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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/755/2023

ACPR/793/2023 du 12.10.2023 sur JTPM/584/2023 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : TRAITEMENT AMBULATOIRE;SOLDE DE LA PEINE;RISQUE DE RÉCIDIVE;MESURE THÉRAPEUTIQUE INSTITUTIONNELLE;EXÉCUTION DES PEINES ET DES MESURES;SUSPENSION DE L'EXÉCUTION DE LA PEINE
Normes : CP.63.al1; CP.63.al2; CP.57.al3; CP.62c.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/755/2023 ACPR/793/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 12 octobre 2023

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre le jugement rendu le 25 août 2023 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

 

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 8 septembre 2023, A______ recourt contre le jugement du 25 août 2023, notifié le 28 suivant, par lequel le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après, TAPEM) a prononcé la levée du traitement institutionnel des addictions (ch. 1 du dispositif), ordonné l'exécution du solde de la peine privative de liberté de 18 mois (ch. 2) et prononcé un traitement ambulatoire pour une durée de quatre ans (ch. 3).

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation du ch. 2 du dispositif du jugement querellé, à ce que l'exécution du reste de sa peine soit suspendue, à sa mise en liberté accompagnée d'un suivi auprès du Service de probation et d'insertion, ainsi qu'à ce que "la durée d'exécution anticipée et d'exécution de la mesure au sens de l'art. 60 CP [soit] imputée entièrement sur le solde de la peine". Subsidiairement, il conclut à ce que soit ordonnée "toute mesure jugée nécessaire à [s]a libération".

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par jugement du Tribunal de police, prononcé le 10 mai 2023, A______ a été reconnu coupable d'infractions aux art. 19 al. 1 et 2 de la Loi fédérale sur les stupéfiants (LStup), de violations simples des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR), de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 al. 1 LCR cum art. 51 LCR), de conduite sans autorisation (art. 95 al. 1 let. b LCR), de conduite malgré une incapacité et violation de l'interdiction de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP) et de contravention à l'art. 19a LStup.

Il a été condamné à une peine privative de liberté de 18 mois, sous déduction de 129 jours de détention avant jugement, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 30 jours-amende et à une amende de CHF 500.-. Le Tribunal a également ordonné un traitement institutionnel des addictions (art. 60 CP) et suspendu l'exécution de la peine privative de liberté au profit de la mesure.

b. Incarcéré dès le 14 janvier 2023, A______ avait été, par ordonnance du Ministère public du 3 avril 2023, mis au bénéfice d'une exécution anticipée de mesure.

c. Une expertise psychiatrique avait été rendue par le Centre universitaire romand de médecine légale (CURML) le 22 février 2023. Les experts psychiatres avaient diagnostiqué A______ comme souffrant de troubles de la personnalité (traits narcissiques, paranoïaques et dyssociaux), de troubles délirant (délire de persécution), de dépendance de longue date aux opioïdes et de consommation nocive de cocaïne. La diminution de sa responsabilité était légère. Le risque de récidive était qualifié de très élevé s'agissant des infractions à la LStup et de moyen pour les infractions à la LCR. Les experts avaient préconisé une prise en charge institutionnelle comprenant un suivi psychiatrique, ainsi qu'un traitement de la dépendance, dans une institution spécialisée. Le résultat attendu des mesures thérapeutiques devait rester modeste, au regard de la chronicité des troubles présentés. En effet, l'expertisé consommait des stupéfiants depuis de très nombreuses années. De même, tous les traitements antérieurs avaient échoué, dans la mesure où l'intéressé n'avait pas réussi à observer ses rendez-vous et avait présenté "des difficultés d'investissement".

d. À teneur du rapport de la prison de B______ du 14 avril 2023, A______ avait été sanctionné le 4 février 2023 à trois jours de cellule forte pour trouble à l'ordre de l'établissement. Hormis cette sanction, l'intéressé n'avait pas posé d'autre problème. Il était décrit comme une personne discrète, interagissant de façon adéquate avec ses pairs et respectueux à l'égard du personnel pénitentiaire. Il pratiquait le sport et bénéficiait, à sa demande, d'une cellule individuelle.

e. Selon le rapport de suivi médico-psychologique établi le 26 mai 2023 par le Service de médecine pénitentiaire de B______ (ci-après, SMP), A______ a bénéficié de 8 entretiens psychiatriques, se montrant preneur de soins et compliant à son traitement médicamenteux (benzodiazépine à des fins anxiolytiques, hypnotique et traitement de substitution à la méthadone). Aucun signe de sevrage ou d'intoxication n'a été objectivé. Cela étant, le patient se montrait contrarié par les conclusions de l'expertise psychiatrique et avait exprimé sa volonté de se soigner en milieu ambulatoire. Il reprochait aux autorités leur volonté de contrôler sa vie et de l'infantiliser. Convaincu d'être une victime, il n'avait pas manifesté de regret en lien avec les faits ayant abouti à sa condamnation et estimait que si la drogue était en vente libre comme l'alcool, il ne serait pas en prison.

