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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/15/2024

ACPR/234/2024 du 09.04.2024 ( PSPECI ) , REJETE

Descripteurs : MESURE THÉRAPEUTIQUE INSTITUTIONNELLE;RISQUE DE RÉCIDIVE
Normes : CP.59

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/15/2024 ACPR/234/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 9 avril 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par
Me Marwan DOUIHOU, avocat, Etude Crettaz et Moutinot, boulevard des Philosophes 17, case postale 89, 1211 Genève 4,

recourant,


contre la décision de passage en milieu fermé rendue le 18 janvier 2024 par le Service de l'application des peines et mesures,

et

LE SERVICE DE L'APPLICATION DES PEINES ET MESURES, case postale 1629, 1211 Genève 26,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 1er février 2024, A______ recourt contre la décision du 18 janvier 2024, notifiée le 22 suivant, par laquelle le Service de l'application des peines et mesures (ci-après: SAPEM) a révoqué l'exécution de sa mesure thérapeutique institutionnelle en milieu ouvert et ordonné que celle-ci soit exécutée en milieu fermé.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, préalablement à l'apport du dossier du SAPEM, principalement, à l'annulation de la décision querellée et, subsidiairement, au renvoi de la cause pour nouvelle décision.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par jugement du Tribunal correctionnel du 24 août 2017 (JTCO/101/2017), A______ a été déclaré coupable d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, pour avoir, alors qu'il était hospitalisé à [la clinique psychiatrique] C______, entretenu une relation sexuelle avec une autre patiente en sachant que celle-ci était endormie, sous sédatifs.

Il a été condamné à une peine privative de liberté de quinze mois, laquelle a été suspendue au profit d'un traitement institutionnel.

b. Une expertise psychiatrique avait été diligentée en amont de ce jugement, par le Centre universitaire romand de médecine légale (ci-après: CURML).

À teneur du rapport, rendu le 16 mai 2017, A______ souffrait d'un trouble schizo-affectif, de type mixte, d'un trouble organique de la personnalité, à savoir un syndrome frontal, et de troubles mentaux et du comportement liés à l'utilisation de dérivés du cannabis, avec un syndrome de dépendance. Le risque de récidive était important, en particulier pour les infractions de nature sexuelle.

c. Par décision du 22 novembre 2017, le SAPEM a ordonné l'exécution de la mesure en milieu fermé.

Jusqu'alors incarcéré à la prison de B______, A______ a été transféré, le 11 juin 2018, aux Établissements [pénitentiaires] de D______, étant précisé que [l'établissement pénitentiaire] E______ a refusé de l’accueillir car il ne correspondait pas aux critères d'admission.

d. Le 22 janvier 2019, le Service de probation et d'insertion (ci-après: SPI) a rendu une évaluation criminologique de A______.

Une récidive était envisageable en cas de recrudescence des symptômes psychiatriques, de non-compliance au traitement médicamenteux ou de rupture thérapeutique de façon plus générale. La consommation de toxiques (alcool ou stupéfiants) pouvait avoir un impact sur sa désinhibition sexuelle et entrainer ainsi un nouveau passage à l'acte. Les femmes en situation de vulnérabilité représentaient des victimes potentielles s'il se trouvait en état de décompensation. Un transfert dans un établissement ouvert nécessitait une vigilance concernant, en particulier, l'abstinence aux toxiques. Le risque de récidive persistait, mais une évolution positive était possible dans un environnement plus sécurisant.

e. Le 10 juin 2021, le SAPEM a ordonné le passage en milieu ouvert de A______.

Ce dernier a ainsi été transféré, le 16 suivant, au Centre G______, à F______ (VS).

f. Le 11 mai 2022, le G______ a signalé au SAPEM qu'un résident, particulièrement vulnérable, avait affirmé avoir entretenu des relations sexuelles avec A______, lesquelles n'étaient pas toutes consenties. Les faits ont été dénoncés par le G______ au Ministère public valaisan.

g. Par décision du 20 mai 2022, le SAPEM a ordonné le passage en milieu fermé de A______.

