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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/17728/2017

AARP/184/2023 du 30.05.2023 sur JTDP/190/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : FIXATION DE LA PEINE;EXEMPTION DE PEINE;ATTÉNUATION DE LA PEINE;CRÉANCE
Normes : CP.47; CP.49; CP.48; CP.71
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17728/2017 AARP/184/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du vendredi 26 mai 2023

statuant suite à l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_220/2022 du 31 octobre 2022 admettant partiellement le recours du Ministère public contre l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 13 décembre 2021

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

A______, domicilié ______, FRANCE, comparant par Me M______, avocat,

B______, domicilié ______ [GE], comparant par Me N______, avocat,

C______, domicilié ______ [GE], comparant par Me O______, avocat, ______, et Me P______, avocat,

D______, domicilié ______ [GE], comparant par Me Q______ et Me R______, avocats, ______, et Me S______, avocate,

appelants,


contre le jugement JTDP/190/2021 rendu le 22 février 2021 par le Tribunal de police.


EN FAIT :

A. a.a. Par jugement du 22 février 2021 (ci-après : le jugement entrepris), le Tribunal de police (TP) a :

-        reconnu A______ coupable d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies du Code pénal [CP]), de violation du secret de fonction (art. 320 ch. 1 CP) et d'instigation à abus d'autorité (art. 312 CP et 24 al. 1 CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 360 jours-amende, à CHF 300.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : deux ans) ;

-        acquitté A______ de complicité d'acceptation d'un avantage pour les faits visés au point 1.2.2 de l'acte d'accusation (art. 322sexies CP et 25 CP) et de violation du secret de fonction pour ceux visés aux tirets 3 et 4 du point 1.2.3 de l'acte d'accusation (art. 320 ch. 1 CP) ;

-        prononcé à l'encontre de A______, en faveur de l'État de Genève, une créance compensatrice de CHF 10'000.- (art. 71 al. 1 CP) ;

-        reconnu B______ coupable de complicité d'octroi d'un avantage (art. 322quinquies CP et 25 CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende, à CHF 30.- l'unité, peine complémentaire à celle prononcée le 4 août 2017 par le Ministère public (art. 49 al. 2 CP), avec sursis (délai d'épreuve : deux ans) ;

-        acquitté B______ d'octroi d'un avantage pour les faits visés au point 1.3.2 de l'acte d'accusation (art. 322quinquies CP) ;

-        reconnu C______ coupable d'octroi d'un avantage (art. 322quinquies CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 240 jours-amende, à CHF 1'100.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : deux ans) ;

-        acquitté C______ d'octroi d'un avantage pour les faits visés au point 1.4.2 de l'acte d'accusation (art. 322quinquies CP) ;

-        reconnu D______ coupable d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 300 jours-amende, à CHF 400.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : deux ans) ;

-        acquitté D______ d'acceptation d'un avantage pour les faits visés au point 1.1.2 de l'acte d'accusation (art. 322sexies CP) ;

-        prononcé à l'encontre de D______, en faveur de l'État de Genève, une créance compensatrice de CHF 50'000.- (art. 71 al. 1 CP).

A______, B______, C______ et D______ ont été condamnés, à raison de CHF 2'200.- chacun, aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, en CHF 10'226.-.

Le TP a alloué, à la charge de l'État de Genève, CHF 17'932.05 à A______, CHF 11'086.35 à C______ et CHF 10'016.10 à D______, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de leurs droits de procédure, en considération des acquittements prononcés (art. 429 al. 1 let. a CPP).

a.b. Selon la première juge, D______ et A______ ne s'étaient pas rendus coupables de l'infraction réprimée à l'art. 322sexies CP pour avoir accepté l'avantage offert par les autorités émiraties mais bien celui, indu, offert par C______ et B______.

b. Par arrêt du 13 décembre 2021, la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a :

-        confirmé les condamnations prononcées par le TP à l'égard de A______ des chefs de violation du secret de fonction (art. 320 ch. 1 CP ; chiffre 1.2.3 tirets 1 et 2 de l'acte d'accusation) et d'instigation à abus d'autorité (art. 312 CP et 24 al. 1 CP ; chiffre 1.2.4 de l'acte d'accusation), ainsi que les acquittements de complicité d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies CP et 25 CP ; chiffre 1.2.2 de l'acte d'accusation) et de violation du secret de fonction pour les faits visés aux tirets 3 et 4 du point 1.2.3 de l'acte d'accusation (art. 320 ch. 1 CP) ;

-        acquitté A______ d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies CP ; chiffre 1.2.1 de l'acte d'accusation),

-        condamné A______ à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, à CHF 300.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : deux ans) ;

-        intégralement acquitté C______, B______ et D______.

La CPAR leur a alloué, à la charge de l'État de Genève, les sommes suivantes pour leurs frais de défense (TVA comprise) encourus lors de la procédure préliminaire et de première instance, puis de la procédure d'appel, en raison des acquittements (nouveaux et/ou confirmés) :

-        A______, CHF 38'250.- (procédure préliminaire et de première instance) et CHF 20'250.- (procédure d'appel) ;

-        C______, CHF 62'277.55 (procédure préliminaire et de première instance) et CHF 21'809.25 (procédure d'appel) ;

-        D______, CHF 25'524.90 (procédure préliminaire et de première instance) et CHF 14'539.50 (procédure d'appel).

Les frais de la procédure préliminaire et de première instance, dont la répartition a été revue compte tenu des nouveaux acquittements, ont été mis à la charge des appelants comme suit, à l'exclusion du prévenu C______ à l'égard duquel aucun reproche ne pouvait être fait :

-        A______ : CHF 4'198.35 ;

-        B______ : CHF 789.65 ;

-        D______ : CHF 789.65.

A______, ayant partiellement succombé, la CPAR a mis à sa charge 1/8ème des frais de la procédure d'appel, arrêtés à CHF 8'815.-, soit CHF 1'101.90.

b.a. En substance, le Ministère public (MP) avait requis que :

-        A______ fut reconnu coupable de toutes les infractions retenues dans l'acte d'accusation, à l'exception des faits visés aux tirets 3 et 4 du point 1.2.3, et condamné à une peine privative de liberté de 14 mois, avec sursis, ainsi que le prononcé, en faveur de l'État de Genève, d'une créance compensatrice de CHF 10'000.- ;

-        B______ fut reconnu coupable de toutes les infractions retenues dans l'acte d'accusation et condamné à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis ;

-        C______ fut reconnu coupable de toutes les infractions retenues dans l'acte d'accusation et condamné à une peine privative de liberté de 12 mois, avec sursis ;

-        D______ fut reconnu coupable de toutes les infractions retenues dans l'acte d'accusation et condamné à une peine privative de liberté de 14 mois, avec sursis, ainsi que le prononcé, en faveur de l'État de Genève, d'une créance compensatrice de CHF 84'000.-.

b.b. Les quatre prévenus avaient plaidé l’acquittement, frais à la charge de l’État, trois d’entre eux prenant en outre des conclusions en indemnisation pour la procédure préliminaire et de première instance, ainsi que pour la procédure d'appel. A______ avait également réclamé une indemnité pour tort moral de CHF 10'000.-.

c. Par arrêt 6B_220/2022 du 31 octobre 2022 (ci-après : l'arrêt de renvoi), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours du MP en ce qu'il portait sur les acquittements d'octroi/acceptation d'un avantage en lien avec le voyage de 2015 (art. 322quinquies et 322sexies CP ; chiffres 1.1.1, 1.2.1, 1.3.1 et 1.4.1 de l'acte d'accusation) des quatre prévenus. L'arrêt attaqué a été annulé dans cette mesure et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.

Les juges fédéraux ont retenu que D______ et A______ avaient commis l'infraction d'acceptation d'un avantage en lien avec les accusations relatives au voyage à Abou Dhabi (art. 322sexies CP), tant pour avoir accepté l'avantage offert par les autorités émiraties que celui offert par C______, avec la complicité de B______, consacrant de la sorte une aggravation de la culpabilité retenue en première instance.

Le Tribunal fédéral a également jugé que C______ avait commis l'infraction d'octroi d'un avantage au sens de l'art. 322quinquies CP comme auteur direct et B______ comme complice (art. 25 cum art. 322quinquies CP).

La Haute Cour a confirmé l'acquittement des quatre prévenus des chefs d'octroi / acceptation d'un avantage dans le volet du sondage F______ (art. 322quinquies et 322sexies CP).

B. Il est renvoyé à l'arrêt de la Cour de céans du 13 décembre 2021 s'agissant des faits encore pertinents à ce stade, soit les volets "Voyage à Abou Dhabi", "Autorisation d'exploiter [l'établissement] G______" et "Messages des 27 et 28 février 2017 de A______ à B______", étant rappelé que l'établissement des faits y opéré n'a été contesté par aucune des parties et pas discuté par le Tribunal fédéral, qui s'y est référé.

C. a. À son retour du Tribunal fédéral, la procédure s'est poursuivie devant la CPAR par la voie écrite, avec l'accord des parties.

b. Le MP conclut au prononcé :

-        d'une peine pécuniaire de 360 jours-amende, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans), à l'encontre de D______ (CHF 400.- l'unité) et A______ (CHF 300.- l'unité), ainsi que d'une créance compensatrice à concurrence de l'enrichissement des prévenus, soit CHF 50'000.- pour D______ et CHF 10'000.- pour A______ ;

-        d'une peine pécuniaire de 240 jours-amende, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans), à l'encontre de C______ (CHF 1'100.- l'unité) ;

-        d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans), à l'encontre de B______ (CHF 30.- l'unité).

L'intégralité des frais de la procédure devait en outre être mise à leur charge et leurs conclusions en indemnisation rejetées.

c.a. A______, C______ et D______ requièrent une exemption de peine en lien avec le voyage de 2015 au sens de l'art. 54 CP, chacun évoquant en particulier les conséquences subies du fait de la médiatisation de l'affaire.

A______ invoque également à l'appui d'une exemption ou atténuation de peine, l'arrestation provisoire dont il a fait l'objet lors de sa première audition, infondée selon lui, puisque les faits reprochés ne justifiaient pas le prononcé d'une peine privative de liberté.

Subsidiairement, ils concluent tous trois à une atténuation de la peine qui serait prononcée à leur encontre en application de l'art. 54 CP et vu l'écoulement du temps.

D______ et C______ se prévalent, au titre de l'appréciation de la gravité de la faute comme de leurs conclusions en exemption/atténuation de peine, de l'absence de jurisprudence claire, au moment des faits, sur les contours des normes consacrant les infractions retenues et d'une interprétation extensive qu'en aurait fait le Tribunal fédéral dans l'arrêt de renvoi.

c.b. A______ sollicite le plein de ses conclusions en indemnisation produites le 8 octobre 2021, ainsi que la réparation de son tort moral (art. 429 al. 1 let. a et c CPP). Subsidiairement, il conclut à l'octroi d'une indemnité de CHF 28'057.05 pour ses frais de défense (CHF 17'932.05 pour la procédure préliminaire et de première instance et CHF 10'125.- pour celle d'appel). Il demande également qu'il soit tenu compte des conséquences financières de son récent licenciement dans la détermination du montant du jour-amende, cas échéant. A titre "encore plus subsidiaire", il s'en rapporte à justice en ce qui concerne la créance compensatrice.

c.c. C______ conclut au paiement de CHF 21'991.35 pour ses frais de défense (CHF 11'086.35 pour la procédure préliminaire et de première instance et CHF 10'905.- pour celle d'appel).

c.d. D______ sollicite une indemnité de CHF 17'785.- pour ses frais de défense en lien avec l'acquittement dans le volet du sondage F______ (CHF 10'016.10 pour la procédure préliminaire et de première instance, CHF 7'269.75 pour celle d'appel et CHF 500.-, indemnité fixée par le Tribunal fédéral dans l'arrêt de renvoi).

Ce condamné s'oppose en outre au prononcé d'une créance compensatrice, subsidiairement conclut à ce que le montant tel que requis par le MP en soit réduit. La valeur marchande du voyage n'était pas déterminable. L'art. 322sexies protégeait un bien juridique collectif, de sorte que le prononcé d'une créance compensatrice poursuivrait un but exclusivement punitif, ce qui justifierait une réduction en application analogique de l'art. 48 CP conformément à la jurisprudence rendue dans l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_430/2012 du 8 juillet 2013.

d. B______ et C______ concluent à ce que le délai d'épreuve soit ramené à deux ans, comme retenu en première instance, étant précisé que le premier ne conteste pas le nombre de jour-amende requis par le MP.

D. a. Il est renvoyé aux développements de la décision du 13 décembre 2021 s'agissant de la situation personnelle de A______, avec les précisions suivantes (cf. pt D).

A______ est directeur pour la région Suisse et Grand Genève d'un promoteur immobilier. Son contrat de travail prendra fin le 30 juin 2023 suite à son licenciement. Il a conservé quelques mandats de consultant à côté de son activité dépendante.

Selon la déclaration fiscale 2019 déposée en première instance, son revenu annuel brut était de l'ordre de CHF 201'000.- (constitué principalement de son salaire brut auprès de son employeur [CHF 140'000.-] et de ses revenus de consultant indépendant [54'000.-]).

Selon une simulation de ses droits au chômage à partir du 1er juillet 2023 réalisée par A______, à défaut de trouver un nouvel emploi, il aurait droit à une indemnisation mensuelle brute d'EUR 7'842.60 les six premiers mois, puis d'EUR 5'489.70.

Il n’a pas d’antécédent.

b. B______ est né en 1966. Il est marié et a quatre enfants, dont trois étaient à sa charge lors des débats d'appel le 11 octobre 2021.

Il a suivi des études en ______, obtenant un CFC puis un diplôme du J______ en ______ et ______. Il a travaillé en qualité de directeur de K______ SA jusqu'en juin 2020. Il travaille pour L______ SA, dont il est actionnaire à 50%, soit la société qui a conclu le bail à ferme pour les locaux de [l'établissement] G______. En octobre 2021, son salaire était de CHF 72'000.- net par année et sa dette envers K______ SA s'élevait à CHF 130'000.- qu'il remboursait petit à petit.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, il a été condamné le 4 août 2017 par le Ministère public à une peine pécuniaire de 45 jours-amende, à CHF 60.-, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans) ainsi qu'à une amende de CHF 1'100.- pour des infractions à la LCR.

c. C______ est né en 1970. Il est marié et a trois enfants.

Il est titulaire d'un Bachelor en ______. Il est actif dans le domaine de l'immobilier et détient plusieurs sociétés.

Il n’a aucun antécédent inscrit à son casier judiciaire.

d. D______ est né en 1978. Il est marié et a trois enfants à sa charge.

Il a suivi des études de droit et obtenu un Master en 2006. Il a eu une activité indépendante avant de devenir Conseiller administratif, puis Conseiller d'État, exerçant deux mandats successivement, avant de démissionner, dans le sillage de la présente affaire, et de se présenter, sans succès, à sa propre réélection.

Il a ensuite exercé des fonctions de cadre dans une entreprise active dans le domaine de la cybersécurité.

Il a été élu au Grand conseil et au Conseil d'État genevois le 28 avril 2023 pour la législature 2023-2028 et doit encore formellement choisir entre les deux mandats, selon ce que rapporte la presse. Il est permis de tenir pour acquis qu'il optera pour le second et entrera dans sa nouvelle fonction de Conseiller d'État le 1er juin 2023.

Il n’a pas d’antécédent.

EN DROIT :

1. 1.1. Un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral lie l'autorité cantonale à laquelle la cause est renvoyée, laquelle voit sa cognition limitée par les motifs dudit arrêt, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral (ATF 104 IV 276 consid. 3b et 103 IV 73 consid. 1) et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou l'ont été sans succès (ATF 131 III 91 consid. 5.2). Il n'est pas possible de remettre en cause ce qui a été admis, même implicitement, par ce dernier. L'examen juridique se limite donc aux questions laissées ouvertes par l'arrêt de renvoi, ainsi qu'aux conséquences qui en découlent ou aux problèmes qui leur sont liés (ATF 135 III 334 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_588/2012 du 11 février 2013 consid. 3.1 et 6B_534/2011 du 5 janvier 2012 consid. 1.2).

La motivation de l'arrêt de renvoi détermine dans quelle mesure la cour cantonale est liée à la première décision, décision de renvoi qui fixe aussi bien le cadre du nouvel état de fait que celui de la nouvelle motivation juridique (ATF 135 III 334 consid. 2).

1.2. Conformément aux considérants de l'arrêt du Tribunal fédéral du 31 octobre 2022, la nouvelle décision de la Cour de céans, statuant à nouveau, doit uniquement porter sur :

-        le prononcé formel des verdicts de culpabilité supplémentaires retenus par le Tribunal fédéral ;

-        la fixation de la peine des appelants A______, C______, B______ et D______ ;

-        le prononcé de créances compensatrices ;

-        les frais et indemnités.

2. 2.1. Les infractions d'octroi ou acceptation d'un avantage (art. 322quinquies et 322sexies CP) et de violation du secret de fonction (art. 320 ch. 1 CP) sont passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. L'abus d'autorité (art. 312 CP) est sanctionné d'une peine privative de liberté de cinq ans ou d'une peine pécuniaire (art. 312 CP).

2.2. La réforme du droit des sanctions entrée en vigueur le 1er janvier 2018 marque, globalement, un durcissement du droit des sanctions (Message relatif à la modification du Code pénal et du Code pénal militaire du 4 avril 2012, FF 2012 4385 ss ; M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, Rem. prél. ad art. 34 à 41, n. 2 ss).

Le nouveau droit est notamment plus favorable lorsque seule une peine pécuniaire entre en ligne de compte, puisque le quantum de la peine menace est de 180 jours amende (art. 34 al. 1 CP) et non plus de 360 jours amende (arrêt du Tribunal fédéral 6B_712/2018 du 18 décembre 2019 consid. 3.1) ; il ne l'est en revanche pas lorsque tant une peine privative de liberté qu'une peine pécuniaire peuvent être envisagées, dans la mesure où une quotité supérieure à 180 jours impose le choix de la première.

En l’occurrence, vu la quotité de la peine concrètement adéquate, le nouveau droit n'est pas plus favorable aux appelants, de sorte qu’il convient d’appliquer l’ancien droit.

2.3. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1).

2.4. Conformément à l'art. 34 aCP, sauf disposition contraire de la loi, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1). Le jour-amende est de 3000.- francs au plus. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).

2.5. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

2.6. D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion.

2.7. Les conséquences pénales d'une erreur sur l'illicéité dépendent de son caractère évitable ou inévitable. L'auteur qui commet une erreur inévitable est non coupable et doit être acquitté (art. 21, 1ère phrase, CP). Tel est le cas s'il a des raisons suffisantes de se croire en droit d'agir, c'est-à-dire lorsqu'aucun reproche ne peut lui être adressé parce que son erreur provient de circonstances qui auraient pu induire en erreur tout homme consciencieux. En revanche, celui dont l'erreur sur l'illicéité est évitable commet une faute, mais sa culpabilité est diminuée. Il restera punissable, mais verra sa peine obligatoirement atténuée (art. 21, 2ème phrase, CP). L'erreur sera notamment considérée comme évitable lorsque l'auteur avait ou aurait dû avoir des doutes quant à l'illicéité de son comportement ou s'il a négligé de s'informer suffisamment alors qu'il savait qu'une réglementation juridique existait (arrêt du Tribunal fédéral 6B_428/2021 du 18 novembre 2021 consid. 2.1).

2.8. À teneur de l'art. 48 let. e CP, le juge atténue la peine si l'intérêt à punir a sensiblement diminué en raison du temps écoulé depuis l'infraction et que le prévenu s'est bien comporté dans l'intervalle.

L'atténuation de la peine en raison du temps écoulé procède du même principe que la prescription. Le temps écoulé amenuise la nécessité de punir et il doit être pris en considération aussi lorsque la prescription n'est pas encore acquise, si l'infraction est ancienne et que le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle. Cela suppose qu'un temps relativement long se soit écoulé depuis l'infraction. Cette condition est en tout cas réalisée lorsque les deux tiers du délai de prescription de l'action pénale se sont écoulés ; selon la nature et la gravité de l'infraction, le juge peut cependant aussi tenir compte d'une durée moins importante (ATF 140 IV 145 consid. 3.1). Les délais de prescription spéciaux, plus courts que les délais ordinaires, y compris celui prévu par l'art. 109 CP pour les contraventions, ne sont pas pris en considération (ATF 132 IV 1 consid. 6.1.1).

2.9. Selon l'art. 54 CP, si l'auteur a été directement atteint par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée, l'autorité compétente renonce à le poursuivre, à le renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine. Cette disposition a été reprise de l'ancien art. 66bis CP, dont les principes demeurent ainsi valables.

Ne peut se prévaloir de l'art. 54 CP que celui qui est directement atteint par les conséquences de son acte. Tel est notamment le cas si l'auteur a subi des atteintes physiques – par exemple s'il a été blessé lors de l'accident qu'il a provoqué – ou psychiques – comme celles qui affectent une mère de famille devenue veuve par suite de l'accident de la circulation qu'elle a causé (ATF 119 IV 280 consid. 2b) – résultant de la commission même de l'infraction. En revanche, les désagréments dus à l'ouverture d'une instruction pénale, le paiement de frais de procédure, la réparation du préjudice, ainsi que la dégradation de la situation financière, le divorce ou le licenciement consécutifs à l'acte délictueux, ne constituent que des conséquences indirectes de l'infraction, sans pertinence au regard de l'art. 54 CP (ATF 117 IV 245 consid. 2a).

L'art. 54 CP doit s'appliquer dans le cas où une faute légère a entraîné des conséquences directes très lourdes pour l'auteur et à l'inverse, ne doit pas être appliqué lorsqu'une faute grave n'a entraîné que des conséquences légères pour l'auteur. Entre ces extrêmes, le juge doit prendre sa décision en analysant les circonstances concrètes du cas d'espèce et il dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Lorsque l'application de l'art. 54 CP n'est pas d'emblée exclue, le juge doit d'abord apprécier la culpabilité de l'auteur conformément à l'art. 47 CP, sans égard aux conséquences que l'acte a entraînées pour celui-ci, puis mettre en balance la faute commise et les conséquences subies. Si cet examen révèle que l'auteur a déjà été suffisamment puni par les conséquences de son acte et qu'une autre sanction ne se justifie plus, il renoncera à prononcer une peine. Il se peut toutefois qu'une exemption totale n'entre pas en considération, mais que l'importance de l'atteinte directe subie par l'auteur justifie de réduire la quotité de la peine, que le juge devra alors atténuer en faisant usage de son pouvoir d'appréciation (ATF 137 IV 105 consid. 2.3 ; 121 IV 162 consid. 2d ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_515/2019 du 11 juin 2019 consid. 2.1). Si l'art. 54 CP n'est pas conçu comme une règle d'exception, il ne doit pas être interprété extensivement (ATF 119 IV 280 consid. 1b).

Il n'est pas exclu d'atténuer la peine en application de l'art. 54 CP en cas d'infraction intentionnelle. Toutefois, plus la faute est lourde, plus les conséquences touchant l'auteur doivent être graves et une atténuation de peine au titre de cette norme ne doit être admise qu'avec retenue (ATF 121 IV 162 consid. 2e arrêt du Tribunal fédéral 6B_515/2019 du 11 juin 2019 consid. 2.1 et références citées).

Le Tribunal fédéral a notamment confirmé le refus d'appliquer l'art. 54 CP lorsqu'un parent n'est pas affecté dans une mesure excédant la douleur que tout père ou mère éprouve à la perte d'un enfant (arrêt du Tribunal fédéral 6B_719/2009 du 3 décembre 2009 consid. 4.2). Le Tribunal fédéral a considéré cette disposition "manifestement inapplicable" dans le cas d'un recourant qui invoquait les graves menaces qui pesaient sur lui-même et sur sa famille en raison des faits de l'espèce, au motif que les éventuels règlements de compte à sa sortie de prison – à supposer que ceux-ci fussent une réalité – n'étaient que des conséquences indirectes de son acte (arrêt du Tribunal fédéral 6B_998/2017 du 20 avril 2018 consid. 6.4.3).

2.10. La peine est impérativement atténuée à l'égard de quiconque a intentionnellement prêté assistance à l'auteur pour commettre un crime ou un délit (art. 25 CP ; ATF 143 IV 179 consid. 1.5.1).

2.11. Il convient de traiter à titre liminaire de l'argument développé tant par D______ que C______ tiré d'une incertitude juridique, le Tribunal fédéral ayant, selon les deux premiers cités, procédé à une interprétation extensive des normes consacrant les infractions reprochées, ce alors que les contours n'en étaient pas clairement définis au moment où elles ont été commises. Autrement dit, ils plaident une forme d'erreur sur l'illicéité.

Or, l'arrêt de renvoi scelle négativement le sort de cette question dans la mesure où le Tribunal fédéral a retenu, en ce qui concerne l'agent public :

"Ces différentes circonstances, et en particulier celles en lien avec le malaise que D______ a décrit avoir ressenti avant le voyage, attestent, comme cela a été retenu par la cour cantonale, qu'il avait bien conscience du caractère indu de l'invitation particulièrement généreuse qu'il avait reçue en sa qualité de Conseiller d'État, en tant qu'elle portait sur un séjour luxueux tous frais payés, de dimension essentiellement privée et d'agrément, et élargie à sa famille ainsi qu'à ses amis B______ et A______.

De même, les éléments de fait mis en évidence par la cour cantonale quant à la connaissance par D______ d'une part, de la nature des activités commerciales exercées par C______ ainsi que, d'autre part, des liens unissant le canton de Genève et l'émirat d'Abou Dhabi, notamment au regard de la coopération envisagée en matière policière, relèvent en eux-mêmes sa conscience du fait que l'invitation en cause pouvait avoir été destinée, aux yeux des personnes ayant concouru à son octroi, à favoriser les relations que celles-là entendaient entretenir dans le futur avec les autorités du canton de Genève et avec lui en particulier.

Malgré cela, D______ a néanmoins accepté de répondre favorablement à l'invitation au Grand Prix et de profiter de son "expédition en famille", tous frais payés, s'accommodant ainsi du risque de se voir reprocher d'avoir confondu ses intérêts privés avec ceux liés à l'apparence d'un accomplissement libre et intègre de sa charge de Conseiller d'État." (consid 2.7.1).

Quant à C______, aux termes d'un examen exhaustif, le Tribunal fédéral a insisté sur le caractère intentionnel de ses agissements, commis dans le but de favoriser ses relations avec les agents publics qui ont bénéficié de l'avantage octroyé, et plus généralement avec l'autorité exécutive cantonale (consid. 3.4).

Ces considérations ne laissent pas de place pour une erreur sur l'illicéité, même seulement excusable, dans la mesure où il en résulte que la volonté de ces deux protagonistes a bien porté sur tous les éléments constitutifs de l'infraction, déjà érigée comme telle au moment où ils l'ont commise, notamment sur le caractère indu de l'avantage, ainsi que l'objectif poursuivi, ou susceptible d'être poursuivi, par l'octroyant s'agissant de D______.

On peut encore observer, s'agissant de ce dernier, que le Tribunal fédéral a par ailleurs confirmé l'appréciation de la CPAR selon laquelle il était sans portée que D______ eut affiché la certitude de ne pas être perméable à des tentatives d'influence (consid. 2.7.2 in fine) ; or, cette certitude quant à sa propre résistance exclut également qu'il eût été dans le doute quant au caractère répréhensible de ses actes.

Le fait que les trois autorités judiciaires ayant eu à trancher du fond ont eu une appréciation différente du caractère illicite des faits n'y change rien, étant relevé d'une part que cela n'est pas rare et, d'autre part, que le TP était parvenu à la même conclusion que le Tribunal fédéral pour une partie des faits reprochés (soit l'offre/acceptation de l'avantage par/de C______ avec la complicité de B______).

On rappellera enfin aussi, par surabondance, que le principe de la lex mitior ne s'applique pas à un changement de jurisprudence, même si cela est critiqué par la doctrine (cf. L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, no 25 ss ad art. 2 CP), alors qu'il n'est pas même soutenu que l'arrêt de renvoi consacrerait un revirement de jurisprudence, mais bien uniquement une précision de contours supposés précédemment flous.

Il n'y a par conséquent pas lieu de faire application de l'art. 21 CP, même au titre de circonstance atténuante, ou sous couvert de l'art. 54 CP.

2.12. La faute de l'appelant A______ est importante. En sa qualité de chef de cabinet d'un Conseiller d'État, il a non seulement accepté un avantage indu, en s'accommodant du risque qu'il eut été octroyé dans le but d'influencer son activité, mais a aussi violé son secret de fonction et instigué un directeur de service à abuser de son autorité. Ce faisant, il a porté atteinte à l'objectivité et l'impartialité du processus décisionnel étatique, à la confiance de la collectivité dans l'objectivité de l'action de l'État et à celle que ce dernier place en ses fonctionnaires.

Si son mobile n’est pas totalement égocentré, une partie des faits pour lesquels il est condamné ayant trait à des démarches effectuées en faveur d’un ami, il était bien purement égoïste en ce qui concerne l'infraction à l'art. 322sexies CP et, dans tous les cas, il n'a pas hésité à profiter de son statut et de ses fonctions pour passer outre les principes élémentaires de notre État de droit que sont l'égalité de traitement et le secret de fonction et agir au mépris des obligations de sa fonction.

Le prévenu A______ a ainsi agi par convenance personnelle, donnant la prééminence à la satisfaction de son bien-être ou au copinage, au détriment de ses devoirs et des institutions en général. En intervenant auprès du directeur de SCom, il a de surcroît amené ce dernier à commettre l’infraction de base, ce qui a eu des conséquences lourdes pour ce dernier.

La collaboration de l’intéressé est contrastée. Il a dissimulé des preuves au sujet du voyage à Abu Dhabi, en faisant "le ménage" dans sa boîte de courrier électronique et menti crassement au début de la procédure, sur l'origine du financement du voyage. Agissant dans le cadre d'une stratégie savamment orchestrée, l'appelant A______, de même que l'appelant D______, sont allés bien au-delà de leur droit de refuser de déposer ou de collaborer (art. 113 al. 1 CPP). Ce faisant, ils ont non seulement compliqué le déroulement de la procédure, mais aussi encore alimenté les soupçons qui pesaient sur eux. Dans le volet G______, cet appelant s’est rallié aux propos de H______ qui l’incriminaient mais a articulé des faits inexacts pour légitimer la violation du secret de fonction.

Sa prise de conscience est embryonnaire, dès lors qu'il a persisté à nier le caractère pénal de ses actes, allant jusqu'à invoquer son pragmatisme administratif et dire qu'il agirait de la même manière si c'était à refaire. A l'instar de D______, il persiste à vouloir échapper à la sanction, ou à tout le moins à en réclamer une atténuée, sous couvert de l'art. 54 CP.

L'absence d'antécédents a un effet neutre sur la fixation de la peine, mais il sera tenu compte du fait qu'il s'agit de faux-pas isolés dans une carrière jusqu'à ce jour sans problème et de ce que l’intéressé paraît sincèrement navré d’avoir commis des erreurs, même s’il en conteste le caractère pénal. Il convient également de tenir compte de l'écoulement du temps depuis ces faits.

La situation professionnelle de l'appelant était excellente au moment des faits. Les difficultés rencontrées dans son couple n'excusent nullement ses actes. Rien n’explique donc ses dérapages, d’autant qu’il était par ailleurs expérimenté, sincèrement habité par le sens de l’État, et engagé pour la collectivité.

Il ne saurait être question d’une exemption de peine au sens de l'art. 54 CP dans le volet du voyage à Abu Dhabi au vu des conséquences que la procédure pénale, ou sa médiatisation, aurait eu pour l’intéressé. Cet argument a d'ailleurs déjà été discuté et écarté dans la décision du 13 décembre 2021, laquelle, si elle retenait un lien entre la médiatisation et le volet du voyage à Abu Dhabi, considérait que les circonstances statuant suite à l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_220/2022 du 31 octobre 2022 admettant partiellement le recours du Ministère public contre l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 13 décembre 20217 ayant suscité l'intérêt des journalistes étaient étrangères à la procédure pénale. D'une part, les enjeux politiques de l'affaire étaient déjà de nature à susciter un engouement, au demeurant antérieur à l'ouverture de la procédure pénale. D'autre part, l'intérêt de la presse a été attisé par le comportement des prévenus D______, A______ et B______ tendant à dissimuler le financement du voyage à Abu Dhabi, puis par le débat autour de la décision de l'appelant D______ de ne pas renoncer à son mandat, soit des circonstances étrangères à la procédure pénale telle que diligentée par l'autorité de poursuite (cf. consid. 10.3.1 et 12.2). A______ n'a pas contesté la décision du 13 décembre 2021, qui consacre déjà le raisonnement qui précède et lui est partant définitivement opposable.

Les conditions de l'art. 54 CP ne sont de toute évidence pas non plus remplies s'agissant de l'arrestation provisoire du prévenu A______, prononcée pour la durée de la première audition dans le volet Abu Dhabi, alors que le prononcé d'une peine privative de liberté ne pouvait en aucun cas être exclu à ce stade de la procédure.

Enfin, la faute n’est pas légère, même considérée uniquement en lien avec l’infraction à l’art. 322sexies CP. Comme déjà dit, l'appelant A______ a égoïstement cédé à la tentation que représentait le luxueux déplacement, foulant au pied ses devoirs d’intégrité.

Une peine pécuniaire de 290 jours-amende est appropriée pour sanctionner l'infraction la plus grave, soit celle d'acceptation d'un avantage, à laquelle il sied d'ajouter 40 jours-amende pour l'instigation à abus d'autorité (peine hypothétique : 60 jours-amende) et 30 jours-amende pour la violation du secret de fonction (peine hypothétique : 45 jours-amende), d’où une peine pécuniaire d'ensemble de 360 jours-amende.

Si la situation financière du prévenu A______ pourrait évoluer défavorablement suite à son licenciement pour le 30 juin 2023, vu son expérience et la facilité avec laquelle il a rebondi après cette affaire, il n'y a pas de raison d'envisager une détérioration durable de sa situation économique. On relèvera de surcroît qu'à teneur des éléments de la procédure, il a conservé une activité indépendante comme consultant, ce qui lui procurait un complément de revenu non négligeable en 2019, de l'ordre de CHF 55'000.- par an. S'il devait ne pas immédiatement retrouver un emploi, il aurait de la sorte plus de temps à consacrer à cette activité indépendante qui semble lui réussir et réaliser un chiffre d'affaires plus conséquent. Pour ces motifs, le montant du jour-amende, fixé à CHF 300.-, est adéquat et sera confirmé.

Il en va de même de l'octroi du sursis qui est acquis à l'appelant. La durée du délai d'épreuve fixée à deux ans en première instance est également adéquate et sera maintenue.

2.11. La faute du prévenu D______ est sérieuse. Alors qu'il occupait depuis 2012 la fonction de Conseiller d'État, qui implique d'être irréprochable, bénéficiant de la confiance de la population, il a accepté en 2015 un avantage indu, en s'accommodant du risque qu'il lui eut été octroyé dans le but d'influencer son activité de Conseiller d'État.

Ce faisant, il a porté atteinte au bien juridiquement protégé par les dispositions en matière de corruption, soit la confiance de la collectivité dans l'objectivité de l'action de l'État.

Il a agi par convenance personnelle, par goût du pouvoir et avec légèreté, l'estime qu'il avait de lui-même comme Conseiller d'État et l'honneur personnel que représentait cette invitation l'ayant aveuglé. Ce faisant, il a perdu de vue les devoirs d'intégrité imposés par sa fonction.

Il jouissait d'une situation personnelle, professionnelle et financière excellente, de sorte qu'il pouvait payer de ses deniers un voyage, quitte à opter pour une version moins luxueuse et/ou à ne pas emmener toute sa famille. Il pouvait surtout y renoncer, sans aucun dommage pour le développement de Genève, en prétextant une impossibilité.

D______ a exprimé des regrets, dont il n'y a pas lieu de douter de la sincérité, concernant son mensonge et les conséquences de ses actes sur les personnes qu'il a blessées, et, passé ses premiers errements dans la procédure, sa collaboration a été bonne. En revanche, il n'a toujours pas pris conscience, ne serait-ce que partiellement, du caractère pénal de ses actes, plaidant l'incertitude juridique pour échapper à toute sanction, voire une sanction réduite. En prolongement, son opposition au principe de la créance compensatrice est le reflet de l'absence ou à tout le moins de la pauvreté de toute démarche introspective, puisqu'il en résulte qu'il n'est pas même ouvert à l'idée de restituer ce dont il a bénéficié illicitement.

Il n'a pas d'antécédent judiciaire, élément neutre dans la fixation de la peine, mais il sera tenu compte du fait qu'il s'agit d'un faux-pas isolé dans une carrière jusqu'à ce jour sans impair. L'écoulement du temps depuis les faits sera pris en considération.

Les conditions de l'art. 54 CP ne sont pas réalisées, les considérations développées au sujet de la situation du prévenu A______ s'appliquant pleinement (cf. supra consid. 2.10). On relèvera que ce condamné est encore moins fondé que son comparse à se prévaloir de la médiatisation de l'affaire, celle-ci étant liée à son statut de personnalité politique (non à la personne des autres protagonistes) et à la nature de l'infraction commise. Il peut être rappelé, l'intéressé pointant du doigt dans ses écritures certains articles ou reportages, qu'il a lui-même choisi d'annoncer publiquement, à la télévision, qu'il avait commis le fameux mensonge.

Dans son cas plus encore que dans le précédent, on ne saurait parler d’une faute légère. Au contraire, il vient d’être retenu qu’elle était sérieuse. C'est sans préjudice de ce que les conséquences subies sont en grande parties dues au fameux mensonge.

Compte tenu de l'ensemble des éléments pertinents, une peine pécuniaire de 300 jours-amende est adéquate.

Le montant du jour-amende, fixé à CHF 400.- par la première juge, non contesté en cas de confirmation du verdict de culpabilité, est approprié et sera confirmé, étant relevé que le prévenu D______ recouvrera dès le 1er juin l'exacte même fonction qu'il occupait au moment des faits et, partant le même traitement. L'octroi du sursis lui est acquis et il n'y a pas de raison de fixer un délai d'épreuve supérieur à deux ans.

2.13. La faute du prévenu C______ n'est pas négligeable. En sa qualité d'entrepreneur, il a agi par intérêt personnel, dans le but de favoriser son activité, de s'attirer la bienveillance d'un Conseiller d'État et de son chef de cabinet, afin de les influencer dans le futur.

Sa situation personnelle et sa très bonne situation professionnelle et financière n'excusent en rien ses agissements, bien au contraire.

Sa collaboration a été bonne. Il a été pour l'essentiel constant et a fermement refusé de participer au mensonge élaboré pour dissimuler l'origine du financement.

Même s'il conteste toute culpabilité, il semble que cette procédure soit un facteur de prise de conscience.

