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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/24616/2019

AARP/252/2024 du 18.07.2024 sur JTDP/1627/2023 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : IN DUBIO PRO REO;CHANTAGE;DÉNONCIATION CALOMNIEUSE;TENTATIVE(DROIT PÉNAL)
Normes : CP.156.ch1; CP.303.al1.ch1; CP.22.al1
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24616/2019 AARP/252/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 18 juillet 2024

 

Entre

A______, domiciliée ______ [GE], comparant par Me B______, avocate,

appelante,

 

contre le jugement JTDP/1627/2023 rendu le 13 décembre 2023 par le Tribunal de police,

 

et

C______, partie plaignante, comparant par Me D______, avocat, et par Me E______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 13 décembre 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnue coupable de tentative d'extorsion et chantage (art. 156 ch. 1 cum 22 al. 1 du code pénal suisse [CP]) ainsi que de dénonciation calomnieuse (art. 303 ch. 1 al. 1 CP), lui infligeant une peine privative de liberté de 180 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, avec sursis (durée du délai d'épreuve : trois ans), outre une amende de CHF 1'000.- (peine privative de liberté de substitution : 36 jours), frais de la procédure à sa charge.

Le TP a également ordonné la confiscation et la destruction du téléphone de la condamnée et renvoyé la partie plaignante à agir par la voie civile.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement.

b. Selon l'ordonnance pénale du 24 janvier 2023, il est reproché ce qui suit à la prévenue :

- entre le 8 et le 11 novembre 2019, elle a tenté de déterminer C______ à lui verser les sommes de CHF 20'000.- et CHF 3'000.- en lui écrivant notamment "Listen I didn't want to have sex with you that night you forced me into it. So now you're gonna help me out. I don't think forcing girls into having sex is a good reputation to have. In Geneva no means no it does't mean just the tip". Elle a de la sorte exercé une pression psychologique sur la partie plaignante, lui faisant comprendre qu'elle était en mesure de lui faire subir un dommage sérieux, soit de porter atteinte à son honneur en l'accusant faussement de l'avoir contrainte à entretenir un rapport sexuel ;

- puis, toujours dans le but de tenter de l'amener à lui verser des sommes d'argent indues, les 11 et 12 novembre 2019, elle a dénoncé C______ à la police, l'accusant de l'avoir violée, le 5 novembre 2019.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. À teneur du rapport de police du 2 décembre 2019, A______ s'était présentée au poste F______ le 11 novembre précédent, pour dénoncer "une agression sexuelle" subie le mardi 5 novembre 2019 de la part de C______. Elle avait travaillé dans la bijouterie de son supposé agresseur du 24 au 27 octobre 2019 et devait être rémunérée à hauteur de CHF 20'000.-. Elle avait rendez-vous avec lui le 5 novembre 2019 pour recevoir cette somme et dîner au restaurant. Il était venu la chercher et l'avait emmenée à son domicile, où il lui avait imposé un rapport sexuel. Selon le gendarme qui l'avait reçue, elle lui avait montré des échanges de messages mais avait fait preuve de réticence lorsqu'il avait voulu parcourir le fil de la conversation.

b. Le lendemain de sa première venue à la police, A______ a été requise de se rendre à la maternité des HUG pour les examens d'usage, lesquels n'ont rien révélé de significatif, puis a été entendue en vue du dépôt de la plainte.

Selon sa déclaration, elle était arrivée à Genève en avril 2018 et avait rencontré C______ à l'automne de la même année, étant à la recherche d'un emploi. En octobre 2019, sans travail et devant payer son loyer, elle lui avait envoyé un message WhatsApp disant qu'elle cherchait un poste d'assistante et joignant son CV. Il l'avait reçue le 27 septembre 2019, dans sa bijouterie. Il n'avait alors pas cessé de fixer sa poitrine, ce qui l'avait gênée. Le 2 octobre suivant, il lui avait proposé de sortir dîner dans un restaurant mais l'avait emmenée devant son domicile, ce qui l'avait effrayée, au point qu'elle criait "à l'intérieur" d'elle. En définitive, elle était restée à côté de la voiture tandis qu'il s'absentait une trentaine de minutes puis ils étaient allés dans un restaurant. Par la suite, C______ lui avait envoyé sans cesse des messages et lui avait demandé de venir l'aider un week-end pour vider des valises de bijoux, précisant qu'elle devait revêtir une robe. Il lui avait demandé d'essayer certaines pièces et n'avait cessé de frôler sa poitrine, avant de placer ses mains sur ses fesses et de la coller à lui, si bien qu'elle avait senti son pénis en érection, mais, "comme une idiote", elle s'était convaincue de ce qu'il s'agissait de la boucle de sa ceinture. Lorsqu'elle était partie, C______ avait glissé CHF 200.- dans son sac et elle s'était dit qu'on faisait de la sorte avec les prostituées. Il avait continué de lui envoyer des messages, et elle avait travaillé pour lui du 24 au 27 octobre, photographiant des objets. Il n'y avait pas eu de contrat écrit mais ils étaient convenus qu'elle noterait ses heures et lui présenterait un décompte final, l'argent n'étant pas un problème. Elle avait certes exposé au gendarme qui l'avait reçue la veille que C______ lui devait CHF 20'000.-, mais à vrai dire, elle avait été à sa disposition, était censée lui dire combien il lui devait et il le lui aurait donné.

Le 5 novembre 2019, il lui avait annoncé qu'il passerait la chercher, sans expliquer le motif, de sorte qu'elle avait pensé qu'ils allaient dîner ensemble. Il était arrivé à 20h41 et lui avait indiqué qu'ils allaient chez lui. Elle n'était pas rassurée mais s'était raisonnée en se disant que cela était ridicule. Sa peur subsistant néanmoins, elle avait pris une photo du salon qu'elle avait envoyée, avec la mention "This is downstairs, this is the lake", à une amie, dont elle refusait de dévoiler l'identité, afin de ne pas l'impliquer.

Elle était restée seule vingt minutes chez C______, pendant qu'il rendait visite à sa tante. À son retour, il l'avait embrassée sur la bouche, avec son accord. Ensuite, il avait attrapé sa main et l'avait conduite dans la chambre à coucher. Il s'était approché d'elle et avait recommencé à l'embrasser. L'homme avait demandé comment on retirait sa robe et elle lui avait répondu qu'elle ne voulait pas se déshabiller mais il remontait le vêtement, tentant de descendre ses collants, malgré ses protestations. Il l'avait forcée à enlever sa robe par le bas, alors que cela se faisait normalement par le haut, et tenté de retirer ses collants. Il lui avait dit d'aller sur le lit et elle s'était assise sur le bord, ne portant plus que sa culotte et ses collants mais il l'avait attrapée par les hanches et poussée sur la couche tout en l'embrassant, étant précisé qu'il avait enlevé son pantalon. Tout au long, elle avait dit "non" et, à une reprise, "non, arrête, on retourne en bas". L'homme avait, à nouveau, essayé de retirer ses collants, en les tirant sur les côtés, alors qu'elle les retenait à hauteur de son ventre. Il avait écarté de force ses jambes, ôté son collant et s'était mis nu puis avait frotté son pénis contre elle et glissé sa main dans sa culotte, alors qu'elle lui disait d'arrêter et qu'il répondait "non, juste ça". Elle avait été paralysée. Après quelques minutes, C______ s'était rendu dans la salle de bain attenante et elle n'avait pu bouger, terrorisée, se disant qu'il était allé chercher "un couteau et ses amis", si bien qu'elle avait été soulagée lorsqu'il était revenu muni d'un préservatif. Elle se demandait pourquoi elle n'avait pas profité de ce qu'il était "vieux" pour lui donner un coup de pied dans les "parties". C______ avait remis sa main dans son slip, tenté de l'ôter, puis dit "très bien, alors je vais le faire avec la culotte". Au début, il avait frotté son pénis contre son vagin. Elle continuait de crier son refus et il avait dit qu'il allait insérer "juste le bout". À ce moment-là, l'esprit de A______ était parti ailleurs. Elle avait ressenti une forte douleur, et l'avait dit, ce à quoi l'agresseur avait répondu qu'il allait y aller doucement et avait continué de la pénétrer, ayant tiré la culotte sur le côté, avant de parvenir à la retirer. Au bout d'un moment, elle avait cessé de se battre. Il avait tenté de la retourner pour la mettre sur le ventre, mais n'étant "plus ", elle ne parvenait pas à ouvrir ses jambes, ou il n'avait pas réussi à les écarter, de sorte qu'il l'avait remise sur le dos. Il avait éjaculé en elle mais dans le préservatif et s'était rendu dans la salle de bain, puis dans l'antichambre.

Pendant ce temps, elle s'était rhabillée et enfermée à son tour dans la salle de bain pour se nettoyer. Elle l'avait ensuite rejoint au salon, il lui avait tendu une bouteille d'eau, puis s'était mis à lui parler des factures qu'elle devait payer. Elle avait refusé d'en parler à ce moment, se disant qu'il la traitait vraiment comme une prostituée. Il l'avait reconduite chez elle.

Sur questions, A______ a notamment indiqué que :

-          elle avait compris que C______ la trouvait attirante ; la réciproque n'était pas vraie mais elle s'était dit qu'à force, il finirait peut-être par lui plaire ;

-          elle n'avait pas aussitôt déposé plainte car durant les deux jours qui avaient suivi, elle avait pensé qu'il l'appréciait. Elle avait continué d'échanger par messages avec lui, lui envoyant même des vidéos "rigolotes", ainsi que des photographies de sous-vêtements. Ce n'était qu'au bout du troisième jour qu'elle avait réalisé ce qui lui était arrivé. Elle avait alors écrit à C______ qu'elle avait dit "non", mais qu'il avait quand même "pris ce qu'il voulait". Faute de réponse elle lui avait réclamé CHF 20'000.-, disant qu'elle en avait besoin. Elle lui avait dit que s'il ne les lui donnait pas, elle irait les prendre, comme il avait pris ce qu'il voulait, et que cela ne lui ferait pas une bonne réputation que d'avoir forcé une fille. Cela était bizarre car il voulait qu'elle se conduise comme une prostituée et c'était ce qu'elle avait fait. Elle s'était dit que ce qui était arrivé était de sa faute et en était encore convaincue lorsqu'elle s'était rendue à la police ;

-          en fait, elle ne voulait pas un franc et à l'hôpital, elle avait conçu le projet de tout donner à une association prenant en charge les victimes de viol.

