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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/21971/2020

AARP/129/2023 du 12.04.2023 sur JTDP/534/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 23.05.2023, rendu le 29.09.2023, REJETE, 6B_680/2023
Descripteurs : USAGE DE FAUX(DROIT PÉNAL);DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LEI;ERREUR DE DROIT(DROIT PÉNAL);SURSIS À L'EXÉCUTION DE LA PEINE
Normes : CP.251; LEI.115.al1; LEI.116; CP.21
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/21971/2020 AARP/129/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 5 janvier 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

intimé sur appel joint,

 

contre le jugement JTDP/534/2022 rendu le 12 mai 2022 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé,

appelant sur appel joint.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/534/2022 du 12 mai 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté de faux dans les titres, mais l'a reconnu coupable de pornographie (art. 197 al. 4 1ère phrase du Code pénal suisse [CP]), d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI), de facilitation de séjour illégal d'un étranger (art. 116 al. 1 let. a LEI), de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI) et d'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a de la loi fédérale sur l'assurance maladie (LAMal). Le TP l'a condamné à une peine pécuniaire ferme de 180 jours-amende à CHF 50.- le jour, a renoncé à révoquer le sursis octroyé le 22 février 2012 par le Ministère public (MP) ainsi qu'à ordonner son expulsion facultative de Suisse.

b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement des chefs d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI), de facilitation de séjour illégal d'un étranger (art. 116 al. 1 let. a LEI), à l'octroi du sursis, frais de la procédure à la charge de l'Etat.

c. Dans le délai légal, le MP forme un appel joint, entreprend le jugement dans son ensemble et conclut à ce que A______ soit déclaré coupable des mêmes infractions pour lesquelles sa culpabilité a été retenue par le premier juge. On comprend des conclusions formulées ultérieurement par le MP qu'il conclut à ce que A______ soit, en sus, condamné du chef de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP) pour les faits en lien avec l'attestation de la société C______ SARL (cf. infra consid. C.c).

Il conclut par ailleurs au prononcé d'une peine privative de liberté de 11 mois, d'une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 50.- le jour, et à l'expulsion du territoire suisse pour une durée de cinq ans, avec inscription au SIS.

d.a. Selon l'acte d'accusation du 9 mars 2021, il est reproché à A______ d'avoir, à Genève :

-        le 17 mai 2017, déposé auprès de l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) une demande d'autorisation de séjour dans le cadre de l'opération "Papyrus", complétée le 28 juillet 2017 et produit à l'appui de sa demande différents documents falsifiés et des informations erronées dans le but d'induire en erreur l'OCPM afin d'obtenir frauduleusement une autorisation de séjour, étant précisé qu'aucune autorisation ne lui a finalement été délivrée, dont :

·         une attestation établie par la société C______ SÀRL, de laquelle il ressort qu'il y a travaillé durant les années 2012 et 2013, alors que ladite société a été dissoute le 15 septembre 2011,

·         des certificats de travail établis par l'entreprise D______ SA pour les années 2010 et 2013, alors qu'il n'avait jamais travaillé pour cette société,

·         des attestations établies par des personnes qu'il ne connaît pas, dont E______;

-        à tout le moins entre le 12 mai 2015 (faits antérieurs classés par le TP en raison de la prescription) et le 17 novembre 2020, jour de son interpellation, pénétré à plusieurs reprises à des dates indéterminées et indéterminables sur le territoire suisse, en particulier à Genève, et y avoir séjourné et travaillé, alors qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires et n'était pas en possession d'un passeport valable indiquant sa nationalité ;

-        entre une date indéterminée et indéterminable en 2017 et le 20 novembre 2020, jour de son interpellation, hébergé F______, ressortissant kosovar, et G______, ressortissante mongole, dans un appartement sis rue 1______ no. ______, favorisant ainsi leur séjour en Suisse, alors qu'il savait que ces derniers, démunis d'autorisation de séjour, se trouvaient sur le territoire suisse illégalement.

d.b. Par le même acte d'accusation, il lui était également reproché, faits dont ni l'établissement ni la qualification juridique ne sont contestés en appel, d'avoir, à Genève :

-        le 30 mars 2020, partagé avec des tiers, dans une conversation Facebook Messenger, une vidéo ayant comme contenu des actes d'ordre sexuel avec des animaux, soit un homme qui pénètre un cochon ;

-        à tout le moins entre le 12 mai 2015 et le 17 novembre 2020, jour de son interpellation, contrevenu à son obligation de s'assurer pour le risque maladie conformément à l'art. 3 LAMal.

B. Les faits encore pertinents au stade de l'appel sont les suivants, étant renvoyé pour le surplus à l'état de fait du jugement de première instance (art. 82 al. 4 CPP) :

a.a. A______ est né le ______ 1997 au Kosovo, pays dont il a la nationalité.

Il a fait l'objet d'une procédure de renvoi dans son pays d'origine le 25 février 2012 et d'une décision d'interdiction d'entrée sur le territoire suisse du 20 novembre 2012 au 19 novembre 2015, notifiée le 30 avril 2015 à son avocat.

a.b. Le 17 mai 2017, A______ a déposé une demande d'autorisation de séjour et de travail auprès de l'OCPM dans le cadre de l'opération "Papyrus". Il a expliqué être arrivé en Suisse, à Genève, à l'âge de 25 ans et avoir exercé une activité lucrative ininterrompue depuis 15 ans dans cette ville.

Par courrier du 28 juillet 2017, A______ a adressé à l'OCPM des renseignements complémentaires. Le 22 septembre 2017, il lui a transmis un exemplaire du formulaire M rempli et signé. Par envoi du 16 mai 2018, il a également adressé à l'OCPM un formulaire "Papyrus" ainsi que des attestations diverses, dont notamment :

-        une lettre de recommandation du 4 mai 2017, établie au nom de "Mme E______", domiciliée à "H______", laquelle attestait connaître A______ depuis plusieurs années ;

-        une attestation du 25 juillet 2014, de l'entreprise "D______ SA, rue 2______ no. ______, [code postal] Genève" (alors que le tampon signature indique "D______ SA rue 2______ no. ______, [code postal différent] Genève"), selon laquelle A______ avait travaillé pour l'entreprise en 2010 et 2013 en qualité d'ouvrier.

a.c. Dès le 31 juillet 2017, l'OCPM a établi, à la demande de A______, des attestations de résidence indiquant que l'intéressé demeurait sur le territoire genevois dans l'attente d'une décision définitive sur l'octroi ou la prolongation de son autorisation de séjour. À compter de fin 2018, l'attestation spécifiait ne pas valoir titre de légitimation.

