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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/81/2022

JTAPI/33/2022 du 14.01.2022 ( MC ) , ANNULE

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS)
Normes : LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/81/2022 MC

JTAPI/33/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 14 janvier 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Renuka CAVADINI, avocate

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1968, originaire du B______, alors en possession d'une carte d'identité et d'un acte de naissance, a déposé une demande d'asile auprès du Centre d'enregistrement et de procédure (CEP) de Bâle, le 2 janvier 2012.

2.             Par décision du 15 octobre 2014, l'office fédéral des migrations devenu depuis le secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) a rejeté la demande d'asile, prononcé son renvoi de Suisse et ordonné l'exécution de cette mesure.

L'exécution du renvoi a été confiée au canton de Genève.

3.             Par arrêt du 30 septembre 2015, le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a rejeté le recours interjeté par l’intéressé, le 3 novembre 2014, contre la décision du SEM du 15 octobre 2014, lequel lui a imparti un nouveau délai au 20 novembre 2015 pour quitter le territoire helvétique.

4.             Par courrier du 29 octobre 2015, l'intéressé a été invité à se présenter au Service asile et départ de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : l'OCPM) le jeudi 12 novembre 2015.

5.             Entendu par l’OCPM le 17 novembre 2015, M. A______ a pris bonne note qu'il pourrait faire l'objet de mesures de contrainte et de voir son refoulement être mis en œuvre par les services de police.

6.             Entendu à nouveau par l’OCPM, le 17 décembre 2015, M. A______ a indiqué que son mandataire allait déposer une demande de réexamen de sa demande d'asile en début janvier 2016 auprès du SEM.

7.             Le même jour, l’OCPM a demandé le soutien du SEM en vue de l'identification de M. A______.

8.             Par courrier du 27 janvier 2016 adressé à l'OCPM, le SEM a suspendu provisoirement l'exécution du renvoi de l'intéressé en raison d'une demande de réexamen introduite par ce dernier le 13 janvier 2016.

9.             Par décision du 9 mars 2016, le SEM a rejeté la demande de reconsidération déposée par l'intéressé et a maintenu l'entrée en force de la décision du 15 octobre 2014, laquelle était également exécutoire.

10.         Par courrier du 14 mars 2016, l'intéressé a été invité à se présenter à l'OCPM le 24 mars 2016 auprès du Service asile et départ.

11.         Entendu dans les locaux de l’OCPM le 24 mars 2016, M. A______ a indiqué vouloir faire recours contre la décision du 9 mars 2016 du SEM, et avoir pris bonne note de la possibilité de faire l'objet de mesures de contrainte et de voir son refoulement être mis en œuvre par les services de police. Un délai au 7 avril 2016 lui a été imparti pour prendre contact avec la Croix-Rouge genevoise pour organiser son départ.

12.         Le 30 mars 2016, l'intéressé a pris contact avec la Croix-Rouge genevoise et un rendez-vous lui a été fixé le 13 avril 2016.

13.         Par décision incidente du 13 avril 2016, le TAF a rejeté la demande d'octroi de l'effet suspensif interjeté dans le cadre d'un recours formé le 7 avril 2016 par l'intéressé, lequel a également indiqué que ce dernier devait immédiatement quitter la Suisse et attendre à l'étranger l'issue de la procédure.

14.         Le 13 avril 2016, M. A______ a indiqué à la Croix-Rouge genevoise être vivement opposé à son retour au B______ craignant pour sa vie.

15.         Par arrêt du 6 octobre 2016, le TAF a rejeté le recours interjeté par l’intéressé le 7 avril 2016 contre la décision du 9 mars 2016 du SEM.

16.         Entendu dans les locaux de l’OCPM le 8 décembre 2016, M. A______ a indiqué vouloir déposer un nouveau recours, ne pas être disposé à se présenter à la Croix-Rouge genevoise afin d'organiser son retour au B______, y étant en danger, et avoir pris bonne note de la possibilité de faire l'objet de mesures de contrainte et de voir son refoulement être mis en œuvre par les services de police.