Après son audition, A______ a envoyé à la police un message disant avoir parlé à une personne qui avait elle-même été agressée sexuellement par C______, cinq ou six ans auparavant.

c. Entendu à son tour par la police, C______ a indiqué avoir fait la connaissance de A______ cinq ans plus tôt, qu'elle l'avait recontacté après trois ans car elle cherchait du travail, puis à nouveau en septembre 2019, lui envoyant son CV, et lui proposant d'aller prendre un café. Il lui avait dit de venir plutôt à son bureau, ce qu'elle avait fait, brièvement, car il n'avait pas de temps. Il l'avait invitée dîner le 2 octobre suivant, l'avait amenée chez lui et elle était restée sur la terrasse de sa villa tandis qu'il rendait visite à sa tante, âgée, comme tous les soirs, puis ils étaient allés au restaurant. Elle portait alors une robe très courte, de sorte qu'il s'était dit qu'elle "cherchait quelque chose", mais il avait gardé ses distances. Le lendemain, elle lui avait envoyé un message, sollicitant un prêt de CHF 1'200.- pour payer des factures, dont son loyer, ce qu'il avait accepté, lui remettant la somme le soir-même, devant son bureau. Par la suite, A______ lui avait proposé plusieurs sorties et lui avait apporté au bureau un repas iranien. À cette occasion, il l'avait ramenée chez elle, lui remettant CHF 200.- pour couvrir les frais de la nourriture, et elle l'avait embrassé sur la bouche, de manière si provocante qu'il avait compris qu'elle "cherchait du sexe". Par la suite, elle lui avait proposé de se voir un soir, après dîner, et lui avait envoyé une photo de sa jupe, soulignant qu'elle était très courte ("All decked out") mais il n'était pas libre ce soir-là. Le 5 novembre 2019, elle lui avait demandé, toujours par messagerie, CHF 2'000.- pour payer des factures et ils étaient convenus qu'il irait la chercher en sortant de son bureau. Elle l'avait embrassé sur la bouche aussitôt montée dans sa voiture et il l'avait emmenée chez lui, voulant passer voir sa tante, comme d'habitude. Dans le salon, elle avait été entreprenante puis il s'était rendu chez sa parente. À son retour, ils s'étaient embrassés, la jeune femme ayant pris l'initiative. Elle avait enlevé ses chaussures et ils étaient montés dans sa chambre à coucher où elle avait aussitôt enlevé sa robe. Il s'était alors dévêtu mais avait conservé son sous-vêtement, et tous deux s'étaient étendus. Il avait ensuite enlevé son slip et elle le reste de ses vêtements. Il était allé chercher un préservatif et ils avaient fait l'amour. Elle avait montré des signes de plaisir et dit "vas-y" en anglais. Il s'était ensuite lavé dans la salle de bain et rhabillé, elle avait fait de même et ils étaient descendus ensemble, avant qu'il ne la ramène. Durant le trajet, elle lui avait demandé quand ils se reverraient et il avait évoqué le dimanche suivant [ndr : le 5 novembre 2019 était un mardi]. Devant son domicile, il lui avait remis les CHF 2'000.- du prêt sollicité.

Le lendemain, elle lui avait envoyé un cliché de sa boutique, le félicitant pour la décoration, puis des photographies de lingerie et, en réponse à sa question, lui avait indiqué qu'elle allait en acheter mais ne lui dirait pas quelle pièce. Elle avait derechef demandé quand ils se verraient et il avait donné la même réponse.

Le 7 novembre 2019, elle lui avait demandé CHF 20'000.- pour payer des factures. Comme il n'avait pas répondu, elle l'avait relancé disant qu'elle n'avait pas voulu faire du sexe, qu'il l'avait forcée et que désormais il devait l'aider. Puis elle était passée au chantage, évoquant le risque pour sa réputation et qu'à Genève, "no means no it doesn't mean just the tip". Elle avait exigé une réponse pour le soir-même, puis demandé encore CHF 3'000.- pour le gynécologue. Il avait alors écrit qu'il était choqué qu'elle tente de lui extorquer de l'argent et que si elle poursuivait, il contacterait son avocat. Elle avait répondu qu'il n'avait qu'à le faire, elle-même ayant déjà mis en œuvre le sien.

Interrogé sur le travail que A______ avait effectué pour lui, C______ a confirmé qu'elle était venue à une reprise, pour ranger des montres, ce pour quoi il lui avait remis CHF 200.-, puis durant un jour ou un jour et demi, dans le contexte de la réfection de la décoration de la boutique, mais ses prestations n'avaient pas convenu. Il n'avait pas été discuté d'une rémunération ; il pensait plutôt qu'elle venait l'aider car il lui avait prêté de l'argent. Il n'avait jamais été question d'un salaire de CHF 20'000.-, ce montant ayant été évoqué pour la première fois dans le message du 7 novembre 2019.

d. C______ ayant déposé plainte contre A______, celle-ci a été réentendue par la police, cette fois en qualité de prévenue.

Elle ne se souvenait pas d'avoir proposé des sorties à C______ mais était en thérapie depuis deux mois pour oublier ce qu'il s'était passé, ce qui pouvait expliquer la vacuité de ses souvenirs. Confrontée à ses messages en ce sens, elle a demandé qu'on cessât de la "faire vomir". Il était exact qu'il avait été notamment question de regarder des films ensemble, mais elle avait insisté pour le faire au cinéma, plutôt que sur G______ [service de streaming], chez C______, car elle savait très bien ce que cela sous-entendait. Elle avait travaillé dans les milieux du pétrole, du gaz et de la banque en Iran, soit là où il y avait le moins de moralité, et il ne lui était rien arrivé, car il y avait le respect de la femme alors qu'ici, ceux qui proposaient un travail n'étaient pas "tous sympas". Il était tout de même bizarre pour un potentiel employeur d'emmener une postulante dîner au restaurant et elle avait d'ailleurs eu l'impression que C______ n'avait rien à lui proposer. Elle lui avait demandé un prêt de CHF 1'200.- afin qu'il comprît qu'elle ne cherchait pas un salaire élevé. Elle n'avait pas évoqué cette demande lors de sa précédente audition car elle pensait que cela n'avait pas d'importance. Il ne lui avait pas prêté de l'argent, il le lui devait, car elle avait travaillé pour lui près d'une semaine. Elle avait certes évoqué une rémunération de CHF 20'000.- lors de sa précédente audition, mais cela était parce qu'il s'agissait du montant qu'elle avait articulé dans son dernier message, alors qu'elle "pensait" qu'elle avait été ... quand elle avait "réalisé ce qui s'était passé". Elle avait alors avancé un montant "ridicule" pour faire réagir son agresseur, et y était parvenue. Elle avait utilisé le terme "borrow", mais seuls les CHF 1'200.- avaient été un prêt, demandé aussi dans l'idée de lui faire comprendre qu'elle ne voulait qu'un "petit boulot pour le week-end". Elle avait employé le même terme pour être "polie" s'agissant des CHF 2'000.-. Confrontée au fait que la photo prise dans le salon de C______, qu'elle avait dit avoir envoyée à une amie parce qu'elle n'était pas rassurée, avait été prise à 21h06 mais expédiée à 23h05, A______ a dit ne pas s'être rendue compte de ce qu'elle avait possiblement attendu deux heures sur place, plutôt qu'une vingtaine de minutes. Elle n'avait vraisemblablement pas envoyé le cliché rapidement, malgré sa peur parce que dans une telle situation, on ne faisait pas nécessairement des choses "très raisonnables", ainsi qu'elle l'avait compris avec l'aide de sa thérapeute.

Le lendemain des faits, elle n'avait pas même été fâchée, ni triste, elle avait été dans le déni. Cela expliquait les messages qu'elle avait envoyés à C______. Elle n'avait commencé de réaliser que lorsqu'elle avait expédié celui du 11 novembre 2019. Elle était alors consciente de ce que C______ ne lui répondrait pas tant qu'elle ne lui écrirait pas quelque chose de "complètement ridicule", d'où la demande de CHF 20'000.-. Elle n'avait pas parlé de viol parce qu'une "personne normalement constituée" n'accepterait pas de donner la somme mais demanderait ce qui ne va pas.

Elle n'avait pas souhaité montrer l'ensemble des échanges au gendarme qui l'avait reçue la première fois parce qu'elle était gênée.

La personne mentionnée dans son message à la police en connaissait une autre qui avait été humiliée, non agressée, sexuellement par C______ et il y avait d'autres filles qui, elles, avaient été agressées de la sorte, mais elle ne voulait pas les impliquer, raison pour laquelle elle refusait de donner leurs noms.

e. Au cours de l'instruction préliminaire, A______ a maintenu sa plainte pour viol et dit confirmer ses déclarations à la police. Elle était toujours parvenue à régler ses factures de sorte qu'elle considérait qu'elle n'avait pas de difficultés financières. Elle avait envoyé son message demandant CHF 1'200.- parce que l'assistante de C______ lui avait dit qu'il lui proposerait un travail pour le week-end si elle sollicitait une petite somme d'argent. Elle a refusé de donner le nom de la secrétaire, ou même de révéler le raccordement téléphonique sur lequel elles avaient communiqué, à une date dont elle ne se souvenait pas, ne souhaitant pas la mettre "dans [la]situation" dans laquelle elle-même se trouvait, soit la mêler à cette histoire. C______ lui avait bien remis CHF 1'200.-. Selon elle, il s'agissait d'un prêt mais celui-là lui avait dit qu'en échange, elle pouvait travailler pour lui durant le week-end, ce qu'elle avait fait.