L'autorité a considéré que les débuts du séjour en milieu ouvert du précité s'étaient révélés "prometteurs" mais la stabilité clinique était "précaire", de même que sa capacité à "résister à son appétence aux toxiques". A______ évoluait ainsi "sur le fil" depuis de nombreux mois, dans un milieu ouvert qui le poussait dans ses retranchements. Compte tenu de l'incapacité de l'intéressé à respecter les limites, de sa faculté à prendre l'ascendant sur les personnes ne démontrant pas une capacité suffisante à résister à son insistance et des allégations de relations sexuelles non consenties, A______ représentait "une grave mise en danger de l'ordre public et de la sécurité" qui ne pouvait être contenue en milieu ouvert.

h. Le 15 août 2022, A______ est entré à E______.

i. Dans l'intervalle, le Ministère public du Valais a, par ordonnance du 11 juillet 2022, refusé d'entrer en matière sur les faits dénoncés par le G______, au motif que la supposée victime avait affirmé ne pas avoir été contrainte par A______, mais avoir cédé à ses sollicitations répétées.

j. Le 16 mars 2023, le SPI a rendu une nouvelle évaluation criminologique.

À teneur de celle-ci, A______ présentait un risque de violence sexuelle faible à modéré. Un passage en milieu ouvert augmentait ce risque, de par l'allègement de l'encadrement, l'exposition aux toxiques et la potentielle vulnérabilité des autres patients ou résidents. Il était nécessaire de préparer l'intéressé aux changements et, sous la réserve du maintien de la bonne évolution observée, le récidive ne devait pas "représenter une inquiétude outre mesure". Pour cela, l'intéressé devait continuer à s'investir dans la prise en charge proposée et développer des notions d'acceptation du refus et de respect des limites et du consentement d'autrui, afin de maîtriser son impulsivité, notamment sexuelle. A______ devait également approfondir ses réflexions concernant les toxiques.

k. Par jugement du 27 avril 2023 (JTPM/282/2023), le Tribunal d'application des peines et des mesures a ordonné la poursuite du traitement institutionnel de A______ jusqu'au prochain contrôle annuel, étant rappelé que la mesure était valable jusqu'au 24 août 2025.

Il résultait de l'ensemble du dossier que le traitement en cours était adapté à la situation et qu'il avait permis d'obtenir une évaluation favorable, bien que fluctuante, de l'état de A______. Les incidents émaillant son parcours, comme son retour en milieu fermé, attestaient de la nécessité dudit traitement. L'intéressé devait impérativement poursuivre son investissement dans les soins et son travail sur l'appétence aux toxiques et la compréhension de son mode de relation avec lui-même et les autres (y compris la notion de consentement), afin de consolider cette stabilité psychique.

l. Après plusieurs demandes de A______, le SAPEM a rendu, le 14 novembre 2023, une décision ordonnant derechef son passage en milieu ouvert.

Les difficultés rencontrées par A______ lors du premier séjour en milieu ouvert avaient pu faire l'objet d'un travail approfondi. Le risque de commission d'une infraction apparaissait suffisamment contenu dans un cadre différent de celui offert par le G______, lequel était "probablement un lieu trop stimulant". Il n'y avait, en outre, "pas de doute quant à l'absence de dangerosité du concerné dans le cadre" de l'allégement de la mesure.

m. Le 21 novembre 2023, le SAPEM a demandé le transfert de A______ à l'Hôpital de psychiatrie de C______.

n. Le 9 janvier 2024, le SAPEM a, à nouveau, ordonné, à titre de mesure conservatoire, le placement de A______ en milieu fermé.

Il avait été informé, le jour-même, que le précité avait "agressé sexuellement" une patiente de C______. Selon trois témoins, cette dernière avait d'abord consenti à une relation sexuelle, avant de se rétracter. A______ l'avait alors poussée dans les toilettes et agressée. Le maintien en milieu ouvert n'était plus compatible avec les exigences de sécurité publique.

o. Invité à se déterminer, A______ a contesté, le 16 janvier 2024, sous la plume de son conseil, les faits d'agression sexuelle. Il ne comprenait pas comment de telles accusations, dont la teneur exacte, le contexte et l'identité des personnes impliquées étaient inconnus, avaient pu conduire à son transfert à B______ sans investigation préalable, notamment en lien avec la crédibilité des témoignages rapportés. Il était, en effet, notoire que C______ accueillait des patients souffrant de graves troubles mentaux et pouvant être sujets à des états confusionnels ou à des hallucinations. Le SAPEM ne devait pas agir dans la précipitation et en dépit de la présomption d'innocence, au risque de réitérer la même "erreur" que lors de son placement en milieu fermé après la dénonciation du G______.

p. Dans l'intervalle, soit le 15 janvier 2024, le Service des mesures institutionnelles (ci-après: SMI) a transmis au SAPEM un rapport médical concernant le séjour de A______ à C______.

Malgré sa volonté de maintenir son abstinence et d'avancer dans sa mesure, A______ avait consommé de la cocaïne le 24 décembre 2023. En outre, ce dernier avait verbalisé des envies sexuelles et s'était présenté à plusieurs reprises auprès d'une patiente de l'unité afin de lui proposer des relations intimes. Il lui avait alors été rappelé l'interdiction de telles relations dans le cadre de l'hôpital et celui-ci avait maintenu un comportement adéquat, en montrant toutefois peu d'adhésion aux propositions thérapeutiques.

q. Dans un courriel envoyé le lendemain au SAPEM, le SMI a ajouté que le 31 décembre 2023, A______ avait fugué cinq minutes. L'adhésion aux soins de ce dernier était partielle et insuffisante par rapport aux engagements pris.

C. Dans la décision querellée, le SAPEM retient que A______ avait enfreint le cadre de son placement à C______ un mois à peine après son arrivée, en fuguant, en consommant de la cocaïne et en se montrant insistant avec une patiente. L'intéressé refusait également tout travail d'accompagnement dans ses difficultés sur le plan addictologique et sexuel. Or, la consommation d'alcool ou de stupéfiants pouvait avoir un impact sur la désinhibition sexuelle et favoriser un nouveau passage à l'acte. Si le travail réalisé au sein de E______ avait permis de bons espoirs quant à la suite du traitement thérapeutique, il n'en était finalement rien. L'absence d'adhésion concernant "les deux domaines les plus sensibles" du parcours du précité, à savoir l'addiction et les relations intimes et interpersonnelles, était "plus que préoccupante". Si les faits signalés par le G______ n'étaient pas constitutifs d'une infraction pénale, ils étaient néanmoins révélateurs du fonctionnement de A______. Concernant la crédibilité des témoins ayant dénoncé les faits à C______, il était "extrêmement improbable qu'ils aient souffert tous trois de la même hallucination au même moment". Il n'appartenait de toute façon pas au SAPEM d'investiguer la véracité de ces témoignages mais aux autorités de poursuites pénales. Au vu du risque qualifié de récidive présenté par A______, un retour en milieu fermé s'imposait.

D. a. Dans son recours, A______ conteste l'existence d'un risque de récidive. La position du SAPEM reposait intégralement sur les allégations, non investiguées, d'agression sexuelle, découlant de supposés témoins dont "la capacité de discernement [faisait] potentiellement défaut". Le dossier ne permettait pas de savoir si ces témoignages étaient distincts, ou provenaient d'une personne l'ayant raconté à deux autres. Il apparaissait en tous cas qu'aucune plainte n'avait été déposée par la prétendue victime. Le SAPEM s'appuyait également sur des "éléments périphériques", comme un épisode de consommation de stupéfiants, ainsi que le manque de collaboration dans le cadre de certains suivis thérapeutiques. Pourtant, le risque de récidive avait été qualifié de faible à modéré en mars 2023 et l'autorité intimée affirmait encore, le 14 novembre 2023, qu'elle n'avait aucun doute quant à l'absence de dangerosité le concernant. Il avait déjà fait l'objet d'une révocation hâtive de l'exécution de sa mesure en milieu ouvert, sur la base de "fausses accusations" à son encontre et qui avait conduit à sa réintégration en milieu fermé pour une durée de dix-huit mois environ. Cette durée devait être mise en perspective avec la peine de privation de liberté de quinze mois à laquelle il avait été initialement condamné, suspendue au profit d'une mesure thérapeutique. Enfin, si un retour à C______ devait s'avérer irréalisable, d'autres alternatives moins incisives restaient plus propices à son évolution.

b. Le SAPEM maintient sa décision et explique qu'une procédure pénale était dorénavant ouverte contre A______ pour contrainte sexuelle (P/1______/2024). Les allégations des témoins étaient donc suffisamment "claires et concrètes" pour justifier l'ouverture d'une enquête pénale. En outre, le précité ne pouvait pas se plaindre de son passage en milieu fermé ordonné le 20 mai 2022 puisque, à l'époque, il n'avait pas recouru contre cette décision. Globalement, le risque de récidive était considéré comme accru en cas de passage en milieu ouvert, raison pour laquelle un suivi était exigé par les intervenants. Au vu du parcours de A______, de son refus de poursuivre le travail sur ses difficultés face aux toxiques et aux relations interpersonnelles et de la reprise de la consommation de stupéfiants, les allégations de contrainte sexuelle sur une personne vulnérable, constatée par trois témoins, apparaissaient suffisantes pour considérer le risque de commission d'infraction comme étant concret, imminent et hautement probable.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours et constate que le passage en milieu ouvert de A______ s'était soldé par un échec, ce dernier ayant démontré, par son comportement, qu'il présentait un risque actuel et concret de nouveau passage à l'acte.

d. Dans sa réplique, A______ considère que l'affirmation du SAPEM selon laquelle les allégations des témoins seraient "claires et concrètes" violait le principe de la présomption d'innocence. En outre, l'enquête pénale avait été ouverte après le dépôt du recours. Quoiqu'il en soit, le SAPEM n'avait pas considéré d'autres alternatives à la réintégration en milieu carcéral, violant ainsi le principe de la proportionnalité.

EN DROIT :

1.             1.1. Conformément à l'art. 128 al. 2 let. a et al. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05), la Chambre de céans exerce les compétences que le CPP et la loi d'application du Code pénal suisse et d'autres lois fédérales en matière pénale du 27 août 2009 (LaCP ; RS E 4 10) lui attribuent.

1.2. En vertu de la délégation figurant à l'art. 439 al. 1 CPP, le législateur genevois a attribué à la Chambre pénale de recours la compétence de statuer sur les recours dirigés contre les décisions rendues par le département, ses offices et ses services conformément à l'art. 40 LaCP (art. 42 al.1 let. a LaCP). Les procédures de recours sont notamment régies par les art. 379 à 409 CPP (art. 42 al. 3 LaCP).

1.3. Le département est compétent pour prendre toutes les décisions relatives à l'exécution des peines privatives de liberté et des mesures entraînant une privation de liberté (art. 74 à 91 CP), à l'exclusion des décisions visées aux art. 75 al. 6 et 86 à 89 CP (art. 5 al. 2 let. h LaCP; art. 11 al. 1 let. e Règlement sur l'exécution des peines et mesures du 19 mars 2014 [REPM ; RS E 4 55.05]). La loi ne désigne pas l'autorité compétente pour ordonner le placement en milieu fermé selon l'art. 59 al. 3 CP. Selon la jurisprudence, le choix du lieu d'exécution de la mesure thérapeutique institutionnelle constitue une modalité d'exécution de la mesure qui relève de la compétence de l'autorité d'exécution. Aussi, la compétence de placer le condamné dans une institution fermée ou un établissement pénitentiaire appartient à l'autorité d'exécution (ATF 142 IV 1 consid. 2.5; ACPR/679/2023 du 30 août 2023 consid. 3.1).

1.4. En l'espèce, le recours est recevable pour être dirigé contre une décision rendue par le SAPEM, sujette à recours auprès de la Chambre de céans, avoir été déposé dans la forme et le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al 1 CPP) et émaner du condamné visé par la décision déférée, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision entreprise (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le dossier du SAPEM ayant été transmis à la Chambre de céans par cette autorité, la conclusion préalable du recourant est sans objet.

3.             Le recourant conteste son placement en milieu fermé.

3.1. Conformément à l'art. 59 al. 1 CP, lorsque l'auteur souffre d'un grave trouble mental, le juge peut ordonner un traitement institutionnel, si l'auteur a commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble et qu'il est à prévoir que la mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce trouble.

En principe, le traitement institutionnel s'effectue dans un établissement psychiatrique approprié ou dans un établissement d'exécution des mesures (art. 59 al. 2 CP). Il peut toutefois aussi s'effectuer dans un établissement fermé, tant qu'il y a lieu de craindre que l'auteur ne s'enfuie ou ne commette de nouvelles infractions. Il peut aussi être effectué dans un établissement pénitentiaire au sens de l'art. 76 al. 2 CP dans la mesure où le traitement thérapeutique nécessaire est assuré par du personnel qualifié (art. 59 al. 3 CP).

3.2. L'art. 59 al. 3 CP subordonne le traitement dans un établissement fermé à un risque de fuite ou de récidive. Il doit s'agir d'un risque qualifié, puisque toutes les mesures supposent un risque de récidive (cf. art. 56 al. 1 let. b CP). Le risque est qualifié quand il est concret et qu'il est hautement probable que le condamné commette d'autres infractions dans l'établissement ou en dehors de celui-ci. Il s'agit d'un danger qui ne peut être combattu que par le placement dans un établissement fermé. Conformément au principe de la proportionnalité, l'exécution de la mesure dans un établissement fermé suppose une sérieuse mise en danger de biens juridiques essentiels (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1216/2018 du 16 janvier 2019 consid. 1.1; 6B_1243/2017 du 13 mars 2018 consid. 1.1; 6B_319/2017 du 28 septembre 2017 consid. 1.1; 6B_845/2016 du 29 juin 2017 consid. 3.1.2; 6B_1040/2015 du 29 juin 2016 consid. 5.1). 

