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Décisions | Assistance juridique

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AC/2020/2010

DAAJ/17/2024 du 20.02.2024 sur AJC/4586/2023 ( AJC ) , REJETE

Recours TF déposé le 08.04.2024, 2D_8/2024
Normes : CO.128.ch3
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/2020/2010 DAAJ/17/2024

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 20 FEVRIER 2024

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, avocat, p.a. Étude B______, ______ [GE], représenté par Me C______, avocat, ______ [GE],

 

contre la décision du 12 septembre 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 


EN FAIT

A.           a. Le 23 août 2010, D______, incarcéré à la prison de E______, a notamment sollicité de la direction générale de l'Office pénitentiaire de Genève (ci-après: la direction) que celle-ci constate, après avoir procédé à une enquête, que les conditions dans lesquelles il était détenu n'étaient pas dignes au regard des art. 1 et 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et 7 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) en raison de la surpopulation notoire de la prison. Il n’avait pu disposer d’un espace égal ou supérieur à 3m2 dans sa cellule d’une part, et d’autre part, la cohabitation avec l’un de ses camarades de cellule était extrêmement difficile en raison du fait que celui-ci observait le Ramadan et refusait que de la musique soit écoutée, imposant "un couvre-feu quasi permanent". L’intéressé réclamait en outre une indemnité de 150 fr. par jour dès sa mise en détention par analogie avec l’art. 36 de la Constitution de la République et canton de Genève du 24 mai 1847 (Cst-GE - A 2 00), abrogé depuis le 1er janvier 2011.

b. Par décision du 21 décembre 2010, la direction a tout d'abord considéré que D______ disposait toujours d'un intérêt digne de protection à l'obtention d'une décision et qu'elle était seulement compétente pour statuer sur le caractère indigne de la détention allégué par le détenu. Enfin, après examen des circonstances dans lesquelles le précité avait été détenu depuis son arrivée dans l'établissement, elle a constaté que la détention de l'intéressé n'était pas indigne au sens des dispositions susvisées (cause A/1______/2011).

c. Le 6 janvier 2011, D______ a été mis au bénéfice de l'assistance juridique pour recourir à l'encontre de la décision rendue par la direction le 21 décembre 2010 (cause AC/2______/2010).

d. Par arrêt ATA/584/2011 du 13 septembre 2011, la Chambre administrative de la Cour de justice a rejeté le recours interjeté contre la décision du 21 décembre 2010.

e. Par décision du 14 novembre 2011, D______ a été mis au bénéfice de l'assistance juridique pour le dépôt d'une demande d'interprétation de l'arrêt précité (cause A/3______/2011).

f. Par arrêt ATA/277/2012 du 8 mai 2012, la Chambre administrative a rejeté la demande d'interprétation formée par D______ le 19 octobre 2011 contre l'arrêt du 13 septembre 2011.

g. Par courriel du 29 avril 2016, Me A______ a demandé au greffe de l'assistance juridique à connaître les numéros de cause de toutes les procédures ouvertes au nom de D______ afin de pouvoir déposer ses états de frais.

h. Par email du 2 mai 2016, le greffe de l'assistance juridique a communiqué à Me A______ les deux décisions rendues dans les procédures A/1______/2011 et A/3______/2011, précisant que ces "dossiers [étaient] toujours ouverts".

i. Par courrier du 16 mai 2023, Me A______ a transmis son état de frais au greffe de l'assistance juridique dans les causes susvisées, précisant avoir valablement interrompu la prescription et tenir à disposition les pièces y relatives.

j. Invité par le greffe de l'assistance juridique à lui faire parvenir les preuves de l'interruption de la prescription, Me A______ a produit, par courriel du 6 juin 2023, un commandement de payer du 29 janvier 2020, poursuite n° 4______, portant sur divers montants fondés sur trois arrêts de la Chambre pénale de recours rendus les 2 août, 22 mai et 25 janvier 2019, et auquel l'Etat de Genève a formé opposition le 6 mars 2020.

