rapports de travail ; le CO s'applique cependant à titre de droit supplétif concernant la protection contre le licenciement en temps inopportun.

Selon l'art 336c al. 1 let. b CO, l'employeur ne peut résilier les rapports de travail pendant les 90 premiers jours d'une incapacité totale ou partielle de travail.

En l'espèce, engagé dès le 1er septembre 2008, le recourant a été licencié pour le 30 avril 2010. Dans la mesure où il a été absent dès le 9 novembre 2009 pour cause d'accident, il y a lieu de constater qu'il était encore en période probatoire lorsque le Conseil administratif lui a fait part de son intention de ne pas le confirmer à son poste et de résilier son engagement, nonobstant la fin de cette période fixée au 1er janvier 2010. En effet, il se trouve être au bénéfice d'une période de protection contre le licenciement en temps inopportun jusqu'au 9 février 2010. Le Conseil administratif, a prononcé le licenciement du recourant le 16 février 2010, soit peu après l'issue de cette période de protection. La résiliation des rapports de travail est donc formellement valable (ATA/829/2005 du 6 décembre 2005). Seules sont dès lors applicables les dispositions relatives aux employés.

4. Le recourant invoque le caractère abusif et arbitraire de son licenciement.

5. Selon l'art. 61 LPA, le pouvoir d’examen du Tribunal administratif se limite à la violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA). Le tribunal de céans ne peut ainsi pas revoir l'opportunité de la décision litigieuse (art. 61 al. 2 LPA).

6. a. Les communes disposent d'une très grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu'elles entretiennent avec leurs agents (Arrêt du Tribunal fédéral 2P 46/2006 du 7 juin 2006 ; F. BELLANGER, Le contentieux communal genevois in : L'avenir juridique des communes, Schultess, 2007 p. 149).

Ainsi, l'autorité communale doit bénéficier de la plus grande liberté d'appréciation pour fixer l'organisation de son administration et créer, modifier ou supprimer les relations de service nécessaires au bon fonctionnement de celle-ci, questions relevant très largement de l'opportunité et échappant par conséquent au contrôle du Tribunal administratif.

b. Ce pouvoir discrétionnaire ne signifie pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble. Elle ne peut ni renoncer à exercer ce pouvoir, ni faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment ceux de la légalité, de la bonne foi, de l'égalité de traitement, de la proportionnalité et de l'interdiction d'arbitraire (B. KNAPP, Précis de droit administratif, 1991, n. 161 ss, p. 35-36). Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, elle est notamment liée par les critères qui découlent du sens et du but de la réglementation applicable, de même que par les principes généraux du droit (ATF 107 I a 204 ; 104 I a 212 et les références ; Arrêts du Tribunal fédéral 2P.149/2006 du 9 octobre 2006 ; 2P.177/2001 du 9 juillet 2002, consid. 2.2).

c. L'exercice d'un contrôle judiciaire dans ce cadre-là garde tout son sens, même si le juge administratif doit alors observer une très grande retenue dans l'examen de la manière dont l'administration a exercé ses prérogatives. Le juge doit ainsi contrôler que les dispositions prises se tiennent dans les limites du pouvoir d'appréciation de l'autorité communale et qu'elles apparaissent comme soutenables au regard des prestations et du comportement du fonctionnaire ainsi que des circonstances personnelles et des exigences du service. Seules les mesures objectivement insoutenables et arbitraires doivent être annulées, le tribunal vérifiant que l'autorité n'outrepasse pas son pouvoir d'appréciation et respecte les conditions de fond et de forme dont les textes imposent la réalisation (voir ATF 108 Ib 209 publié in JdT 1984 I 331, consid. 2).

d. Une décision est arbitraire lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 128 I 177 consid. 2.1 p. 182 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4P.149/2000 du 2 avril 2001 consid. 2 et les arrêts cités ; ATA/126/2007 du 20 mars 2007 consid. 9a ; ATA/630/2007 du 11 décembre 2007).

7. En l'espèce, il ressort du dossier que l'incident de voyeurisme est à l'origine du licenciement du recourant. Pour fonder sa décision de licenciement, le Conseil administratif s'est basé essentiellement sur les conclusions du rapport de l'enquête administrative.

Or, force est de constater que les conclusions de cette dernière procèdent d'une lecture inexacte des éléments recueillis d'une part et, d'autre part, se fondent sur un état de fait incomplet. En effet, l'enquêteur retient que le recourant a vu une ombre fuir lorsqu'il a ouvert la porte de la cabine, alors que le recourant n'a jamais rien prétendu de tel. Il a déclaré avoir vu une ombre ou quelque chose bouger au moment où il a ouvert la porte de la cabine et avoir traversé pour voir ce que c'était et en sortant de l'autre côté, être tombé sur une jeune femme sortant de la cabine voisine.

Il ressort par ailleurs du dossier que l'intéressée n'a jamais vu la personne qui l'aurait filmée et a admis que l'appareil téléphonique du recourant n'était pas celui qu'elle avait vu par-dessous la cabine. Ainsi, aucun lien direct n'a pu être établi entre le recourant et le téléphone incriminé, qui n'a d'ailleurs jamais été retrouvé. En revanche, l'ami de l'intéressée n'a pas été entendu et l'on ignore ce qu'il a fait et vu durant l'incident, de même que ce qu'il a comme téléphone portable.

L'enquêteur a ainsi accordé un crédit total à la version de la plaignante sans fondement suffisant et a écarté de manière subjective les explications du recourant.

Le Conseil administratif ne pouvait alors se fonder sur une enquête administrative incomplète et partiale. La décision de licenciement est ainsi arbitraire et contraire au droit.

8. La commune a d'ores et déjà indiqué ne pas être disposée à réintégrer l'intéressé, ce qui ouvre la voie à une indemnisation. Reste donc à examiner les conclusions en indemnités du recourant, en tant qu'il appartient à la juridiction de céans de fixer l'indemnité due à ce dernier.

9. a. En effet, l'art. 102 al. 2 du statut prévoit que si le Tribunal administratif retient que la décision contestée est contraire au droit, il peut proposer la réintégration de l'intéressé. Si le Conseil administratif rejette cette proposition, le tribunal fixe une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un mois ni supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut, à l'exclusion de tout autre élément de rémunération.

b. Dans sa jurisprudence développée à l’occasion de la fixation de l’indemnité due à des membres de la fonction publique, le Tribunal administratif tient compte de la nature des manquements reprochés à l’intéressé et de ses éventuels antécédents, de la gravité de ses fautes, de la durée des rapports de service, de son âge au moment du licenciement, des possibilités de retrouver un emploi, des défaillances des supérieurs hiérarchiques et de l’égalité de traitement avec un autre protagoniste (ATA/306/2007 du 12 juin 2007; ATA/314/2005 du 26 avril 2005 et les références citées).

En l'espèce, le Tribunal administratif retiendra que le recourant a été licencié, sans que son employeur ne dispose d’éléments suffisants permettant de penser qu'il avait commis l'acte de voyeurisme, ni de considérer que le lien de confiance avec lui était rompu. La décision arbitraire de l’intimée a des répercussions sur la situation tant professionnelle que psychique du recourant. Ainsi, afin de tenir compte de l'ensemble des circonstances, notamment de la durée des rapports de service et de l'absence d'antécédents de l'intéressé, il y a lieu d’octroyer à ce dernier une indemnité de six mois de son dernier traitement brut. La somme portera intérêt dès la naissance du droit à l’indemnité, soit dès le refus du Conseil administratif, le 20 mai 2010, de réintégrer le recourant au sein du personnel de la ville.

10. Compte tenu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la Ville d'Onex. Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée au recourant, à la charge de l'intimée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 mars 2010 par Monsieur B______ contre la décision de la Ville d'Onex du 16 février 2010 ;

au fond :

admet partiellement le recours ;

constate que la résiliation des rapports de travail du recourant est contraire au droit ;

prend acte du refus de la Ville d'Onex de réintégrer le recourant ;

fixe l'indemnité due par la Ville d'Onex au recourant à six mois de son dernier traitement brut avec intérêts à 5% dès le 20 mai 2010 ;

condamne en tant que de besoin la Ville d'Onex à payer ladite indemnité ;

met à la charge de la Ville d'Onex un émolument de CHF 1'000.- ;

alloue au recourant une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à la charge de la Ville d'Onex ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les articles 113 et suivants LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Patrick Udry, avocat du recourant ainsi qu'à Me François Bellanger, avocat de la Ville d'Onex.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

F. Glauser

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :