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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/21600/2018

ACPR/66/2023 du 24.01.2023 sur OTMC/3250/2022 ( TMC ) , REJETE

Recours TF déposé le 24.02.2023, rendu le 30.03.2023, REJETE, 1B_107/2023
Descripteurs : MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION;RISQUE DE RÉCIDIVE;ALCOOL;CONSOMMATION DE STUPÉFIANTS
Normes : CPP.221; CPP.237.al1; CPP.237.al5

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/21600/2018 ACPR/66/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 24 janvier 2023

 

Entre

 

A______, domicilié ______, comparant MCédric KURTH, avocat, boulevard
James-Fazy 3, case postale 187, 1233 Bernex,

recourant,

 

contre les ordonnances de refus de levée partielle des mesures de substitution et de mise en liberté avec mesures de substitution rendues le 18 octobre 2022, respectivement le 9 décembre 2022, par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

 

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 31 octobre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 18 octobre 2022, notifiée le surlendemain, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a refusé de lever les mesures de substitution suivantes : interdiction de conduire tout type de véhicule à moteur jusqu'à décision contraire de la Direction de la procédure; interdiction de consommer de l'alcool et des stupéfiants; obligation de se soumettre à des contrôles inopinés d'abstinence.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, principalement à l'annulation de ladite ordonnance et à la levée partielle des mesures de substitution susvisées.

b. Par acte expédié le 19 décembre 2022, il recourt contre l'ordonnance du 9 décembre 2022, notifiée le même jour, par laquelle le TMC, après qu'il eut de nouveau été arrêté, l'a mis en liberté moyennant notamment les mesures de substitution suivantes (ch. 2), valable jusqu'au 8 juin 2023 : interdiction de conduire tout type de véhicule à moteur jusqu'à décision contraire de la direction de la procédure; interdiction de consommer de l'alcool et des stupéfiants; obligation de se soumettre à des contrôles inopinés d'abstinence.

Il conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation desdites mesures ainsi qu'à la jonction de son recours avec celui déposé le 31 octobre 2022.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, gynécologue, est prévenu, depuis le 13 avril 2019, d'actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de résistance (art. 191 CP) voire de contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP), subsidiairement d'abus de détresse (art. 193 al. 1 CP), au préjudice de neuf patientes, commis entre le 14 novembre 2008 et le 11 février 2019.

Il lui est également reproché des infractions d'actes d'ordre sexuel et de contrainte sexuelle perpétrés à son domicile de B______ en France, entre 2006 et 2007, au préjudice de C______, alors âgée d'environ 8 ou 9 ans, dans le cadre de jeux aquatiques dans la piscine ou durant son sommeil. Le 12 août 2022, l'instruction a été étendue à ces infractions.

Il lui est en outre reproché d'avoir, le 1er novembre 2017, à 2h23, sur l'avenue Pictet-de-Rochemont à Genève, conduit en état d'ébriété avec un taux d'alcool qualifié (art. 91 al. 1 let. a LCR).

Le précité est encore prévenu de lésions corporelles simples (art. 123 CP), dommages à la propriété (art. 144 CP), violences contre les fonctionnaires (art. 285 CP), empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP), violation grave des règles sur la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR), entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a LCR), violation des obligations en cas d'accident (art. 92 LCR), conduite malgré une incapacité (art. 91 al. 2 let. b LCR) et délit à la LStup (art. 19 al. 1 let. b, c et d LStup) pour avoir, le 7 janvier 2022 à 4h10, au volant du véhicule D______ [marque, modèle] immatriculé GE 1______, à l'intersection du pont du Val d'Arve et de la route de Veyrier et sous l'emprise de la cocaïne, accéléré fortement à la vue d'une patrouille de police et refusé d'obtempérer aux injonctions de police (feux bleus, sirène et message STOP POLICE), obligeant la police à le poursuivre et s'engageant dans une course poursuite avec les forces de l'ordre; puis, à Carouge, à la place des Charmettes, dans un cul-de-sac, alors que les policiers avaient arrêté leur véhicule de service à 1.5m derrière le sien, enclenché la marche arrière et percuté le véhicule de police où se trouvaient E______ et F______ avec son propre véhicule, provoquant des blessures à E______, soit des douleurs au dos; dans ces circonstances, participé à une course-poursuite sur une grande partie du territoire genevois, alors qu'il était poursuivi par plusieurs patrouilles de police depuis Carouge, en effectuant des dépassements téméraires et en commettant des excès de vitesse particulièrement importants, notamment aux Avanchets, à l'avenue Louis-Casaï, à une vitesse de 155 km/h sur un tronçon limité à 50km/h, soit un dépassement de 98 km/h après déduction de 7 km/h, en prenant des sens inverses et trottoirs, en n'observant pas les feux de circulation et le signal STOP, en franchissant des doubles lignes de sécurité et en effectuant des embardées, acceptant ainsi de faire courir un grand risque d’accident pouvant entraîner de graves blessures ou la mort et ce, jusqu'à ce qu'il perde le contrôle de son véhicule et emboutisse une glissière de sécurité, à l'intersection entre le chemin de Chambésy et la route de Lausanne; et une fois interpelé, refusé la prise de sang et d'urine ordonnée.

