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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/13190/2015

ACPR/300/2023 du 28.04.2023 sur ONMMP/3844/2022 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 31.05.2023, 6B_743/2023
Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;ESCROQUERIE;CONDUITE DU PROCÈS;DÉCISION;GESTION FAUTIVE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;MOTIVATION
Normes : CPP.310; CPP.318; CP.146; CP.165

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/13190/2015 ACPR/300/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 28 avril 2023

 

Entre

A______ (BVI) INC, dont le siège est à ______, îles Vierges britanniques, comparant par Me Vincent SOLARI, avocat, PONCET TURRETTINI, rue de Hesse 8, case postale,
1211 Genève 4,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 4 novembre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 17 novembre 2022, A______ (BVI) INC (ci-après: A______ INC) recourt contre l'ordonnance du 4 précédent, communiquée par pli simple, à teneur de laquelle le Ministère public a renoncé à procéder contre B______.

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et à l'ouverture d'une instruction pour gestion fautive, escroquerie et faux dans les titres.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.C______ (SUISSE) SA (ci-après : C______ SA) est une société anonyme de droit suisse, constituée à Genève le ______ 2002, dont la faillite a été prononcée le 9 juillet 2015 par le Tribunal de première instance de Genève. Son but était les services, ______ et ______ dans le domaine financier. Ses actionnaires étaient D______ et E______, à hauteur de 50% chacun.

F______ a été administrateur avec signature individuelle du 9 janvier 2003 au 9 juillet 2015, date de la faillite.

Ont également été administrateurs: son fils, B______ du 9 janvier 2003 au 2 septembre 2014, avec une signature collective à deux, G______ du 7 janvier 2005 au 17 juin 2015 et D______ du 17 juin 2015 au jour de la faillite.

b.a. Le 7 juillet 2015, A______ INC, société active dans le domaine financier, a déposé une plainte pénale en expliquant avoir signé trois contrats de dépôt avec C______ SA, les 18 octobre 2010, 16 mars 2011 et 28 novembre 2011, visant au transfert à cette dernière de respectivement USD 5'000'000.-, USD 3'000'000.- et USD 2'000'000.-, sommes devant être remboursées, à l'échéance d'une année, avec intérêts annuels de 7,5% (pour les deux premiers versements) et de 6% (pour le dernier).

b.b. H______ LLP, également active dans le domaine financier, a, à son tour, déposé une plainte pénale le 18 décembre 2015, en expliquant avoir signé le 23 octobre 2014 un contrat de dépôt avec C______ SA visant au transfert à cette dernière de USD 2'000'000.-, somme devant être remboursée, à l'échéance d'une année, avec intérêts annuels de 5%.

b.c. Selon les plaignantes, l'argent déposé avait été utilisé pour des placements et des prêts non sécurisés en Russie. Ne disposant ainsi d'aucune couverture, C______ SA n'avait pas été en mesure de rembourser les emprunts à ses clients, ni de payer les intérêts.

c. Pour les faits dénoncés, F______ a été prévenu, le 14 décembre 2015, d'abus de confiance (art. 138 CP), d'escroquerie (art. 146 CP) et de gestion déloyale (art. 158 CP).

d. Entendu le 1er novembre 2016 en qualité de témoin, B______ a confirmé avoir été membre du conseil d'administration de C______ SA entre 2003 et 2014, à la demande de son père. Il avait eu une à deux fois par année des discussions avec ce dernier, qui lui présentait les comptes de pertes et profits ainsi que le bilan et le rapport LBA. Il ne s'était jamais occupé de la gestion opérationnelle, conduite dans un pays balte où C______ SA avait un bureau avec des opérations, selon F______.

e. Par ordonnance du 6 février 2018 (OCL/97/2018), le Ministère public a ordonné le classement de la procédure.

En substance, il a considéré que F______ n'était pas un administrateur délégué et n'avait pas participé à la gestion effective de C______ SA, laquelle était exercée depuis Riga, en Lettonie, par les deux autres administrateurs, G______ et D______, ainsi que par les actionnaires. L'enquête n'avait pas permis d'établir que F______ était au courant de leurs agissements, qu'il y avait participé ou qu'il les avait tolérés. Il n'était pas davantage établi qu'il avait délibérément omis de vérifier et contrôler leur gestion de la société dans un dessein d'enrichissement.

f. Par arrêt du 30 novembre 2018 (ACPR/710/2018), la Chambre de céans a confirmé l'ordonnance précitée en ce qu'elle concernait les soupçons d'escroquerie, de gestion déloyale et d'abus de confiance contre F______.

La cause était néanmoins renvoyée au Ministère public pour poursuite de l'instruction concernant les soupçons de gestion fautive (art. 165 CP), dénoncés par A______ INC dans le délai imparti par l'avis de prochaine clôture, afin d'examiner si, "sous l'angle du principe in dubio pro duriore, une faute de gestion [pouvait] être reprochée à F______, administrateur de C______ (cf. art. 29 let. a CP), lequel aurait tardé à aviser le juge civil du surendettement de la société, aggravant par là-même sa situation obérée".