A plusieurs reprises en 2018, 2019 et 2020, A______ a déposé des demandes de visa de retour afin de se rendre au Kosovo. Sur le formulaire du 14 décembre 2017, il est inscrit que "l'intéressé est averti que le visa est négatif pour sa demande", sur un autre formulaire, du 7 septembre 2018, il est inscrit "OK". Les autres formulaires ne portent aucune mention.

a.d. Le 1er février 2019, l'OCPM a informé A______, par le biais du syndicat I______, qu'un préavis positif était donné à sa requête, laquelle était transmise au Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM), l'octroi d'un titre de séjour étant soumis à l'approbation de ce dernier.

Par courrier du 31 mai 2019, le SEM a communiqué à A______ son intention de refuser sa demande, lui accordant un délai pour se déterminer, ce qu'il a fait par le biais de courriers du syndicat I______ des 4 et 11 juillet 2019, produisant en annexe notamment :

-        une attestation, datée du 3 juillet 2019, de la société "C______ SARL, chemin 3______ no. ______, [code postal] Genève", signée par "M. J______" (le tampon signature indiquant "C______ SARL c/o K______ no. ______ rue 4______ [code postal] Genève"), selon laquelle A______ avait travaillé pour l'entreprise du 15 avril 2012 au 18 mai 2012 en qualité de peintre en bâtiment ;

-        un extrait de compte individuels AVS, selon lequel A______ a cotisé auprès de divers employeurs en 2011, puis de 2014 à 2019.

a.e. Par courrier du 11 mars 2020, le SEM n'est pas entré en matière sur la demande de régularisation simplifiée. Il a retourné son dossier à l'OCPM afin qu'il procède à un nouvel examen, eu égard aux attestations de travail qualifiées de douteuses, transmises dans ce cadre.

a.f. Il ressort des extraits du Registre du commerce que la société D______ SA a été dissoute par décision du 12 novembre 2012 et radiée le ______ 2014. L______, directeur, a eu la signature individuelle pour la société de 2008 à 2011.

C______ SARL a été dissoute suite à sa faillite prononcée par jugement du 15 septembre 2011, et radiée le ______ 2012. J______, associé gérant, a eu la signature individuelle pour la société depuis sa création jusqu'à la faillite.

b.a. Le 17 novembre 2020, A______ a été interpellé dans un appartement sis rue 1______ no. ______ à Genève.

Deux autres personnes, sans autorisation de séjour en Suisse, se trouvaient dans ce logement, soit F______, de nationalité kosovare et G______ de nationalité mongole. Le locataire officiel était M______. Les policiers ont pu constater que G______ dormait dans la cuisine et F______ dans une chambre où se trouvaient un matelas au sol et un lit.

b.b. Entendue par la police, G______ a admis séjourner illégalement en Suisse depuis 2015, suite à l'expiration de son visa de touriste. Elle vivait dans l'appartement sous-loué à un tiers par son petit-ami, A______, depuis 2017. Un autre homme nommé "N______" résidait également sur place. Elle ne payait aucun loyer. A______ versait CHF 1'500.- par mois pour le logement.

G______ a été reconnue coupable, notamment, de séjour illégal sur le territoire suisse entre le 9 juin 2015 et le 17 novembre 2020, par ordonnance pénale du 18 novembre 2020, à laquelle elle n'a pas fait opposition.

b.c.a. F______ a déclaré à la police et devant le MP avoir vécu dans l'appartement de la rue 1______ depuis 2017, avec A______ et son frère O______, ainsi que, depuis 2018, avec G______, petite-amie de A______. Il payait CHF 450.- de loyer à A______, lequel remettait ensuite l'argent au propriétaire de l'appartement.

Tout au long de la procédure, F______ a contesté séjourner illégalement en Suisse, dans la mesure où il avait déposé une demande de permis de séjour "Papyrus" auprès de l'OCPM le 12 octobre 2018 et que, dans cette attente, il disposait d'une attestation lui permettant de résider en Suisse. Il ignorait avoir fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse entre 2013 et 2016. Par décision du 16 octobre 2020, l'OCPM lui avait signifié refuser sa demande de régularisation simplifiée et son renvoi de Suisse, décision assortie d'un délai au 16 décembre 2020 pour quitter le territoire. Il avait fait recours contre cette décision.

b.c.b. Dans le jugement querellé, depuis lors définitif et exécutoire en ce qui le concerne, F______ a été condamné, notamment, pour séjour illégal sur le territoire suisse entre le 12 mai 2015 et le 17 novembre 2020.

c.a. A______ a expliqué, à la police et devant le MP, qu'il vivait depuis 2013 dans l'appartement de la rue 1______, avec son frère. Il sous-louait ce logement à P______ pour CHF 1'500.- par mois. F______ les avaient rejoints en 2017. Son frère et F______ payaient CHF 450.- chacun, tandis qu'il complétait les CHF 600.- restants. Sa petite-amie, G______, qui habitait également avec lui depuis 2017, ne payait aucun loyer.

Il avait entendu parler de Q______, dont il pensait qu'il s'agissait d'un avocat s'occupant des dossiers de compatriotes. Ce dernier lui avait détaillé les documents qu'il devait fournir à l'appui de sa demande d'autorisation de séjour et avait sollicité CHF 1'000.- de rémunération pour ses services. Il avait remis à Q______ tous les documents dont il disposait lors d'un deuxième rendez-vous, soit la preuve d'un abonnement de téléphone prépayé auprès de l'opérateur R______ en 2008, un avis de passage aux HUG en 2009, un transfert d'argent S______ en 2010, une preuve de travail auprès de T______ SARL, celle d'une consultation médicale en 2011 et de consultations chez le dentiste en 2012 et 2013, une attestation de travail chez U______ en 2014, la preuve d'un abonnement téléphonique auprès de l'opérateur V______ en 2016, ainsi que, pour les années 2015 à 2018, un extrait de son compte AVS. Il n'avait signé aucun formulaire ou courrier à l'OCPM et n'avait jamais vu le dossier de demande déposé par Q______, en particulier ni la demande du 17 mai 2017, ni le complément du 28 juillet 2017.

Il avait travaillé de manière non déclarée pour la société C______ SARL durant les années 2012 et 2013. Suite à la demande de documents complémentaires de l'OCPM, il avait contacté son ancien patron, le dénommé "J______", pour lui demander une attestation pour les périodes où il avait travaillé pour l'entreprise. Il ignorait que la société était déjà en faillite depuis 2011 et affirmait avoir effectivement travaillé pour "J______" en 2012.

Il n'avait en revanche jamais travaillé pour la société D______ SA et ne connaissait pas L______, ni E______ ou W______. Il n'avait jamais vu les attestations de ces personnes, produites avec sa demande de permis de séjour. Il était possible que Q______ eût ajouté ces documents à son dossier, à son insu.

c.b. Confronté à Q______, A______ a indiqué qu'il n'avait pas signé la demande d'autorisation de séjour. Il avait fourni les annexes à Q______, lequel a admis avoir certainement signé ladite demande à la place de A______ sous son nom, pensant en avoir le droit.

Le 3 février 2021, A______ est revenu sur cette déclaration. Il avait remis certains documents à Q______ pour son dossier, soit ceux énumérés lors de ses premières auditions. Il ignorait quels documents ce dernier avait finalement envoyé à l'OCPM. Il n'avait fabriqué aucun faux et n'avait pas connaissance des attestations qu'on lui reprochait d'avoir contrefaites.

c.c. Devant le premier juge, A______ a confirmé pour l'essentiel ses précédentes déclarations.

Il est en revanche revenu sur la date depuis laquelle F______ avait habité chez lui, indiquant qu'il était arrivé dès l'été 2018, soit trois mois avant de déposer sa demande, car il avait besoin d'une adresse à cette fin. Ainsi, F______ mentait lorsqu'il prétendait avoir emménagé dans l'appartement en 2017.

Il réitérait s'être cru en droit de séjourner en Suisse. Grâce aux attestations de l'OCPM, il avait pu constituer sa société et acheter une voiture. Il n'avait jamais été arrêté par la police depuis 2011. Il était informé de la décision d'interdiction d'entrée en Suisse dont il avait fait l'objet jusqu'en novembre 2015. Depuis lors, il était retourné au Kosovo à quelques reprises et était revenu en Suisse, à chaque fois de manière illégale.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite, avec l'accord des parties.

b. Dans son mémoire d'appel et de réponse, A______ persiste dans ses conclusions, sous réserve de l'entrée illégale, plus contestée à ce stade.

Il n'avait pas eu connaissance des attestations de D______ SA et de E______, probablement ajoutées à son dossier par Q______. L'attestation de C______ SARL avait été établie par Monsieur J______. Il avait travaillé pour cette entreprise, dont il ignorait qu'elle avait fait faillite, à l'instar du fait que Monsieur J______ ne disposait plus de pouvoir de représentation. Dans tous les cas, pour lui, une telle attestation sur l'honneur ne revêtait pas la valeur probante nécessaire pour être qualifiée de faux dans les titres.

Son séjour en Suisse était toléré par les autorités administratives depuis le 17 mai 2017. Suite à sa demande de régularisation, l'OCPM lui avait délivré des attestations de résidence sur le territoire genevois, valables dès le 31 juillet 2017 et renouvelées jusqu'à son arrestation le 17 novembre 2020. L'OCPM avait ensuite rendu un préavis positif au SEM le 1er février 2019. Il avait ainsi des raisons suffisantes de se croire en droit de séjourner sur le territoire suisse. Il en allait de même de son droit d'exercer une activité lucrative, ce d'autant qu'il était déclaré à l'AVS et à l'impôt à la source. Son acquittement se justifiait dès lors pour ces deux infractions, à tout le moins pour la période du 17 mai 2017 au 17 novembre 2020.

Il avait hébergé F______ de 2018 à 2020. Ce dernier avait déposé une demande de régularisation le 13 octobre 2018 et était en attente d'une décision sur sa demande de permis, tout comme lui. Dans la mesure où il se croyait lui-même en droit de demeurer sur le territoire suisse, il avait de bonnes raisons de penser qu'il en allait de même pour F______ et qu'il n'agissait dès lors pas de manière contraire au droit en l'hébergeant.

Le pronostic quant à son comportement futur ne pouvait pas être considéré comme défavorable. Il avait remédié à son omission de s'assurer auprès d'une caisse maladie par la conclusion d'un contrat avec le Groupe Mutuel, ce qu'attestait le formulaire d'adhésion du 12 septembre 2022 produit. Il avait pris conscience de la gravité de sa faute en lien avec l'infraction de pornographie, non contestée. Vu son acquittement du chef de faux dans les titres, la procédure de demande de régularisation allait être reprise par les autorités compétentes et avait de bonnes chances d'aboutir à la délivrance d'un permis de séjour, vu le préavis positif de l'OCPM. Le risque de réitération de ses agissements en lien avec sa situation administrative était nul. Pour la même raison, il devait être renoncé à son expulsion.

A______ produit des états de frais de son défenseur privé, Me B______, facturant, sous des libellés divers, huit heures et cinq minutes d'activité de chef d'étude au tarif de CHF 450.- l'heure, et six heures et 35 minutes d'activité de stagiaire au tarif de CHF 200.- l'heure.

c. Dans son mémoire d'appel, le MP conclut au rejet de l'appel de A______, à sa condamnation du chef de faux dans les titres en lien avec l'attestation de la société C______ SARL en sus des autres infractions retenues par le premier juge, au prononcé d'une peine privative de liberté de 11 mois et à son expulsion du territoire suisse.

A______ avait admis avoir produit un certificat de travail de C______ SARL erroné, qu'il avait remis en toute connaissance de cause à Q______ pour que ce dernier l'adresse à l'OCPM. L'attestation avait été rédigée postérieurement à la faillite de la société, date à laquelle son signataire n'avait plus aucun pouvoir de représentation. Il s'agissait ainsi d'un faux matériel dans les titres, de sorte que la condition de la force probante accrue du document n'avait pas à être examinée. Il en avait en tous les cas fait usage en la produisant à l'appui de sa demande de permis de séjour.

La peine prononcée par le premier juge était exagérément clémente. Le Tribunal avait omis de tenir compte des biens juridiques multiples qui avaient été lésés par les actes de l'appelant, le faux dans les titres devant s'y ajouter.

Contrairement à ce qu'avait retenu le premier juge, l'appelant ne s'était pas rendu coupable uniquement d'infractions à la LEI. Son expulsion facultative se justifiait. Toute sa famille vivait au Kosovo et il avait déjà fait l'objet d'un renvoi dans son pays s'étant soldé par un retour moins d'un mois plus tard sur le territoire suisse, auquel seul son travail illégal le rattachait.

d. Le TP se réfère intégralement au jugement entrepris.