Les objectifs thérapeutiques de A______ consistaient au maintien de sa stabilité psychique, à la construction d'une alliance thérapeutique solide, ainsi qu'à un travail sur ses addictions. Son transfert dans un établissement approprié était préconisé, la prison de B______ ne pouvant offrir une prise en charge optimale en l'absence de programme dédié au traitement de patients vulnérables.

f. Entre les 16 mai et 26 juin 2023, le Service de l'application des peines et mesures (ci-après, SAPEM) a formulé des demandes de placement de A______ auprès des établissements D______, E______, F______, G______ et H______.

Lesdites demandes ont été refusées faute de place, respectivement au motif que les troubles dont souffrait l'intéressé étaient de nature à rendre difficile son encadrement dans un foyer résidentiel.

g. Dans son préavis du 20 juillet 2023, le SAPEM a préconisé la levée de la mesure thérapeutique institutionnelle au sens de l'art. 60 CP, ainsi que le prononcé d'un traitement ambulatoire et la suspension de l'exécution du solde de la peine au profit de la mesure.

Ses demandes auprès d'institutions spécialisées dans le traitement des addictions avaient toutes été refusées et – au vu des éléments médicaux figurant au dossier – aucune autre mesure thérapeutique institutionnelle ne semblait envisageable. Par ailleurs, A______ étant incarcéré depuis le 14 janvier 2023 au sein de la prison de B______, un maintien dans un établissement non adapté au traitement des addictions apparaissait comme délétère et contraire à la lettre de l'art. 60 CP. Cela étant, compte tenu des risques élevés de récidive, il convenait d'astreindre l'intéressé à un suivi ambulatoire axé sur les problématiques d'addictions, et ce, même si, d'après l'expertise psychiatrique du 22 février 2023, les perspectives d'évolutions positives restaient faibles. En tout état de cause, la menace de devoir purger le solde de sa peine était à même d'encourager le précité à entreprendre un suivi ambulatoire.

h. Par requête du 25 juillet 2023, le Ministère public a fait sien le préavis et les conclusions du SAPEM.

i. Par courrier du 21 août 2023 adressé au TAPEM, A______ a, sous la plume de son conseil, conclu à la levée de la mesure (art. 60 CP), à sa libération immédiate et à la mise en œuvre d'un traitement ambulatoire au sens de l'art. 63 CP.

Le passage en prison l'avait profondément changé et le sevrage aux produits s'était bien déroulé. Il avait pris contact avec son thérapeute, le Dr I______, qui s'était montré disposé à assurer son suivi médical. À sa sortie de prison, il souhaitait habiter chez ses parents afin de les assister dans leur quotidien.

C. Dans sa décision querellée, le TAPEM a décidé de lever la mesure thérapeutique institutionnelle, au vu de l'absence d'établissement approprié au sens de l'art. 62c al. 1 let. c CP. Le solde de la peine devait toutefois être exécuté, dès lors que la durée de la privation de liberté était inférieure à la quotité de la peine prononcée et que les conditions du sursis n'étaient pas réunies en l'espèce.

Il convenait par ailleurs de soumettre le cité à un traitement ambulatoire axé sur ses problématiques d'addictions et ses troubles sévères de la personnalité. Rien ne s'opposait de surcroit à l'exécution de la peine privative de liberté, dans la mesure où celle-ci était a priori compatible avec le traitement ambulatoire. Cela étant, une bonne adhésion à la mesure – respectivement un travail sur les addictions et un comportement correct en prison – constitueraient un atout en vue d'une libération conditionnelle.

D. a. Dans son recours, A______ considère que, compte tenu de ses troubles de personnalité et des capacités limitées de la médecine pénitentiaire, la peine privative de liberté n'était pas compatible avec le traitement ambulatoire ordonné. Ce d'autant qu'il ressortait du préavis du SAPEM que le maintien dans un établissement non adapté au traitement des addictions apparaissait délétère. Par ailleurs, à sa sortie de prison, il bénéficierait d'un encadrement familial – respectivement d'un emploi et d'un suivi psychothérapeutique –, soit des mesures d'intégration sociale, lesquelles seraient susceptibles de diminuer le risque de récidive.