Le Ministère public devait également déterminer si un reproche similaire pouvait être fait aux autres administrateurs de C______ SA, soit notamment B______.

g. Dans son arrêt du 25 mars 2019 (6B_88/2019), le Tribunal a déclaré irrecevable le recours interjeté par A______ INC contre la décision précitée, faute de préjudice irréparable.

Il a ajouté que dans la mesure où le Ministère public devait poursuivre son instruction sur l'infraction de gestion fautive, il ne pouvait "être exclu qu'au cours de cette enquête, il découvre des éléments susceptibles de justifier la réouverture de la procédure pour les autres infractions, en particulier l'escroquerie, l'abus de confiance ou la gestion déloyale (cf. art. 323 CPP)".

h. Le 11 avril 2019, le Ministère public a ordonné une expertise financière, visant notamment à déterminer la date précise du surendettement de C______ SA et si la solvabilité des débiteurs de la société, soit les bénéficiaires des prêts consentis, était suffisamment documentée.

Selon les conclusions dudit rapport, rendu le 15 avril 2020, le "surendettement était incontesté et manifeste au 31.12.2014, il ne l'était pas auparavant". L'expert a relevé à plusieurs reprises le caractère lacunaire de la documentation à sa disposition, s'agissant de la comptabilité et des dossiers de crédits, lesquels étaient manquants. Il avait été contraint de limiter son analyse aux seuls débiteurs figurant à l'inventaire de C______ SA pour une dette d'un montant supérieur à CHF 1'000'000.- au moment de la faillite.

i. Une demande d'entraide judiciaire internationale a été adressée le 1er septembre 2020 à la Lettonie, dans le but d'obtenir les documents relatifs à la comptabilité et aux dossiers de crédits de C______ SA.

Les documents obtenus, reçus le 20 novembre suivant, figuraient déjà à la procédure et seuls les contrats d'emprunts/dépôts ont été remis s'agissant des dossiers de crédits.

j. Lors de l'audience du 12 juillet 2022, le Ministère public a informé F______ qu'il était dorénavant soupçonné:

- d'avoir, en sa qualité d'administrateur de C______ SA, avec signature individuelle, tardé à aviser le juge civil du surendettement de la société;

- subsidiairement, d'avoir omis de tenir une comptabilité de C______ SA conforme aux prescriptions du CO, à tout le moins pour les exercices comptables de 2012 à 2015, de sorte qu'il était impossible d'établir la réelle situation financière de la société, en particulier de déterminer à quelle date exactement celle-ci s'était trouvée en situation de surendettement au sens de l'art. 725 al. 2 CO.

Au terme de cette audience, le Ministère public a avisé les parties qu'une ordonnance pénale pour violation de tenir une comptabilité (art. 166 CPP) serait rendue concernant F______.

k. Une ordonnance de disjonction de la procédure concernant D______, E______ et G______ a été rendue le même jour, annonçant qu'ils étaient prévenus de violation de tenir une comptabilité (art. 166 CP) et leur audition sur ces faits par voie de commission rogatoire dans la procédure P/1______/2022. Aucune partie n'a recouru contre cette disjonction.

l. Dans ses déterminations du 5 septembre 2022 à la suite de l'avis de prochaine clôture, A______ INC a sollicité du Ministère public un complément d'expertise, compte tenu du caractère lacunaire de celle du 15 avril 2020, et argumenté que les infractions de gestion fautive, d'escroquerie et de faux dans les titres étaient réalisées par F______. En effet, à teneur du rapport du 15 avril 2020, des prêts, représentant une contrevaleur de près de CHF 35 millions, avaient été consentis par C______ SA sans garantie. Indépendamment du surendettement, l'octroi de tels prêts constituait une grave faute de gestion. En outre, en l'absence de document en lien avec la solvabilité des emprunteurs, il était "manifeste" que les bilans de C______ SA n'étaient pas fiables, du fait qu'ils ne prenaient pas en compte les provisions effectives qui auraient dû être constituées pour refléter les risques inhérents à ses débiteurs. Dans ces conditions, des "indices convergents" permettaient de constater que lesdits bilans étaient faux. Par extension, comme les investisseurs avaient été amenés à confier leurs avoirs à la société sur la base d'une situation financière trompeuse, les conditions de l'escroquerie étaient réalisées.