Le risque de récidive doit être concret et hautement probable, c'est-à-dire résulter de l'appréciation d'une série de circonstances. Il vise la dangerosité interne du prévenu. Il s'agit d'un danger qui ne peut être combattu que par le placement dans un établissement fermé. Au regard du principe de la proportionnalité, le placement dans un établissement fermé ne peut être ordonné, respectivement maintenu, que lorsque le comportement ou l'état du condamné représente une grave mise en danger pour la sécurité et l'ordre dans l'établissement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1216/2018 du 16 janvier 2019 consid. 1.1; 6B_1243/2017 précité consid. 1.1; 6B 319/2017 du 28 septembre 2017 consid. 1.1).

3.3. En l'espèce, il ressort du dossier qu'une procédure pénale (P/1______/2024) a été ouverte récemment contre le recourant, pour des faits survenus le 9 janvier 2024 à l'Hôpital de psychiatrie de C______.

Il est certes exact que la teneur des témoignages à charge du recourant, ainsi que l'avis de la victime potentielle, ne sont, en l'état, pas connus et que celui-ci bénéficie à ce stade de la présomption d'innocence.

Ce nonobstant, les éléments au dossier suffisent, en l'état, à établir que les agissements reprochés au recourant dans le cadre de la procédure susmentionnée présentent des similitudes avec ceux qui ont mené le Tribunal correctionnel à le condamner pour infraction à l'art. 191 CP, ainsi qu'à ceux qui ont donné lieu à un signalement par le G______, même s'ils ont finalement fait l'objet d'une non-entrée en matière. La crédibilité des témoignages qui ont provoqué l'ouverture de cette P/1______/2024 est sans importance à ce stade, puisque le Ministère public semble leur accorder assez de crédit pour ne pas envisager le prononcé immédiat d'une non-entrée en matière. De surcroît, les arguments du recourant pour en contester la probité relèvent de la simple conjecture.

De plus, les soupçons qui pèsent ainsi sur le recourant doivent être mis en perspective avec son parcours et son suivi thérapeutique.

Le SPI soulignait déjà, le 22 janvier 2019, le risque accru de récidive en cas de consommation de toxiques, susceptible d'influer sur ses inhibitions sexuelles, surtout en présence de femmes vulnérables. Le passage du précité dans un environnement moins contraignant nécessitait ainsi une vigilance particulière. Lorsque l'intéressé a été placé en milieu ouvert en novembre 2023, le SAPEM estimait que, dans un cadre adapté, il ne présenterait pas de dangerosité particulière. L'évaluation criminologique du 16 mars 2023 mentionnait également un risque de récidive faible à modéré. Ces considérations ont toutefois été émises sous les réserves – faisant écho à l'évaluation criminologique du 22 janvier 2019 – d'un travail du recourant sur ses problèmes d'addiction et sur les relations intimes et interpersonnelles. Au moment de prolonger la mesure thérapeutique institutionnelle, le Tribunal d'application des peines et des mesures a, dans son jugement du 27 avril 2023, également souligné l'importance d'un tel travail.

Or, selon le rapport médical du SMI du 15 janvier 2024, et son complément du lendemain, le recourant offre une adhésion partielle et insuffisante à son suivi thérapeutique. Surtout, il a consommé des stupéfiants un mois seulement après son arrivée à C______, a avoué s'être montré insistant auprès d'une patiente et se retrouve dorénavant mis en cause pour agression sexuelle.

Dans ces circonstances, les conditions énoncées par le SAPEM et le SPI pour garantir l'absence de dangerosité du recourant dans un milieu ouvert n'apparaissent plus réalisées et les réserves émises par ces autorités à cet égard semblent s'être concrétisées. Au vu des événements récurrents intervenus alors que le recourant se trouvait en milieu ouvert, il existe un risque concret qu'il réitère des actes du même type que ceux pour lesquels il a été condamné.

Compte tenu de ce qui précède, le transfert du recourant en milieu fermé était justifié et proportionné, aucune autre solution n'étant, en l'état, susceptible de contenir le risque de récidive qualifié retenu. Point n'est ainsi besoin d'examiner si le risque de fuite – alternatif – est réalisé.

4.             Justifiée, la décision querellée sera donc confirmée.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au SAPEM et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et
Madame Valérie LAUBER, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

 

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

 

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/15/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00