Il lui est enfin reproché d'avoir consommé régulièrement et sans droit de la cocaïne, entre août 2021 et août 2022, à des dates indéterminées.

b. A______ a été arrêté le 12 avril 2019 et remis en liberté sous mesures de substitution le surlendemain par le TMC. Sur recours du Ministère public, la Chambre de céans a ordonné la mise en détention provisoire du prévenu jusqu'au 13 juin 2013 par arrêt du 2 mai 2019 (ACPR/312/2019). Dite détention provisoire a ensuite été régulièrement prolongée jusqu'au 15 octobre 2019. Par ordonnance du 11 octobre 2019, le TMC a mis l'intéressé en liberté moyennant un certain nombre de mesures de substitution destinées à pallier les risques de fuite, collusion et récidive, dont l'interdiction d'exercer une activité en gynécologie et obstétrique au contact de patientes (OTMC/3711/2019), lesquelles ont été régulièrement prolongées par ordonnances du TMC des 5 octobre 2021 (OTMC/3333/2021, confirmé par l'arrêt ACPR/77/2022 du 7 février 2022 puis par arrêt 1B_134/2022 du Tribunal fédéral du 19 avril 2022), 29 mars 2022 (OTMC/1008/2022) et 6 juillet 2022 (OTMC/2174/2022), jusqu'au 8 janvier 2023.

Par ordonnance du 9 janvier 2022 (OTMC/39/2022), rendue dans le cadre de la procédure P/2______/2022 désormais jointe à la présente procédure, le TMC a notamment ordonné les mesures de substitution suivantes à l'endroit du prévenu, lesquelles ont été prolongées la dernière fois jusqu'au 8 janvier 2023 : interdiction de conduire tout type de véhicule à moteur jusqu'à décision contraire de la Direction de la procédure; interdiction de consommer de l'alcool et des stupéfiants; obligation de se soumettre à des contrôles inopinés d'abstinence; obligation d'entreprendre, au rythme et conditions fixés par le thérapeute, un traitement toxicologique auprès d'un thérapeute choisi par le Service de probation et d'insertion (ci-après : SPI); obligation de produire en mains du SPI, chaque mois, un certificat attestant de la régularité du suivi thérapeutique; obligation de se présenter au SPI le jour ouvrable suivant sa libération; obligation de suivre les règles ordonnées par le SPI dans le cadre du suivi des mesures de substitution.

Dans sa dernière ordonnance, le TMC a relevé que les experts psychiatres avaient conclu à un risque de récidive faible de commissions d'infraction à caractère sexuel, ceux-ci ayant précisé lors de l'audience du 21 avril 2021 que le fait de ne plus exercer sa profession était un facteur protecteur majeur et que si celui-ci devait être absent, le risque de récidive devrait être qualifié de moyen à élevé. Il indiquait par ailleurs que le rapport du SPI du 1er juillet 2022 mentionnait que A______ avait présenté une consommation excessive et régulière d'alcool durant les deux à trois semaines précédant son contrôle auprès du CURML, ce qu'avaient révélé des tests toxicologiques effectués le 21 juin 2022, ce qui signifiait que le prévenu avait violé les mesures de substitution ordonnées, comportement venant renforcer le risque de récidive. Les mesures ordonnées apparaissaient aptes et adéquates encore à ce jour pour diminuer les risques présentés par le prévenu.

c. Le 12 octobre 2022, A______ a sollicité du Ministère public la levée partielle des mesures de substitution suivantes : interdiction de conduire tout type de véhicule à moteur jusqu'à décision contraire de la direction de la procédure; interdiction de consommer de l'alcool et des stupéfiants; obligation de se soumettre à des contrôles inopinés d'abstinence.