Il était vrai qu'elle avait proposé à C______ d'aller au cinéma, mais il lui avait répondu qu'il avait G______ à la maison, ce qui était une invitation à se rendre chez lui. Elle aurait "malheureusement" été d'accord de le faire.

Il lui "semblait" qu'elle avait essayé de flirter avec lui. Cela était notamment le cas lorsqu'elle lui avait envoyé une photographie de ses jambes après lui avoir proposé de boire un verre, "all decked out" signifiant "I look pretty" selon elle. Ultérieurement, elle a cependant affirmé que le cliché de ses jambes tendait uniquement à montrer qu'elle était habillée, prête pour sortir, puis, confrontée à la contradiction, indiqué que c'était la même chose, que d'être prête à sortir et de flirter, puis encore que flirter n'avait pas nécessairement une connotation sexuelle et qu'en l'occurrence, il s'agissait d'obtenir un job.

Après avoir dit qu'elle ne se souvenait pas de leur premier baiser, elle a précisé qu'il avait été initié par lui, à un moment et en un lieu qu'elle ne pouvait préciser. Elle ne l'avait pas repoussé.

Elle avait demandé à plusieurs reprises à C______ de le voir, même si cela pouvait sembler dégoûtant, parce qu'elle avait vraiment besoin de travail.

Après plusieurs reports, les parties étaient convenues de se voir le 5 novembre 2019 pour aller au cinéma, mais C______ l'avait directement conduite chez lui. Le MP lui rappelant qu'ils étaient censés aller dîner selon ses déclarations à la police, A______ a dit qu'elle ne savait plus, puis confrontée au fait qu'en effet il était question de regarder un film chez C______ selon la conversation Whatsapp et qu'elle avait précédemment déclaré qu'elle savait très bien ce que cela voulait dire, elle a indiqué qu'elle considérait son interlocuteur comme un ami, avait bien pensé qu'il pourrait y avoir des attouchements tels ceux survenus lorsqu'elle avait essayé les bijoux, mais pas un tel incident. Elle lui avait le même jour demandé de lui prêter CHF 2'000.- parce qu'elle avait travaillé trois-quatre jours pour lui. C'était une manière iranienne et polie de lui demander de payer ce qu'il devait.

Elle a relaté les faits du 5 novembre 2019 en manifestant de l'émotion, selon mention au procès-verbal, avec quelques variations par rapport à son récit à la police, notamment l'évocation d'une pénétration anale par le doigt, et dit qu'elle devait être restée environ une heure chez C______. Elle avait envoyé la photographie du salon avant le rapport sexuel de sorte qu'elle avait en effet dû rester deux heures devant la télévision, au salon. Elle avait envoyé le cliché afin que son amie, qui savait déjà où elle était, sût à quel moment elle y était, ce pour le cas où quelque chose lui arriverait. Elle était apeurée, mais pas au point de profiter de l'absence de C______ pour s'en aller.

Ses messages des deux jours suivants s'expliquaient par le fait qu'elle attendait de C______ qu'il lui demandât comment elle avait trouvé la soirée, si elle avait eu du plaisir et lui proposât de la revoir. Elle voulait qu'il "acknowledge", confesse, ce qu'il s'était passé. En effet, elle ne pouvait pas évoquer le viol, personne ne l'aurait crue. Elle avait donc besoin de quelque chose pour prouver, tout d'abord à elle-même, que ce qu'elle pensait être arrivé avait bien eu lieu. Elle avait ensuite envoyé le message le plus "agressif" auquel elle avait pu penser, soit celui demandant la somme de CHF 20'000.-. Nonobstant son texto en ce sens du 8 novembre 2019, elle n'avait pas voulu aller au restaurant avec son violeur. Elle n'avait fait que reprendre ce qu'il avait dit au moment où il lui avait remis le montant de CHF 2'000.-, parce qu'elle était à la recherche d'une réponse. Elle comprenait mieux son comportement un an après les faits, aussi en raison des explications reçues de ses thérapeutes, alors que lors de son audition par la police, elle avait été dans l'émotionnel.

Le montant de CHF 20'000.- ne correspondait à rien et notamment pas à un salaire, contrairement à ce qu'elle avait précédemment déclaré. Elle avait dans son message évoqué des frais scolaires, son loyer et des factures à payer uniquement pour "faire le message le plus long possible". Il ne s'agissait pas pour elle de se venger, ni de faire peur à C______. Elle lui avait parlé d'argent car c'était le seul langage qu'il comprenait. Elle ne se souvenait pas pourquoi elle avait en outre demandé CHF 3'000.- pour des frais de gynécologue.

A______ a derechef refusé de donner le nom de la supposée victime de C______ qu'elle avait rencontrée. Toutes ses victimes avaient travaillé pour lui, sans contrat, et différentes choses "de nature sexuelle" leur étaient arrivées. Elle n'a pas davantage accepté de donner l'identité de l'assistante de C______, quand bien même elle ne travaillait plus pour lui et n'habitait plus la Suisse selon elle, ou celui de la destinataire de l'image du 5 novembre 2019, afin de ne pas l'attrister parce qu'elle n'avait rien pu faire pour elle, ou plutôt, elle voulait bien le donner au MP mais pas à sa partie adverse.

Elle ne serait pas allée à la police si son propos avait relevé du mensonge et du chantage, d'autant moins que C______ avait lui-même annoncé qu'il allait déposer plainte.

Interrogée sur le message, effacé de son téléphone mais récupéré par la police, reçu le 5 novembre 2019 à 23h02, d'un contact non identifié lui suggérant de ne pas "donner plus", soit ne pas "baiser" selon l'interprète, s'"il" lui donnait moins de CHF 2'000.-, A______ a supposé qu'il s'agissait d'une erreur de traduction puis, concédant que ce n'était pas le cas, a dit ne pas s'en souvenir, enfin ne pas vouloir lire la suite de la conversation car il s'agissait d'échanges entre filles. Elle voulait bien donner le nom de ses amies au MP, non à C______. H______, à laquelle elle avait proposé de se voir après le supposé viol n'était pas une amie proche. Elle réitérait qu'elle était alors dans le déni mais elle avait néanmoins souhaité se confier, pensant "à 70%" que H______ avait "vécu la même chose". Lorsqu'elle l'avait fait, après le dépôt de sa plainte, l'autre femme lui avait dit que C______, sous prétexte de l'emmener au restaurant, l'avait conduite chez lui. Elle était cependant descendue du véhicule et n'était pas entrée dans sa maison.

Lors des débats de première instance, A______ a persisté dans ses précédentes déclarations. Ses demandes de CHF 20'000.- avaient pour seul objectif d'obtenir une réaction. Elle avait certes, dans un premier temps, dit à la police que cette rémunération lui était due pour son travail mais cela était imputable à son état psychologique très instable. Elle a d'abord exposé qu'elle se serait contentée d'une réaction, même si elle avait consisté en des dénégations, car elle voulait surtout une explication pour elle-même, puis qu'elle aurait déposé plainte pénale même s'il avait accepté de lui payer la somme réclamée. Elle ne l'avait pas fait aussitôt car elle avait été dans le déni, comme cela était généralement le cas de victimes de viol. C______ était devenu un violeur dès lors qu'en réponse à son refus il avait répondu "juste le bout".

Elle avait 28 ans à son arrivée d'Iran, mais elle avait là-bas été traitée comme une enfant, n'étant autorisée à sortir de chez elle que pour se rendre à l'Université. Elle était donc très naïve et avait vécu un choc culturel.

Elle ne savait "honnêtement" pas ce qu'elle avait attendu du rendez-vous du 5 novembre 2019, mais en tout cas pas ce qu'il était arrivé.

e. C______ a également confirmé devant le MP sa propre plainte et ses précédentes déclarations. Le 2 octobre 2019, lorsqu'elle l'avait attendu sur la terrasse de sa maison, A______ n'était nullement apeurée. Elle était contente d'être là, admirant le lac et fumant une cigarette à son retour. Il avait accepté de lui prêter CHF 1'200.-, la tenant pour une personne de "bonne culture et de bonne famille". Il espérait pouvoir l'aider et considérait lui avoir concédé un prêt, quand bien même ils n'en avaient pas clarifié l'échéance. Il avait pensé qu'elle pourrait l'aider de temps en temps au bureau. Lorsqu'elle l'avait fait, en rangeant des montres, il lui avait néanmoins encore remis CHF 200.- afin de ne pas lui causer de difficultés financières.

Il était vrai qu'il avait demandé à la jeune femme d'essayer des bijoux, soit des clips d'oreille, dont il se demandait s'il allait les conserver. Elle l'avait déjà fait deux ou trois ans auparavant. Il ne l'avait pas touchée : elle les avait mis et enlevés elle-même. Cela avait eu lieu le 6 octobre 2019, en présence de l'un de ses employés.

A______ n'avait pas été qualifiée pour travailler en bijouterie ou comme assistante, de sorte qu'il lui avait proposé de l'assister le week-end. Elle n'avait jamais été seule et avait dû être occupée trois journées et deux demi-journées, recevant CHF 200.- à chaque fois. Il avait aussi considéré qu'une partie du montant de CHF 1'200.- couvrait l'aide qu'elle avait fournie.

Il l'avait invitée dîner le 2 octobre 2019 parce qu'ils avaient rendez-vous au bureau mais qu'il avait oublié et en avait été désolé. Lorsqu'elle lui avait demandé les CHF 2'000.-, il avait souhaité la voir dans l'idée de lui expliquer qu'elle ne pouvait continuer comme cela et devait trouver un travail. Elle était cependant venue à leur rendez-vous vêtue de façon très sexy. Ils ne s'étaient vus que trois fois en dehors du travail, soit les 2 octobre, le jour où elle lui avait apporté un repas iranien, puis le 5 novembre 2019.

Ce soir-là, il était allé la chercher aux environs de 21h00, l'avait laissée seule 15 ou 20 minutes tandis qu'il allait voir sa tante, et il devait être 22h00 ou 22h15 lorsqu'ils avaient quitté son domicile, après le rapport sexuel, auquel elle avait consenti et participé activement. Comme il la déposait, elle lui avait demandé s'ils pouvaient se revoir et il avait proposé le dimanche suivant, étant occupé dans l'intervalle, puis lui avait remis la somme de CHF 2'000.-. Il pensait alors qu'ils avaient initié une sorte de relation, mais réalisait désormais qu'elle n'avait vu en lui qu'une "cash money bank". À lire, ses messages, il avait cru qu'elle était heureuse et n'avait compris qu'elle cherchait de l'argent que lorsqu'elle avait exigé les CHF 20'000.-, après qu'il eut réitéré qu'il ne pouvait pas la voir avant le dimanche suivant.

Il n'avait pas considéré que A______ était immature et avait de bonne foi pensé qu'une relation entre eux était possible, à compter du moment où elle avait clairement marqué son intérêt, car elle était d'une bonne famille et qu'ils avaient des relations communes, ce malgré l'écart d'âge. Il ignorait du reste qu'il était de 35 ans et dans la culture iranienne, ce n'était pas un facteur important, "la culture et la chimie entre les êtres" l'étant davantage.

f.a. Le fil de la conversation WhatsApp entre les parties conduit à mettre en exergue les éléments suivants :

-A______ a pris contact avec C______ le 14 septembre 2019, lui demandant de l'aide pour trouver un travail ;

- le 3 octobre 2019, soit le lendemain du dîner au restaurant, elle lui demande de lui prêter CHF 1'200.- pour payer ses factures ;

-A______ a ensuite proposé à de nombreuses reprises à C______ de se voir pour aller au cinéma ou boire un verre notamment ;

- le 19 octobre 2019, elle indique avoir mangé iranien, qu'elle a pensé à lui et lui apportera de la nourriture de leur pays le lundi suivant, au bureau ;

- le 1er novembre 2019, marquant son souhait de boire un verre avec lui, elle lui envoie le selfie d'elle assise, ciblant le bas de sa mini-jupe et ses jambes croisées, revêtues d'un collant fin, à pois, ce à quoi il répond "Yammy" et elle ajoute "All decked out" ;

- elle lui a ensuite quotidiennement proposé des rendez-vous qui ne se sont pas concrétisés ;

- le 3 novembre 2019, elle dit avoir très envie de voir un certain film sur G______ et lui propose de dîner ensemble préalablement. Ils conviennent de se voir le surlendemain ;

- ce jour-là, elle lui demande de lui prêter la somme de CHF 2'000.- pour lui permettre de payer la moitié de ses factures. C______ lui propose de se voir et elle suggère le soir-même à 21h00. À 20h40 il l'informe de ce qu'il est arrivé en bas de chez elle ;

- le lendemain A______ communique à C______ une photographie de la vitrine de sa bijouterie en le complimentant, puis, dans la soirée, deux liens vers des vidéos humoristiques ;

- le 7 novembre 2019, elle lui demande de deviner ce qu'elle est en train de faire, puis lui envoie deux photographies d'un rayon de lingerie (soutiens-gorge et slips). Il lui demande si elle achète et elle opine, précisant qu'elle ne lui montrera pas ce qu'elle choisit ;

- le 8 novembre 2019, elle lui demande s'ils iront au restaurant le lendemain, ce à quoi il répond "dimanche". Elle lui rappelle qu'il voit sa famille ce jour-là de la semaine. Peu après, elle indique avoir fait ses calculs et avoir besoin de CHF 20'000.-, pour payer ses frais d'écolage, son loyer ainsi que des factures en souffrance, et lui demande s'il peut l'aider ;

- sans réponse, elle le relance ["so ?"] le lendemain, puis écrit "listen I remeber sayibng no bit you taking what you wanted. So now you what I need is 20'000 fr. which is not that much ! You can give it to me on Monday or I can do what you did and just come take it". Il répond "Slowly InshAllah darling" et, un peu plus tard, qu'il ne comprend pas ce qu'elle dit. Elle rétorque qu'elle ne peut pas attendre, en a besoin pour mardi, et viendra donc ce jour-là, lui demandant de fixer une heure ;

- le 11 novembre 2019, elle annonce tout d'abord qu'elle a reçu un commandement de payer pour l'assurance accident et qu'elle doit s'inscrire à l'école de sorte qu'elle a besoin des CHF 20'000.-, ajoutant "Please help me out". Un peu plus tard, elle dit "Answer please" et enfin "Listen, I didn't want to have sex with you that night you forced me into it. So now you're gonna help me out. I don't think forcing girls into having sex is a good reputation to have. In Geneva no means no it doesn't mean just the tip" puis "I need an answer from you by tonight". Elle le relance plusieurs fois. De son côté, le téléphone de C______ émet un appel en vidéo qui n'aboutit pas, puis la jeune femme le traite de "cowered"[sic ; "coward" sans doute] avant d'ajouter qu'elle a oublié qu'elle a aussi besoin de CHF 3'000.- pour aller chez le gynécologue. C______ répond qu'il est choqué de ce qu'elle tente de lui extorquer de l'argent au moyen de mensonges et de menaces et qu'il va transférer ses messages à son avocat auquel elle aura affaire si elle le harcèle encore ne serait-ce qu'une fois. Elle répond qu'il n'y a pas de problème car elle a parlé à son propre conseil le matin-même, avant d'ajouter qu'elle l'a également fait durant la nuit.

On relèvera que jusqu'au changement intervenu le 9 novembre 2019, le ton de la conversation est très badin, voire par moments franchement dans la séduction.

f.b. L'analyse du téléphone de la prévenue a mis en évidence les éléments suivants :

- la photographie prise le 5 novembre 2019 à 21h06 dans le salon de C______ (on y voit au premier plan la jambe gauche, croisée sur l'autre, de la prévenue, manifestement assise sur un sofa, une table basse, une partie de la cheminée et la télévision allumée), qu'elle a envoyée, à 23h05 à l'interlocutrice dont elle a refusé de dévoiler l'identité avec le message "this is downstairs, this is the lake";

- les messages, effacés, mais récupérés par la police, mêlant le farsi et l'anglais, entrecoupés de smileys, échangés le 5 novembre 2019 entre 23h02 et 23h03 avec la personne dont A______ a également refusé de dévoiler l'identité. Sa correspondante (il est rappelé que selon A______, il s'agit d'une femme) lui demande "il a donné de l'argent ?", "combien ?", ce à quoi elle répond par l'affirmative, qu'elle se sent "comme une pute complète" et "2'000". L'autre femme lui conseille alors : "s'il donne moins que 2'000 ne lui donne plus ", une note de l'interprète précisant qu'en persan, "donner" signifie "baiser";

- une assez longue conversation avec H______, le 5 novembre 2019 entre 23h37 et 23h48, initiée par A______, qui demande à son amie si elle est sortie, celle-ci répondant "Good try", puis un échange de banalités.

g.a. A______ a produit des attestations de l'Unité interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence (UIMPV) des 17 décembre 2019 et 10 février 2021 à teneur desquelles elle était suivie depuis le 12 novembre 2019 après avoir été adressée par les urgences de la maternité des HUG. Elle présentait des symptômes intenses de stress aigu post traumatiques nécessitant un accompagnement médical et une médication. A______ avait décrit des symptômes dissociatifs, soit un sentiment d'irréalité, durant les jours suivants les faits, des troubles du sommeil, des cauchemars, des pensées intrusives, des flash-backs, de l'hypervigilance dans les lieux publics, des réactions physiologiques (palpitations, souffle court), une méfiance généralisée envers les hommes, de l'évitement social et des lieux lui rappelant les faits, un isolement, une labilité émotionnelle avec de la tristesse, des rires nerveux, des crises de pleurs et des accès de colère survenant soudainement, un sentiment de culpabilité de ne pas être parvenue à repousser son agresseur, des troubles de l'appétit avec une prise de poids, une aboulie, une anhédonie et des crises de panique. Elle a bénéficié d'un traitement médicamenteux contre les troubles du sommeil et à visée anxiolytique.

g.b. Elle a encore versé devant le TP une attestation du 30 août 2023 résumant les confidences de la patiente au sujet de son vécu durant la procédure. Alors qu'elle se sentait mieux après avoir déménagé, son appartement lui rappelant les faits, elle avait connu une nouvelle détérioration de son état suite à la convocation à une audience, marquée par un isolement, des difficultés de sommeil, des troubles de l'appétit avec une prise de poids, des ruminations, de l'anxiété, de la tristesse et une procrastination. Au début de l'année 2022, elle s'était plainte de vomissements, de perte de connaissance, de symptômes d'allure dissociative, d'un isolement, d'un état d'épuisement, d'un sentiment de dégoût, d'idées de mort passives et se disait particulièrement choquée. Ces manifestations symptomatiques avaient été déclenchées à la suite d'une audience au MP particulièrement éprouvante. Le 9 février 2022, elle avait rapporté de fortes envies suicidaires, d'autres victimes ayant renoncé à témoigner. Le 2 septembre 2022, elle avait ressenti une grande détresse suite au classement de sa plainte. Le dernier entretien s'était déroulé le 15 juillet 2023 : la patiente, confrontée à la proximité de l'audience de jugement, ressentait une anxiété, une labilité de l'humeur, des difficultés à gérer ses émotions, une irritabilité, une hypersensibilité, des pleurs et de l'évitement. Près de quatre ans après les faits, A______ souffrait encore d'une symptomatologie post-traumatique et anxio-dépressive. Elle avait bénéficié à plusieurs reprises au cours de son suivi d'une prescription pour un traitement anxiolytique.

g.c. Entendue le 6 mai 2022 par le MP, I______, psychologue et psychothérapeute auprès de l'UIMPV a exposé que la prévenue avait confié à sa collègue, qui avait assuré le suivi durant les deux premiers mois, qu'elle s'était trouvée dans une grande détresse et un état anormal après avoir été agressée sexuellement par une personne qu'elle considérait comme son employeur. Elle avait rapporté de nombreux symptômes et du stress. Sa collègue et elle avaient observé des symptômes de type dissociatif, la patiente ayant expliqué avoir du mal à croire que ce qu'il s'était passé était vrai, qu'elle était en colère et qu'elle ne se reconnaissait pas. Toutes les fois qu'elle était à nouveau confrontée à l'affaire, elle se sentait mal et sollicitait le renouvellement de son ordonnance.