Enfin, il convenait d'imputer "en entier sur le solde de peine" la durée de l'exécution de la mesure institutionnelle.

À l'appui de son recours, A______ produit notamment:

-     une promesse d'embauche pour un contrat de durée indéterminée à compter du 1er octobre 2023, ou à une date à convenir, et

-     un rapport du secteur socio-éducatif du Service de probation et d'insertion du 5 septembre 2023 faisant état d'un suivi hebdomadaire du précité depuis son entrée en détention. Lors des derniers entretiens, celui-ci avait relaté des difficultés à gérer ses interactions sociales au sein de la prison et une détérioration de son état psychique. Il avait par ailleurs exprimé le souhait de traiter les problématiques liées à la consommation des drogues dans un environnement adapté.

b. Par pli du 27 septembre 2023, que le TAPEM a transmis à la Chambre de céans, A______ revient sur des faits exposés dans son recours, précisant avoir travaillé plus de quinze ans au sein de l'entreprise de son père. À bien le comprendre, il demande également à participer à une audience devant la chambre de céans.

c. Par courrier du 3 octobre 2023, le conseil de A______ a produit un certificat établi le jour même par le Service de médecine pénitentiaire, duquel il ressort en substance que le patient était investi dans le processus du suivi psychiatrique et avait commencé à identifier progressivement les facteurs de vulnérabilité. Il nécessitait un cadre plus adapté à la prise en charge de sa pathologie psychiatrique, que l'établissement de B______ ne pouvait que difficilement lui offrir.

d. À réception, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision ultérieure indépendante au sens de l'art. 363 CPP, sujette à recours auprès de la Chambre de céans (arrêt du Tribunal fédéral 6B_293/2012 du 21 février 2013 consid. 2; ACPR/421/2013) et émaner du condamné qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les pièces nouvelles produites devant la juridiction de céans sont recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.2).

1.3. En revanche, le courrier du 27 septembre 2023, envoyé bien après l'échéance du délai de recours, n'est pas recevable.

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant requiert que sa peine privative de liberté soit suspendue au profit du traitement ambulatoire ordonné.

3.1. Lorsque l'auteur souffre d'un grave trouble mental, est toxico-dépendant ou qu'il souffre d'une autre addiction, le juge peut ordonner un traitement ambulatoire au lieu d'un traitement institutionnel, si l'auteur a commis un acte punissable en relation avec son état et s'il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec son état (art. 63 al. 1 CP).

En vertu de l'art. 63 al. 2 CP, si la peine n'est pas compatible avec le traitement, le juge peut suspendre, au profit d'un traitement ambulatoire, l'exécution d'une peine privative de liberté ferme prononcée en même temps que le traitement. Une assistance de probation ou des règles de conduite peuvent être ordonnées.

Le principe est que la peine est exécutée et que le traitement ambulatoire est suivi en même temps. La suspension de la peine revêt un caractère exceptionnel (ATF
129 IV 161 consid. 4.1 et 4.3 p. 162 ss ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1150/2014 du 19 novembre 2015 consid. 3.2.2 ; 6B_335/2012 du 13 août 2012 consid. 2.1). Ainsi, chaque fois qu'une peine est apte, seule, à prévenir une nouvelle infraction, elle doit être ordonnée. Un traitement ambulatoire, et la suspension éventuelle de l'exécution de la peine, nécessitent une justification particulière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_282/2007 du 5 octobre 2007 consid. 4.2 avec référence à l'ATF 129 IV 161 consid. 4.1 et 4.3).

La suspension ne pourra ainsi être ordonnée que si l'auteur ne constitue pas un danger pour la collectivité et que le traitement ambulatoire s'avère prioritaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1250/2014 du 29 septembre 2015 consid. 5.2). En principe, la probabilité que l'auteur puisse commettre des infractions avec violence suffit pour exclure la suspension de la peine. Inversement, on ne saurait appliquer la même conséquence à des infractions contre le patrimoine. En cas d'infractions de gravité moyenne, il convient d'en examiner les caractéristiques et l'intensité. Les effets escomptés du traitement sont également à prendre en compte dans cette appréciation puisqu'une prise en charge adéquate peut entraîner une baisse du risque de récidive et donc de la dangerosité pour des tiers (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 24 ad art. 63). La suspension doit aussi se justifier suffisamment par des motifs thérapeutiques. Une suspension doit être ordonnée si la perspective du succès du traitement est considérablement compromise par l'exécution de la peine privative de liberté prononcée. Il n'est toutefois pas nécessaire que le traitement pendant l'exécution soit totalement impossible ou dépourvu de chances de succès (ATF 116 IV 101 consid. 1a et références citées). La thérapie doit être privilégiée lorsqu'un traitement immédiat offre de bonnes chances de réinsertion, alors qu'un séjour carcéral les anéantirait ou les diminuerait clairement (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1150/2014 du 19 novembre 2015 consid. 3.2.2). La suspension n'apparaît pas justifiée si on ne peut espérer que la thérapie sera fructueuse seulement à long terme et de manière modeste (ATF 129 IV 161 consid. 5.4). De même, les effets néfastes de la détention sur le plan familial, professionnel et social ne suffisent pas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_698/2017 du 13 octobre 2017 consid. 7.3). Si l'auteur a volontairement suivi avec succès une thérapie avant le jugement et jusqu'à son prononcé, une suspension de la peine peut être indiquée (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal – Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 14 ad art. 63).