Par "identité de motifs", il convenait de mettre en prévention B______ pour ces mêmes infractions, dans la mesure où il avait été administrateur de C______ SA.

m. Dans une ordonnance pénale du 4 novembre 2022, le Ministère public a déclaré F______ coupable de violation de l'obligation de tenir une comptabilité et l'a libéré du chef de gestion fautive en lien avec l'annonce tardive du surendettement de C______ SA.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public considère qu'au vu des éléments établis par la procédure, B______ n'avait eu aucune implication dans la gestion de la société, malgré le fait qu'il était inscrit, "pour rendre service", au Registre du commerce à la demande de son père. En application de l'art. 52 CP, il s'imposait ainsi de ne pas procéder contre le précité.

D. a. Dans son recours, A______ INC reproche au Ministère public d'avoir rendu une ordonnance de non-entrée en matière – et non pas de classement – alors que la procédure était ouverte depuis 2015 déjà et que de nombreux actes d'instruction avaient été effectués, dont l'audition de B______. Cette décision ne se justifiait pas non plus sur le fond. Il résultait de l'expertise financière que la faillite de C______ SA était la conséquence du non-remboursement de prêts consentis par elle sans garantie à des sociétés off-shores, pour des montants dépassant CHF 35 millions. De tels prêts, octroyés "à la légère", étaient constitutifs d'une gestion fautive grave, que l'ordonnance querellée tentait de "minimiser". La culpabilité de B______, administrateur de la société durant dix ans, ne permettait pas une application de l'art. 52 CP. Même à supposer qu'il n'était qu'un "homme de paille", il conservait des obligations légales de par son statut d'organe et s'était ainsi rendu coupable de graves négligence dans sa gestion de C______ SA. Le Ministère public n'avait, en outre, pas examiné les reproches formulées dans ses déterminations du 5 septembre 2022 sur avis de prochaine clôture, s'agissant des infractions d'escroquerie et de faux dans les titres. Pourtant, à teneur de l'arrêt du Tribunal fédéral du 25 mars 2019, il ne pouvait être exclu que l'enquête aboutisse à la découverte d'éléments susceptibles de justifier la réouverture de la procédure pour d'autres infractions. L'ordonnance querellée violait en outre son droit à la preuve alors qu'il avait requis une nouvelle expertise financière.

b. Dans ses observations, le Ministère public souligne que B______ n'était pas mis en cause – ni même mentionné – dans la plainte de A______ INC et qu'aucune partie à la procédure avait soutenu que le précité avait pris part à la gestion opérationnelle des activités de C______ SA.

c. A______ INC n'a pas répliqué.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La recourante reproche au Ministère public d'avoir rendu une ordonnance de non-entrée en matière plutôt que de classement.

2.1. Le ministère public n'a pas à informer les parties avant de rendre une ordonnance de non-entrée en matière et n'a pas à leur donner la possibilité d'exercer leur droit être entendu, lequel sera assuré, le cas échéant, dans le cadre de la procédure de recours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_43/2013 du 11 avril 2013 consid. 2.1).

En revanche, si une instruction est ouverte au sens de l'art. 309 CPP, elle doit être clôturée formellement (art. 318 al. 1 CPP), de sorte qu'une ordonnance de non-entrée en matière ne peut plus être rendue (arrêt du Tribunal fédéral 1B_67/2012 du 29 mai 2012 consid. 2.1).

2.2. La question de savoir si une instruction a été ouverte s'examine à la lumière des actes entrepris dans le cadre de la procédure pénale, la majorité de la doctrine estimant que l'ordonnance d'ouverture d'instruction prévue par l'art. 309 al. 3 CPP n'a qu'une portée déclarative (A. CHERPILLOD, Arrêt de la procédure pénale par le ministère public sans condamnation, ni instruction: l'ordonnance de non-entrée en matière, in RPS 133 (2015) p. 195). Si le prononcé de mesures de contrainte interdit celui d'une ordonnance de non-entrée en matière (art. 309 al. 1 let. b CPP), le procureur peut, en revanche, sans ouvrir d'instruction, procéder à de premières investigations, par exemple demander à la police de compléter un rapport ou une dénonciation qui n'établit pas clairement les soupçons retenus (art. 309 al. 2 CPP; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 22 ad art. 309). Dans ce cas, l'avis préliminaire, demandé à la police antérieurement à l'ouverture de l'instruction, n'empêche pas le prononcé d'une ordonnance de non-entrée en matière (arrêt du Tribunal fédéral 1B_262/2012 du 4 juin 2013 consid. 2.2).

2.3. En l'espèce, le mis en cause n'était pas mentionné dans la plainte de la recourante et sa seule audition a été effectuée en qualité de témoin. Quant à l'arrêt de la Chambre de céans du 30 novembre 2018, il n'a fait que suggérer au Ministère public d'examiner si un comportement pénalement répréhensible pouvait être retenu contre lui. Il n'a enfin jamais fait l'objet d'une mesure de contrainte.

À la lumière de ces éléments, il n'y a aucune raison de supposer qu'une instruction était ouverte contre le mis en cause avant que la recourante ne le dénonce pour la première fois – au détour de déterminations afférentes au père de ce dernier – pour des comportements n'ayant fait l'objet d'aucune incrimination jusqu'alors.

Partant, le Ministère public était en droit de rendre une ordonnance de non-entrée en matière en faveur du mis en cause, ce qui ne nécessitait pas d'entendre préalablement la recourante, ni de donner suite à des actes d'enquête complémentaires.

Le grief peut, par conséquent, être rejeté.

3.             La recourante allègue une violation de son droit d'être entendu.

3.1. La garantie du droit d'être entendu, déduite de l'art. 29 al. 2 Cst., impose à l'autorité de motiver ses décisions, afin que les parties puissent les comprendre et apprécier l'opportunité de les attaquer, et que les autorités de recours soient en mesure d'exercer leur contrôle (ATF 136 I 229 consid. 5.2 p. 236; 135 I 265 consid. 4.3 p. 276). Il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs fondant sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause; l'autorité peut se limiter à ne discuter que les moyens pertinents, sans être tenue de répondre à tous les arguments qui lui sont présentés (ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236; 126 I 97 consid. 2b p. 102).

3.2. En l'espèce, le Ministère public a retenu dans l'ordonnance querellée que le mis en cause n'avait aucune implication dans la gestion de la société.

Les faits nouvellement dénoncés supposent une activité opérationnelle effective de l'intéressé. Dès lors, la recourante pouvait comprendre de la motivation précitée que le Ministère public considérait les éléments constitutifs des infractions concernées comme n'étant pas réalisés s'agissant de lui.

Le caractère succinct de cette motivation – qui reflète d'ailleurs les développements lacunaires de la recourante pour fonder ses accusations – ne saurait renverser ce constat.

La recourante était ainsi en position de critiquer l'ordonnance querellée, ce qu'elle a fait au demeurant. Il s'ensuit que ce grief peut également être rejeté.

4.             Enfin, la recourante critique le bien-fondé de l'ordonnance querellée.

4.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis. Selon la jurisprudence, cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore" (arrêt 6B_1456/2017 du 14 mai 2018 consid. 4.1 et les références citées). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 1 CPP en relation avec les art. 309 al. 1, 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91) et signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies.

4.2.1. Selon l'art. 146 al. 1 CP, se rend coupable d'escroquerie quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

4.2.2. Commet un faux dans les titres au sens de l’art. 251 CP – infraction qui constitue un crime – celui qui, dans le dessein, soit de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, soit de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique.

4.2.3. Aux termes de l'art. 165 CP, le débiteur qui, de manières autres que celles visées à l'art. 164 CP, par des fautes de gestion, notamment par une dotation insuffisante en capital, par des dépenses exagérées, par des spéculations hasardeuses, par l'octroi ou l'utilisation à la légère de crédits, par le bradage de valeurs patrimoniales ou par une négligence coupable dans l'exercice de sa profession ou dans l'administration de ses biens, aura causé ou aggravé son surendettement, aura causé sa propre insolvabilité ou aggravé sa situation alors qu'il se savait insolvable, sera, s'il a été déclaré en faillite ou si un acte de défaut de biens a été dressé contre lui, puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

4.3. En l'espèce, des agissements dénoncés par la recourante, aucun ne peut être reproché directement et personnellement au mis en cause.

Au cours de la procédure, les parties n'ont jamais contesté que, malgré son rôle d'administrateur avec signature collective à deux, l'intéressé n'a jamais exercé une activité opérationnelle pour la société, ni qu'il n'avait eu un quelconque pouvoir décisionnel. Comme constaté dans le précédent arrêt de la Chambre de céans, la gestion effective était opérée depuis Riga, en Lettonie, par les autres administrateurs et actionnaires, qui font maintenant l'objet d'une procédure distincte.

Le dossier n'offre ainsi aucune assise permettant d'imputer au mis en cause une responsabilité liée aux prêts octroyés ou à la teneur de la comptabilité. S'il conservait, certes, des devoirs en sa qualité d'organe, cela ne fonde pas encore une prévention pénale à son encontre.

En tout état, des explications du mis en cause, il ressort qu'il n'avait qu'un aperçu même approximatif des opérations effectuées par la société. Ses connaissances étant ainsi limitées, on ne saurait lui prêter d'intention délictuelle; par ailleurs, les infractions dénoncées par la recourante ne répriment pas la négligence.

À titre superfétatoire, une nouvelle expertise apparaît d'emblée vaine, dès lors que les démarches visant à obtenir une image complète de la comptabilité se sont révélées infructueuses. Il n'y a donc pas de raisons de croire que les conclusions d'un nouvel expert différeraient substantiellement de celles au dossier.

5.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

6.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ (BVI) INC aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/13190/2015

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

-

CHF

Total

CHF

1'000.00