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Décisions | Assistance juridique

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AC/1691/2023

DAAJ/133/2023 du 24.11.2023 sur AJC/4384/2023 ( AJC ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/1691/2023 DAAJ/133/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU VENDREDI 24 NOVEMBRE 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié ______ [GE],

représenté par Me B______, avocat,

contre la décision du 30 août 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 

 


EN FAIT

A.           a. Le 8 juin 2023, A______ (ci-après : le recourant) a sollicité l'assistance juridique pour une action en modification des contributions d'entretien dues à ses deux enfants. Lesdites contributions s'élevaient à un montant de 500 fr. par mois par enfant. Il n'a pas indiqué le montant de la réduction qu'il entendait solliciter.

b. Par courrier du 8 juin 2023, adressé au recourant avec copie à son conseil juridique, le greffe de l'assistance juridique lui a indiqué ne pas être en mesure d'évaluer les chances de succès des démarches envisagées ni de procéder à l'évaluation de sa situation financière.

Le greffe de l'assistance juridique a donc invité le recourant à lui fournir dans un délai venant à échéance le 3 juillet 2023 – des précisions quant au fond du litige, une copie de la décision dont il souhaitait demander la modification et des pièces complémentaires sur sa situation financière.

Il était encore précisé que la requête pouvait faire l'objet d'un refus d'entrer en matière si les pièces ou renseignements sollicités n'étaient pas fournis dans le délai imparti.

c. Le greffe de l'assistance juridique n'a reçu aucun courrier ou document de la part du recourant ou de son conseil à la suite de ce courrier.

B.            Par décision du 30 août 2023, reçue le 8 septembre 2023 par le recourant, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête précitée. En substance, elle a retenu que ni le recourant, ni son conseil n'avait donné suite à son courrier du 8 juin 2023, que les éléments fournis par le recourant ne permettaient ni de se prononcer sur les mérites de la cause ni de déterminer sa situation financière et que compte tenu du fait qu'il était assisté d'un avocat, le greffe de l'assistance juridique n'avait pas à l'interpeller à nouveau pour qu'il complète sa requête lacunaire.

C.           a. Par acte déposé le 12 septembre 2023 au guichet universel, le recourant a formé recours contre cette décision. Assisté de son conseil, il a sollicité le renvoi de la cause à l'autorité précédente et a renoncé à réclamer des dépens.

Il allègue qu'il a envoyé deux courriers les 7 et 21 juillet 2023 – par courrier A – au service de l'assistance juridique. C'était la première fois que des courriers qu'il envoyait n'arrivaient pas à leur destinataire. Il n'était pas indiqué "dans le règlement" que les courriers devaient obligatoirement être envoyés avec un suivi ou déposés au guichet universel.

Le recourant a produit deux pièces qui ne figurent pas au dossier de première instance, soit deux courriers datés des 3 et 21 juillet 2023 et adressés au greffe de l'assistance juridique.

b. Dans ses observations du 14 septembre 2023, la vice-présidence du Tribunal civil a indiqué n'avoir aucune trace des courriers mentionnés dans le recours. Elle persistait ainsi dans sa position et concluait au rejet du recours.

EN DROIT

1.             1.1. En tant qu'elle refuse l'assistance juridique, la décision entreprise, rendue en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC et 1 al. 3 RAJ), compétence expressément déléguée à la vice-présidence soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. Selon l'art. 327 al. 3 CPC, si elle admet le recours, l'autorité de recours annule la décision et renvoie la cause à l'instance précédente (let. a) ou rend une nouvelle décision si la cause est en état d'être jugée (let. b).

Même si le recours extraordinaire de l'art. 319 CPC déploie avant tout un effet cassatoire, le recourant ne peut se limiter à conclure à l'annulation de la décision attaquée; il devra prendre des conclusions au fond sous peine d'irrecevabilité du recours, de façon à permettre à l'autorité supérieure de statuer à nouveau dans le cas où les conditions de l'art. 327 al. 3 let. b CPC sont réunies (Jeandin, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 5 ad art. 321 CPC et n. 6 ad art 327 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 65D_155/2013 du 22 octobre 2013 consid. 4.3). Les conclusions réformatoires doivent en outre être déterminées et précises, c'est-à-dire indiquer exactement quelles modifications sont demandées. En principe, ces conclusions doivent être libellées de telle manière que l'autorité de recours puisse, s'il y a lieu, les incorporer sans modification au dispositif de sa propre décision (cf. ATF 137 III 617 consid. 4.2 et 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_587/2012 du 9 janvier 2013 consid. 2).

1.3. En l'espèce, le recourant, pourtant assisté d'un avocat, s'est contenté de conclure au renvoi de la cause à l'autorité précédente sans solliciter l'annulation de la décision attaquée ni l'octroi de l'assistance juridique.

Il s'ensuit que le recours est irrecevable en raison de l'absence de conclusions réformatoires. Même si le recours avait été recevable, il aurait été infondé (cf. consid. 3 infra).

1.4. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Cela étant, le régime de l'art. 326 al. 1 CPC doit être calqué sur celui de l'art. 99 al. 1 LTF – dont la teneur est la suivante: "[a]ucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente" –, afin d'empêcher que la présentation des faits et preuves nouveaux soit soumise à une réglementation plus rigoureuse devant l'autorité cantonale que devant le Tribunal fédéral (ATF 139 III 466 consid. 3; Jeandin, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 7 ad art. 326 CPC).