A______ lui avait dit que sa relation avec C______ était exclusivement professionnelle et qu'elle lui avait demandé de l'argent avant les faits pour le travail effectué durant quelques week-ends, de même qu'après, parce qu'elle était en colère suite à ce qu'elle avait subi.

h. Par ordonnance du 23 août 2022, le MP a classé la procédure à l'égard de C______ ; le recours interjeté par A______ a été rejeté par arrêt de la Chambre pénale de recours (CPR) du 30 novembre 2022, lequel est entré en force (ACPR/842/2022).

Aux termes de son arrêt, la CPR a en substance retenu que, quand bien même l'on retiendrait que A______ n'avait pas été consentante, il ne ressortait pas du dossier que l'élément de contrainte eût été réalisé, pas même au plan psychologique, la relation entretenue par les parties, leur différence d'âge ou même l'expectative d'un travail par l'intéressée ne permettant pas de retenir l'existence d'un état de dépendance, d'autant moins qu'elle était parvenue à obtenir de l'argent de C______.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b.a. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

Sa reprise de contact avec C______ à l'automne 2019 avait été motivée par son besoin impératif de trouver un travail mais la relation avait glissé en flirt, à l'initiative de l'homme, jeu auquel elle s'était prêtée. Malgré cette "confusion des rôles", il était toujours question pour elle d'obtenir un emploi. Ses propositions d'aller au cinéma ou de boire des verres tenaient à ce que faisaient traditionnellement les jeunes de son âge. Pour sa part, le plaignant s'appliquait à entretenir une relation ambiguë et malsaine, alors qu'il était confronté à une jeune femme de 28 ans "fraîchement débarquée en Suisse depuis l'Iran" et qu'il était un homme parfaitement intégré, de 35 ans son aîné. Conscient de sa "position de surplomb", il décidait seul du moment où ils se voyaient, toujours au dernier moment, et tard le soir, la jeune femme devant se tenir prête à sortir quand il le lui demandait ou à se rendre à son bureau pour donner un coup de main, au pied levé. Et l'appelante de citer certains messages dont il résultait qu'il avait retiré une offre de venir travailler au dernier moment et qu'il annulait systématiquement leurs soirées. Il s'était agi d'une situation et d'un jeu aliénants au plan affectif comme professionnel. À la date du 5 novembre 2019, les parties ne s'étaient en définitive que très peu vues, dont à une unique reprise le soir, pour dîner, mais avaient échangé des centaines de textos, glissant sur un mode certes intime mais qui était demeuré "virtuel". Vu la demande franche reçue le jour-même, C______ savait que A______ sollicitait de sa part avant tout un soutien financier. Ce nonobstant, il lui a proposé d'aller dîner chez lui. Il était tout à fait invraisemblable que dans ces circonstances la jeune femme eût pris l'initiative de l'acte sexuel. Elle avait au contraire clairement dit non, ainsi qu'elle l'avait inlassablement exposé, tout en concédant son besoin d'argent et son adhésion au flirt. Son récit avait été crédibilisé par l'évocation d'un détail significatif, soit que face à sa résistance, l'homme avait dit qu'il introduirait "juste le bout", par l'état émotionnel dans lequel elle s'était trouvée soit son état dissociatif et les symptômes de stress post traumatique identifiés par ses thérapeutes. Le MP comme le TP avaient omis de relever que C______ avait tenté d'appeler A______ le 11 novembre 2019 plutôt que de se rendre à la police. Les contradictions initiales de la jeune femme au sujet des CHF 20'000.- tenaient au fait qu'elle avait honte. Au regard du contexte, dont le TP avait fait abstraction pour ne se concentrer que sur le comportement de l'appelante postérieur aux faits, il fallait admettre, à tout le moins au bénéfice du doute, qu'elle avait déposé plainte de bonne foi, dans la mesure où elle avait été constante sur son absence de consentement et donc n'avait pas voulu, envisagé ou accepté que C______ fût innocent de l'infraction de viol. De même, il n'était pas établi qu'elle avait tenté de le contraindre à lui payer les sommes de CHF 20'000.- et CHF 3'000.- plutôt qu'articulé des montants fantaisistes pour obtenir la réaction dont elle avait besoin.

b.b. Dans une déclaration écrite du 24 avril 2024 à l'attention de la juridiction d'appel, A______ admet que ses messages étaient inappropriés et se dit habitée par des principes moraux forts, ayant été élevée dans une famille de militaires. Le viol dont elle avait été victime l'avait privée de son âme et de son identité et elle demandait si elle avait mérité une punition aussi sévère pour des actes provoqués par des circonstances extérieures. Il était clair que C______ avait opéré en pleine connaissance de cause, sans laisser d'empreintes digitales, et abusant de la vulnérabilité d'une personne qui avait été en recherche d'emploi et dépourvue de soutien. Cela étant, elle regrettait ses actes et elle n'aurait pas envoyé un tel message si elle avait été en pleine possession de ses esprits.

c. Le MP et la partie plaignante concluent au rejet de l'appel, ainsi que, s'agissant du second, à la condamnation de A______ à lui payer CHF 4'500.- + TVA en couverture de ses honoraires d'avocat pour la procédure d'appel, au tarif de CHF 450.-/heure.

Ils exposent en substance qu'il était évident que la relation sexuelle avait été consentie, le tableau présenté dans le mémoire d'appel étant en contradiction manifeste avec les éléments du dossier.

Selon le plaignant, A______ avait voulu la relation sexuelle, pour favoriser ses manœuvres tendant à obtenir de l'argent de lui. Elle avait ensuite continué de jouer de séduction puis fait appel à sa sympathie, évoquant ses factures en souffrance, en vain, d'où la tentative d'extorsion. Elle avait ensuite été mue par des idées vengeresses.

D. Célibataire et sans enfant, A______ est née le ______ 1991 en Irlande, pays dont elle est ressortissante. Elle indique dans son mémoire d'appel avoir grandi en Iran, où elle a obtenu un bachelor en économie, qu'elle complétera à Genève par un master en marchés financiers. Elle est venue en Suisse en 2018 pour y trouver du travail et est titulaire d'un permis B, mais sans emploi depuis octobre 2023 et bénéficie de prestations de l'Hospice général par CHF 2'412.90 par mois, sa prime d'assurance maladie étant également prise en charge. Son loyer s'élève à CHF 1'250.- Elle a des poursuites, principalement pour des dettes d'assurance, à hauteur de CHF 3'666.-.

Elle pas d'antécédent connu.

E. Me B______, défenseure d'office dépose un état de frais comptabilisant 780 minutes d'activité durant la procédure d'appel, soit un entretien d'une heure avec la cliente, 120 minutes de relecture du dossier et 600 de rédaction du mémoire d'appel, relevant qu'il fait 28 pages.

Son activité telle que taxée par la première instance dépasse les 30 heures.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance
(art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 148 IV 409 consid. 2.2 ; 145 IV 154 consid. 1.1 ; 127 I 38 consid. 2a).

Le principe de la libre appréciation des preuves implique qu'il revient au juge de décider ce qui doit être retenu comme résultat de l'administration des preuves en se fondant sur l'aptitude de celles-ci à prouver un fait au vu de principes scientifiques, du rapprochement des divers éléments de preuve ou indices disponibles à la procédure, et sa propre expérience (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2) ; lorsque les éléments de preuve sont contradictoires, le tribunal ne se fonde pas automatiquement sur celui qui est le plus favorable au prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2 ; 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1 ; 6B_1363/2019 du 19 novembre 2020 consid. 1.2.3). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence interdit cependant au juge de se déclarer convaincu d'un fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence d'un tel fait ; des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent en revanche pas à exclure une condamnation (ATF 148 IV 409 consid. 2.2 ; 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 et 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7 ; 127 I 38 consid. 2a). Lorsque dans le cadre du complexe de faits établi suite à l'appréciation des preuves faite par le juge, il existe plusieurs hypothèses pareillement probables, le juge pénal doit choisir la plus favorable au prévenu (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.2).

2.2. Les déclarations de la victime alléguée constituent un élément de preuve que le juge doit prendre en compte dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier ; les situations de "déclarations contre déclarations", dans lesquelles les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et celles contraires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement conduire à un acquittement, l'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (arrêts du Tribunal fédéral 6B_792/2022 du 16 janvier 2024 consid. 1.1.2 ; 7B_740/2023 du 11 décembre 2023 consid. 2.1.4 ; 7B_6/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.3 ; 6B_754/2023 du 11 octobre 2023 consid. 2.1 ; 6B_265/2023 du 20 septembre 2023 consid. 2.1). Il est notoire que les victimes d'abus sexuels peuvent ne pas se confier dans un premier temps et ne donner des informations sur les événements que bien plus tard (cf. ATF 147 IV 409 consid. 5.4.1 et 5.4.2 ; AARP/392/2023 du 20 octobre 2023 consid. 2.2).

2.3. Il convient tout d'abord de relever que la présente cause à ceci de particulier que si le viol supposément commis le 5 novembre 2019 n'est pas directement l'objet du débat, il faut néanmoins l'examiner. En effet, dans son arrêt, la CPR n'a exclu que la réalisation de l'élément constitutif de la contrainte, sans trancher celle du consentement de l'appelante, et cette dernière soutient qu'il faudrait admettre qu'il n'était pas donné, ce qui est pertinent pour la subsomption s'agissant des deux infractions qui lui sont reprochées. En prolongement, la situation a ceci de paradoxal qu'alors qu'elle est l'accusatrice, non la prévenue, s'agissant du viol, elle peut néanmoins se prévaloir de la présomption d'innocence.

Il convient donc d'établir les faits à l'aune de ce qui précède.