Il a également produit deux courriels du 17 novembre 2016 de F______, alors directrice du greffe de l'assistance juridique, faisant suite à un appel téléphonique de Me A______ lui demandant de renoncer à invoquer la prescription pour toutes créances en indemnisation résultant de dossiers dans lesquels il avait été nommé d'office. Dans ces emails, elle a expliqué à Me A______ ne pas pouvoir renoncer à invoquer la prescription pour l'ensemble des dossiers d'assistance juridique dont il était en charge, mais qu'elle acceptait de lui laisser un délai au 31 mars 2017 pour déposer ses états de frais dans les dossiers dans lesquels la prescription n'était pas déjà acquise au 17 novembre 2016, mais sur le point d'intervenir.

Me A______ a également produit deux courriels de G______, alors directrice adjointe du greffe de l'assistance juridique. Dans le premier message du 21 avril 2017, elle acceptait une prolongation de délai accordée au 30 juin 2017 pour déposer des états de frais individualisés. Dans le second du 7 juillet 2017, elle refusait d'entrer en matière sur une nouvelle demande de prolongation de délai sollicitée par Me A______ par courriel du 30 juin 2017. Dans un courriel du même jour, ce dernier a allégué qu'une simple démarche visant à interrompre la prescription suffisait en droit public, régissant la créance de l'avocat d'office.

k. Par décision du 13 juin 2023, le greffe de l'assistance juridique a refusé de taxer l'état de frais du 16 mai 2023 de Me A______, au motif que la créance en indemnisation était prescrite, celui-ci n'ayant pas valablement interrompu le délai de prescription quinquennal échéant au 12 juin 2017 au plus tard, soit cinq ans après l'entrée en force de l'arrêt de la Chambre administrative du 8 mai 2012, dont le caractère exécutoire avait été suspendu par la procédure d'appel, étant néanmoins précisé que l'assistance juridique n'avait été octroyée que pour la première instance.

l. Le 26 juin 2023, Me A______ a sollicité la reconsidération de la décision précitée au motif que le raisonnement opéré par le greffe de l'assistance juridique était juridiquement erroné, au-delà du fait que c'était de la "faute de l'autorité judiciaire qui n'a[vait] pas respecté les règles en vigueur à l'époque, développant au demeurant une pratique de taxer les états de frais même prescrits", qu'en tout état, les démarches effectuées avaient permis d'identifier les dossiers, qui avaient été listés et qui étaient connus des autorités, via une simple consultation du DM-Web, et qu'il proposait de le prouver par le biais du témoignage de son ancienne assistante, H______, qui avait eu des contacts réguliers avec le greffe de l'assistance juridique, notamment avec F______ et G______. Il considérait que chacune de ces démarches avait interrompu la prescription. Il sollicitait enfin la consultation du dossier en main du greffe de l'assistance juridique.

m. L'avocat-stagiaire de Me A______ a consulté le dossier auprès du greffe de l'assistance juridique le 25 août 2023.

B.            Par décision du 12 septembre 2023, notifiée le 15 septembre 2023 à Me A______, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la demande de reconsidération de Me A______ et confirmé la décision de refus de taxer du 13 juin 2023.

Elle a relevé que le greffe de l'assistance juridique n'avait pas renoncé à se prévaloir de la prescription pour l'ensemble des créances que Me A______ pouvait avoir à l'encontre de l'Etat de Genève et avait indiqué qu'il n'entrerait pas en matière pour les créances qui seraient déjà prescrites. S'il avait accordé un délai à Me A______ pour lister les dossiers concernés par sa demande de renonciation à invoquer la prescription, ce dernier n'avait présenté aucune demande s'agissant de la procédure AC/2020/2010, alors même qu'il avait été informé, par courriel du 2 mai 2016, du nombre de procédures d'assistance juridique alors ouvertes au nom de son mandant.

Le premier juge a souligné que dans la décision DAAJ/122/2021 du 7 septembre 2021 portant sur un état de fait similaire à celui de la présente procédure, la Cour avait considéré que la demande de Me A______ consistant à la renonciation à la prescription pour l'ensemble de ses créances en indemnisation n'était pas de nature à interrompre la prescription, puisqu'il n'y réclamait pas le paiement de la créance visée par la procédure d'assistance juridique.