Ainsi, l'interdiction de nova devant l'autorité de recours connaît une exception lorsque la décision de l'autorité précédente est le motif pour présenter de nouveaux faits ou moyens de preuve ou, en d'autres termes, lorsque c'est la décision de l'autorité précédente qui, pour la première fois, a rendu pertinents ces faits ou moyens de preuve. Il peut s'agir de faits et moyens de preuve qui se rapportent à la régularité de la procédure devant l'instance précédente (par ex. une violation du droit d'être entendu lors de l'instruction) ou qui sont propres à contrer une argumentation de l'autorité précédente objectivement imprévisible pour les parties avant la réception de la décision (arrêts du Tribunal fédéral 5A_67/2019 du 25 février 2019 consid. 2.2; 5A_904/2015 du 29 septembre 2016 consid. 2.3).

En l'espèce, les deux pièces produites par le recourant semblent recevables en tant qu'elles tendent à prouver que le premier juge avait à tort considéré qu'il n'avait pas complété son dossier.

3.             Le recourant fait valoir qu'il a complété sa requête lacunaire par l'envoi de deux courriers au greffe de l'assistance juridique et s'étonne qu'ils n'y soient pas parvenus.

3.1. 3.1.1. Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 133 III 614 consid. 5).

3.1.2. Applicable à la procédure portant sur l'octroi ou le refus de l'assistance judiciaire, la maxime inquisitoire est limitée par le devoir de collaborer des parties. Ce devoir de collaborer ressort en particulier de l'art. 119 al. 2 CPC qui prévoit que le requérant doit justifier de sa situation de fortune et de ses revenus et exposer l'affaire et les moyens de preuve qu'il entend invoquer. Il doit ressortir clairement des écritures de la partie requérante qu'elle entend solliciter le bénéfice de l'assistance judiciaire et il lui appartient de motiver sa requête s'agissant des conditions d'octroi de l'art. 117 CPC et d'apporter, à cet effet, tous les moyens de preuve nécessaires et utiles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_984/2022 du 27 mars 2023 consid. 3.2 et les références citées).

Le plaideur assisté d'un avocat ou lui-même expérimenté voit son obligation de collaborer accrue dans la mesure où il a connaissance des conditions nécessaires à l'octroi de l'assistance judiciaire et des obligations de motivation qui lui incombent pour démontrer que celles-ci sont remplies. Le juge n'a de ce fait pas l'obligation de lui octroyer un délai supplémentaire pour compléter sa requête d'assistance judiciaire lacunaire ou imprécise (arrêt du Tribunal fédéral 4A_480/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.2). Ainsi, lorsque le requérant assisté ne satisfait pas (suffisamment) à ses obligations, la requête peut être rejetée faute d'être suffisamment étayée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_694/2022 du 23 janvier 2023 consid. 4.1).

3.1.3. Selon l'art. 143 al. 1 CPC (applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ), les actes doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai soit au tribunal soit à l'attention de ce dernier, à la poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse. Le délai est sauvegardé si l'acte est remis à La Poste Suisse le dernier jour du délai en cours à minuit (ATF 147 IV 526 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_466/2022 du 10 février 2023 consid. 2).

Le principe général de l'art. 8 CC est aussi applicable en droit de procédure. Le fardeau de la preuve de la notification d'un acte et de la date à laquelle celle-ci a été effectuée incombe en principe à celui qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 122 I 97 consid. 3b p. 100 ; 114 III 51 consid. 3c et 4 p. 53 ss; arrêt du Tribunal fédéral 4A_250/2008 du 18 juin 2008 consid. 3.2.1).

La preuve stricte de l'expédition de l'acte procédural en temps utile peut résulter du sceau postal, du récépissé de l'envoi posté en recommandé, de l'accusé de réception obtenu au guichet postal, de la quittance imprimée par l'automate MyPost 24 ou de tout autre moyen adéquat, tel le témoignage d'une ou plusieurs personnes (arrêt du Tribunal fédéral 4A_466/2022 du 10 février 2023 consid. 2). Le pli recommandé permet de ménager un moyen de preuve incontestable ; la loi n’en impose pas l’usage, mais celui qui y renonce s’expose au risque de voir la date de l’expédition, voire l’expédition elle-même, remise en question (arrêt du Tribunal fédéral 2C_404/2011 du 21 novembre 2011 consid. 2.3).

3.2. En l'espèce, il est tout d'abord relevé que le recourant ne reproche pas au premier juge d'avoir considéré que sa requête d'assistance juridique du 8 juin 2023 était lacunaire. Il soutient cependant avoir envoyé deux courriers en réponse au greffe de l'assistance juridique afin de la compléter. De son côté, le vice-président du Tribunal civil a indiqué n'avoir aucune trace desdits courriers dans son dossier.

En tout état, le recourant n'apporte pas la preuve, alors qu'il en supporte le fardeau, d'avoir effectivement remis les deux courriers susmentionnés à La Poste Suisse, étant observé qu'il affirme les avoir expédiés les 7 et 21 juillet 2023, soit après l'échéance du délai fixé au 3 juillet 2023, dont la prolongation avant l'échéance n'a pas été demandée.

Il s'ensuit que faute d'avoir apporté la preuve tant de la date d'expédition des courriers à l'Autorité précédente que de leur expédition elle-même, le recourant n'a pas démontré avoir complété sa requête d'assistance judiciaire lacunaire, de sorte que la décision entreprise doit être confirmée.

Infondé, le recours sera rejeté.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

Déclare irrecevable le recours formé le 12 septembre 2023 par A______ contre la décision rendue le 30 août 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/1691/2023.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me B______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.