Il n'a pas d'antécédent judiciaire, élément neutre dans la fixation de la peine. Il sera tenu compte de l'écoulement du temps, les faits datant de 2015.

Les conditions de l'art. 54 CP ne sont manifestement pas réalisées. Comme indiqué ci-dessus (cf. supra consid. 2.11), les enjeux politiques de l'affaire étaient déjà de nature à susciter l'engouement, au demeurant antérieur à l'ouverture de la procédure pénale. La médiatisation de l'affaire a ensuite été soutenue par le comportement de ses comparses. Il n'y a certes pas contribué lui-même, mais il demeure que les circonstances ayant suscité l'intérêt des journalistes étaient étrangères à la procédure pénale.

Au vu de ce qui précède, une peine pécuniaire de 240 jours-amende est appropriée.

Le montant du jour-amende, fixé à CHF 1'100.-, non contesté en cas de confirmation du verdict de culpabilité, paraît approprié et sera confirmé. L'octroi du sursis lui est acquis et le délai d'épreuve fixé à deux ans.

2.14. La faute du prévenu B______ est d'une gravité légèrement moindre. Il a agi comme complice, dans le but de réseauter, de conforter son accès à un Conseiller d'État et son chef de cabinet pour lui-même, pour les affaires de C______ et pour tout tiers le sollicitant, cela même si son amitié et son affection étaient sincères.

La collaboration du prévenu à l'enquête a été globalement moyenne. Il a participé au mensonge et fait "le ménage" des messages compromettants, même s'il a agi de la sorte à la demande des prévenus D______ et A______.

Sa prise de conscience semble ébauchée.

Il a un antécédent judiciaire qui n'est pas spécifique.

Suite à l'arrêt de renvoi, il ne conteste plus la peine pécuniaire de 180 jours-amende prononcée en première instance, laquelle tient adéquatement compte des éléments qui précèdent et est complémentaire à celle prononcée le 4 août 2017 par le Ministère public.

Il en va de même du montant du jour-amende, fixé à CHF 30.-, et de l'octroi du sursis qui lui sont acquis et seront confirmés. Le délai d'épreuve sera fixé à deux ans.

3. 3.1.1. L’art. 70 al. 1 CP autorise le juge à confisquer des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d’une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.

L'infraction doit être la cause essentielle et adéquate de l'obtention des valeurs patrimoniales et celles-ci doivent typiquement provenir de l'infraction en question. Il doit donc exister, entre l'infraction et l'obtention des valeurs patrimoniales, un lien de causalité tel que la seconde apparaisse comme la conséquence directe et immédiate de la première. Tel est le cas lorsque l'obtention des valeurs patrimoniales est un élément objectif ou subjectif de l'infraction ou lorsqu'elle constitue un avantage direct découlant de la commission de l'infraction (ATF 145 IV 237 consid. 3.2.1 ; 144 IV 1 consid. 4.2.1 ; 141 IV 155 consid. 4.1 ; 141 IV 305 consid. 6.3.2).

3.1.2. Lorsque les valeurs à confisquer ne sont plus disponibles, le juge ordonne, selon l’art. 71 CP, leur remplacement par une créance compensatrice.

Le but de la créance compensatrice est d'éviter que celui qui a disposé des objets ou valeurs à confisquer soit privilégié par rapport à celui qui les a conservés (ATF
140 IV 57 consid. 4.1.2 ; 144 IV 1 consid. 4.2.4).

La notion de créance compensatrice est plus large que celle d'enrichissement illégitime. La créance compensatrice est une dette d'argent. Elle ne peut être compensatrice et remplacer les objets ou valeurs qui ont disparu que si ceux-ci sont également estimables en argent. Il faut admettre que l'avantage doit avoir une valeur économique et qu'il doit revêtir la forme d'une augmentation de l'actif, d'une diminution du passif, d'une non-augmentation du passif ou d'une non-diminution de l'actif (ATF 119 IV 17 consid. 2c ; ATF 100 IV 104 consid. 1).

La créance compensatrice ne joue qu'un rôle de substitution de la confiscation en nature et ne doit donc, par rapport à celle-ci, engendrer ni avantage ni inconvénient. En raison de son caractère subsidiaire, elle ne peut être ordonnée que si, dans l'hypothèse où les valeurs patrimoniales auraient été disponibles, la confiscation eût été prononcée : elle est alors soumise aux mêmes conditions que cette mesure. Néanmoins, un lien de connexité entre les valeurs saisies et l'infraction commise n'est pas requis (ATF 140 IV 57 consid. 4.1.2 ; SJ 2019 II 281, 283 et 285).

L'art. 71 al. 2 CP prévoit que le juge peut renoncer totalement ou partiellement à la créance compensatrice s'il est à prévoir qu'elle ne sera pas recouvrable ou qu’elle entravera sérieusement la réinsertion de la personne concernée. Le juge doit procéder à une appréciation globale de la situation personnelle et financière de l’intéressé et respecter le principe de proportionnalité (ATF 122 IV 299 consid. 3b ; SJ 2019 II 281, 296). On ne doit par ailleurs pas attendre que l'intéressé fasse passer la créance compensatrice avant ses obligations découlant du droit de la famille (ATF
119 IV 117 consid. 2a/bb). Une réduction, voire une suppression de la créance compensatrice n'est cependant admissible que dans la mesure où l'on peut réellement penser que celle-ci mettrait concrètement en danger la situation sociale de l'intéressé sans que des facilités de paiement permettent d'y remédier (ATF 119 IV 17 consid. 2a/bb ; 106 IV 9 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6P_138/2006 du 22 septembre 2006 consid. 5.2 ; 6S_59/2003 du 6 juin 2003 consid. 5.2).

3.2. En l'espèce, la valeur commerciale du séjour à Abu Dhabi a été correctement évaluée par le MP à CHF 50'000.- pour la famille D______ et à CHF 10'000.- pour l'appelant A______ (cf. développement au consid. 3.2.2 de la décision du 13 décembre 2021 auquel il y a lieu de se référer).

Les appelants A______ et D______ ont bénéficié illicitement de cette valeur, laquelle est le produit de l'infraction d'acceptation d'un avantage (sous la forme d'une non diminution de l'actif).

Il se justifie dès lors de prononcer une créance compensatrice de CHF 50'000.- à l'encontre de D______ et de CHF 10'000.- à l'encontre de A______.

La créance compensatrice prononcée à l'encontre de A______ ne sera pas réduite en raison de la prochaine fin de ses rapports de travail, le montant de CHF 10'000.- n'étant pas de nature à entraver sa réinsertion. Il bénéficiera en effet d'une couverture adéquate au titre de l'assurance chômage, selon ses propres calculs, pourra continuer d'exercer son activité indépendante et il est raisonnable de supposer qu'il rebondira, comme il l'a d'ailleurs fait déjà en 2018, les développements qui précèdent s'appliquant également ici (cf. supra consid. 2.11).

Aucune réduction de la créance compensatrice prononcée à l'encontre de D______ n'entre en considération. Ses revenus sont assurés et excellents pour les prochaines années, ce qui lui permet sans difficulté de restituer à la collectivité ce dont il a bénéficié indûment. L'écoulement du temps n'est pertinent pour la fixation de la créance compensatrice que du point de vue de la prescription. La jurisprudence invoquée par la défense de D______ n'a pas tranché de l'application par analogie de l'art. 48 let. e CP à la créance compensatrice de sorte qu'elle ne lui est d'aucun appui (arrêt du Tribunal fédéral 6B_430/2012 du 8 juillet 2013 consid. 3.4).

4. 4.1.1. Les frais de la procédure sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (art. 428 al. 1 CPP).

Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_472/2018 du 22 août 2018 consid. 1.2 ; 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1.2). Lorsqu'une partie obtient gain de cause sur un point, succombe sur un autre, le montant des frais à mettre à sa charge dépend de manière déterminante du travail nécessaire à trancher chaque point (arrêts du Tribunal fédéral 6B_636/2017 du 1er septembre 2017 consid. 4.1 ; 6B_634/2016 du 30 août 2016 consid. 3.2). Dans ce cadre, la répartition des frais relève de l'appréciation du juge du fond (arrêt du Tribunal fédéral 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1.2).

4.1.2. Si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure (al. 3).

4.1.3. Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours et renvoie la cause à l'autorité précédente, en l'occurrence à la juridiction d'appel cantonale, pour nouvelle décision, il appartient à cette dernière de statuer sur les frais sur la base de l'art. 428 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1367/2017 du 13 avril 2018 consid. 2.1). Les frais de la procédure d'appel postérieurs à un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral doivent être laissés à la charge de l'État si l'autorité d'appel doit revoir favorablement sa décision à la suite de l'arrêt de renvoi (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1367/2017 du 13 avril 2018 consid. 2.1).

4.2.1. Non contestée, la pondération décidée par la Cour de céans pour la procédure préliminaire et de première instance dans sa décision antérieure à l'arrêt de renvoi sera reprise (cf. consid. 11.2.3 de la décision du 13 décembre 2021), soit :

-        1/2 pour le volet consacré au voyage d'Abu Dhabi ;

-        1/6 pour le sondage F______ ;

-        1/6 pour le volet [de l'établissement] G______ ;

-        1/6 pour la violation du secret de fonction.

4.2.2. La part afférente au volet consacré au voyage à Abu Dhabi est ainsi d'1/8ème ([1/2]/4 = 1/8ème) pour chaque prévenu, soit CHF 1'278.25 (1/8ème de CHF 10'226.-).

4.2.3. Vu sa condamnation pour deux autres chefs d'infractions, le prévenu A______ devra assumer encore un tiers (1/6ème + 1/6ème) des frais de la procédure préliminaire et de première instance, soit CHF 3'408.70.

4.3.1. Dans la procédure d'appel antérieure à l'arrêt du Tribunal fédéral, la cause des frais peut être pondérée de la manière suivante en fonction de leur importance et du temps qui y a été consacré :

-        70% pour le volet consacré au voyage à Abu Dhabi, soit CHF 6'170.50 ;

-        10% pour le sondage F______, soit CHF 881.50 ;

-        15% pour le volet G______, soit CHF 1'322.25 ;

-        5% pour la violation du secret de fonction, soit CHF 440.75.

4.3.2. La part afférente au volet consacré au voyage à Abu Dhabi est ainsi de 17.5% ([70%]/4 = 17.5%) pour chaque prévenu, soit CHF 1'542.60 (17.5% de CHF 8'815.-).

4.3.3. Vu sa condamnation pour deux autres chefs d'infractions, le prévenu A______ devra assumer encore 20% des frais de la procédure d'appel, soit CHF 1'763.-.

4.3.4. Le solde des frais de la procédure (CHF 881.50) sera laissé à la charge de l'État, vu le rejet de l'appel du MP sur le volet sondage F______ et la confirmation des acquittements.

4.4. Les frais de la procédure d'appel postérieure à l'arrêt de renvoi du 31 octobre 2022, qui comprennent un émolument de décision de CHF 1'000.-, seront mis à la charge des quatre prévenus, à raison d'un quart chacun, la Cour de céans ayant revu sa décision en leur défaveur, conformément aux instructions du Tribunal fédéral.

5. 5.1. Conformément à l'art. 429 al. 1 let. c CPP, si le prévenu est acquitté, totalement ou en partie, ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit, entre autres, à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté.

5.2. L'appelant A______ persiste, encore à ce stade, à réclamer une indemnité pour tort moral de CHF 10'000.- en raison des conséquences de la procédure et de sa médiatisation sur sa réputation, sa famille et ses difficultés à retrouver un emploi, ce malgré l'arrêt de renvoi aggravant sa culpabilité et l'absence de contestation de sa part par-devant le Tribunal fédéral de la décision du 13 décembre 2021.

Les arguments développés dans la précédente décision de la CPAR conservent toute leur pertinence et il y sera renvoyé mutatis mutandis (cf. consid. 12). Les prétentions en réparation du tort moral du prévenu A______ sont rejetées.

6. 6.1.1. Selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP, également applicable à la procédure de recours par renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

La question de l'indemnisation du prévenu doit être traitée en relation avec celle des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2).

6.1.2. Ladite indemnité concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205 consid. 1), dont les démarches doivent apparaître nécessaires et adéquates (cf. ATF 139 IV 102 consid. 4.3 concernant la partie plaignante).

Dans l'appréciation du caractère raisonnable, les autorités pénales disposent d'un pouvoir d'appréciation considérable (ATF 142 IV 163). Le recours à plusieurs avocats peut, en cas de procédure volumineuse et complexe, procéder d'un tel exercice (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2013 du 7 avril 2014 consid. 4.3 et 4.5). Le prévenu peut être enjoint de chiffrer et détailler ses prétentions (art. 429 al. 2 CPP), afin que l'autorité soit en mesure de procéder à cette appréciation.

L'indemnité doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule et englober la totalité des coûts de défense (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1183/2017 du 24 avril 2018 consid. 3.1 et 6B_47/2017 du 13 décembre 2017 consid. 1.1). La Cour de justice applique au chef d'étude un tarif horaire de CHF 450.- (arrêt du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 ; ACPR/279/2014 du 27 mai 2014) ou de CHF 400.- (ACPR/282/2014 du 30 mai 2014), notamment si l'avocat concerné a lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013).

6.2. Vu l'arrêt de renvoi, il y a lieu de revoir les indemnités octroyées dans la décision de la CPAR antérieure à l'arrêt de renvoi, dans le prolongement de la répartition des frais.

Aussi, les appelants A______, C______ et D______ seront uniquement indemnisés pour leur frais de défense correspondant au volet du sondage F______.

Aucune indemnité ne sera prononcée en faveur de l'appelant B______ qui y a expressément renoncé.

Les pondérations établies par la CPAR dans sa décision du 13 décembre 2021 seront appliquées, tant pour la procédure préliminaire et de première instance que celle d'appel, n'ayant pas fait l'objet d'une contestation par les appelants.

6.3.1. Le prévenu A______ sera indemnisé pour ses frais de défense afférents à la procédure préliminaire et de première instance par CHF 16'650.- (37h x CHF 450.-). Il n'y a pas lieu d'ajouter à cette somme un montant à titre de TVA dès lors qu'il est domicilié hors de Suisse (AARP/280/2022 du 12 septembre 2022 consid. 5.3 ; AARP/232/2022 du 2 août 2022 consid. 7.1 ; voir également : ATF 141 IV 344 consid. 4.1).

6.3.2. Les frais de défense du prévenu C______ pour la procédure préliminaire et de première instance seront couverts à concurrence de CHF 14'781.80 (30h30 x CHF 450.- [CHF 13'725.-], plus la TVA [CHF 1'056.80]).

6.3.3. Le prévenu D______ sera indemnisé pour la procédure préliminaire et de première instance par CHF 10'016.10 (31h x CHF 300.- [tarif pratiqué à teneur des notes d'honoraires produites] [CHF 9'300.-], plus la TVA [CHF 716.10]).

6.4.1. Pour la procédure d'appel, 15h seront admises pour le volet du sondage F______ ayant abouti à la confirmation de l'acquittement des appelants, le volet voyage à Abu Dhabi pour lequel les appelants sont condamnés étant sensiblement plus important que celui du sondage F______. Ce temps a été consacré à la participation aux débats d'appel, qui ont duré 22h au total, et à la préparation, téléphones, courriers et entretiens. Le dossier était en effet censé maîtrisé par les avocats qui le suivaient depuis le début de la procédure et l'avaient plaidé en première instance huit mois plus tôt. Il posait certes des questions inusuelles juridiquement comme au plan des faits, mais qui avaient été exhaustivement étudiées en vue des débats devant le TP au plus tard.

Compte tenu des abattements opérés, seul le tarif pratiqué par le chef d'étude sera appliqué.