D. A______ est marié et père de deux enfants mineurs. Sa famille demeure au Kosovo. Ses parents sont décédés. Ses quatre sœurs ainsi que trois de ses frères vivent également au Kosovo, tandis que son quatrième frère réside à Genève. Il a suivi l'école de commerce au Kosovo. Arrivé en Suisse en 2004, il a tout de suite travaillé dans le domaine du jardinage, puis en qualité de peintre en bâtiment.

Il exerce toujours la profession de peintre en bâtiment et est titulaire d'une entreprise en raison individuelle, crée en janvier 2020, sous la raison sociale X______. Il réalise un revenu mensuel net d'environ CHF 4'500.- à 5'000.-. Son loyer, dont il s'acquitte seul, s'élève à CHF 1'500.-. Il envoie chaque mois CHF 1'800.- à sa famille. Il n'a pas d'autre charge, aucune dette et possède environ CHF 1'000.- de fortune. Il a l'intention de rester en Suisse, dans l'espoir que sa demande d'autorisation de séjour soit acceptée.

A teneur de son casier judiciaire, il a été condamné le 22 février 2012 par le MP à une peine pécuniaire de 150 jours-amende à CHF 40.-, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, ainsi qu'à une amende de CHF 1'500.- pour séjour et travail illégal (période pénale du 1er janvier 2007 au 20 février 2012).

 

 

 

 

 

EN DROIT :

1. L'appel de A______ est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]). Il en va de même de l'appel joint du MP (art. 400 al. 3 let. b et 401 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a) ou encore lorsque le juge condamne le prévenu au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

3. 3.1.1. L'art. 251 ch. 1 CP sanctionne le comportement de celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre.

3.1.2. La notion de titre est définie à l'art. 110 al. 4 CP. Seuls les documents destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique sont concernés. Le caractère de titre d'un écrit est relatif. Ainsi, certains de ses aspects peuvent être propres à prouver certains faits, alors que d'autres ne le sont pas (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 6 ad art. 251).

Le législateur réprime deux types de faux dans les titres : le faux matériel et le faux intellectuel. Leur utilisation est également considérée comme une infraction. On parle de faux matériel lorsque le véritable auteur du titre ne correspond pas à l'auteur apparent (ATF 129 IV 130 consid. 2.1, JdT 2005 IV 118). Autrement dit, le faussaire crée un titre qui trompe sur l'identité de celui dont il émane en réalité. Commet un faux intellectuel, celui qui aura constaté ou fait constater faussement un fait ayant une portée juridique. Le faux intellectuel se rapporte ainsi à l'établissement d'un titre authentique (réalisé par l'auteur apparent), mais mensonger du fait que le contenu réel et le contenu figurant dans le titre ne concordent pas. Comme le simple mensonge écrit n'est pas répréhensible, même en présence d'un titre, il faut que celui-ci ait une valeur probante plus grande qu'en matière de faux matériel, pour que le mensonge soit punissable comme faux intellectuel (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], op. cit., n. 34 ad art. 251).

Lorsque l'auteur désigné par le titre est une personne morale, il y a lieu d'évaluer si le document est en soi apte à prouver que la personne morale a fait une déclaration, faute de quoi il ne s'agit pas d'un titre. Si c'est le cas, l'établissement de ce titre au nom de la personne morale par une personne qui ne peut pas (ou plus) valablement l'engager dans les rapports externes est un faux matériel (cf. ATF 123 IV 17 consid. 2b; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 29 ad art. 251 CP).

3.1.3. Dans toutes les variantes envisagées, l'infraction est intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs objectifs, y compris sur le fait que le document ne correspond pas à la vérité et qu'il a une valeur probante. Le dol éventuel est suffisant. L'élément subjectif de l'infraction requiert, dans tous les cas, l'intention de tromper autrui pour se procurer ou procurer à un tiers un avantage illicite, ou causer un préjudice (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, op. cit., n. 46 et 48 ad art. 251).

Il y a concours réel entre l'art. 251 CP et l'art. 118 LEI si le comportement frauduleux à l'égard des autorités a été réalisé à l'aide de documents falsifiés (M.S. NGUYEN / C. AMARELLE [éds], Code annoté de droit des migrations, vol. II, Loi sur les étrangers [LEtr], Berne 2017, ch. 3 ad art. 118 p. 1335).

3.2.1. En l'espèce, les faits retenus par l'acte d'accusation et par le premier juge en lien avec les documents produits à l'appui de la demande d'autorisation de l'appelant doivent être remis dans leur contexte.

En effet, la procédure montre que l'appelant a fait appel à un tiers, soit Q______, lequel constituait des dossiers pour le compte de ressortissants de pays des Balkans en vue du dépôt de demandes "Papyrus" auprès de l'OCPM.

L'attestation de la société D______ SA du 25 juillet 2014, ainsi que celle de E______, datée du 4 mai 2017, ont été produites à l'appui de la demande déposée en mai 2017 par Q______, lequel a admis avoir potentiellement signé la demande en imitant la signature de l'appelant. Il n'est ainsi pas exclu que Q______ a confectionné et produit ces documents à l'insu de l'appelant, comme l'a affirmé ce dernier depuis le début de l'instruction. L'appelant a par ailleurs toujours contesté avoir vu ces attestations et connaitre leur auteur apparent.

Le premier juge doit donc être suivi en ce qu'il considère que l'appelant ne peut être tenu pour responsable ni de la création, ni de l'usage de ces attestations, le doute devant lui profiter.

3.2.2. Le cas de l'attestation de C______ SARL est différent. Cette attestation, datée du 3 juillet 2019, a été produite par le biais d'un courrier du Syndicat I______ en juillet 2019, alors que le SEM avait déjà fait part de son intention de refuser la demande de l'appelant. Cette attestation ne peut donc pas être le fait de Q______.

L'appelant ne conteste pas l'avoir remise à l'OCPM. Elle était destinée à prouver sa présence et son activité lucrative en Suisse en avril et mai 2012, insuffisamment démontrée selon le SEM, de sorte qu'elle doit être qualifiée de titre au sens de l'art. 110 al. 4 CP.