Dans la présente affaire, Me A______ se contentait d'alléguer à l'appui de sa demande en reconsidération avoir effectué "plusieurs démarches" ayant interrompu la prescription, faisant vraisemblablement référence aux courriels susmentionnés, ne précisant ni la nature ni les dates de ces démarches.

En particulier, la poursuite requise en janvier 2020, après l'échéance du délai de prescription – pour des créances liées à une procédure pénale qui n'est ni l'objet de la présente procédure, ni même dirigée à l'encontre de D______ – n'avait pas eu d'effet interruptif.

Comme déjà souligné par la Cour dans sa décision DAAJ/122/2021 du 7 septembre 2021, il n'appartenait pas au greffe de l'assistance juridique de pallier aux carences de Me A______ en dressant la liste de toutes les procédures dans lesquelles il avait été nommé d'office pour déterminer, pour chacune de ses créances en indemnisation, si elle était déjà prescrite ou s'il y avait lieu de considérer que la prescription avait été interrompue. Il importait peu que le greffe de l'assistance juridique ait accès à la base de données DM-Web, puisqu'une consultation de celle-ci ne permettait pas d'identifier les dossiers pour lesquels la prescription quinquennale courait encore et qu'en tout état de cause, il n'appartenait pas aux autorités, mais à chaque avocat nommé d'office, de tenir la comptabilité de ses mandants en veillant, cas échéant, à ce que les notes d'honoraires y relatives soient envoyées avant l'échéance du délai de prescription.

Dans ces circonstances, l'audition de l'ancienne assistante de Me A______ apparaissait inutile.

Enfin, il n'existait aucune pratique en matière d'assistance juridique consistant à indemniser l'activité d'un avocat nommé d'office lorsque la prescription quinquennale est déjà atteinte.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 25 septembre 2023 à la Présidence de la Cour de justice. Le recourant conclut, préalablement, à l'audition de H______ et, principalement, à l'annulation de la décision entreprise et au renvoi du dossier à l'autorité précédente pour qu'elle procède à la taxation de défenseur d'office, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Il fait valoir que son droit d'être entendu a été violé par le refus d'entendre H______ et par le fait que le dossier n'était pas complet. L'autorité était en mesure d'identifier les faits sur lesquels il fondait sa prétention, puisqu'il avait été informé du nombre de procédures d'assistance juridique ouvertes au nom de son mandant par courriel de celle-ci du 2 mai 2016. C'était la preuve que les dossiers concernés étaient connus de l'autorité et qu'une simple recherche dans le système informatique permettait d'obtenir cette information, si bien que, saisie d'une demande visant les dossiers où il avait été nommé d'office, l'autorité était parfaitement en mesure d'identifier les dossiers concernés. Il a également allégué que dès lors que l'autorité ne l'avait pas mis en demeure en tant qu'avocat d'office, elle aurait dû le taxer d'office, la pratique de celle-ci en matière d'assistance judiciaire ayant toujours été d'accepter de taxer l'activité d'un avocat d'office, même si cela faisait plus de cinq ans que la dernière activité avait été déployée. En tout état, le délai de prescription était de dix ans, la relation entre l'Etat et l'avocat d'office étant régie par les règles de droit public. Il avait valablement interrompu la prescription par les "nombreuses démarches" qu'il avait effectuées.

b. Dans ses observations du 6 octobre 2023, la vice-présidence du Tribunal civil a conclu au rejet du recours, précisant que le dossier en mains de l'autorité était complet, les appels téléphoniques n'étant pas de nature à figurer dans les dossiers judiciaires, et que les courriels des 29 avril et 2 mai 2016 n'avaient pas interrompu le délai de prescription. Enfin, même à considérer que tel soit le cas, le nouveau délai de prescription aurait commencé à courir dès le 3 mai 2016, voire dès le 1er juillet 2017, de sorte que les créances en indemnisation du recourant seraient en tous les cas prescrites.

c. Par pli du 10 octobre 2023, notifié le lendemain, le recourant a été informé de ce que la cause était gardée à juger et a reçu une copie des observations de la Vice-présidence du Tribunal civil.

d. Par pli expédié le 23 octobre 2023 et réceptionné le 25 octobre 2023 par le greffe de la Cour, le recourant a exercé son droit inconditionnel à la réplique, persistant dans ses conclusions.