17.         Par courriel du 7 avril 2021 adressé à l'OCPM, le SEM a indiqué qu'il avait été informé par l'Ambassade du B______ à Genève que M. A______ avait été identifié et qu'elle était prête à délivrer un laissez-passer en sa faveur.

18.         À nouveau entendu dans les locaux de l’OCPM le 31 mai 2021, l'intéressé a indiqué n'être toujours pas disposé à se présenter à la Croix-Rouge genevoise afin d'organiser son retour au B______, y étant en danger, et avoir pris bonne note de la possibilité de faire l'objet de mesures de contrainte et de voir son refoulement être mis en œuvre par les services de police.

19.         En date du 19 août 2021, l'OCPM a requis des forces de police de procéder au renvoi de M. A______ à destination du B______.

20.         Le 10 janvier 2022, les autorités du B______ ont délivré un laissez-passer en faveur de l’intéressé.

21.         M. A______ a été interpellé par les services de police le 11 janvier 2022. Une place à bord d'un avion à destination du B______ ayant été réservée à son nom pour le 13 janvier 2022, à 15h55, au départ de Zurich.

22.         Le 11 janvier 2022 à 17h25, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de huit semaines, sur la base de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu’il s'opposait à son renvoi au B______. Si sa dernière demande était refusée, il accepterait de retourner dans son pays.

23.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après le tribunal) le même jour.

24.         Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a expliqué que le 11 janvier 2022, il avait été convoqué par la police au Vieil Hôtel de Police à 14h00 sans en connaître la raison. Il avait été amené dans un local et on lui a demandé de se déshabiller. Puis, on lui avait expliqué qu'il allait être détenu. Il avait expliqué qu'il avait un avocat qui avait déposé une demande. Il avait donné la carte de visite de cet avocat. Ensuite, il avait été placé en cellule.

La représentante du commissaire de police a confirmé que M. A______ avait été convoqué par la police le 11 janvier 2022. L'intéressé lui avait effectivement remis la carte d'une permanence juridique qu'elle avait essayé de contacter en vain puisqu'elle était fermée. Elle avait également adressé un courriel à cette adresse en expliquant la situation de M. A______. La juriste qui lui avait finalement répondu lui avait indiqué qu'elle n'avait pas de procuration et qu'elle ne souhaitait pas le représenter dans le cadre de cette procédure.

Le conseil de M. A______ a indiqué que Me CAVADINI avait été contactée le 12 janvier 2022 par des proches de M. A______ et qu'elle s'était constituée pour la défense de celui-ci. Elle ne l'avait pas défendu auparavant.

M. A______ a déclaré être arrivé en Suisse en 2012. Il logeait depuis environ neuf ans à la rue de C______ 1______, c/o M. D______. Au préalable, il avait habité à la rue de la E______, et encore avant il avait habité dans un foyer.

Il a indiqué qu'il travaillait depuis environ sept ans au sein de la brasserie F______ en qualité d'auxiliaire de gastronomie et de garçon d'office. Il travaillait cinq jours par semaine et gagnait environ CHF 3'000.- net par mois. Son employeur versait ses cotisations sociales.

Le conseil de M. A______ a indiqué avoir contacté Madame G______, juriste au sein de l'association ELISA ASILE, laquelle avait déjà reçu M. A______ et examiné si une demande de régularisation de sa situation était envisageable. A ce stade, aucune demande n'avait été déposée et Me CAVADINI n'entendait pas aller de l'avant dans cette démarche. Il avait brièvement expliqué cette situation à son client lors du parloir de ce jour.

M. A______ a déclaré ne pas être opposé à retourner au B______ mais il souhaitait disposer de plus de temps avant son renvoi. Cela faisait en effet presque dix ans qu'il vivait à Genève. En outre, il souhaitait consulter son médecin. Il souffrait de diabète, d'hypertension, de problèmes cardiaques et il avait du cholestérol. Il suivait un traitement pour traiter ces maladies. Il avait un rendez-vous chez son médecin le 12 janvier 2022 qu'il n'avait pas pu honorer.

La représentante du commissaire de police a indiqué que pour les autorités genevoises, M. A______ était démuni de tout document d'identité, de sorte qu'ils avaient dû demander un laissez-passer à l'ambassade du B______ en faveur de l'intéressé.