Il faut ainsi tenir compte, d'une part, des effets de l'exécution de la peine, des perspectives de succès du traitement ambulatoire et des efforts thérapeutiques déjà consentis mais également, d'autre part, de l'exigence de politique criminelle de réprimer les infractions proportionnellement à la faute, respectivement d'exécuter en principe les peines qui ont force de chose jugée (ATF 116 IV 101 consid. 1a;
129 IV 161 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1150/2014 du 19 novembre 2015 consid. 3.2.2). Pour certaines personnes condamnées, il peut être bénéfique de suivre le traitement ambulatoire en détention. Le cadre pénitentiaire apporte une structure journalière, des activités, la possibilité de se former et implique une mise à l'écart de facteurs criminogènes pour un certain temps. En revanche, pour d'autres, un séjour carcéral peut se révéler néfaste voire même contreproductif. En général, le maintien des liens prosociaux ainsi que d'une activité professionnelle à l'extérieur a une influence positive et devrait ainsi favoriser la réussite de la mesure (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), op. cit., n. 25 ad art. 63).

Sous l'angle du principe de l'égalité de traitement, le besoin de traitement doit être d'autant plus marqué que la peine suspendue est d'une longue durée. Un traitement ambulatoire ne saurait être ordonné pour éviter l'exécution d'une peine ou la différer indéfiniment (ATF 129 IV 161 consid. 4.1 p. 163; arrêt du Tribunal fédéral 6B_992/2017 du 11 décembre 2017 consid. 2.1.2).

3.2. En l'espèce, le recourant considère que la peine n'est pas compatible avec le traitement ambulatoire prononcé, compte tenu de ses troubles de personnalité et des capacités limitées de la médicine pénitentiaire, ce qui ressort également des rapports des 26 mai et 3 octobre 2023 du SMP.

Force est toutefois de constater que lorsque les chances de succès d'une thérapie ne s'inscrivent qu'à long terme et dans une mesure moindre – comme c'est le cas en l'espèce, d'après l'expertise psychiatrique du 22 février 2023 –, les conditions exigées pour la suspension d'une peine ne sont à l'évidence pas remplies. En juger autrement reviendrait à privilégier les condamnés – au bénéfice d'une mesure ambulatoire, dont les chances de succès apparaissent modestes – de manière incompatible avec les principes de la responsabilité pour faute personnelle et de l'égalité de traitement. Par ailleurs, le risque de récidive est évalué comme très élevé s'agissant des infractions à la LStup – respectivement comme moyen pour les infractions à la LCR – et, selon le rapport de suivi médico-psychologique du 26 mai 2023, le recourant n'a pas manifesté de regret en lien avec les faits ayant abouti à sa condamnation. La gravité des infractions reprochées qui se déduit de la condamnation à une peine privative de liberté de 18 mois (non contestée) ne joue pas non plus en faveur d'une suspension exceptionnelle au profit d'un traitement ambulatoire. Ce d'autant que la diminution de la responsabilité du recourant pour les actes commis a été qualifiée de légère. De surcroît, d'après le rapport du 3 octobre 2023 du SMP, le recourant s'est montré preneur des soins et a commencé à identifier progressivement les facteurs de vulnérabilité, ce qui n'exclut pas d'emblée un certain effet bénéfique du traitement en établissement pénitentiaire. Finalement, le fait qu'il disposerait d'une promesse d'embauche ne suffit pas à contrebalancer l'ensemble des éléments précités, notamment le risque élevé de réitération d'infractions.

Au vu de ce qui précède, la peine ne sera pas suspendue au profit de la mesure.

La Chambre de céans relève, à l'instar du premier juge, qu'une bonne adhésion à la mesure – respectivement un travail sur les adhésions et un comportement correct en prison – constitueraient un atout en vue d'une libération conditionnelle. Ce d'autant que les médecins n'ont objectivé aucun signe de sevrage ou d'intoxication durant la détention et que le recourant est au bénéfice d'une promesse d'embauche. Rien n'empêchera par ailleurs que le traitement ordonné se poursuive après une éventuelle libération conditionnelle; le recourant pourrait être motivé à le suivre, après sa libération par crainte de devoir exécuter le solde de la peine s'il ne s'y soumettait pas.

4. Le recourant semble reprocher à l'instance inférieure de ne pas avoir imputé la durée du placement en institution (art. 60 CP) sur celle de la peine encore à accomplir.

4.1. Selon l'art. 57 al. 3 CP, la durée de la privation de liberté entraînée par l'exécution de la mesure est imputée sur la durée de la peine.

L'art. 62c al. 2 première phrase CP prévoit que si la durée de la privation de liberté entraînée par la mesure est inférieure à celle de la peine privative de liberté suspendue, le reste de la peine est exécutée.

Le Tribunal fédéral a précisé que la durée de la privation de liberté résultant de la mesure doit être imputée sur la peine, sans égard au motif pour lequel la mesure a pris fin. Cette imputation est obligatoire et l'autorité n'a, sur le point précis du principe de l'imputation, aucun pouvoir d'appréciation. La pratique antérieure, suivant laquelle l'imputation pouvait être refusée en fonction de la cause de la levée de la mesure, et notamment lorsque l'intéressé y avait fait échec par mauvaise volonté, apparaît ainsi dépassée. Que, dans certains cas, notamment lorsque la peine est de relativement courte durée, la personne soumise à la mesure puisse, par une attitude obstructive durant la mesure, retrouver la liberté après la levée de celle-ci n'y change rien (ATF 142 IV 359 consid. 2.3 et références citées).

Une fois posé le principe de l'imputation, il reste encore à en déterminer l'ampleur. À cet égard, l'art. 62c al. 2 CP se réfère à "la durée" de la mesure. Cela ne signifie toutefois pas que la durée imputable doive correspondre jour pour jour à celle de la privation de liberté résultant de la mesure. La fraction imputable de la durée de la privation de liberté résultant de l'exécution de la mesure doit être déterminée en fonction de différents facteurs englobant notamment l'importance de la privation de liberté en résultant (soit les conditions effectives d'exécution de la mesure), les perspectives d'amendement de l'intéressé ainsi que les causes de l'échec de la mesure, attendu que lorsque l'échec du placement résultait du refus de toute coopération, le condamné ne devait pas en être récompensé par une imputation intégrale de la durée de la mesure (ATF 142 IV 359 consid. 2. 4 p. 364; arrêt du Tribunal fédéral 6B_652/2017 du 21 septembre 2017 consid. 1.1).

4.2. En l'espèce, contrairement à l'avis du recourant, le premier juge n'a procédé à aucun refus de toute forme d'imputation sur la durée de la peine à exécuter, notamment pas en ce qui concerne l'exécution anticipée de la mesure. Par ailleurs, la question de l'imputation de la durée de la mesure sur celle de la peine ne semble pas être pertinente, dans la mesure où le recourant n'a jamais commencé à exécuter le traitement institutionnel des addictions au sens de l'art. 60 CP.

Le grief sera dès lors rejeté.

5. Justifiée, la décision querellée sera donc confirmée.

6. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), compte tenu de sa situation économique.

7. La procédure étant ici close (art. 135 al. 2 CPP), des dépens seront alloué à l'avocat d'office.

7.1. À teneur de l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, le tarif des avocats est édicté à l'art. 16 RAJ ; il prévoit une indemnisation sur la base d'un tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude (art. 16 al. 1 let. c RAJ). Seules les heures nécessaires sont retenues ; elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance, et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

7.2. En l'espèce, l'indemnité sera fixée à CHF 700.- correspondant à 3h30 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (1h30 de conférence avec le client à B______ et 2h00 pour la rédaction du recours), augmentée de la TVA à 7,7% (CHF 53.90), étant précisé que le forfait ne se justifie pas en instance de recours (ACPR/762/2018 du 14 décembre 2018).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 500.-.

Alloue à Me C______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 753.90 (TVA à 7,7% incluse) pour l'instance de recours.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au Tribunal d'application des peines et des mesures et au Ministère public.

Le communique, pour information, au Service de l'application des peines et mesures.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PM/755/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

Total

CHF

500.00