Dans la mesure où la société C______ SARL était radiée du Registre du commerce depuis le 6 février 2012, J______ n'avait plus le pouvoir d'engager la société, laquelle au demeurant ne disposait plus de la personnalité juridique, et ce tant en 2019, au moment de la création de l'attestation, qu'en avril et mai 2012, période à laquelle l'appelant est supposé avoir travaillé pour ladite société. Il s'agit ainsi d'un faux matériel, dans la mesure où tant son auteur désigné que son contenu sont faux. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu d'examiner l'éventuelle force probante accrue de ce document.

Sous l'angle de l'élément subjectif, l'appelant ne pouvait qu'avoir conscience du fait que cette attestation était fausse, ou du moins entrevoir cette possibilité, ce dont il s'est accommodé, lorsqu'il l'a produite. En effet, il a admis à la police ne pas connaître la société C______ SARL et ne pas avoir travaillé pour celle-ci, avant d'expliquer qu'il avait bien travaillé, de manière non déclarée, pour un patron dénommé J______, signataire de l'attestation. L'appelant devait ainsi savoir que ce document au nom de C______ SARL était faux et il l'a produit néanmoins dans le but d'obtenir un avantage illicite, soit favoriser sa demande d'autorisation de séjour de Suisse.

Les éléments constitutifs de l'infraction sont réalisés. Partant, l'appelant sera reconnu coupable de faux dans les titres au sens de l'art. 251 ch. 1 CP en lien avec cette attestation.

L'appel joint du MP est admis sur ce point et le jugement querellé sera réformé en ce sens.

4. 4.1.1. Se rend coupable de violation de l'art. 115 al. 1 LEI, quiconque contrevient aux dispositions sur l'entrée en Suisse prévues à l'art. 5 LEI (let. a), y séjourne illégalement (let. b) ou exerce une activité lucrative sans autorisation (let. c).

4.1.2. En principe, l'étranger entré légalement en Suisse pour un séjour temporaire qui dépose ultérieurement une demande d'autorisation de séjour durable doit attendre la décision à l'étranger (art. 17 al. 1 LEI). Cela vaut aussi pour l'étranger résidant illégalement en Suisse qui tente de légaliser son séjour par le dépôt ultérieur d'une demande d'autorisation de séjour durable (ATF 139 I 37 consid. 2.1). Selon le message du Conseil fédéral, le requérant ne peut pas se prévaloir, déjà durant la procédure, du droit de séjour qu'il sollicite ultérieurement, à moins qu'il ne remplisse "très vraisemblablement" les conditions d'admission (FF 2002 3469 ss, p. 3535).

4.1.3. Selon l'art. 116 al. 1 let. a LEI, est punissable quiconque, en Suisse ou à l'étranger, facilite l'entrée, la sortie ou le séjour illégal d'un étranger ou participe à des préparatifs dans ce but.

4.1.4. L'infraction en cause, soit le fait de faciliter le séjour illégal d'une personne en Suisse, est difficile à circonscrire. En effet, l'étranger qui séjourne illégalement dans notre pays noue de nombreuses relations avec d'autres personnes. Il prend par exemple un moyen de transport, achète de la nourriture ou va au restaurant. Tout contact avec cet étranger, qui rend plus agréable le séjour de celui-ci en Suisse, ne saurait être punissable au sens de l'art. 116 al. 1 let. a LEI. Sinon, le champ d'application de cette disposition serait illimité. Aussi, le Tribunal fédéral exige-t-il que le comportement de l'auteur rende plus difficile le prononcé ou l'exécution d'une décision à l'encontre de l'étranger en situation irrégulière ou restreigne, pour les autorités, les possibilités de l'arrêter. En règle générale, il est admis que celui qui héberge une personne séjournant illégalement en Suisse facilite le séjour illégal de celle-ci, qu'il agisse en tant qu'hôtelier, de bailleur ou d'employeur qui loue une chambre. Le logement est alors susceptible de devenir une cachette pour l'étranger en situation irrégulière, lui permettant ainsi de se soustraire à l'intervention des autorités administratives (ATF 130 IV 77 consid. 2.3.2).

En revanche, les personnes qui offrent aux étrangers en situation illégale un logement ou un gîte pour seulement quelques jours doivent demeurer impunis car cela ne témoigne pas d'une volonté délictueuse, qui n'est, par ailleurs, pas de nature à entraver l'action administrative (NGUYEN/AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, Vol. II, Loi sur les étrangers, n. 2.2/14 ad art. 116 LEI).

4.1.5. Aux termes de l'art. 21 CP, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.

Pour qu'il y ait erreur sur l'illicéité, il faut que l'auteur ne sache ni ne puisse savoir que son comportement est illicite. L'auteur doit agir alors qu'il se croyait en droit de le faire. Il pense, à tort, que l'acte concret qu'il commet est conforme au droit (ATF 141 IV 336 consid. 2.4.3 ; 138 IV 13 consid. 8.2). Tel est le cas s'il a des raisons suffisantes de se croire en droit d'agir (ATF 128 IV 201 consid. 2), une raison de se croire en droit d'agir étant "suffisante" lorsqu'aucun reproche ne peut lui être adressé parce que son erreur provient de circonstances qui auraient pu induire en erreur tout homme consciencieux (ATF 98 IV 293 consid. 4a; cf. FF 1999 p. 1814).

La tolérance constante de l'autorité administrative ou pénale à l'égard d'un comportement illicite déterminé peut, dans certains cas, constituer une raison suffisante de se croire en droit d'agir (ATF 91 IV 201 consid. 4). Cependant, le simple fait que l'autorité n'intervienne pas ne suffit pas pour admettre l'existence d'une erreur de droit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_716/2018 du 23 octobre 2018 consid. 1.1 et les références ; 6S.46/2002 du 24 mai 2002 consid. 4b = SJ 2002 I 441).

4.2.1. L'appelant conteste sa condamnation pour séjour illégal et activité lucrative sans autorisation pour la période postérieure au dépôt de sa demande de régularisation "Papyrus". Il admet en revanche être entré, puis avoir séjourné et travaillé de manière illégale en Suisse entre le 12 mai 2015 et le 17 mai 2017.

Après le dépôt de ladite demande, la situation administrative de l'appelant était inchangée. Il ne disposait toujours pas d'une autorisation de séjour ni d'une autorisation de travail, sa demande de régularisation étant à l'examen. Les attestations de résidence de l'OCPM ne mentionnent aucune autorisation de séjour, ni de travail, même temporaire. Elles se contentent d'indiquer que le prévenu résidait à Genève dans l'attente d'une décision sur l'éventuel octroi d'une autorisation de séjour. L'appelant a du reste admis que ces attestations lui avaient permis d'effectuer certaines démarches, mais qu'elles n'équivalaient pas à une autorisation de séjour, dont il savait ne pas bénéficier.