À la suite des évènements du 7 janvier 2022, son permis de conduire lui avait été immédiatement retiré. Partant, il ne pouvait légalement plus conduire. L'interdiction de conduire prononcée n'avait dès lors aucun sens, tout comme l'interdiction de consommer de l'alcool puisqu'il était dépourvu de permis de conduire, étant rappelé que la consommation d'alcool était sans lien avec la récidive d'infractions pénales dans le cadre de son activité professionnelle. Quant à l'obligation de se soumettre à des contrôles inopinés d'abstinence, elle n'avait pas davantage de sens dans l'optique de détecter des consommations faites uniquement dans le cadre privé. S'il devait consommer des stupéfiants, il se rendrait alors coupable de la même infraction que commettent tous les toxicomanes.

d. Le Ministère public a refusé de faire droit à cette requête.

e. À l'audience du 7 décembre 2022 devant le Ministère public, A______ a déclaré : "Actuellement, j'essaie de survivre. Je suis extrêmement déprimé". Il avait refusé d'être hospitalisé début 2022, ne réalisant pas la gravité de son état. En juillet 2022, il s'était rendu à l'évidence. Il était sorti de la clinique G______ en septembre 2022 mais n'était plus rentré au domicile conjugal. Il vivait actuellement à l'hôtel. Son moral n'était pas bon et il prenait énormément de médicament. Il lui était arrivé de boire, depuis le prononcé des mesures de substitution du 9 janvier 2022 mais ce n'était plus le cas.

f. Le même jour, le Ministère public a sollicité du TMC la mise en détention provisoire du prévenu, eu égard au non-respect des mesures de substitution ordonnées par le TMC le 9 janvier 2022 et prolongées le 6 juillet 2022.

g. À l'audience du 9 décembre 2022 devant le TMC, A______ a admis avoir consommé de l'alcool et des stupéfiants nonobstant l'interdiction ordonnée car il avait fait une grave dépression ayant nécessité son hospitalisation à la clinique G______, du 13 juillet au 6 septembre 2022, et s'était séparé de son épouse. Concernant les rendez-vous manqués avec le SPI les 2 août, 9 septembre, 7 octobre et 14 octobre 2022, il avait été assidu à ses contrôles d'abstinence et s'il y avait eu des manquements, c'était en raison soit de son hospitalisation soit qu'il avait peut-être oublié. Après son hospitalisation à la clinique G______, il avait été hospitalisé à [la clinique psychiatrique] H______, du 13 au 23 ou 24 octobre 2022. Durant cette période, il était perturbé et désordonné dans la gestion de son agenda. Il a précisé qu'à la suite d'une audience au Tribunal civil à fin septembre 2022 concernant sa séparation d'avec son épouse, il s'était mis à boire de façon compulsive. C'était son avocat qui l'avait amené aux urgences psychiatriques des HUG. Ensuite, il avait été hospitalisé. Il estimait qu'actuellement, il aurait besoin d'être suivi, étant précisé que sa consommation n'était plus celle d'avant d'entrer à H______. Il consommait un ou deux verres de vin en mangeant, une ou deux fois par semaine. Il avait consommé à une seule reprise de la cocaïne, mais cela faisait plusieurs semaines. Il avait commencé un suivi avec le Dr I______ à sa sortie de H______ et le voyait tous les dix jours environ. Il réalisait à présent que les mesures de substitution n'étaient pas facultatives. Il s'engageait solennellement à les respecter à l'avenir. Il allait en effet un peu mieux grâce à son suivi actuel et aux médicaments qu'il prenait. Cela baissait le risque qu'il consomme à nouveau. Il sollicitait sa mise en liberté provisoire immédiate, avec toutes les mesures de substitution que le Tribunal jugerait utiles.

