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Décisions | Assistance juridique

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AC/2237/2020

DAAJ/52/2022 du 03.06.2022 sur AJC/874/2022 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/2237/2020 DAAJ/52/22

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU VENDREDI 3 JUIN 2022

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié p.a. B______, ______,

représenté par Me Raphaël ROUX, avocat, Boulevard Saint-Georges 72, case postale, 1211 Genève 8,

 

contre la décision du 23 février 2022 de la Vice-présidente du Tribunal de première instance.

 

 

 


EN FAIT

A.           a. Le 18 décembre 2018, A______ (ci-après : le recourant), né à C______ le ______ 1981, ressortissant du Kosovo, a déposé auprès de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), une demande de régularisation de ses conditions de séjour.

b. Par décision du 13 juillet 2020, l'OCPM a refusé d'accéder à la requête du recourant et, par conséquent, de soumettre son dossier avec un préavis positif au Secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), et a prononcé son renvoi de Suisse, avec un délai au 13 septembre 2020 pour quitter le territoire.

Selon l'OCPM, le recourant ne répondait pas aux critères de l'opération Papyrus (séjour continu de dix ans dans sa situation, devant être documenté, intégration réussie, niveau A2 de français, absence de condamnation pénale et indépendance financière), notamment faute d'intégration socio-professionnelle réussie et d'indépendance financière puisqu'il était aidé par l'Hospice général (ci-après : l'hospice).

Il ne remplissait pas davantage les critères relatifs à un cas individuel d'extrême gravité au sens des art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr) (dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2019) et 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) :

-          La durée de son séjour en Suisse (depuis le 15 juillet 2010), inférieure à dix ans, devait être relativisée par rapport aux nombreuses années passées au Kosovo (dont toute son adolescence);

-          Une intégration socioculturelle particulièrement remarquable n'avait pas été démontrée puisque le recourant était aidé par l'hospice et qu'il n'avait pas remis d'attestation relative à son niveau de français;

-          Aucun certificat médical, justifiant de graves problèmes de santé et de l'absence de soins permanents disponibles dans son pays d'origine, n'avait été produit;

-          Le recourant avait formé des actions en paiement auprès de la juridiction des prud'hommes, à la suite d'un accident de travail survenu le 22 juillet 2017 (chute d'une échelle, fracture du pied, opérations chirurgicales et incapacité totale de travail selon ses allégations) et sollicité des prestations auprès de l'assurance obligatoire accident, mais l'instruction de ces procédures n'imposait pas sa présence en Suisse;

-          Le recourant s'était rendu à trois reprises dans son pays d'origine depuis le dépôt de sa demande, ce qui tendait à démontrer l'existence d'attaches importantes au Kosovo, de sorte qu'une réintégration dans son pays d'origine ne devrait pas avoir de graves conséquences sur sa situation personnelle, indépendamment des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place.

c. Le recourant a sollicité le 15 août, et obtenu le 7 septembre 2020 l'assistance juridique pour former recours contre la décision de l'OCPM du 13 juillet 2020 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Par recours daté du 14 septembre 2020, le recourant a notamment reproché à l'OCPM l'excès de son pouvoir d'appréciation et son formalisme excessif, dès lors que sa dépendance financière à l'aide sociale était temporaire (dans l'attente de la décision de l'assurance accident obligatoire, subséquente aux procédures prud'homales) et que sans l'accident, survenu sans sa faute, il aurait continué à travailler et n'aurait pas émargé à l'assistance publique. Il avait en outre été injustement exclu de l'opération Papyrus compte tenu de son état de santé, ce qui était discriminatoire.

d. Par jugement JTAPI/38/2022 du 18 janvier 2022, le TAPI a rejeté le recours, considérant que l'OCPM n'avait violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation.

Le TAPI a confirmé que le recourant ne remplissait pas les conditions strictes et cumulatives de l'opération Papyrus faute de totaliser dix ans de séjour continu en Suisse.

Même si le recourant n'avais jamais émargé à l'assistance sociale avant son accident, n'avait ni casier judiciaire ni dettes, son intégration professionnelle ne pouvait être qualifiée d'exceptionnelle et ses connaissances linguistiques n'étaient pas attestées par un "certificat de niveau A2".

Né au Kosovo et y ayant vécu jusqu'à l'âge de 29 ou 30 ans, il avait manifestement conservé de fortes attaches avec sa patrie et avait, depuis le dépôt de sa demande, obtenu à trois reprises un visa de retour pour visiter sa famille.

Les motifs médicaux ne justifiaient pas à eux seuls l'octroi d'un permis de séjour dès lors qu'il n'avait pas démontré que son suivi médical serait indisponible au Kosovo. En outre, l'octroi d'une éventuelle rente d'invalidité était exportable au Kosovo en raison d'une convention entre cet État et la Suisse.

Enfin, l'exécution de son renvoi était raisonnablement exigible dans la mesure où le Kosovo disposait d'un encadrement médical adéquat pour poursuivre, si nécessaire, le traitement entamé en Suisse. Les procédures pendantes relatives au montant de ses indemnités journalières et à la détermination d’un éventuel taux d’invalidité ne justifiaient pas la présence du recourant en Suisse.

B.            a. Par courrier du 21 janvier 2022, le conseil du recourant a sollicité l'extension de l'assistance judiciaire afin de former recours contre ce jugement du 18 janvier 2022 auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la Chambre administrative).

À l'appui de cette demande, le recourant a soutenu que le TAPI et l'OCPM avaient "abusé de leur pouvoir d'appréciation en n'examinant pas son cas à l'aune des critères développés durant l'opération Papyrus". À son sens, le fait de retenir qu'il soit sans emploi et à l'aide sociale était "un motif discriminatoire", dès lors que son inactivité résultait d'une situation d'invalidité. Il estimait que le TAPI – qui avait suspendu la procédure par décision du 1er mars 2021 – aurait dû prolonger cette suspension jusqu'à droit connu sur son statut du point de vue des assurances sociales.

b. Par messagerie sécurisée du jeudi 17 février 2022, le conseil du recourant a relancé le Greffe de l'Assistance juridique (ci-après : GAJ) au sujet de l'extension de sa requête, au regard de l'échéance du délai au lundi 21 février 2022 pour former recours auprès de la Chambre administrative. Il expliquait avoir téléphoné au GAJ le 15 février 2022 et que celui-ci lui avait répondu ne pas être lié par ce délai, ni être disposé à lui indiquer l'état de traitement de sa requête. Selon ce conseil, le fait de limiter l'octroi de l'assistance judiciaire à la première instance et de ne pas statuer dans les plus brefs délais pendant le délai de recours était constitutif d'un déni de justice qui engageait la responsabilité de l'État.

C.           Par décision du 23 février 2022, notifiée le 2 mars 2022, la Vice-présidente du Tribunal de première instance a rejeté la requête d'assistance judiciaire précitée, au motif que la cause du recourant paraissait dénuée de chances de succès.

Selon la Vice-présidente du Tribunal, le séjour continu en Suisse du recourant ne totalisait pas dix années, ce qu'il admettait, de sorte qu'il ne pouvait pas se prévaloir de l'opération Papyrus.

Le TAPI avait retenu que le recourant n'avait jamais émargé à l'aide sociale avant son accident, mais, en dépit de cela et du fait qu'il n'avait ni casier judiciaire ni dettes, il ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration professionnelle exceptionnelle en Suisse.

Enfin, la procédure en cours concernant un éventuel droit à une rente d'invalidité (examens médicaux, audiences) n'imposait pas sa présence en Suisse, puisqu'il pouvait y effectuer des séjours touristiques ou être représenté par un mandataire.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 22 mars 2022 à la Présidence de la Cour de justice. Le recourant conclut, préalablement, à ce qu'il soit renoncé à toute avance de frais concernant la procédure de recours contre la décision de la Vice-présidente du Tribunal de première instance du 23 février 2022. Principalement, il conclut à l'annulation de la décision de la Vice-présidente du Tribunal de première instance du 23 février 2022, à la constatation du déni de justice, à la réserve de ses prétentions en dommages-intérêts, à l'octroi de l'assistance judiciaire dès le 21 janvier 2022 aux fins de la procédure A/1______/2020 (recours devant la Chambre administrative), avec suite de dépens.

Certes, le recourant ne remplit pas tous les critères de régularisation d'un statut de séjour tels que développés par l'opération Papyrus en raison de son incapacité de travail de longue durée non fautive qui l'exclut de facto du critère d'emploi. Néanmoins, sa situation n'a été envisagée ni par le législateur, ni par les autorités migratoires, de sorte qu'il appartient à la jurisprudence de trancher son cas.

Il reproche à la Vice-présidente du Tribunal une attitude contradictoire en accordant l'assistance juridique en première instance et en la refusant pour la seconde instance. À son sens, ce comportement est en outre déloyal car l'Autorité de première instance ne s'est pas prononcée avant l'échéance du délai de recours alors que la nature de l'affaire l'imposait.

Certes, les juridictions avaient pris du retard en raison de la pandémie, mais les délais légaux n'avaient pas été suspendus et celles-là n'avaient pas octroyé d'aménagements particuliers aux justiciables; "le principe d'égalité des armes et de bonne foi impose de tenir les uns et les autres à des standards équivalents". Son devoir professionnel de conseil du recourant justifiait de sauvegarder le délai de recours et les "circonstances du cas permettaient en outre de bonne foi, de partir du principe que l'assistance juridique serait octroyée pour couvrir les activités de deuxième instance".

"En refusant la couverture au-delà du délai de recours, l'Autorité de première instance a commis un déni de justice et violé le principe de la bonne foi".

Le recourant produit des pièces nouvelles (nos 11 et 12).

b. Dans ses observations du 12 avril 2022, la Vice-présidente du Tribunal de première instance réfute l'existence d'un déni de justice et conclut au rejet du recours.

Elle rappelle que le recourant ne justifie pas d'une période de dix ans continue en Suisse, condition cumulative nécessaire à l'obtention d'une autorisation de séjour.

S'agissant du déni de justice reproché, la Vice-présidente du Tribunal indique que le Code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272), applicable en matière administrative à titre de droit cantonal supplétif, prévoit à l'art. 119 al. 5 que l'assistance judiciaire doit faire l'objet d'une nouvelle requête pour la procédure de recours et que le dépôt d'une requête d'assistance juridique ne suspend pas les délais légaux (comme les délais de recours). Assistée du GAJ, elle faisait son possible pour tenir compte des délais auxquels étaient tenus les avocats, mais il arrivait, selon les circonstances, que cela ne soit pas possible, sans que la responsabilité de l'État ne soit engagée.


 

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidente de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 10 al. 3 LPA). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours dans un délai de 30 jours (art. 10 al. 3 LPA, 130, 131 et 321 al. 1 CPC, applicables par renvoi des art. 10 al. 4 LPA et 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 du 15 juin 2011 consid. 2.2).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi, étant au surplus relevé que le déni de justice peut faire en tout temps l'objet d'un recours lorsque les autorités demeurent inactives (arrêt du Tribunal fédéral 5A_134/2012 consid. 4.4 ; art. 319 let. c CPC).

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 10 al. 3 LPA), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 précité). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

1.4. Il n'y a pas lieu d'entendre le recourant, celui-ci ne le sollicitant pas et le dossier contenant suffisamment d'éléments pour statuer.

2.             À teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions et les allégations de faits nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'une procédure de recours.

Par conséquent, les allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance et les pièces nouvelles ne seront pas pris en considération. Les pièces du recourant nos 11 et 12 nouvellement produites et les faits y relatifs sont, dès lors, irrecevables.

3.             Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1; ATF 128 I 225 consid. 2.5.3).

Pour déterminer les chances de succès d'un recours, le juge peut prendre en considération la décision de première instance, en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce qu'une partie voit quasiment rendu impossible le contrôle d'une décision qu'elle conteste (arrêt du Tribunal fédéral 5A_572/2015 du 8 octobre 2015 consid. 4.1).

La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 133 III 614 consid. 5).

L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

4. 4.1. Le 1er janvier 2019, est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la LEI. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 2C_841/2019 du 11 octobre 2019 consid. 3; 2C_737/2019 du 27 septembre 2019 consid. 4.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit, étant précisé que la plupart des dispositions de la LEI sont demeurées identiques.

4.2. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

4.3. L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment du dépôt de la demande d'autorisation de séjour, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives du Secrétariat d'État aux migrations, domaine des étrangers, 2013, état au 12 avril 2017, ch. 5.6.12 [ci-après : directives SEM])

4.4. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A_543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3; C-1240/2012 du 24 juillet 2014 consid. 5.3; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5d; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4d).

4.5. L'opération Papyrus développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères.

Les critères pour pouvoir bénéficier de cette opération sont les suivants selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter (ATA/877/2021 du 31 août 2021) :

- avoir un emploi;

- être indépendant financièrement;

- ne pas avoir de dettes;

- avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires; le séjour doit être documenté;

- faire preuve d'une intégration réussie (minimum niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment);

- absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

Le livret précise en outre que les dossiers de régularisation déposés jusqu'au 31 décembre 2018 seront instruits selon les critères précités et la pratique mise en œuvre dans le cadre du projet pilote Papyrus.