6.4.2. Le prévenu A______ sera indemnisé pour ses frais de défense afférents à la procédure d'appel par CHF 6'750.- (15h x CHF 450.-), hors TVA (cf. supra consid. 6.3.1).

6.4.3. L'appelant C______ sera indemnisé de ses frais pour la défense ayant abouti à la confirmation de son acquittement en appel dans le volet ISPSOS à hauteur de CHF 7'269.75 (15h x CHF 450.- [6'750.-], plus la TVA [CHF 519.75]).

6.4.4. Les frais de défense du prévenu D______ pour la procédure d'appel seront couverts à concurrence de CHF 4'846.50 (15h x CHF 300.- [4'500.-], plus la TVA [CHF 346.50]), vu le tarif pratiqué par son conseil selon les notes produites en première instance.

Il n'y a par ailleurs pas lieu de statuer sur les dépens alloués par le Tribunal fédéral, le prévenu étant invité à s'adresser à l'autorité d'exécution.

7. Conformément à l'art. 442 al. 4 CPP, les créances découlant de ce qui précède seront compensées, à due concurrence, avec celles de l'État en paiement des frais de la procédure mis à la charge des prévenus et de la créance compensatrice s'agissant de D______ et A______.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Prend acte de l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_220/2022 du 31 octobre 2022 qui a annulé l'AARP/400/2021 du 13 décembre 2021 en ce qu'il portait sur l'acquittement de A______ et D______ d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies CP) et sur celui de B______ et C______ d'octroi d'un avantage (art. 322quinquies CP) et a renvoyé la cause à la Chambre pénale d'appel et de révision pour nouvelle décision dans cette mesure.

Reçoit les appels formés par le Ministère public, A______, B______, C______ et D______ contre le jugement rendu le 22 février 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/17728/2017.

Rejette les appels de A______, B______, C______ et D______.

Admet partiellement l'appel du Ministère public.

Annule ce jugement en ce qui concerne A______, B______, C______ et D______.

Et statuant à nouveau :

Déclare D______ coupable d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies CP ; chiffre 1.1.1 de l'acte d'accusation).

Acquitte D______ d'acceptation d'un avantage pour les faits visés au point 1.1.2 de l'acte d'accusation (art. 322sexies CP).

Condamne D______ à une peine pécuniaire de 300 jours-amende (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 400.-.

Met D______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à deux ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit D______ de ce que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Prononce à l'encontre de D______ en faveur de l'État de Genève une créance compensatrice de CHF 50'000.-, celle-ci s'éteignant automatiquement dans la mesure du paiement par D______ (art. 71 al. 1 CP).

* * *

Déclare A______ coupable d'acceptation d'un avantage (art. 322sexies CP ; chiffre 1.2.1 de l'acte d'accusation), de violation du secret de fonction (art. 320 ch. 1 CP ; chiffre 1.2.3 tirets 1 et 2 de l'acte d'accusation) et d'instigation à abus d'autorité (art. 312 CP et 24 al. 1 CP ; chiffre 1.2.4 de l'acte d'accusation).

Acquitte A______ de complicité d'acceptation d'un avantage pour les faits visés au point 1.2.2 de l'acte d'accusation (art. 322sexies CP et 25 CP) et de violation du secret de fonction pour les faits visés aux tirets 3 et 4 du point 1.2.3 de l'acte d'accusation (art. 320 ch. 1 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 360 jours-amende, sous déduction d'un jour-amende, correspondant à un jour de détention avant jugement (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 300.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à deux ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ de ce que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Prononce à l'encontre de A______ en faveur de l'État de Genève une créance compensatrice de CHF 10'000.-, celle-ci s'éteignant automatiquement dans la mesure du paiement par A______ (art. 71 al. 1 CP).

* * *

Déclare C______ coupable d'octroi d'un avantage (art. 322quinquies CP ; chiffre 1.4.1 de l'acte d'accusation).

Acquitte C______ d'octroi d'un avantage pour les faits visés au point 1.4.2 de l'acte d'accusation (art. 322quinquies CP).

Condamne C______ à une peine pécuniaire de 240 jours-amende (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 1'100.-.

Met C______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à deux ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit C______ de ce que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

* * *

Déclare B______ coupable de complicité d'octroi d'un avantage (art. 322quinquies CP et 25 CP; chiffre 1.3.1 de l'acte d'accusation).

Acquitte B______ d'octroi d'un avantage pour les faits visés au point 1.3.2 de l'acte d'accusation (art. 322quinquies CP).

Condamne B______ à une peine pécuniaire de 180 jours-amende (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Dit que cette peine est complémentaire à celle prononcée le 4 août 2017 par le Ministère public du canton de Genève (art. 49 al. 2 CP).

Met B______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à deux ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit B______ de ce que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

* * *

Ordonne la confiscation et la destruction des documents figurant aux deux inventaires des 14 août 2018, des dossiers du SCOM concernant [l'établissement] G______ (pièces C-3'197, C-3'228, C-3'413 et celles se trouvant dans les classeurs CI et CII) et des documents imprimés à l'OCPM (pièces C-3'197, C-3'184 à C-3'196).

Ordonne la restitution à leur ayant droit des documents séquestrés chez K______ SA (C-3'135ss) et V______ SA (C-3'620ss).

Ordonne la restitution à leur ayant-droit des documents séquestrés chez W______ SA (C-3'553ss).

Ordonne la confiscation et la destruction des données informatiques séquestrées (C-3'200, C-3'214 et C-3'649 ; art. 69 CP).

Ordonne la restitution à l'État de Genève du dossier original du SCOM concernant [l'établissement] I______ (pièce C-3'197 et celles se trouvant dans les classeurs CI et CII ; art. 267 al. 1 et 3 CPP).

* * *

Condamne D______, B______ et C______, à raison de CHF 1'278.25 chacun, aux frais de la procédure préliminaire et de première instance (art. 426 al. 1 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, à raison de CHF 4'686.95.

Laisse le solde des frais de la procédure préliminaire et de première instance, soit CHF 1'704.30, à la charge de l'État (art. 423 al. 1 CPP).

Alloue une indemnité pour les dépenses occasionnées par leurs frais de défense pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 429 al. 1 let. a CPP) en :

-        CHF 16'650.-, à A______ ;

-        CHF 14'781.80, à C______ ;

-        CHF 10'016.10, à D______.

* * *

Arrête les frais de la procédure d'appel antérieurs à l'arrêt du Tribunal fédéral du 31 octobre 2022 à CHF 8'815.-, qui comprennent un émolument de décision de CHF 8'000.-.

Met 17.5% de ces frais, soit CHF 1'542.60 chacun, à la charge de D______, C______ et B______, ainsi que 37.5%, soit CHF 3'305.60 à celle de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État, soit CHF 881.60.

Alloue une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de leurs droits de procédure en appel jusqu'au prononcé de l'arrêt du Tribunal fédéral du 31 octobre 2022 (art. 429 al. 1 let. a CPP) en :

-        CHF 6'750.-, à A______ ;

-        CHF 7'269.75, à C______ ;

-        CHF 4'846.50, à D______.

Rejette les conclusions de A______ en réparation du tort moral (art. 429 al. 1 let. c CPP).

Compense à due concurrence la créance de l'État portant sur les frais de la procédure et les créances compensatrices prononcées à l'encontre des deux premiers avec les indemnités accordées à D______, A______ et C______ (art. 442 al. 4 CPP).

* * *

Arrête les frais de la procédure d'appel postérieurs à l'arrêt du Tribunal fédéral du 31 octobre 2022 à CHF1'255.-, qui comprennent un émolument de décision de CHF 1'000.-

Met ces frais, à raison de 25% chacun, soit CHF 313.75, à la charge de A______, D______, C______ et B______.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

 

Total des frais de la Chambre pénale d'appel et de révision antérieur à l'arrêt du Tribunal fédéral :

CHF

CHF

10'226.00

CHF 8'815.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision postérieur à l'arrêt du Tribunal fédéral :

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

180.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

État de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'255.00

Total général (première instance + appel (antérieur/postérieur TF) :

CHF

20'296.00