Elle a confirmé que M. A______ n'avait jamais disparu dans la clandestinité. S'il avait toujours honoré les convocations de l'OCPM, il ne s'était en revanche pas toujours rendu aux rendez-vous prévus par la Croix-Rouge en vue de l'organisation de son départ.

Le conseil de M. A______ a indiqué, qu'à teneur du dossier, celui-ci s'était rendu à trois reprises à la Croix-Rouge.

La représentante du commissaire de police a déclaré que le laissez-passer délivré par les autorités du B______ était valable pour une durée de trois mois, il n'était dès lors pas nécessaire d'en solliciter un nouveau. A ce stade, les autorités genevoises avaient sollicité la réservation d'une place sur un vol sous escorte policière pour la date du 1er au 2 février 2022 qui restait à confirmer.

Le conseil de M. A______ a observé que son client qu'il avait vu à 14h40 lui avait signalé qu'on ne lui avait rien donné à manger aujourd'hui. Compte tenu de son état diabétique, ceci pouvait expliquer son expression un peu confuse.

La représentante du commissaire de police a expliqué, pour répondre au conseil de M. A______, que lorsque ce dernier avait été convoqué le 11 janvier 2022, il ne lui avait pas été indiqué qu'il s'agissait de l'interpeller pour le placer dans un avion à destination de son pays d'origine. Elle a rappelé qu'il faisait l'objet d'une décision de renvoi depuis 2014 et qu'il savait qu'il était susceptible de faire l'objet de mesures de contrainte.

Le conseil de M. A______ a produit un chargé de pièces contenant notamment une attestation de son employeur.

La représentante du commissaire de police a indiqué que si M. A______ avait manifesté son souhait de partir de manière volontaire, il aurait dû se présenter à la Croix-Rouge et organiser son départ de manière concrète.

Le conseil de M. A______ a déclaré que si son client indiquait qu'il lui fallait du temps pour organiser son départ, c'était qu'il souhaitait recouvrer ses créances auprès de son employeur notamment.

Il a fait observer au tribunal que dans le public présent à l'audience de ce jour, se trouvait notamment Monsieur H______, lequel lui avait indiqué qu'il se portait garant du départ de M. A______. Apparemment, ni son client ni ses amis avaient, avant l'arrestation de celui-ci, pris la mesure de la situation ni compris qu'il devait désormais quitter la Suisse au plus vite.

M. A______ a confirmé devant le tribunal qu'il s'engageait à quitter la Suisse d'ici au 28 février 2022 au plus tard. Il était d'accord d'entreprendre toutes les démarches nécessaires à cette fin, et notamment de se procurer un billet d'avion à destination de son pays d'origine.

La représentante du commissaire de police a conclu principalement à la confirmation de l'ordre de mise en détention administrative pris le 11 janvier 2022 par le commissaire de police pour une durée de huit semaines. Subsidiairement, à ce qu'il soit fait ordre à M. A______ d'une part de produire un billet d'avion acheté par ses soins à destination du B______ et d'autre part, de se présenter chaque semaine au Vieil Hôtel de police à Carl-Vogt.

Le conseil de M. A______ a conclu à la libération immédiate de son client. Il s'engageait formellement à produire un billet d'avion à destination de I______ d'ici au 21 janvier 2022 et à quitter la Suisse à la fin du mois de février de cette année, ce que son ami, M. H______ présent dans le public garantissait pour le surplus. En effet, cette mise en liberté se justifiait en application du principe de proportionnalité.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.                 En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 11 janvier 2022 à 14h00.

3.                 La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 § 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1).

4.                 L'art. 76 al. 1 let. b LEI stipule que lorsqu'une décision de renvoi a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre qu'elle entende se soustraire au renvoi, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (ch. 3) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (ch. 4).

Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.2 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_743/2009 du 7 décembre 2009 consid. 4), qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine (cf. ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; 130 II 56 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1139/2012 du 21 décembre 2012 consid. 3.2 ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014).