C. a. Dans son ordonnance du 18 octobre 2022, le TMC considère qu'il existe un risque de réitération tangible, considérablement accru au vu de l'état psychique actuel du prévenu, les experts, dans leur rapport du 22 juillet 2022 [destiné principalement à déterminer si le prévenu était apte à être entendu dans la procédure pénale et à y participer] ayant conclu à un épisode dépressif moyen ainsi qu'à une consommation nocive pour la santé d'alcool et de cocaïne. Le prévenu disait vivre à l'hôtel et n'avait plus de contacts avec les membres de sa famille. Le maintien de l'interdiction de conduire, malgré le retrait du permis par l'autorité administrative, continuait de faire sens, dès lors qu'il était possible mais pas légal de conduire sous retrait de permis. Le même raisonnement s'appliquait s'agissant de l'interdiction de consommer des substances prohibées et de l'obligation de se soumettre à des contrôles réguliers. Ces mesures étaient de nature à réduire l'important risque de réitération, étant rappelé que le prévenu était soupçonné d'avoir commis des infractions routières en étant ivre, respectivement sous l'influence de cocaïne.

b. Dans son ordonnance du 9 décembre 2022, le TMC considère qu'il existe toujours un risque de fuite concret, possiblement sous la forme d'une disparition dans la clandestinité, le prévenu vivant désormais à l'hôtel, à la suite de la séparation d'avec son épouse. Dit risque pouvait cependant être pallié par les sûretés versées et l'obligation de déférer aux convocations du pouvoir judiciaire.

Le risque de collusion demeurait élevé avec les parties plaignantes et les témoins.

Quant au risque de réitération, il était tangible, au vu de l'état psychique actuel du prévenu, les experts ayant conclu à un épisode dépressif moyen dans leur rapport du 22 juillet 2022 ainsi qu'à une consommation nocive d'alcool et de cocaïne, le prévenu ayant pour sa part indiqué, lors de l'audience du 7 décembre 2022 au Ministère public, se trouver dans un état psychologique déplorable, étant relevé encore la séparation d'avec son épouse et l'absence de liens avec ses filles.

Il était constaté qu'à teneur des rapports du SPI, des 1er juillet, 8 août, 7 octobre et 6 décembre 2022, A______ omettait régulièrement de se présenter à ses rendez-vous au SPI ainsi qu'aux contrôles inopinés du CURML. Le résultat des analyses de prélèvements du CURML démontrait par ailleurs une consommation importante voire quotidienne et excessive d'alcool, ce que réfutait jusqu'alors l'intéressé, expliquant le résultat des tests par le fait que ces derniers seraient trop sensibles. Le résultat des analyses faisait également état d'une consommation de cocaïne. Le suivi psychologique précédemment ordonné n'avait pas pu être mis en place par le SPI en raison des fréquentes absences du prévenu. Convoqué pour être entendu sur la violation des mesures de substitution le 5 juillet 2022, celui-ci avait demandé l'annulation de l'audience pour admission imminente à la clinique G______, ce qui lui avait été accordé. Par courriers des 4 juillet et 9 août 2022, il lui avait été rappelé qu'il devait se conformer aux mesures de substitution ordonnées. Convoqué une nouvelle fois le 13 octobre 2022 pour être entendu sur la violation des mesures de substitution, il ne s'était pas présenté par-devant le Ministère public. Toutefois, il reconnaissait aujourd'hui la violation de l'interdiction de consommer de l'alcool et de la cocaïne, qu'il mettait en lien notamment avec l'épreuve supplémentaire que constituait pour lui la séparation d'avec sa femme. Il admettait également ne pas s'être présenté à certaines convocations du SPI et du CURML. Dans ce contexte, il avait notamment exposé avoir été hospitalisé volontairement à la clinique G______ du 13 juillet au 6 septembre 2022 puis à la clinique de H______ du 13 au 23 octobre 2022. À ce jour et depuis sa sortie de la clinique de H______, il restait régulièrement suivi par le Dr I______, psychiatre, le lien ayant par ailleurs été établi avec le SPI, et il poursuivait son traitement médicamenteux. Il s'était en outre engagé formellement à respecter scrupuleusement à l'avenir les mesures de substitution qui lui seraient imposées et indiquait avoir désormais compris le caractère obligatoire desdites mesures. Enfin, il ne ressortait pas du dossier qu'il aurait récidivé dans la commission d'infractions pénales depuis le prononcé des mesures de substitution du 9 janvier 2022, hormis la consommation de stupéfiants. Partant, des mesures de substitution pouvaient pallier aux risques susénoncés, notamment celui de récidive, à condition que le prévenu les respecte, sauf à en démontrer l'inefficacité.

D. a. Dans son recours du 31 octobre 2022, A______ expose que l'interdiction absolue de consommer de l'alcool violait le principe de la proportionnalité. Il n'avait commis qu'une seule infraction routière en état d'ébriété, le 1er novembre 2017. Lors de l'infraction du 7 janvier 2022, le contrôle au moyen de l'éthylomètre avait révélé une absence de consommation d'alcool. Les experts avaient du reste indiqué qu'il n'y avait pas lieu de prononcer une telle abstinence. Cette mesure faisait d'autant moins sens qu'il ne disposait plus de permis de conduire à la suite des faits du 7 janvier 2022 ni de véhicules immatriculés à son nom. À cela s'ajoutait qu'il n'exerçait plus aucune activité professionnelle. L'interdiction de conduire prononcée, tout comme celle de consommer de l'alcool et des stupéfiants ne faisaient sens et ne réduisaient pas le risque de récidive, dès lors que l'obligation de se conformer à la loi s'adressait à tout citoyen. Une interdiction d'enfreindre la loi ne pouvait donc être prononcée à titre de mesure de substitution.

Aucune des mesures de substitution dont il sollicitait la levée n'était par ailleurs en lien avec les risques de fuite et de collusion – contestés au demeurant.

b. Dans son recours du 19 décembre 2022, le prévenu reproche au TMC d'avoir à nouveau ordonné les trois mesures de substitution contestées dans son précédent recours. Il reprend en substance les termes de son précédent recours, s'offusquant au passage de ce que la décision querellée lui interdisait de boire "un verre de vin à Noël ou une coupe de champagne à Nouvel an" sous peine de se voir réincarcéré. Les mesures de substitution dont il demandait la levée l'entravaient dans sa vie et étaient inutilement onéreuses sous l'angle des contrôles d'abstinence. Il contestait par ailleurs avoir refusé la prise de sang et le contrôle d'urine, s'agissant des faits survenus le 7 janvier 2022, se soumettant au contraire immédiatement au test d'alcoolémie, lequel s'était révélé négatif. L'interdiction de consommer de l'alcool prononcée à titre de mesure de substitution n'ayant pas pour but de prévenir des consommations nocives pour la santé, telle mesure était illégitime.

Le risque de récidive faisait défaut. Il avait été hospitalisé volontairement à la clinique G______ du 13 juillet au 6 septembre 2022 puis à la clinique de H______ du 13 au 23 octobre 2022, où il avait été traité pour dépression et consommation d'alcool. Depuis sa sortie de H______, il était régulièrement suivi par le Dr I______, psychiatre. Il s'était par ailleurs engagé à formellement respecter les mesures de substitution qui lui seraient imposées par le TMC. Il savait en outre devoir respecter le Code pénal comme n'importe quel citoyen.

c. À réception des recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Les recours sont recevables pour avoir été déposés selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner des ordonnances sujettes à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation des décisions querellées (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Vu leur connexité évidente, les recours seront joints et traités en un seul arrêt.

3.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

4.             4.1. Aux termes de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, la détention provisoire peut être ordonnée lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu "compromette sérieusement la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre". Selon la jurisprudence, il convient de faire preuve de retenue dans l'appréciation du risque de récidive: le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si le pronostic est très défavorable et si les délits dont l'autorité redoute la réitération sont graves (ATF 137 IV 13 consid. 4.5; 135 I 71 consid. 2.3; 133 I 270 consid. 2.2 et les arrêts cités). Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3.4; cf. arrêt 1B_133/2011 du 12 avril 2011 consid. 4.7). Le risque de récidive peut également se fonder sur les infractions faisant l'objet de la procédure pénale en cours, si le prévenu est fortement soupçonné - avec une probabilité confinant à la certitude - de les avoir commises (ATF 137 IV 84 consid. 3.2 et les références citées).

4.2. Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures – énumérées de manière non exhaustives à l'art. 237 CPP – moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention.

À l'instar de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, les mesures de substitution doivent en tout temps demeurer proportionnées au but poursuivi, tant par leur nature que par leur durée (ATF 140 IV 74 consid. 2.2).

Conformément à l'art. 237 al. 5 CPP, le tribunal peut en tout temps révoquer les mesures de substitution, en ordonner d'autres ou prononcer la détention provisoire si des faits nouveaux l'exigent ou si le prévenu ne respecte pas les obligations qui lui ont été imposées. Le tribunal compétent dispose dans ce cadre d'un large pouvoir d'appréciation, comme cela ressort de la formulation potestative de la loi (arrêt du Tribunal fédéral 1B_485/2019 du 12 novembre 2019 consid. 3.1).

4.3. En l'espèce, il est pour le moins contradictoire de la part du recourant de contester par la voie du recours la prolongation par le TMC de mesures de substitution qu'il s'est formellement engagé à respecter par-devant ce même tribunal, un tel comportement pouvant s'apparenter à un abus de droit.

Cette question peut cependant rester ouverte, les recours devant de toute manière être rejetés.

Le recourant semble contester les risques de fuite et de collusion. Or, les mesures de substitution dont il sollicite la levée ou la non-prolongation se rattachent exclusivement au risque de récidive. Partant, il n'y a pas lieu de les examiner plus avant ni de s'appesantir sur la motivation du TMC à cet égard.

Le recourant considère que le risque de réitération ne saurait être contenu par une interdiction de consommer de l'alcool, faute d'infraction commise en lien avec l'alcool. Il s'est néanmoins accommodé de cette interdiction imposée à la suite des évènements du 7 janvier 2022 dans laquelle la consommation de toxiques – à tout le moins de cocaïne – semble avoir joué un rôle, avant de présenter une consommation excessive et régulière d'alcool durant l'été 2022, contrevenant par ailleurs à l'interdiction faite. Il a ainsi admis avoir consommé alcool et stupéfiants avant son hospitalisation à la clinique G______, le 13 juillet 2022, en raison d'une grave dépression, ne déférant par ailleurs pas ou peu aux convocations du SPI. Après sa sortie de la clinique, le 6 septembre 2022, il s'est même mis à boire de façon compulsive, ensuite de sa séparation avec son épouse, ce qui a conduit à une nouvelle hospitalisation en urgence à H______. S'il est à présent suivi par un psychiatre et va "un peu mieux" selon ses propres déclarations, rien ne permet d'affirmer, faute d'éléments médicaux probants, que le risque qu'il commette à nouveau des infractions du type de celles reprochées le 7 janvier 2022 est écarté, vu son état psychique actuel, le recourant se disant encore "extrêmement déprimé". Le fait qu'il vive seul dans un hôtel et n'ait plus de contact avec sa famille constitue en outre un facteur aggravant. À cette aune, sa promesse de ne plus consommer de toxiques n'apparaît pas suffisante, pas plus qu'elle ne l'est au regard de la violation (reconnue) de ses précédents engagements.

On ne voit pas en quoi l'interdiction de consommer des stupéfiants ne pourrait pas être érigée en mesures de substitution, eu égard aux événements survenus le 7 janvier 2022 et ainsi au risque que le recourant ne commette à nouveau des actes dangereux pour la collectivité.

L'obligation de se soumettre à des contrôles d'abstinence étant le corollaire des interdictions de consommation de toxiques imposées, elle a tout son sens et est, elle aussi, proportionnée.

Quant à l'interdiction de conduire tout type de véhicule à moteur, si elle semble aller de soi dès lors que le recourant est désormais privé de son permis de conduire, elle reste proportionnée à la lumière des évènements survenus le 7 janvier 2022 et de l'état de dangerosité occasionné pour les autres usagers de la route, étant relevé que l'absence de permis ne saurait constituer un frein suffisant à toute nouvelle récidive en matière de circulation routière.

Au vu de ce qui précède, c'est donc à bon droit que le TMC a refusé de lever les mesures de substitution critiquées, respectivement les a prolongées.

5. Justifiées, les ordonnances querellées seront donc confirmées.

6. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Joint les recours.

Les rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au Tribunal des mesures de contrainte et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/21600/2018

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'000.00

-

CHF

Total

CHF

1'085.00