EN DROIT

1.             1.1 Les décisions de reconsidération en matière de taxation, rendues en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Présidente de la Cour de justice. Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

L'avocat commis d'office dispose à titre personnel d'un droit de recours au sujet de la rémunération équitable accordée (ATF 131 V 153 consid. 1; Tappy, Commentaire romand CPC, 2ème éd. 2019, n. 22 ad art. 122 CPC).

1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd. 2010, n. 2513-2515).

2.             Se pose la question de la recevabilité de l'écriture du recourant du 23 octobre 2023, déposée devant la Cour après que la cause ait été gardée à juger, le 10 octobre 2023.

En l'espèce, cette question peut demeurer ouverte vu l'issue du recours.

3.             Le recourant a préalablement conclu à l'audition de son ancienne assistante, H______.

3.1 Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

3.2 En l'espèce, le recourant se contente de réitérer sa demande d'auditionner H______, sans toutefois expliquer de manière précise sur quels points son audition pourrait être utile à l'appréciation de sa cause ou propre à modifier l'appréciation des éléments figurant d'ores et déjà au dossier. Il n'a pas motivé pour quelles raisons le premier juge avait erré en retenant que l'audition de son ancienne assistante apparaissait inutile dans les circonstances retenues.

Par conséquent, l'audition de H______ ne sera pas ordonnée.

4.             Invoquant une violation de son droit d'être entendu, le recourant reproche au premier juge de ne pas avoir produit un dossier complet, celui-ci ne contenant selon lui ni les échanges de courriels, ni les notes internes concernant la présente affaire, notamment suite aux contacts téléphoniques du recourant et/ou de son assistante avec le greffe de l'assistance juridique.

4.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de nature formelle. En principe, la violation du droit d'être entendu entraîne l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Toutefois, le droit d'être entendu n'est pas une fin en soi; il doit permettre d'éviter qu'une procédure judiciaire ne débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure, notamment à l'administration des preuves. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_168/2022 du 10 juin 2022 consid. 5.1 et les arrêts cités). Dans ce cas, en effet, le renvoi de la cause à l'autorité précédente en raison de cette seule violation constituerait une vaine formalité et conduirait seulement à prolonger inutilement la procédure (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1 et les références citées; arrêt du Tribunal fédéral 5A_647/2022 du 27 mars 2023 consid. 3.3.1).

4.2 En l'espèce, il faut tout d'abord rappeler qu'à la demande du recourant, son stagiaire a consulté le dossier auprès du greffe de l'assistance juridique le 25 août 2023. Il ne ressort toutefois pas de la procédure que le recourant se serait plaint, suite à cette consultation, de ce que le dossier était incomplet; il ne s'en est plaint qu'au stade du présent recours. De plus, il a pu produire les différents courriels sur lesquels il base son raisonnement, de sorte que la Cour de céans possède tous les éléments nécessaires pour rendre sa décision. Quant aux appels téléphoniques, il n'existe pas d'obligation d'en faire une note à inclure dans le dossier et l'audition de H______ a été refusée pour les raisons exposées ci-dessus.

Partant, le grief du recourant est infondé.

5.             Le recourant invoque une violation de l'art. 27 Cst. (liberté économique) et de l'art. 9 Cst. (interdiction de l'arbitraire) au motif que la décision du premier juge a pour effet de priver l'avocat d'office de toute rémunération. Selon lui, dès lors que l'autorité ne l'avait pas mis en demeure, elle aurait dû être tenue d'appliquer la loi et de fixer l'indemnité en cause, cas échéant par estimation.

5.1 Dans l'arrêt 6B_1198/2017 du 18 juillet 2018 consid. 2, le Tribunal fédéral a considéré que les autorités cantonales n'avaient pas nié le droit de l'avocat d'office à être rémunéré pour son activité de conseil d'office; elles ont considéré qu'il avait agi tardivement pour obtenir la fixation du montant de son indemnité, soit que sa créance était prescrite et, partant, que cette prétention, sans être éteinte ou inexistante, ne pouvait plus être déduite en justice. Il ne s'agit donc pas de savoir si le recourant pouvait être astreint à défendre d'office sans contre-partie. La liberté économique n'était pas absolue et il incombait en tout état au titulaire d'un droit d'agir pour en obtenir la protection judiciaire. Dans tous les cas, il ne pouvait être déduit de l'art. 27 Cst., qui ne permet en aucune façon d'exiger une prestation positive de l'Etat (ATF 130 I 26 consid. 4.1; 121 I 230 consid. 3h), un droit inconditionnel de l'avocat à être interpellé d'office sur l'importance de son activité d'assistance judiciaire et à obtenir de l'autorité qu'elle agisse, en l'absence de toute demande, au besoin en estimant l'importance de cette activité et en procédant à une "taxation d'office".

5.2 En l'espèce, – et pour autant que l'argumentation du recourant sur ce point puisse être considérée comme suffisante et dès lors recevable –, l'application de la jurisprudence du Tribunal fédéral précitée, rendue dans une affaire similaire, doit conduire à écarter les arguments du recourant: en constatant que l'avocat d'office avait agi tardivement pour obtenir la fixation du montant de son indemnité, soit que sa créance était prescrite, le premier juge n'avait pas nié le droit du recourant à être rémunéré pour son activité de conseil d'office; l'avocat n'ayant pas à être interpellé, voire taxé d'office. Cette jurisprudence a d'ailleurs été rappelée dans une affaire concernant le recourant, soit dans l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_546/2018 du 16 août 2018 consid. 4.2.

Le grief du recourant est dès lors infondé.

6.             Le recourant reproche au premier juge d'avoir considéré que le délai de prescription applicable à l'indemnité de l'avocat d'office était de cinq ans sur la base de l'art. 128 ch. 3 CO. Il considère que la prescription est au contraire décennale, se basant principalement sur l'art. 135 al. 5 CPP – qui prévoit que la prétention de la Confédération ou du canton se prescrit par dix ans à compter du jour où la décision est entrée en force – et sur les art. 435, 442 CPP et 123 al. 2 CPC. En tout état, le premier juge avait considéré à tort que seul l'art. 135 CO permettait l'interruption de la prescription à l'exclusion d'autres actes admis en droit administratif, et, à titre subsidiaire, qu'il n'avait pas effectué de tels actes.

6.1 Le Tribunal fédéral a retenu qu'en l'absence de règle sur la prescription résultant du droit public, la solution consistant, dans les rapports de droit public également, à retenir que les prétentions de l'avocat en rémunération de ses services se prescrivaient par 5 ans dès la fin du mandat du défenseur d'office (art. 128 ch. 3 CO) n'apparaissait pas critiquable. Une telle solution rendait compte de l'analogie existant entre les honoraires de l'avocat dans son activité privée et les indemnités qu'il perçoit de l'Etat en tant que conseil d'office (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1198/2017 du 18 juillet 2018 consid. 6.3.3. et 6.4; 6B_546/2018 du 16 août 2018 consid. 7).

De même, la Chambre administrative de la Cour de justice a retenu qu'en l'absence de base légale expresse et d'une règlementation de droit public à laquelle se référer, les règles pertinentes du droit privé devaient être appliquées. Elle a ainsi retenu que dans la mesure où la législation applicable au personnel de la fonction publique ne traitait pas de la question de la prescription des créances en matière d'heures supplémentaires, il convenait de faire référence à l'art. 128 ch. 3 CO qui prévoit qu'en matière de rapports de travail les actions des travailleurs, pour leurs services, se prescrivent par cinq ans (ATA/1021/2019 du 18 juin 2019 consid. 4a et les références citées).