2.3.1. La crédibilité de l'appelante est très mauvaise.

Elle a menti, non seulement, d'entrée de cause, sur le motif de sa demande de paiement de CHF 20'000.-, mais également sur d'autres éléments : il n'était pas convenu que l'intimé et elle se rendraient chez le premier, le 5 novembre 2019, alors qu'elle lui avait proposé de voir un film qui l'intéressait, sur G______ (non au cinéma comme elle a aussi soutenu) ; elle avait envoyé à une amie l'image du salon afin qu'elle sût où elle se trouvait (première version) ou quand elle s'y trouvait (seconde version), ce avant le rapport sexuel, alors qu'il est établi que l'image a été envoyée deux heures après avoir été prise, à un moment où l'intéressée était de retour chez elle et échangeait des messages avec au moins deux autres interlocutrices. L'appelante a également menti par omission (l'intimé lui avait envoyé de multiples messages, ses propres communications et propositions, auxquelles l'homme ne faisait généralement que répondre, étant passées sous silence, de même que les baisers échangés avant le 5 novembre 2019, concédés uniquement lorsque l'intimé en a fait état, ou le fait qu'elle était allée jusqu'à préparer et apporter à l'intimé un repas iranien ; prêt de CHF 1'200.- initialement tu).

Elle a forcé le trait, dépeignant l'intimé comme un prédateur sexuel (regard rivé sur sa poitrine lors du premier entretien, censé être professionnel ; évocation d'autres victimes, dont elle a cependant refusé de dévoiler l'identité ; elle savait fort bien ce que sous-entendait regarder un film au domicile de l'intimé ; comportement "bizarre" d'un potentiel employeur invitant la postulante à dîner, alors qu'il résulte clairement des messages qu'elle n'a cessé de proposer elle-même des sorties, pour ensuite reprocher à l'intimé, dans son mémoire d'appel, d'en avoir annulé plusieurs ; sa peur lorsqu'elle avait attendu l'intimé sur la terrasse de sa villa ; exploitation d'une position de "surplomb" selon la même écriture, inexistante selon la CPR comme à teneur du présent arrêt).

Elle s'est contredite (la demande de CHF 1'200.- tantôt avait pour objet un prêt, tantôt visait à faire comprendre qu'elle ne cherchait pas un salaire important ; elle avait travaillé en Iran dans des milieux sophistiqués et difficiles mais avait su s'y faire respecter puis n'avait été qu'une jeune femme naïve et sans expérience, autorisée à sortir uniquement pour fréquenter l'Université), quand elle n'a pas tenu des propos peu compréhensibles ou incohérents (l'intimé ne lui plaisait pas mais elle s'était dit qu'à force, cela pourrait changer ; il lui "semblait" qu'elle avait flirté ; la demande de prêt de CHF 2'000.- avait été une manière délicate de demander son dû ; elle ne se souvenait pas du lieu ou de la date du premier baiser, mais bien de ce que l'intimé l'avait initié ; pourquoi, si elle avait été mal à l'aise lors du premier entretien avec l'intimé dans sa boutique, effrayée lorsqu'ils sont passés chez lui avant d'aller au restaurant le 2 octobre 2019, puis importunée lors de l'essayage de bijoux, aurait-elle continué de le rechercher activement et proposé d'aller voir un film à son domicile le 5 novembre 2019 ?), et en a rajouté sur le déroulement du supposé viol (pénétration anale par le doigt ; suite à l'examen en audience de leur conversation du 5 novembre 2019, l'appelante a fini par suggérer que H______ était l'une des nombreuses victimes de l'intimé).

Elle a nié l'évidence (la photographie de ses jambes croisées avait uniquement pour but de montrer qu'elle était prête pour sortir et "all decked out" ne signifie pas "tout découvert"), elle ne voulait pas voir l'intimé durant les jours qui avait suivi le 5 novembre 2019, malgré la teneur très claire de ses messages, en particulier la demande d'aller au restaurant ; la portée de ses échanges avec l'interlocutrice qui lui suggérait de ne plus "baiser" pour seulement CHF 2'000.-).

L'appelante a encore refusé de collaborer à l'enquête, qu'il s'agît d'étayer ses dires (refus de dévoiler l'identité des autres victimes de l'intimé, de l'amie à laquelle elle avait envoyé la photographie du salon ainsi que celle de l'assistante qui lui aurait suggéré une manœuvre pour obtenir un emploi) ou d'expliquer la conversation en farsi et en anglais qu'elle avait eu avec une tierce personne après les faits de même que de communiquer l'identité de ladite interlocutrice, et a donné des réponses évasives, affirmant ne plus se souvenir de certaines circonstances, non sans une certaine théâtralité par moments (demande qu'on cessât de la "faire vomir") ou alors en invoquant sa détresse psychologique et un état de dissociation. Mieux : elle a détruit la conversation en farsi et anglais précitée, dont le contenu est accablant.

2.3.2. À bien des égards, le narratif proposé par l'appelante est contredit par les éléments du dossier. On y reviendra (infra 2.3.5). Seuls deux indices favorables à sa thèse sont présents :

2.3.2.1. Comme développé dans le mémoire d'appel, il est vrai que l'évocation de ce que l'intimé aurait dit qu'il n'allait introduire que le bout de son pénis est un élément singulier, susceptible d'être gage de crédibilité. Toutefois, ce n'est pas suffisant, face à toutes les autres incohérences déjà discutées.

2.3.2.2. Le second élément a priori favorable tient aux constatations faites par les deux thérapeutes de l'intimée, mais là encore, ce n'est pas suffisant. D'une part, il ne peut être tenu pour établi que les symptômes d'un syndrome de stress post-traumatique trouvent leur cause dans les faits dénoncés. D'autre part, et surtout, les constats des thérapeutes dépendent du récit livré exclusivement par la patiente, sans confrontation possible avec celle de tiers, y compris l'agresseur supposé, ou avec les éléments objectifs. La confrontation n'est du reste pas recherchée, car elle nuirait au lien thérapeutique. Dans le cas présent, il peut être relevé, à titre d'exemple, que l'appelante a déclaré à sa psychologue que sa relation avec l'intimé était exclusivement professionnelle et qu'elle lui avait demandé de l'argent, avant les faits, pour le travail effectué durant quelques week-ends, de même qu'après, parce qu'elle était en colère suite à ce qu'elle avait subi. Pourtant, il résulte clairement du dossier, y compris des dires de l'intéressée elle-même, que le volet professionnel du rapport n'a été que très secondaire, étant notamment rappelé que la jeune femme elle-même a dit avoir rapidement pensé que l'intimé n'avait rien à lui proposer à ce titre, qu'au moins une partie des montants requis avant les faits n'était pas en lien avec du travail fourni et que les sommes exigées ensuite étaient censées couvrir des besoins personnels précis, selon les messages envoyés, ou avaient été demandées afin d'obtenir une explication, à suivre la version soutenue dans la procédure, non pour lui permettre d'évacuer sa colère. De même, elle est allée jusqu'à évoquer en thérapie des idées suicidaires provoquées par le fait que d'autres victimes avaient renoncé à témoigner, alors que c'est elle qui a empêché leur identification, ce qui suggère qu'elles n'existent tout simplement pas.

De fait, et indépendamment du cas d'espèce, si le diagnostic de l'état de santé psychologique d'une victime alléguée peut être un indice s'ajoutant à d'autres éléments probants, il ne saurait à lui seul en pallier l'absence, encore moins permettre de faire abstraction de toutes les faiblesses d'une version. Quant au déni et à l'état dissociatif, ils ne peuvent tout expliquer, comme il sera discuté plus bas.

2.3.3. La crédibilité de l'intimé est bien meilleure. Il a été globalement précis, factuel, mesuré, constant et a livré un récit qui correspond aux éléments du dossier, à tout le moins n'est contredit par aucun. Il n'a jamais nié avoir eu un rapport sexuel avec l'appelante, ni ne s'est montré fuyant ou évasif. Tout au plus peut-on relever que ses explications sur les sommes remises à l'appelante ne sont pas d'une grande clarté non plus et supposer qu'il n'a guère envisagé que sa relation avec la jeune femme pourrait se développer au point de comporter un élément affectif, comme il semble avoir voulu le laisser entendre lorsqu'il a évoqué qu'elle était cultivée, de bonne famille et que ce qui comptait était "l'alchimie entre les êtres".

L'appel vidéo manqué de l'intimé le 11 novembre 2019 évoqué par l'appelante dans son écriture est sans pertinence. Il n'y aurait rien de surprenant à ce que l'intimé eût envisagé de parler avec l'appelante, dont il disait ne pas comprendre le comportement, avant de se raviser, sans préjudice aussi de ce que cela pourrait être dû à une mauvaise manipulation, comme cela arrive fréquemment.

2.3.4. Les deux protagonistes avaient, possiblement, un intérêt à mentir, l'appelante pour étayer une accusation mensongère puis se défendre contre sa propre mise en prévention, l'intimé pour résister à l'accusation de viol.

2.3.5. En définitive, essentiellement sur la base des éléments objectifs du dossier mais aussi du récit de l'intimé, dans la mesure où ceux-là le soutiennent, il sera retenu que l'appelante a repris contact avec lui le 14 septembre 2019 dans le cadre de ses recherches d'emploi. Le 3 octobre 2019, il l'a invitée dîner. Le lendemain, elle lui a demandé un prêt de CHF 1'200.-, qu'il lui a concédé, la thèse du message, sur conseil d'une assistante de l'intimé, pour mieux faire comprendre qu'elle n'attendait pas un salaire important étant totalement fantaisiste. À compter de ce moment au plus tard, l'appelante s'est attelée à entretenir une relation personnelle avec l'intimé, lui proposant diverses occasions de se rencontrer dans un contexte non professionnel, avec une forte composante de flirt. Elle est allée jusqu'à lui envoyer le cliché très parlant de ses jambes puis a souligné, à réception de sa manifestation d'appréciation pour ne pas dire d'appétence ("Yammy"), qu'en effet, tout était découvert, ou à lui apporter un repas iranien cuisiné de ses mains. De son côté, l'intimé a accédé à la demande de prêt, sans formalisme et sans demander de précisions s'agissant de l'échéance, et a montré de l'intérêt pour ce jeu de séduction, même s'il a beaucoup décliné les propositions de sortie. En parallèle, il a accepté non pas de lui confier un poste fixe mais de faire appel ponctuellement à ses services, pour des petites prestations n'exigeant pas de qualification.

Dans un tel contexte, l'appelante s'est elle-même placée dans un rapport où elle était demanderesse et débitrice, ce qui implique nécessairement une certaine inégalité, mais cela n'a rien d'un lien fort de dépendance, de "surplomp" pour reprendre son propos. Elle pouvait d'ailleurs à tout moment y mettre un terme, étant souligné qu'elle n'a jamais soutenu que l'intimé aurait utilisé le prêt de CHF 1'200.- comme un moyen de pression. La différence d'âge entre les protagonistes et la relativement récente arrivée de la jeune femme en Suisse n'ont aucune pertinence. À 28 ans, elle était loin d'être une toute jeune fille, sa dernière version sur l'éducation reçue en Iran n'est nullement étayée et contradictoire avec son précédent propos sur l'expérience qu'elle avait eue là-bas (et même avec l'affirmation contenue dans le mémoire d'appel selon laquelle ses propositions d'aller au cinéma ou de boire des verres tenaient à ce que faisaient traditionnellement les jeunes de son âge, car il y a là l'aveu de ce qu'elle était au moins habituée à sortir de la sorte) et elle avait par ailleurs de bonne ressources intellectuelles, lui ayant permis d'acquérir une formation universitaire complète. Sa façon de s'exprimer dans ses messages à l'intimé ou avec ses autres interlocutrices montrent du reste qu'elle n'avait rien de naïf.

Le 3 novembre 2019, l'appelante a proposé à l'intimé de voir un film qui l'intéressait sur G______. Comme elle l'a elle-même déclaré durant l'instruction préliminaire, cela signifiait nécessairement se rendre chez lui pour le voir sur l'écran de télévision. Ils sont convenus de le faire le surlendemain. Le jour de leur rendez-vous, elle a formulé une nouvelle demande de prêt – ici encore, il faut s'en tenir au texte littéral de son message –, de CHF 2'000.-. L'intimé est allé la chercher à 20h42 et il se sont rendus, comme convenu, à son domicile. L'appelante n'avait donc aucune raison d'être surprise, ni d'avoir peur et il n'est pas établi que tel aurait été le cas, la soi-disant mesure de précaution alléguée (envoi d'une photographie à une amie) n'ayant pas été prise.

Les parties ont ensuite eu un rapport sexuel, puis l'intimé l'a raccompagnée et lui a remis les CHF 2'000.- demandés.

Ce n'est qu'à son retour chez elle que l'appelante a envoyé à une connaissance une photographie qu'elle avait prise dans le salon. Elle a demandé à une autre amie si elle était sortie, ce que celle-ci a compris comme une proposition de la rejoindre, et, comme ce n'était pas le cas, elles ont échangé des banalités sur un ton léger. Surtout, l'appelante a eu la conversation au cours de laquelle elle a dit qu'elle se sentait comme une prostituée, et il lui a été suggérer de ne plus "baiser" pour seulement CHF 2'000.-.

Dès le lendemain, l'appelante a pris l'initiative de maintenir le contact avec l'intimé, d'abord sur un ton amical, le complimentant sur sa vitrine ou lui envoyant des liens vers des vidéos humoristiques, puis nettement plus aguicheur, lorsqu'elle lui a envoyé les photographies de lingerie et l'a taquiné, lui disant qu'elle ne lui dirait pas quel modèle elle allait choisir. Elle a ensuite proposé d'aller dîner le samedi 10 novembre, mais l'intimé a répondu que ce serait pour dimanche. Cette réponse n'a pas convenu, car l'appelante a craint une annulation, comme cela était déjà arrivé, pensant qu'il réservait ses dimanches soirs à la famille. Elle lui a dès lors dit qu'elle avait fait ses calculs et avait besoin de CHF 20'000.- indiquant clairement dans quel but, soit payer ses frais d'écolage, son loyer et des factures en souffrance, et précisant qu'elle lui demandait de l'aider.

Ce n'est qu'à compter du lendemain, que, sans réponse, elle a soudainement changé de ton, l'accusant d'avoir pris ce qu'il voulait alors qu'elle se souvenait d'avoir dit non. Elle a ensuite menacé de porter atteinte à sa réputation, exposé qu'elle était dans l'urgence parce qu'elle avait reçu un commandement de payer, et formulé une demande supplémentaire de CHF 3'000.- pour des frais de gynécologue.

L'intimé n'a pas cédé et elle a déposé plainte pour viol.

2.3.6. Vu le déroulement des événements avant l'acte sexuel et après celui-ci, ainsi que l'absence de crédibilité de l'appelante, il n'y a aucune place, même sous le prisme du principe in dubio pro reo appliqué à la supposée victime, pour la version selon laquelle l'appelante ne voulait pas, le 5 novembre 2019, entretenir un rapport sexuel avec l'intimé. Au contraire, il ne peut qu'être tenu pour établi qu'elle a délibérément choisi de le séduire, dans l'idée de devenir sa maîtresse et d'obtenir de lui de l'argent. Il est hautement probable qu'elle n'était pas à l'aise avec ce comportement, pour des raisons qui lui sont personnelles, preuve en étant son commentaire selon lequel elle se sentait comme une prostituée, auquel on peut ajouter l'allusion au fait que l'intimé l'avait précédemment déjà traitée comme telle lorsqu'il lui avait remis CHF 200.-, ou, plus parlant encore, sa déclaration selon laquelle l'intimé avait voulu qu'elle se comportât comme une prostituée, et que, bizarrement, elle l'avait fait. Il reste que tel était son choix. Dans les jours qui ont suivi l'acte, elle a continué de poursuivre cet objectif, mais elle a dû trouver que cela n'allait pas assez vite, peut-être parce qu'elle était dans l'urgence, comme elle l'a dit, et aussi parce qu'elle n'était pas certaine de parvenir à ses fins. Lorsqu'elle a craint que le dîner du dimanche n'aurait pas lieu, elle a choisi de présenter une demande d'une somme importante, mais en faisant dans un premier temps appel à l'empathie de l'intimé. Puis, elle a articulé l'accusation de viol et la menace de porter atteinte à sa réputation pour l'obtenir.

Comme déjà dit, les textos échangés avec son interlocutrice de langue persane et avec l'intimé après le 5 novembre 2019 sont accablants et la lecture que l'intéressée propose des seconds, non sans avoir initialement prétendu que la somme de CHF 20'000.- lui était due au titre de rémunération, est totalement incohérente. On ne voit pas comment on pourrait préférer à une interprétation littérale, qui a un sens et s'inscrit parfaitement dans la logique des événements, sa version selon laquelle elle aurait écrit n'importe quoi pour obtenir une réaction de l'intimé, et aurait choisi, selon une plus récente explication, au titre de ce n'importe quoi, de demander de l'argent parce que ce serait le seul langage que l'intimé comprendrait. Cette dernière affirmation laisse d'ailleurs perplexe, la relation de l'intéressé à l'argent n'ayant jamais été au centre du dossier.

C'est ici qu'il faut souligner que le déni et la dissociation ne peuvent pas tout expliquer : s'il est constant que les victimes d'agression sexuelle (notamment) ont souvent des comportements inattendus, durant les faits mais aussi après, ce qui peut aller jusqu'à rester dans leur relation avec leur bourreau, la Chambre de céans n'a jamais observé d'attitude telle celle que l'appelante a eue dans les jours qui ont suivi le prétendu viol, consistant à maintenir le jeu de séduction, à demander à revoir celui dont elle soutient par ailleurs qu'il ne l'attirait pas, pour lequel elle n'a jamais dit voir éprouvé des sentiments amoureux et qu'elle ne fréquentait que depuis peu, avant de lui demander de l'argent, d'abord en faisant appel à sa générosité et en invoquant des besoins pressants qu'elle a pris soin d'expliciter, pour ne l'accuser qu'en dernier recours de l'avoir violée. Il n'est pas davantage usuel qu'une victime dans le déni dépose plainte pénale pour viol tout en ne présentant volontairement qu'une version très tronquée des événements, ce qui démontre qu'elle est suffisamment dans la maîtrise de ses ressources pour concevoir une stratégie.

Il est donc établi que l'appelante a, intentionnellement, faussement accusé l'intimé de viol par messagerie, et précisé que sa réputation en pâtirait si cela se savait, pour obtenir le paiement de la somme de CHF 20'000.- puis d'un montant supplémentaire de CHF 3'000.-, ainsi que lorsqu'elle a déposé plainte à son encontre.

2.3.7. La motivation de l'appelante est évidente s'agissant de soutirer des fonds de l'intimé. L'objectif est moins évident en ce qui concerne le dépôt de la plainte, mais deux peuvent être envisagés, qui ne s'excluent d'ailleurs pas : d'une part, elle a pu avoir décidé de mettre sa menace à exécution, dans l'idée que la pression supplémentaire lui permettrait de négocier un retrait de plainte ; d'autre part, elle a pu avoir réalisé qu'elle était allée trop loin lorsque l'intimé a parlé de son avocat et envisager qu'il était prudent de prendre les devants.

3. 3.1. Aux termes de l'art. 156 ch. 1 CP, quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura déterminé une personne à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers, en usant de violence ou en la menaçant d'un dommage sérieux, sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Pour que cette infraction soit objectivement réalisée, il faut que l'auteur, par un moyen de contrainte, ait déterminé une personne à accomplir un acte portant atteinte à son patrimoine ou à celui d'un tiers (arrêt du Tribunal fédéral 6B_275/2016 du 9 décembre 2016 consid. 4.1).

La loi prévoit deux moyens de contrainte : la violence – qui n'entre pas en considération en l'espèce – et la menace d'un dommage sérieux. La menace est un moyen de pression psychologique. L'auteur doit faire craindre à la victime un inconvénient, dont l'arrivée paraît dépendre de sa volonté (ATF 122 IV 322 consid. 1a p. 324 ad art. 181 CP). La menace peut être expresse ou tacite et être signifiée par n'importe quel moyen. Le dommage évoqué peut toucher n'importe quel intérêt juridiquement protégé (arrêt du Tribunal fédéral 6S.277/2003 du 23 septembre 2003 consid. 2.1). Il faut toutefois qu'il soit sérieux, c'est-à-dire que la perspective de l'inconvénient soit propre, pour un destinataire raisonnable, à l'amener à adopter un comportement qu'il n'aurait pas eu s'il avait eu toute sa liberté de décision ; le caractère sérieux du dommage doit être évalué en fonction de critères objectifs et non pas d'après les réactions du destinataire (ATF 122 IV 322 consid. 1a p. 325 ad art. 181 CP ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_275/2016 du 9 décembre 2016 consid. 4.2.1 et les références).

L'usage de la contrainte doit avoir déterminé la personne visée à accomplir un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. Cela implique d'abord que la personne visée ait conservé une certaine liberté de choix et se lèse elle-même ou lèse autrui par son acte. Il faut en outre un dommage, c'est-à-dire une lésion du patrimoine sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif (cf.
ATF 122 IV 279 consid. 2a p. 281 ; ATF 121 IV 104 consid. 2c; arrêt du Tribunal fédéral 6B_275/2016 du 9 décembre 2016 consid. 4.2.3 et les références).

L'extorsion suppose un lien de causalité entre ces divers éléments. Autrement dit, l'usage de la contrainte doit avoir été la cause de l'acte préjudiciable aux intérêts pécuniaires, lequel doit être la cause du dommage (arrêt du Tribunal fédéral 6B_275/2016 du 9 décembre 2016 consid. 4.2.4 et les références).

Sur le plan subjectif, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement, le dol éventuel étant suffisant, et dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (arrêt du Tribunal fédéral 6B_275/2016 du 9 décembre 2016 consid. 4.2.5).

3.2. Selon l'art. 303 ch. 1 al. 1 CP, quiconque dénonce à l'autorité, comme auteur d'un crime ou d'un délit, une personne qu'il sait innocente, en vue de faire ouvrir contre elle une poursuite pénale, est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Une dénonciation n'est calomnieuse que si la personne mise en cause est innocente. Est innocente, la personne qui n'a pas commis les faits délictueux qui lui sont faussement imputés. Est également considérée comme innocente la personne dont l'innocence - sous réserve d'une reprise de la procédure - a été constatée avec force de chose jugée par une décision de non-lieu ou d'acquittement. Il est en effet dans l'intérêt de la sécurité du droit qu'une décision ayant acquis force de chose jugée ne puisse plus être contestée dans une procédure ultérieure. Un précédent jugement ou une décision d'acquittement ne lie toutefois le juge appelé à statuer sur l'infraction de dénonciation calomnieuse dans une nouvelle procédure que pour autant que cette première décision renferme une constatation sur l'imputabilité d'une infraction pénale à la personne dénoncée. Dans la mesure où la précédente procédure a été classée pour des motifs d'opportunité ou en vertu de l'art. 66 bis aCP (art. 54 CP), cela n'empêche pas le juge appelé à statuer sur l'infraction de dénonciation calomnieuse, de statuer à nouveau sur la culpabilité de la personne dénoncée (ATF 136 IV 170 consid. 2.1 p. 175 s. et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1289/2018 du 20 février 2019 consid. 1.2.1).

3.3. Se plaçant sur le terrain de l'établissement des faits, l'appelante ne conteste, à raison, pas que ceux qui lui sont reprochés dans l'ordonnance pénale et ont été retenus ci-avant réalisent tous les éléments constitutifs objectifs et subjectifs de deux infractions précitées, avec la précision que celle de l'art. 156 ch. 1 CP en est restée au stade de la tentative, l'intimé n'ayant pas cédé.

En particulier, il est manifeste qu'en affirmant à l'intimé qu'il l'avait violée, ce dans le contexte de sa, puis ses, demande(s) d'argent et en évoquant le risque réputationnel, elle l'a menacé d'un inconvénient majeur, soit celui d'être publiquement accusé d'avoir commis un crime infâmant. De surcroît, vu le caractère pénal du reproche, la menace du dépôt de plainte était sous-jacente. L'intimé a d'ailleurs bien compris la gravité de la situation, exposant avec fermeté qu'il ferait suivre les messages à son avocat.

Le verdict de culpabilité est partant confirmé et l'appel rejeté.

4. Dans son mémoire d'appel, l'appelante ne discute pas le genre ou la quotité des peines infligées ; dans son attestation écrite, elle évoque une punition sévère, mais elle semble plutôt remettre en cause le principe de sa culpabilité, d'autant plus si on met ce document en perspective avec l'écriture de son avocate. Il sera partant renvoyé aux considérants du jugement de première instance, que la juridiction d'appel fait siens (art. 82 al. 4 CP), avec la nuance qui précède s'agissant du mobile pour la dénonciation calomnieuse (cf. supra consid. 2.3.7), nuance qui n'a pas de portée sur la fixation de la peine, la motivation demeurant, en toute hypothèse, purement égoïste.

Il convient d'ajouter que l'appelante n'a guère avancé sur le chemin de la prise de conscience depuis le prononcé de première instance. Elle a certes fait état de ses regrets dans son attestation écrite, mais elle persiste à soutenir qu'elle a été violée.

5. Elle succombe intégralement et supportera partant les frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument d'arrêt de CHF 2'000.- (art. 428 al. 1 CPP et art. 14 al. 1 let e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]). Il n'y a pas lieu de revenir sur sa condamnation à ceux de la procédure préliminaire et de première instance (art. 428 al. 3 CPP a contrario).

6. 6.1. La décision sur le sort des frais de la procédure préjugeant de celle sur les indemnités de procédure au sens des art. 429, 433 et 436 CPP (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_548/2018 du 18 juillet 2018 consid. 1.1.2 ; 6B_385/2017 du 5 décembre 2017 consid. 2.1), la condamnation de l'appelante à couvrir l'intimé de ses dépenses nécessaires exposées durant la procédure préliminaire et de première instance sera maintenue, et doublée de l'obligation d'en faire autant pour la procédure d'appel.

6.2. L'intimé réclame la couverture de 10 heures de travail de ses deux conseils juridiques privés pour la procédure d'appel, au taux horaire de CHF 450.-. Si ce tarif est conforme à la pratique cantonale, le client ne produit aucun relevé d'opérations permettant de vérifier l'adéquation du temps facturé. Ses avocats connaissaient parfaitement le dossier, pour l'avoir soutenu et plaidé en première instance ; par ailleurs sa position en appel était nettement plus confortable que celle de sa partie adverse, dont les chances de succès du recours étaient faibles d'entrée de cause. Cela étant, il est vrai aussi que les indemnités fondées sur les art. 429 ou 433 et 436 CPP ne sont pas soumises aux mêmes exigences strictes d'expédience et d'efficacité que la rémunération à l'assistance judiciaire. Dans ces circonstances, il apparaît correct de retenir le même temps de travail sur dossier (y compris la rédaction du mémoire de réponse), soit six heures (cf. infra consid. 7.3), auxquelles on ajoutera une heure de conférence, communications et activités diverses, ainsi que la TVA au taux de 8.1%.

L'appelante sera donc condamnée à payer à l'intimé la somme de CHF 3'405.15 (comprenant CHF 255.15 de TVA au taux de 8.1%).

7. 7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès, soit CHF 200.- heure pour une cheffe d'Étude (art.. 16 al. 1 let. a du règlement sur l'assistance juridique [RAJ])

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd. Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

7.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions

7.3. En l'occurrence, les douze heures de travail sur dossier facturées par la défenseure d'office de l'appelante sont fortement excessives. L'ayant suivi depuis le début de la procédure, celle-ci connaissait parfaitement bien le dossier, qui n'était par ailleurs ni volumineux, ni complexe, au plan factuel comme juridique. Certes, le mémoire d'appel fait 28 pages (page de garde comprise), mais cela tient au choix de reproduire intégralement le dispositif du jugement et les conclusions déjà prises dans la déclaration d'appel, ainsi que de présenter les événements comme on le fait en procédure civile (un allégué par fait avec référence au moyen de preuve invoqué), ce qui prend de la place sur le papier ; en prolongement, la partie en droit comporte de longs rappels de principes juridiques connus. Cette façon de procéder ne satisfait pas aux exigences d'expédience et d'efficacité régissant l'assistance judiciaire.

On admettra donc six heures de travail sur dossier + la conférence avec la cliente + le forfait de 10% (non 20% vu le nombre d'heures total consacré à la cause) couvrant les activités diverses + la TVA au taux de 8.1%.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 1'664.75.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1627/2023 rendu le 13 décembre 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/24616/2019.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 2'215.-, qui comprennent un émolument de CHF 2'000.- (art. 428 al. 1 CPP).

La condamne à payer CHF 3'405.15 à C______ en couverture de ses dépenses nécessaires provoquées par la procédure d'appel (art. 433 et 436 CPP).

Arrête à CHF 1'664.75, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de sa défenseure d'office, Me B______.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant

Déclare A______ coupable de tentative d'extorsion et chantage (art. 156 ch. 1 cum 22 al. 1 CP) et de dénonciation calomnieuse (art. 303 ch. 1 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 180 jours, sous déduction de 1 jour de détention avant jugement (art. 40 CP).

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 1'000.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 36 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne la confiscation et la destruction du [téléphone de marque] J______/1______ [modèle] figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 2______ (art. 69 CP).

Renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Fixe à CHF 7'475.75 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 4'738.05, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

[...]

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-. "

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Casier judiciaire suisse, à l’Office cantonal de la population et des migrations et au Service des contraventions.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

e.r. Delphine GONSETH

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

5338.05

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

140.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'215.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

7'553.05