Il en va de même des demandes de visa de retour versées au dossier, qui attestent du dépôt de telles demandes, mais non de l'obtention des visas. L'appelant ne l'allègue d'ailleurs pas, puisqu'il a admis qu'il s'était rendu au Kosovo à plusieurs reprises durant cette période et était revenu illégalement en Suisse.

L'appelant savait donc qu'il n'était pas fondé, malgré sa demande de régularisation "Papyrus", à pénétrer plusieurs fois et à séjourner en Suisse dans l'attente de la décision. Par ailleurs, l'appelant, qui ne conteste pas sa condamnation pour tentative de tromperie à l'égard des autorités au sens de l'art. 118 al. 1 LEI en lien avec cette demande, ne saurait valablement prétendre qu'il en remplissait très vraisemblablement les conditions et qu'il était ainsi légitimement convaincu d'obtenir un titre de séjour à l'issue de la procédure. Partant, il n'était pas dans l'erreur quant à l'illicéité de son comportement, dont il était parfaitement conscient.

Le même raisonnement vaut mutatis mutandis s'agissant de son droit à exercer une activité lucrative sur le territoire suisse.

Ainsi, sa condamnation pour les infractions à l'art. 115 al. 1 let. a, b et c LEI sera confirmée.

4.2.2. Il est établi que F______ et G______, en situation de séjour illégal en Suisse, ont logé dans l'appartement de la rue 1______ durant la période pénale visée, soit depuis une date indéterminée en 2017, voire en 2018, jusqu'au 17 novembre 2020. L'appelant ne conteste pas qu'il avait la maîtrise de cet appartement. Même s'il n'en était pas le locataire officiel, l'appelant était en mesure d'accepter ou non de loger d'autres personnes, fixait la part de loyer due par chacun des occupants, la récoltait et la reversait au logeur, qui n'avait au demeurant des contacts qu'avec lui, en sa qualité de fait de sous-locataire. C'est ainsi bien l'appelant qui a hébergé, durablement, F______ et G______.

L'appelant connaissait manifestement la situation administrative irrégulière de ses colocataires, de sorte que ses dénégations s'agissant de F______ n'emporte pas conviction. En effet, l'appelant a admis que ce dernier lui avait demandé de pouvoir loger dans l'appartement car il avait besoin d'une adresse pour le dépôt de sa demande de régularisation "Papyrus". Il s'ensuit que l'appelant savait que l'intéressé était en situation illégale au moment où il a accepté de le loger, peu importe que cela soit en 2017 ou 2018. Pour la période postérieure au 12 octobre 2018, date du dépôt par F______ de sa demande "Papyrus", l'appelant savait, pour être dans la même situation, que ce dépôt n'octroyait pas un droit à demeurer sur le territoire suisse dans l'attente d'une décision. À nouveau, l'appelant ne saurait prétendre avoir agi sous l'emprise d'une erreur quant à l'illicéité de son comportement.

Partant, en fournissant une adresse à Genève et un toit à F______, l'appelant a effectivement favorisé le séjour illégal en Suisse de celui-ci.

Les éléments constitutifs de l'infraction à l'art. 116 al. 1 let. a LEI étant réalisés, sa condamnation de ce chef sera confirmée.

5. 5.1.1. L'art. 2 CP délimite le champ d'application de la loi pénale dans le temps. L'alinéa 1 pose le principe de la non-rétroactivité, en disposant que dite loi ne s'applique qu'aux infractions commises après son entrée en vigueur. L'alinéa 2 fait exception à ce principe pour le cas où l'auteur est mis en jugement sous l'empire d'une loi nouvelle ; en pareil cas, cette dernière s'applique si elle est plus favorable à l'auteur que celle qui était en vigueur au moment de la commission de l'infraction (lex mitior).

Le nouveau droit ne doit être appliqué que s'il conduit effectivement à un résultat plus favorable au condamné. L'ancien et le nouveau droit ne peuvent être combinés. Ainsi, on ne saurait, à raison d'un seul et même état de fait, appliquer l'ancien droit pour déterminer quelle infraction a été commise et le nouveau droit pour décider si et comment l'auteur doit être puni. Si l'un et l'autre droit conduisent au même résultat, c'est l'ancien droit qui est applicable. En revanche, lorsque l'auteur a commis plusieurs actes punissables indépendants, il convient d'examiner pour chacun d'eux quel est le droit le plus favorable (ATF 134 IV 82 consid. 6.2.3 ; 102 IV 196).

En présence d'un concours réel d'infractions, chaque acte est jugé selon le droit en vigueur lorsqu'il a été commis et une peine d'ensemble est fixée selon le droit en vigueur au moment du jugement (R. ROTH / L. MOREILLON [éds], Code pénal I : art. 1-100 CP, Bâle 2009, n. 19 ad art. 2 ; M. DUPUIS et al., op. cit., n. 20 ad art. 2 ; M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Basler Kommentar, Strafrecht I, 4ème éd., Bâle 2018, n. 10 ad art. 2).

5.1.2. En l'espèce, les comportements dont l'appelant est reconnu coupable sont intervenus tant sous l'égide de l'ancien que du nouveau droit des sanctions, entré en vigueur au 1er janvier 2018. Puisque les infractions commises avant cette date entrent en concours réel parfait avec celles réalisées a posteriori, une peine d'ensemble doit être fixée en fonction du nouveau droit.

5.2.1. Le faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP) est passible d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire. Les infractions de pornographie (art. 197 al. 4 1ère phrase CP) et de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI) sont punies d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. L'entrée illégale, le séjour illégal et le travail sans autorisation (art. 115 al. 1 let. a à c LEI) sont réprimés par une peine privative de liberté d'un an au plus ou une peine pécuniaire. L'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal est puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus.

5.2.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

5.2.3. Le juge peut prononcer une peine privative de liberté à la place d'une peine pécuniaire si (a) une peine privative de liberté paraît justifiée pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits, ou (b) s'il y a lieu de craindre qu'une peine pécuniaire ne puisse pas être exécutée (art. 41 al. 1 CP).

Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention. La faute de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1). Il y a lieu d'admettre qu'une peine pécuniaire ne peut être prononcée lorsque le condamné ne s'acquittera vraisemblablement pas des jours-amende, en présence d'un risque de fuite, par manque de moyens suffisants ou encore en raison d'une mesure d'éloignement prononcée par une autorité administrative (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, Petit commentaire du Code pénal, 2ème éd., 2017, n. 3 ad art. 41).

5.2.4. Conformément à l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de même genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine à prononcer pour chacune d'elle. Le prononcé d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu à l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le même genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise. Que les dispositions pénales applicables prévoient abstraitement des peines de même genre ne suffit pas. Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement. La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1).

Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose, à la différence de l'absorption et du cumul des peines, que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits (ATF 144 IV 217 consid. 3.5.3).

5.2.5. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 ; 134 IV 1 consid. 4.2.2).

La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner le prévenu de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère du prévenu et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 ; 134 IV 140 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1457/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.1).

5.2.6. À teneur de l'art 46 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel (al. 1). En cas d'échec de la mise à l'épreuve, la révocation ne peut plus être ordonnée lorsque trois ans se sont écoulés depuis l'expiration du délai d'épreuve (al. 5).

5.3.1. En l'espèce, la faute de l'appelant est sérieuse. En fournissant de faux renseignements et en produisant des documents mensongers, dont un titre faux, aux autorités compétentes dans le but d'obtenir un titre de séjour et/ou de travail, il a porté atteinte à la confiance que l'administration est en droit d'attendre de l'administré ainsi qu'à la bonne foi dans les rapports entre celui-ci et l'État. Il a persisté à pénétrer, séjourner et travailler sur le territoire suisse sans bénéficier des autorisations nécessaires, ce dont il avait parfaitement conscience, et a facilité le séjour de deux personnes sur une période s'entendant au minimum à deux ans. La période pénale est ainsi longue. Sa faute est alourdie par la détention et la propagation d'une image relevant de la pornographie.

Le fait que la commission de l'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités en soit restée au stade de la tentative n'est dû qu'à des circonstances indépendantes de la volonté de l'appelant, si bien qu'il n'en sera tenu compte que dans une faible mesure dans la fixation de la peine.

Les mobiles de l'appelant résident de manière générale dans son intérêt personnel à demeurer en Suisse par convenance personnelle, son mépris des autorités et des lois en vigueur.

Sa situation personnelle n'explique ni n'excuse ses actes. Il avait, s'agissant des infractions à la LEI, la possibilité de subvenir à ses besoins légalement au Kosovo, pays où réside toute sa famille proche et où il peut travailler.

Sa collaboration est sans particularité. Il a fourni des explications au fil de la procédure, en admettant en partie les faits, tout en les minimisant. Sa prise de conscience est inexistante, puisqu'il a persisté à contester l'illicéité de son séjour et de son activité rémunérée en Suisse, de même que la fourniture des faux documents à l'OCPM dans le cadre de sa demande "Papyrus", malgré les éléments du dossier. Il avance néanmoins avoir souscrit à une assurance maladie obligatoire depuis sa condamnation en première instance, mettant ainsi un terme à son infraction à la LAMal.

L'appelant a un antécédent spécifique pour infractions à la LEI, toutefois ancien.

Il y a concours d'infractions, facteur aggravant de la peine.

Les éléments qui précédent, imposent le prononcé d'une peine privative de liberté.

L'infraction de faux dans les titres est abstraitement la plus grave. Elle commanderait à elle seule une peine privative de liberté de trois mois. Cette peine doit être étendue d'un mois et demi pour l'infraction de pornographie (peine hypothétique de deux mois et demi), de deux mois pour le comportement frauduleux à l'égard des autorités (peine hypothétique de trois mois), d'un mois et demi pour la facilitation du séjour illégal de tiers, d'un mois pour entrée et séjour illégaux (peine hypothétique de deux mois) et un mois supplémentaire pour le travail sans autorisation (peine hypothétique de deux mois).

La peine privative de liberté sera ainsi arrêtée à dix mois, sous déduction de deux jours de détention avant jugement (art. 51 CP).

Pour l'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal, punissable uniquement d'une peine pécuniaire, une peine de 20 jours-amende, d'un montant adéquat de CHF 50.- le jour, sera prononcée.

5.3.2. Contrairement à ce qui a été retenu en première instance, ce n'est qu'en cas de pronostic défavorable que le sursis pourrait être refusé au prévenu, vu son absence d'antécédent dans un délai de moins de cinq ans.

La peine privative de liberté prononcée devrait être de nature à permettre à l'appelant de comprendre la gravité de sa faute et de lui éviter toute récidive. Cette peine sera ainsi assortie du sursis, avec un délai d'épreuve de trois ans. Il en ira de même de la peine pécuniaire.

L'appel du prévenu sera ainsi admis sur ce point.

Enfin, c'est à tort que le TP s'est prononcé (par la négative) sur la révocation du sursis octroyé le 22 février 2012, la récidive ayant eu lieu après l'échéance du délai d'épreuve de trois ans. La mention y relative sera partant écartée du dispositif.

6. 6.1.1. Aux termes de l'art. 66abis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à quinze ans si, pour un crime ou un délit non visé à l'art. 66a CP, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l'objet d'une mesure.

6.1.2. Cette mesure prévue par la loi qui, par essence, s'ajoute à la peine proprement dite, fait partie intégrante de la sanction à prononcer (ATF 143 IV 168 consid. 3.2 = SJ 2017 I 433). L'expulsion judiciaire pénale de l'art. 66abis CP - qui ne diffère pas fondamentalement de l'expulsion prescrite en son temps par l'art. 55 al. 1 aCP (ATF 123 IV 107 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_607/2018 du 10 octobre 2018 consid. 1.1 ; 6B_770/2018 du 24 septembre 2018 consid. 1.1) - ne contredit pas l'interdiction de la double peine qui découle notamment de l'art. 6 CEDH (AARP/202/2017 du 16 juin 2017 consid. 2.5).

Le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst. Il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse. Une telle pesée des intérêts répond également aux exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH concernant les ingérences dans la vie privée et familiale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_549/2019 du 29 mai 2019 consid. 2.1). S'agissant d'un étranger arrivé en Suisse à l'âge adulte, l'examen de la proportionnalité suppose une prise en compte de la nature et de la gravité de la faute, du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, du comportement de l'auteur durant cette période, de la durée de son séjour en Suisse, de la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination (ATF 139 I 145 consid. 2.4 et
139 I 31 consid. 2.3.3).

6.2.1. En l'espèce, l'appelant est condamné pour des infractions non visées à l'art. 66a CP, de sorte qu'il est soumis au régime de l'expulsion facultative.

Le MP peut être suivi lorsqu'il fait valoir que les infractions commises par l'appelant ne sont pas uniquement relatives à la LEI. Non seulement, il s'agit d'infractions à plusieurs dispositions de cette loi, mais il est, en sus, reconnu coupable de faux dans les titres et ne conteste pas sa condamnation pour des faits de pornographie ainsi que d'infraction à la LAMal. Il a ainsi porté atteinte à plusieurs biens juridiques protégés, en particulier la confiance que l'administration suisse est en droit d'attendre de l'administré et a diffusé de la pornographie dure. La peine prononcée est finalement une peine privative de liberté.

Aucun élément du dossier ne permet de penser que l'expulsion le mettrait dans une situation personnelle grave, l'appelant ne le soutenant d'ailleurs pas, ni que son intérêt privé l'emporterait sur l'intérêt public de l'expulser de Suisse, pays avec lequel il n'a pas de réelles attaches. Son épouse et ses enfants vivent au Kosovo, alors que son séjour et son travail en Suisse demeurent illégaux. L'appelant ne saurait se prévaloir du préavis positif de l'OCPM du 1er février 2019, lequel avait été donné avant la découverte de la tentative de tromperie dont a été victime cette autorité et avant la production de l'attestation constitutive de faux dans les titres. Le préavis du SEM est par ailleurs négatif.

Dans ces circonstances, il se justifie de prononcer une mesure d'expulsion à l'encontre de l'appelant. Celle-ci sera néanmoins limitée à une durée de trois ans, afin de tenir compte des biens juridiques touchés par les actes de l'appelant et de respecter le principe de proportionnalité.

6.2.2. Il n'y a pas lieu d'étendre cette mesure à l'ensemble de l'espace Schengen, eu égard à nouveau au principe de proportionnalité.

7. L'appel joint du MP est largement admis, alors que l'appelant n'obtient que très partiellement gain de cause, la peine, bien qu'alourdie, étant assortie du sursis. L'appelant supportera ainsi trois quarts des frais de la procédure d'appel envers l'État (art. 428 CPP). L'émolument complémentaire de jugement arrêté à CHF 1'000.- par le TP suivra le même sort.

Pour le surplus, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de procédure préliminaire et de première instance dans la mesure où le chef de faux dans les titres portait sur le même complexe de faits que celui ayant conduit, en première instance, au verdict de culpabilité de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités et qu'aucun acte particulier supplémentaire n'a été administré en lien avec ce point (cf. art. 426 CPP et arrêt du Tribunal fédéral 6B_460/2020 du 10 mars 2021 consid. 10.3.1).

8. 8.1. Selon l'art. 436 al. 2 CPP, si ni un acquittement total ou partiel, ni un classement de la procédure ne sont prononcés mais que le prévenu obtient gain de cause sur d'autres points, il a droit à une juste indemnité pour ses dépenses.

La question de l'indemnisation doit être traitée après celle des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2). Lorsque la condamnation aux frais n'est que partielle, la réduction de l'indemnité devrait s'opérer dans la même mesure (arrêts du Tribunal fédéral 6B_548/2018 du 18 juillet 2018 consid. 1.1.2 ; 6B_1238/2017 du 12 avril 2018 consid. 2.1).

8.2. L'indemnisation allouée à l'appelant dans la mesure de l'admission partielle de son appel, sera réduite de trois quarts par parallélisme avec la décision sur les frais. Au bénéfice d'une défense privée, il a déposé des états de frais pour la procédure d'appel faisant état d'un total de 14 heures et 40 minutes d'activité, qu'il convient de réduire au vu du dossier, censé connu de l'avocat qui l'avait plaidé et qui n'a pas connu de rebondissement en appel. L'activité sera ainsi réduite à sept heures, dont quatre au tarif de chef d'étude et trois au tarif usuellement admis pour le stagiaire.

L'indemnité due sera partant arrêtée à CHF 605.80 (trois quarts de CHF 2'423.25 [4 heures x CHF 450.- + 3 heures x CHF 150.- + la TVA au taux de 7.7%, en CHF 173.25]).

Conformément à l'art. 442 al. 4 CPP, cette indemnité sera compensée, à due concurrence, avec les frais de procédure mis à sa charge.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel et l'appel joint formés par A______ et par le Ministère public contre le jugement JTDP/534/2022 rendu le 12 mai 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/21971/2020.

Admet partiellement l'appel joint du Ministère public et très partiellement l'appel de A______.

Annule ce jugement en ce qui concerne A______.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ de faux dans les titres en lien avec les attestations de D______ SA et E______ (art. 251 CP).

Déclare A______ coupable de faux dans les titres en lien avec l'attestation C______ SARL (art. 251 ch. 1 CP), de pornographie (art. 197 al. 4 1ère phrase CP), d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI), de facilitation de séjour illégal d'un étranger (art. 116 al. 1 let. a LEI) et de tentative d'infraction à l'art. 118 al. 1 LEI.

Le condamne à une peine privative de liberté de dix mois, sous déduction de deux jours de détention avant jugement (art. 40 et 51 CP).

Déclare A______ coupable d'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal.

Le condamne à une peine pécuniaire de 20 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 50.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion facultative de Suisse de A______ pour une durée de trois ans (art. 66abisCP).

Ordonne la confiscation et la dévolution à l'Etat de la somme de CHF 150.- figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n°5______ (art. 70 CP).

Condamne A______ à deux tiers des frais de la procédure préliminaire et de première instance, soit CHF 1'063.35 (art. 426 al. 1 CPP).

Met trois quarts de l'émolument complémentaire de jugement de CHF 1'000.-, soit CHF 750.- à la charge de A______, le solde étant laissé à charge de l'Etat.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'175.-, y compris un émolument de CHF 1'000.-.

Met trois quarts de ces frais, soit CHF 881.25 à la charge de A______, et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Alloue à A______ une indemnité de CHF 605.80 pour ses frais de défense pour la procédure d'appel.

Compense à due concurrence l'indemnité accordée pour ses dépenses occasionnées par la procédure d'appel avec la créance de l'Etat portant sur les frais de la procédure (art. 442 al. 4 CPP).

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations, Secrétariat d'Etat aux Migrations ainsi qu'au Service de l'application des peines et mesures.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Delphine GONSETH

e.r. Catherine GAVIN

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

2'595.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

100.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'175.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'770.00