Dans ce même arrêt, la Chambre administrative a toutefois retenu que les conditions d'interruption de la prescription étaient plus souples en droit public que celles prévues par l'art. 135 CO. Il s'agissait de tout acte propre à faire admettre la prétention en question, visant à l'avancement de la procédure et accompli dans une forme adéquate. L'administré interrompait la prescription par toute intervention auprès de l'autorité compétente tendant à faire reconnaître ses droits. D'une manière générale, la prescription était interrompue par tout acte par lequel le créancier faisait valoir sa créance de manière adéquate vis-à-vis du débiteur (ATA/1021/2019 précité consid. 4b et les références citées).

Selon le Tribunal fédéral administratif, si le contenu de la réclamation ne doit pas être soumis à des exigences trop élevées, celle-ci doit toutefois contenir les éléments permettant à l'administration d'identifier pour quels faits l'administré entend interrompre la prescription (ATAF A-1271/2011 du 16 août 2011 consid. 4.3.2; Meier, Verjährung und Verwirkung öffentlich-rechtlicher Forderungen, 2013, p. 266).

6.2 En l'espèce, le recourant considère qu'il est "douteux" que l'art. 128 CO s'applique à l'indemnisation des avocats commis d'office et qu'il serait même une "hérésie de l'affirmer". Toutefois, à la lecture du considérant 6 de l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_1198/2017 précité, l'argumentation du recourant semble identique à celle déjà présentée à l'appui du recours jugé dans la cause susvisée, de même que dans celle faisant l'objet de l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_546/2017 précité qui concerne le recourant (cf. consid. 7). Il en ressort que le Tribunal fédéral a retenu que l'autorité cantonale n'avait pas violé le droit fédéral en jugeant qu'il n'y avait pas lieu, quant à l'indemnisation du conseil d'office, de s'écarter de la règle prévue par l'art. 128 ch. 3 CO en droit privé (délai de prescription de cinq ans).

De même, il ne peut être reproché au premier juge d'avoir laissé la question ouverte s'agissant de savoir si la prescription pouvait non seulement être interrompue par l'un des actes mentionnés à l'art. 135 CO mais également par tout acte propre à faire admettre la prétention en question. En effet, le recourant se contente d'alléguer avoir effectué "plusieurs démarches" ayant interrompu la prescription, sans toutefois établir les dates de ces démarches et le contenu de celles-ci. Le seul acte porté à la connaissance des autorités consiste dans la demande du recourant tendant à ce qu'il soit renoncé à la prescription pour l'ensemble des créances qu'il détiendrait à l'encontre de l'Etat de Genève. Cette demande n'était pas de nature à interrompre la prescription puisque le recourant n'y réclamait pas le paiement de sa créance dans la présente procédure. Il ne pouvait être exigé du greffe de l'assistance juridique qu'il pallie les carences du recourant en déterminant pour chacune des procédures où il avait été nommé d'office si elle avait déjà été taxée, était déjà prescrite ou s'il y avait lieu de considérer que la prescription avait été interrompue. C'est ainsi à juste titre que le premier juge a retenu que le recourant n'avait, quel que soit le type d'acte interruptif retenu, pas interrompu la prescription et qu'il avait déposé son état de frais dans la présente cause une fois la prescription quinquennale déjà acquise.

Pour le surplus, le recourant ne rend pas vraisemblable une pratique de l'administration consistant à taxer l'activité d'un avocat d'office après que la prescription a été acquise et, comme vu ci-dessus, le Tribunal fédéral a déjà considéré, dans des affaires similaires, qu'il n'existait pas un droit inconditionnel de l'avocat à être interpellé d'office sur l'importance de son activité d'assistance judiciaire et à obtenir de l'autorité qu'elle agisse, en l'absence de toute demande, au besoin en estimant l'importance de cette activité et en procédant à une "taxation d'office" (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1198 du 18 juillet 2018 consid. 2 et 6B_546/2018 du 16 août 2018 consid. 4.2).

Au vu de ce qui précède, le recours, infondé, sera rejeté.

7.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 25 septembre 2023 par A______ contre la décision rendue le 12 septembre 2023 par la Vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/2020/2010.

Au fond :

Rejette le recours.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me C______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.