Dans le cadre du projet pilote Papyrus, le SEM a procédé à une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité dans le strict respect des dispositions légales et de ses directives internes. Il ne s'agit pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voit pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur parce qu'elle séjourne et travaille illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation est constitutive d'un cas de rigueur en raison notamment de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

L'« opération Papyrus » étant un processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, il n'emporte en particulier aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

Selon le site internet de l'État de Genève, le projet pilote Papyrus a pris fin le 31 décembre 2018, date limite pour le dépôt des dossiers de régularisation auprès de l'OCPM (ATA/340/2020 du 7 avril 2020 consid. 9c).

4.6. En l'espèce, le recourant paraît ne pas remplir certains critères pour pouvoir bénéficier de l'opération Papyrus, ce qu'il reconnaît d'ailleurs lui-même dans son recours.

En effet, selon la décision de l'OCPM du 13 juillet 2020 et le jugement du TAPI du 18 janvier 2022, le recourant ne peut pas se prévaloir des dix ans de séjour continu en Suisse, puisque les documents fournis ne permettent pas de remonter à une date antérieure au 15 juillet 2010.

Ne remplissant pas l'une des conditions cumulatives de l’opération Papyrus, le recourant ne semble ainsi pas pouvoir se prévaloir d’une régularisation de son séjour fondée sur ce motif. Par conséquent, le fait qu'il n'occupe pas d'emploi – autre condition cumulative de l'opération Papyrus –, sans sa faute, n'apparaît, à première vue, pas pertinent dans le cadre l'analyse de cette problématique.

En outre, et dans la mesure où l'opération Papyrus constitue une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité, il est également a priori douteux que le recourant puisse obtenir une autorisation de séjour dans le cadre de cet examen. En effet, la durée de son séjour en Suisse devrait être relativisée puisqu'il a été uniquement toléré à la suite du dépôt de la demande de régularisation. Enfin, l'intéressé semble avoir conservé des liens personnels avec son pays d'origine puisqu'il s'y est rendu à trois reprises pour rendre visite à sa famille. Il y a lui-même par ailleurs vécu durant son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte.

Par ailleurs et contrairement à ce que soutient le recourant, il ressort du jugement du TAPI du 18 janvier 2022 que la proposition de l'OCPM de suspendre la procédure par-devant le TAPI avait été commandée par la nécessité de connaître l'état médical du recourant et non pas au motif que sa situation n'avait été envisagée ni par le législateur, ni par les autorités migratoires. D'ailleurs et sur ce point, le TAPI a retenu qu'au vu des certificats médicaux produits, ceux-ci ne nécessitent pas une prise en charge particulièrement lourde ne pouvant être suivie qu'en Suisse.

Enfin, s’il devait à terme se voir reconnaître le droit à une rente AI, elle pourra lui être versée au Kosovo, sur la base et aux conditions prévues par la convention de sécurité sociale liant la Suisse et la République du Kosovo conclue le 8 juin 2018, entrée en vigueur le 1er septembre 2019 (RS 0.831.109.475.1; notamment art. 5 al. 1 et 2; ATA/779/2021 du 27 juillet 2021 consid. 8).

Au vu de ces éléments et prima facie, il est douteux que la chambre administrative considère que le recourant puisse en définitive bénéficier d'une régularisation de ses conditions de séjour.

Par conséquent, c'est de manière conforme au droit que l'autorité de première instance a refusé l'extension de l'assistance juridique au recourant, au motif qu'un recours à l'encontre du jugement du TAPI précité paraissait dénué de chances de succès.

5. 5.1. Aux termes de l'art. 119 al. 5 CPC, l'assistance judiciaire doit faire l'objet d'une nouvelle requête pour la procédure de recours (arrêt du Tribunal fédéral 5A_267/2013 du 10 juin 2013 consid. 4.3). L'assistance juridique peut être limitée à certains actes de procédure ou démarches déterminées ainsi que dans la quotité des heures nécessaires à l'activité couverte. Toute procédure ou démarche connexe doit faire l'objet d'une nouvelle requête (art. 3 al. 1 RAJ).

En procédure de recours, les conditions de l'assistance judiciaire – chances de succès et indigence – doivent être examinées à nouveau, en principe selon les circonstances au moment du dépôt de la requête pour la procédure de recours (arrêts du Tribunal fédéral 5A_502/2017 du 15 août 2017 consid. 2.3; 5A_267/2013 précité consid. 4.3).

Dès lors qu'une nouvelle requête est nécessaire, elle est en principe soumise aux mêmes exigences formelles que celle déposée en première instance, en particulier en ce qui concerne le devoir de collaboration quant à la situation de revenus et de fortune selon l'art. 119 al. 2 1ère phr. CPC (arrêt du Tribunal fédéral 5A_267/2013 précité consid. 4.4).

Le seul fait que le recourant ait obtenu l'assistance judiciaire en première instance ou dans d'autres procédures n'est pas décisif (ATF 122 III 392 consid. 3a; DAAJ/28/2020 du 6 avril 2020 consid. 2.1.3).

5.2. Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., commande aux autorités comme aux particuliers de s'abstenir, dans les relations de droit public, de tout comportement contradictoire ou abusif (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2; arrêts du Tribunal fédéral 2C_832/2013 du 18 mars 2014 consid. 5.1 et 1C_495/2013 du 7 janvier 2014 consid. 5). Il découle de ce principe que l'administration et les administrés doivent se comporter réciproquement de manière loyale (ATF 131 II 627 consid. 6.1, 129 I 161 consid. 4, 129 II 361 consid. 7.1; ATA/1222/2018 du 13 novembre 2018 consid. 8).

5.3. En l'occurrence, comme vu ci-dessus, la loi exige le dépôt d'une nouvelle requête d'assistance judiciaire pour la procédure de recours. En outre, le seul fait que le recourant l'ait obtenue par-devant le TAPI n'est pas décisif, puisque les chances de succès doivent à nouveau être examinées, comme le retient la jurisprudence du Tribunal fédéral susmentionnée.

Dès lors, la Vice-présidente du Tribunal de première instance n'a aucunement adopté un comportement contradictoire au vu des éléments dont elle avait connaissance aux fins de statuer, parmi lesquels figurent le jugement du TAPI du 18 janvier 2022.

6 6.1. Comme vu ci-dessus, l'art. 119 al. 5 CPC exige le dépôt d'une nouvelle requête d'assistance judiciaire pour la procédure de recours.

6.2. Commet un déni de justice proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. l'autorité qui ne statue pas ou n'entre pas en matière sur une requête ou un grief qui lui est soumis dans les formes et délais légaux, alors qu'elle était compétente pour le faire (ATF 135 I 6 consid. 2.1; 134 I 229 consid. 2.3).

6.3. La doctrine précise qu'en deuxième instance, les parties ne disposent généralement que d’un bref délai légal non prolongeable, de dix ou trente jours, pour décider d’une part si elles entendent recourir et pour déposer d’autre part dans l’affirmative un appel ou un recours motivé. Un requérant ne pourra dans ces conditions presque jamais avoir obtenu auparavant déjà la nouvelle décision exigée par l’art. 119 al. 5 CPC. En conséquence, en deuxième instance cantonale les parties devront le plus souvent agir sans savoir si l’assistance judiciaire leur sera accordée, tout en déposant simultanément à leur appel, recours ou réponse une requête d’assistance dont l’effet rétroactif en cas d’acceptation devrait aller pratiquement de soi (Tappy, Commentaire romand CPC, 2ème édition, 2019, n. 22 ad art. 119 CPC et les références citées).

6.4. En l'occurrence, comme le relève à juste titre la Vice-présidente du Tribunal de première instance dans ses observations du 12 avril 2022, le dépôt d'une nouvelle requête d'assistance juridique ne suspend pas les délais légaux.

En outre, au vu du bref délai légal non prolongeable de dix ou trente jours pour recourir contre une décision ou un jugement du TAPI, il est difficile pour un recourant d'obtenir la nouvelle décision exigée par l’art. 119 al. 5 CPC avant l'échéance dudit délai de recours. Cela est admis par la doctrine précitée, laquelle ne relève d'ailleurs aucun déni de justice ou de violation du principe de la bonne foi par rapport à ce procédé.

Par ailleurs, dans le cadre de l'examen de cette seconde requête d'assistance juridique, les chances de succès doivent être à nouveau analysées, ce qui implique logiquement un travail préalable de la part du mandataire.

En conséquence, en deuxième instance cantonale, le recourant doit, le plus souvent, agir sans savoir si l’assistance judiciaire lui sera accordée, dans les délais de l'art. 62 LPA, le cas échéant par l’intermédiaire de l’avocat d’office ou de choix ayant procédé pour lui en première instance, tout en déposant simultanément à son recours une requête d’assistance judiciaire.

L'autorité de première instance n'a ainsi commis aucun déni de justice ou adopté un comportement déloyal en ne statuant pas sur la nouvelle requête d'assistance juridique soumise par le recourant avant l'échéance du délai de recours contre le jugement du TAPI du 18 janvier 2022.

Partant, le recours, entièrement mal fondé, sera rejeté.

7. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Par ailleurs, il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens, vu l'issue du recours.

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PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 23 février 2022 par la Vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/2237/2020.

Au fond :

Rejette le recours.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me Raphaël ROUX (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière de droit public; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 82 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.