Lorsqu’il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s’il existe des garanties que l’étranger prêtera son concours à l’exécution du renvoi, soit qu’il se conformera aux instructions de l’autorité et regagnera ainsi son pays d’origine le moment venu, c’est-à-dire lorsque les conditions seront réunies. Dans ce cas, le juge de la détention dispose d’une certaine marge d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C.400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).

5.                  Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.2 ; 2C_142/2013 du 1er mars 2013 consid. 4.2 ; 2C_1017/2012 du 30 octobre 2012 consid. 4.1.1 ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014). Ne constituent pas des éléments suffisants le seul fait que l'étranger soit entré en Suisse de façon illégale ou le fait qu'il soit démuni de papiers d'identité (cf. ATF 129 I 139 consid. 4.2.1). De même, le fait de ne pas quitter le pays dans le délai imparti à cet effet n'est pas à lui seul suffisant pour admettre un motif de détention au sens de l'art. 76 al. 1 ch. 3 ou 4 LEI, mais peut tout au plus constituer un indice parmi d'autres en vue d'établir un risque de fuite (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_142/2013 du 1er mars consid. 4.2 in fine ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014). En effet, si tel était le cas, il aurait appartenu au législateur d'indiquer expressément à l'art. 76 al. 1 LEI que le non-respect du délai de départ constitue à lui seul un motif justifiant la mise en détention de l'étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées). Dans la même ligne, le fait de travailler au noir ne constitue pas non plus un indice d'un risque de fuite (ATF 140 II 1 consid. 5.4.2 p. 5). À l'inverse, la circonstance que la personne concernée s'est tenue, assez longtemps et de manière ininterrompue, en un endroit stable à la disposition des autorités plaide en défaveur du risque de fuite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées).

6.                  En l'espèce, M. A______ a fait l'objet d'une décision de renvoi de Suisse, prononcée le 15 octobre 2014. Il n'a pas quitté le pays dans le délai qui lui avait été imparti et a jusqu'ici refusé de se soumettre à cette obligation. S'il a toujours honoré les convocations des autorités, il a toujours déclaré qu'il refusait de retourner au B______ et le 13 janvier dernier, il a refusé d'embarquer sur le vol de ligne prévu pour son refoulement. Ce n'est que par l'intermédiaire de son avocat puis lors de l'audience de ce jour qu'il a indiqué au tribunal qu'il ne s'opposait pas à son retour dans son pays d'origine au plus tard fin février 2022 par ses propres moyens. Il a ainsi démontré son absence de collaboration.

Certes, il n'a jamais disparu dans la clandestinité, mais, comme l'a déjà jugé la chambre administrative, ce qui est déterminant c'est qu’il peut être retenu de son comportement qu’il ne coopérera pas complètement avec les autorités en vue de l’exécution de la décision de renvoi ou qu’il existe un risque concret qu’il refusera d'obtempérer à leurs instructions lorsque celles-ci lui ordonneront (à nouveau) de monter à bord d'un avion à destination du B______, situation visée par l’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI. L’absence de risque de disparition dans la clandestinité ou de fuite loin des autorités, au moment où il lui faudrait prendre ledit vol, n’exclut pas l’application de cette disposition. En effet, si la circonstance que la personne concernée s'est tenue assez longtemps et de manière ininterrompue en un endroit stable à la disposition des autorités plaide en défaveur du risque de fuite, elle ne constitue qu’un indice dans ce sens, la question centrale étant de déterminer s’il existe des garanties que les étrangers concernés prêteront leur concours à l’exécution du renvoi le moment venu - soit lorsque les conditions en seront réunies -, ce qui dépend des circonstances et situations particulières (cf. ATA/201/2017 du 16 février 2017 consid. 5c et 5d et les arrêts cités ; cf. aussi ATA/442/2017 du 19 avril 2017).

Il faut ainsi conclure de ce qui précède que les conditions posées par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI sont en l'occurrence réunies. Le principe de la légalité est donc respecté.

7.            Même si un motif de détention existe, la mise en détention doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. ATA/201/2017 du 16 février 2017 consid. 6).

Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 143 I 147 consid. 3.1 ; 142 I 135 consid. 4.1 ; 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.4 ; 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

8.            En l'occurrence, au vu de la situation personnelle particulière de M. A______, qui séjourne à Genève depuis neuf ans, travaille depuis 2014 auprès de la Brasserie F______, dispose d'un lieu de résidence fixe et stable depuis plusieurs années, dans lequel il est toujours demeurée joignable, et n’a jamais jusque-là disparu dans la clandestinité, il faut considérer qu’une mise en détention ne se justifie pas sous cet angle.

Néanmoins, on ne peut pas sans autre prononcer cette mise en liberté. Il faut en effet tenir compte en particulier du risque d’une non-présentation à la nouvelle tentative de renvoi que la police devra organiser en l'assortissant de mesures d’aménagement pour pallier ce risque, soit en substituant à la détention d’autres mesures moins incisives, sous la forme d'une assignation territoriale, selon l'art. 74 LEI, et/ou d’une ou plusieurs des mesures prévues par l'art. 64e LEI, lesquelles, selon la jurisprudence de la chambre administrative, peuvent être ordonnées par le tribunal, en vertu de son pouvoir de réforme (cf. ATA/471/2017 du 27 avril 2017 ; ATA/442/2017 du 19 avril 2017 ; ATA/201/2017 du 16 février 2017 consid. 6, la disposition légale et les arrêts cités).

Compte tenu de ce qui précède, l'ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 11 janvier 2022 sera annulé. La détention administrative sera levée et M. A______ remis en liberté avec effet immédiat.

Cela étant, à ce stade, il lui sera fait obligation de se présenter auprès de l'OCPM chaque semaine, selon les modalités que celui-ci définira en application de l'art. 64e let. a LEI. Une copie du présent jugement sera dès lors communiquée à cette autorité. Enfin, il pourra se justifier de prononcer une mesure d'assignation à un lieu de résidence, en application de l'art. 74 al. 1 let. b LEI, de façon à s'assurer qu'il sera effectivement atteignable au moment où un vol aura été réservé. Compte tenu du peu de temps dont le tribunal dispose pour statuer et de la difficulté pratique, pour lui, de fixer dans ce cadre les diverses modalités d'une telle mesure, le soin sera laissé au commissaire de police, mieux à même d'évaluer ces dernières, de décider si cette mesure s'impose et, le cas échéant, de déterminer le lieu, par exemple le domicile de M. A______, ou le territoire devant lui être assigné (cf. art. 7 al. 2 let. a LaLEtr). Si une telle mesure devait être prise, l'obligation faite à ce dernier de se présenter régulièrement devant l'OCPM n'aurait peut-être plus raison d'être et/ou serait difficilement praticable, de sorte qu'elle pourrait devoir être levée, ce que le commissaire de police appréciera.

Par ailleurs, il sera donné acte à M. A______ de ce qu'il s'engage à fournir à l'OCPM d'ici au 21 janvier 2022, un billet d'avion valable en vue de son départ à destination de I______ d'ici au 28 février 2022.

Enfin, l'attention de M. A______ sera attirée sur le fait que le non-respect de ces obligations pourra entrainer un nouvel examen de sa situation, susceptible de conduire à sa mise en détention (cf. en particulier art. 76 al. 1 let. b ch. 1 cum 75 al. 1 let. b LEI en cas de non-respect d'une éventuelle mesure d'assignation prise en application de l'art. 74 LEI).

9.            Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat, au commissaire de police et à l'OCPM pour information. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             annule l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 11 janvier 2022 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de huit semaines ;

2.             ordonne la mise en liberté immédiate de Monsieur A______ ;

3.             donne acte à Monsieur A______  de son engagement de fournir à l'office cantonal de la population et des migrations d'ici au 21 janvier 2022 un billet d'avion à destination du B______ valable pour un départ prévu d'ici au 28 février 2022 au plus tard ;

4.             fait obligation à Monsieur A______  de se présenter auprès de l'office cantonal de la population et des migrations une fois par semaine, selon les modalités pratiques qui auront été décidées par celui-ci ;

5.             invite donc l'office cantonal de la population et des migrations à fixer ces modalités et à les communiquer sans délai à Monsieur A______  ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à M. A______, à son avocat, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière