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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1998/2021

ATAS/715/2022 du 18.08.2022 ( AVS ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1998/2021 ATAS/715/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 août 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à DARDAGNY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Marie-Josée COSTA

Monsieur B______, domicilié à COPPET, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Marie-Josée COSTA

 

 

recourants

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION, sise rue des Gares 12, GENÈVE

intimée

 

EN FAIT

 

A. a. L’association « C______ » (ci-après : l’association) a été inscrite au registre du commerce de Genève (ci-après : RC), en date du 11 juin 2012, avec pour but la fourniture d’opportunités de travail de formation à des adultes, afin de leur permettre d’acquérir une expérience significative et des compétences pour intégrer le monde professionnel. Elle a été affiliée en qualité d’employeur à la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse ou l’intimée) dès le 1er mai 2012. Madame A______ (ci-après : la présidente ou la recourante) a été inscrite au RC, en date du 30 mai 2013, jusqu’à la faillite de l’association. Monsieur B______ (ci-après : le trésorier ou le recourant) a été inscrit au RC, en date du 30 mai 2013, jusqu’au 18 décembre 2014.

b. En date du 31 août 2016, le Tribunal de première instance (ci-après : TPI) a prononcé le jugement de faillite de ladite société. L’état de collocation a été déposé le 14 novembre 2017 et la procédure de faillite a été clôturée par jugement du 7 août 2018, à la suite de quoi l’association a été radiée d’office.

c. Par décision du 1er novembre 2019, la caisse a réclamé à la présidente le paiement d’un montant de CHF 102’909.90, représentant les cotisations paritaires, y compris les frais et les intérêts moratoires dus, suite aux dommages causés à la caisse en raison du non-respect de ses obligations en tant qu’organe de l’association, dont elle était présidente du 30 mai 2013 au 31 août 2016. L’état de collocation, publié le 14 novembre 2017, révélait que le dividende prévisible serait de 0 % de sorte que la créance produite dans la faillite de l’association ne serait pas couverte. Il était ajouté que le trésorier ainsi que Monsieur D______ (vice-président) étaient codébiteurs solidaires du paiement du montant du dommage réclamé. Un décompte était annexé au courrier, détaillant le montant des salaires et des cotisations dues pour les années 2014 et 2015.

d. Par décision jointe du 1er novembre 2019, la caisse a réclamé au trésorier le paiement d’un montant de CHF 102’909.90, représentant les cotisations paritaires, y compris les frais et les intérêts moratoires dus, suite aux dommages causés à la caisse en raison du non-respect de ses obligations en tant qu’organe de l’association, dont il était trésorier du 30 mai 2013 au 31 août 2016. L’état de collocation, publié le 14 novembre 2017, révélait que le dividende prévisible serait de 0 % de sorte que la créance produite dans la faillite de l’association ne serait pas couverte. Il était ajouté que la présidente ainsi que Monsieur D______ (vice-président) étaient codébiteurs solidaires du paiement du montant du dommage réclamé. Un décompte était annexé au courrier, détaillant le montant des salaires et des cotisations dues pour les années 2014 et 2015.

e. Par courriers du 18 novembre 2019, la présidente et le trésorier ont fait opposition à la décision du 1er novembre 2019, invoquant en substance que sans la maladie de la présidente, l’association n’aurait pas fait faillite et aurait continué à fonctionner selon son modèle de départ, ce qui impliquait qu’ils n’étaient pas responsables du dommage.

B. a. Par décision sur opposition du 11 mai 2021, la caisse a confirmé sa précédente décision et rejeté l’opposition. Elle a rappelé les éléments fondant ses prétentions à l’égard de la présidente, notamment la condition d’organe de cette dernière et le fait que les cotisations paritaires n’avaient pas été versées par l’association en raison de l’inaction et de la passivité de la présidente, ce qui entraînait la responsabilité de cette dernière pour le remboursement du dommage, selon le montant articulé dans la décision du 1er novembre 2019.

b. Par décision jointe sur opposition du 11 mai 2021, la caisse a confirmé sa précédente décision et rejeté l’opposition du trésorier. Elle a rappelé les éléments fondant ses prétentions à l’égard du trésorier, notamment la condition d’organe de ce dernier et le fait que les cotisations paritaires n’avaient pas été versées par l’association en raison de l’inaction et de la passivité du trésorier, ce qui entraînait la responsabilité de ce dernier pour le remboursement du dommage selon le montant articulé dans la décision du 1er novembre 2019.

C. a. Par mémoire du 10 juin 2021, la mandataire de la présidente a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision sur opposition du 11 mai 2021. En substance, la recourante a considéré que les montants qui lui étaient réclamés étaient erronés dès lors qu’ils se fondaient sur des attestations de salaire inexactes. Pour le surplus, elle a invoqué la prescription de l’action, dès lors que les décisions du 1er novembre 2019 avaient été notifiées plus de trois ans après le jugement de faillite du 31 août 2016. Enfin, la recourante niait toute responsabilité et notamment toute négligence l’exposant à devoir rembourser le montant réclamé par l’intimée. La chambre de céans a enregistré le recours sous le numéro de procédure A/1998/2021.

b. Par mémoire joint du 10 juin 2021, la mandataire du trésorier a interjeté recours auprès de la chambre de céans contre la décision sur opposition du 11 mai 2021. En substance, le recourant a considéré que les montants qui lui étaient réclamés étaient erronés dès lors qu’ils se fondaient sur des attestations de salaire inexactes. De surcroît, la période pendant laquelle il avait été trésorier était erronée. Pour le surplus, il invoquait la prescription de l’action dès lors que les décisions du 1er novembre 2019 avaient été notifiées plus de trois ans après le jugement de faillite du 31 août 2016. Enfin, le recourant niait toute responsabilité et notamment toute négligence l’exposant à devoir rembourser le montant réclamé par l’intimée. La chambre de céans a enregistré le recours sous le numéro de procédure A/1999/2021.

c. Par ordonnance du 15 juin 2021, la chambre de céans a ordonné la jonction des causes A/1998/2021 et A/1999/2021 sous numéro de cause A/1998/2021.

d. Par réponse du 8 juillet 2021, l’intimée a allégué que c’était le moment de la connaissance du montant du dommage qui correspondait au point de départ du délai de prescription. C’était donc le moment du dépôt de l’état de collocation, soit le 14 novembre 2017, qui était le moment de la connaissance du montant du dommage et le point de départ du délai de prescription de deux ans, ce qui justifiait que les créances en réparation du dommage n’étaient pas prescrites lors de la notification des décisions, en date du 1er novembre 2019. S’agissant de la responsabilité des recourants, la jurisprudence topique était rappelée et notamment le devoir de surveillance concernant l’obligation de payer les cotisations sociales. Au vu du comportement des recourants et indépendamment de l’état de santé de la présidente, on ne pouvait que constater une violation des obligations de diligence et de surveillance imposées par le rôle d’organe de l’association, ce qui entraînait la responsabilité des recourants au sens de l’art. 52 LAVS.

e. Par réplique du 16 août 2021, la mandataire des recourants a allégué que suite à la faillite de l’association, le TPI avait ordonné, en date du 29 mai 2017, que la faillite soit réalisée selon le mode de liquidation sommaire, ce qui impliquait que les actifs étaient quasi inexistants. C’était donc dès cette date, soit au mois de mai 2017 au plus tard, que la caisse savait que les cotisations dues ne pourraient pas être recouvrées ce qui impliquait que les décisions datées du 1er novembre 2019 étaient postérieures à l’échéance du délai de prescription de deux ans. Par ailleurs, les recourants alléguaient un certain nombre de difficultés qu’ils avaient rencontrées pour justifier que la responsabilité de ces derniers n’était pas engagée. Dès lors, les recourants persistaient dans leurs conclusions visant à l’annulation des décisions querellées.

f. Par duplique du 13 septembre 2021, la caisse a écarté les arguments des recourants, tout en réservant le fait que le contrôle interne actuellement en cours pourrait établir, de manière formelle, le montant définitif de la masse salariale et par conséquent celui du dommage. Pour le surplus, l’intimée persistait dans ses conclusions.

g. Par observations du 22 septembre 2021, la mandataire des recourants a allégué, à nouveau, la gravité de l’état de santé de la recourante pour justifier l’existence d’un lien de connexité direct et manifeste entre le non-paiement des cotisations et la gravité de son état. De surcroît, les recourants ont allégué qu’ils ignoraient qui avait transmis et complété les attestations de salaire communiquées à l’intimée ; dès lors, les montants des salaires figurant sur lesdites attestations ne leur étaient pas opposables. Enfin, les recourants prenaient acte du fait que l’intimée reconnaissait l’inexactitude du montant de la masse salariale qu’elle avait retenu.

h. Par observations du 15 novembre 2021, l’intimée a allégué qu’il appartenait aux recourants de préciser les contours de la masse salariale, tout en rappelant que la décision de taxation pour la période 2014 était entrée en force sans être contestée ; pour le surplus, l’intimée considérait que la différence peu sensible de cotisations paritaires fixées en sus n’était de loin pas choquante et ne pouvait plus être contestée. Selon l’intimée, les recourants avaient indubitablement la qualité d’organe de l’association pendant la période topique et leur négligence était causale quant au dommage dont le remboursement était réclamé. Dès lors, l’intimée persistait dans ses conclusions visant au rejet des recours.

i. Par courrier du 16 juin 2022, la chambre de céans a rappelé à l’intimée que les cotisations LAMat ne pouvaient donner lieu à une action en réparation du dommage suite à l’arrêt du 30 janvier 2020 (ATAS/97/2020). Elle a donc enjoint à la caisse de présenter un nouveau tableau rectificatif ne comprenant que les cotisations pouvant faire l’objet d’une action en réparation du dommage avec les intérêts idoines.

j. Par courrier du 28 juillet 2022, la caisse a invité la chambre de céans à se référer à la pièce 3 de son chargé de pièces, dont il convenait de soustraire les montants des cotisations LAMat, par CHF 494.15 + CHF 286.65 plus les intérêts y relatifs.

k. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

l. Les autres faits seront cités, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence ratione materiae pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Selon l’art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l’employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. Cette disposition est également applicable lorsque la caisse recherche un organe de l’employeur en réparation du dommage, et ce quel que soit le domicile dudit organe (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).

La personne morale ayant son siège dans le canton de Genève jusqu'au moment de la faillite, la chambre de céans est également compétente ratione loci.

3.             Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

4.              

4.1. À teneur de l’art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s’appliquent aux art. 1 à 97 LAVS, à moins que la loi n’y déroge expressément.

L’entrée en vigueur de la LPGA le 1er janvier 2003 a entraîné la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l’AVS, notamment en ce qui concerne l’art. 52 LAVS. Désormais, la responsabilité de l’employeur y est réglée de manière plus détaillée qu’auparavant et les art. 81 et 82 du règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) ont été abrogés. Les principes dégagés par la jurisprudence sur les conditions de droit matériel de la responsabilité de l’employeur au sens de l’art. 52 LAVS dans sa teneur précédente restent valables sous l’empire des modifications introduites par la LPGA (ATF 129 V 11 consid. 3.5 et 3.6). Les modifications de la LAVS du 7 juin 2011, entrées en vigueur le 1er janvier 2012, ont également entraîné la modification de nombreuses dispositions légales, en particulier l’art. 52 al. 2 à 4 LAVS. Par ailleurs, le 1er janvier 2020 est entrée en vigueur la révision du droit de la prescription de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), entraînant la modification de l’art. 52 al. 3 LAVS.

4.2. En l’espèce, au vu des faits pertinents, la responsabilité des recourants doit être examinée, sur le plan matériel, au regard des dispositions en vigueur depuis le
1er janvier 2012, étant encore précisé qu’eu égard au principe de droit intertemporel selon lequel les dispositions légales applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 445 consid. 1), c’est la teneur de l’art. 52 al. 2 LAVS en vigueur jusqu’au 31 décembre 2019 qui est applicable au cas d’espèce.

5.        Le litige porte sur la responsabilité des recourants dans le préjudice causé à l’intimée, par le défaut de paiement des cotisations sociales, pour les années 2014 et 2015.

6.              

6.1. L'art. 14 al. 1er LAVS en corrélation avec les art. 34 et suivants RAVS, prescrit l'obligation pour l'employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié et de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses, périodiquement, les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions. L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 118 V 193 consid. 2a).

6.2. Selon l’art. 52 LAVS, dans sa teneur du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2019, l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l'assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). Le droit à réparation est prescrit deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais peuvent être interrompus. L'employeur peut renoncer à invoquer la prescription. Si le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est applicable (al. 3). La caisse de compensation fait valoir sa créance en réparation du dommage par voie de décision (al. 4).

7.        À titre liminaire, il convient d’examiner si la prétention de la caisse est prescrite comme le soutiennent les recourants.

7.1.1. Les délais prévus par l’art. 52 al. 3 LAVS doivent être qualifiés de délais de prescription, non de péremption, comme cela ressort du texte légal et des travaux préparatoires de la LPGA (SVR 2005 AHV n° 15 p. 49 consid. 5.1.2 ; FF 1994 V 964 ; FF 1999 p. 4422). Alors que le délai de prescription de deux ans commence à courir dès la connaissance du dommage, celui de cinq ans débute, en revanche, dès la survenance du dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.2). Cela signifie qu'ils ne sont plus sauvegardés une fois pour toutes avec la décision relative aux dommages-intérêts ; le droit à la réparation du dommage au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS peut donc aussi se prescrire durant la procédure d'opposition ou la procédure de recours qui s'ensuit (ATF 135 V 74 consid. 4.2).

7.1.2. Le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 193 consid. 2.2 ; ATF 126 V 443 consid. 3a). Ainsi, en matière de cotisations, un dommage se produit au sens de l'art. 52 LAVS lorsque l'employeur ne déclare pas à l'AVS tout ou partie des salaires qu'il verse à ses employés et que, notamment, les cotisations correspondantes se trouvent ultérieurement frappées de péremption selon l'art. 16 al. 1 LAVS. Dans un tel cas, le dommage est réputé survenu au moment de l'avènement de la péremption (ATF 112 V 156 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 35/06 du 4 octobre 2006 consid. 6). Ce jour marque également celui de la naissance de la créance en réparation et la date à partir de laquelle court le délai de cinq ans (ATF 129 V 193 consid. 2.2 ; ATF 123 V 12 consid. 5c).

Un dommage se produit également en cas de faillite, en raison de l'impossibilité pour la caisse de récupérer les cotisations dans la procédure ordinaire de recouvrement. Le dommage subi par la caisse est réputé être survenu le jour de la faillite (ATF 129 V 193 consid. 2.2).

7.1.3. Selon la jurisprudence rendue à propos de l'ancien art. 82 al. 1 RAVS, et valable sous l'empire de l'art. 52 al. 3 LAVS (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 18/06 du 8 mai 2006 consid. 4.2), il faut entendre par moment de la « connaissance du dommage », en règle générale, le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.1).

En cas de faillite, le moment de la connaissance du dommage correspond en règle générale à celui du dépôt de l'état de collocation, ou celui de la publication de la suspension de la liquidation de la faillite faute d'actifs (ATF 129 V 193 consid. 2.3), la date de la publication de cette mesure dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) étant déterminante (arrêt du Tribunal fédéral H.142/03 du 19 août 2003 consid. 4.3 ; ATF 129 V 193 consid. 2.3).

7.1.4. S’agissant des actes interruptifs de prescription, il sied de retenir ce qui suit. Tandis que le juge ne peut interrompre la prescription que par une ordonnance ou une décision, « chaque acte judiciaire des parties » suffit à produire cet effet (art. 138 al. 1 CO). Cette notion d'acte judiciaire des parties doit être interprétée largement tout en ayant égard à la ratio legis de la disposition citée, qui est de sanctionner l'inaction du créancier. Il faut donc considérer, comme acte judiciaire d'une partie, tout acte de procédure relatif au droit invoqué en justice et susceptible de faire progresser l'instance (ATF 130 III 202 consid. 3.2). Par ailleurs, tant la décision que l’opposition interrompent le délai de prescription de deux ans et font courir un nouveau délai de même durée (ATF 135 V 74 consid. 4.2.2).

Selon l’art. 136 al. 1 CO, la prescription interrompue contre l’un des débiteurs solidaires ou l’un des codébiteurs d’une dette indivisible l’est également contre tous les autres. Cette règle n’est cependant valable qu'en cas de solidarité parfaite (ATF 133 III 11 consid. 5.1). L’art. 136 al. 1 CO ne s'applique pas au simple concours d'actions, appelé parfois solidarité imparfaite (ATF 106 II 250 consid. 3) ; le lésé doit alors interrompre la prescription contre chacun des responsables du dommage (ATF 127 III 257 consid. 6a et les arrêts cités).

La solidarité entre responsables du dommage causé à la caisse de compensation doit être qualifiée de parfaite (cf. ATAS/536/2011 du 26 mai 2011 et ATAS/1150/2009 du 17 septembre 2009).

7.2. En l’espèce, le dommage s’est produit le 31 août 2016, soit au moment du prononcé de la faillite, et l’intimée est réputée avoir eu connaissance du montant du dommage le 14 novembre 2017, lors de la publication dans la FOSC du dépôt de l’état de collocation prévoyant un dividende de 0 %.

Ainsi, le délai absolu de prescription de cinq ans, courant dès le 31 août 2016 et le délai relatif de prescription de deux ans, courant dès le 14 novembre 2017, ont été interrompus par les deux décisions en réparation du dommage du 1er novembre 2019. Les prétentions de la caisse ne sont donc pas prescrites.

8.        L’action en réparation du dommage n’étant pas prescrite, il convient à présent d’examiner si les autres conditions de la responsabilité de l’art. 52 LAVS sont réalisées, à savoir si les recourants peuvent être considérés comme étant des organes de l’employeur, s’ils ont commis une faute ou une négligence grave et enfin s’il existe un lien de causalité adéquate entre leur comportement et le dommage causé à l’intimée.

9.              

9.1. La nouvelle teneur de l’art. 52 al. 2 LAVS, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, codifie la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle, si l’employeur est une personne morale, la responsabilité peut s’étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom (ATAS/610/2013 du 18 juin 2013 consid. 4a).

Le caractère subsidiaire de la responsabilité des organes d’une personne morale signifie que la caisse de compensation ne peut agir contre ces derniers que si le débiteur des cotisations (la personne morale) est devenu insolvable (ATF 123 V 12 consid. 5b).

L’art. 52 LAVS ne permet ainsi pas de déclarer l’organe d’une personne morale directement débiteur de cotisations d’assurances sociales. En revanche, il le rend responsable du dommage qu’il a causé aux différentes assurances sociales fédérales, intentionnellement ou par négligence grave, en ne veillant pas au paiement des cotisations sociales contrairement à ses obligations (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 96/05 du 5 décembre 2005 consid. 4.1).

9.2. La notion d'organe selon l'art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui se dégage de l'art. 754 al. 1 CO.

En matière de responsabilité des organes d'une société anonyme, l'art. 52 LAVS vise en première ligne les organes statutaires ou légaux de celle-ci, soit les administrateurs, l'organe de révision ou les liquidateurs (ATF 128 III 29 consid. 3a ; Thomas Nussbaumer, Les caisses de compensation en tant que parties à une procédure de réparation d'un dommage selon l'art. 52 LAVS, in RCC 1991 p. 403).

S’agissant des autres personnes morales, le Tribunal fédéral a reconnu la responsabilité du gérant d'une société à responsabilité limitée ainsi que du président, du directeur financier ou du gérant d'une association sportive (ATF H 34/04 du 15 septembre 2004 consid. 5.3.1 et les références, in SVR 2005 AHV n° 7 p. 23, arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.1).

Dans une association, le comité est l'organe exécutif de l'association qui a le devoir, sous réserve de dispositions statutaires contraires, d'exécuter les tâches qui lui incombent en vertu de la loi, des statuts et des décisions de l'association. Il a notamment pour tâches de conduire les affaires, de représenter l'association vis-à-vis des tiers ou, en cas de délégation de la gestion à une tierce personne, de veiller au choix, à l'instruction et à la surveillance du délégué. Le fait d'agir à titre bénévole ne change rien à la nature des obligations liées à la fonction (arrêt du Tribunal fédéral 9C_859/2007 consid. 2.4 et les références citées).

Mais les critères d'ordre formel ne sont, à eux seuls, pas décisifs et la qualité d'organe s'étend également aux personnes qui ont pris des décisions réservées aux organes ou se sont chargées de la gestion proprement dite, participant ainsi de manière déterminante à la formation de la volonté de la société (ATF 119 II 255 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 128/04 du 14 février 2006 consid. 3 ss).

Pour que la responsabilité d’un organe matériel ou de fait soit engagée, les tâches déléguées doivent inclure le domaine des cotisations (Michel VALTERIO, Droit de l’assurance-vieillesse et survivants (AVS) et de l’assurance-invalidité (AI), 2011, n° 2395 p. 647). Le Tribunal fédéral a ainsi reconnu la responsabilité du directeur d’une société anonyme disposant du droit de signature individuelle (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 215/99 du 20 février 2002), d’un membre d’un conseil d’administration qui exécute d’une manière indépendante ou sous sa responsabilité le traitement des salaires et des cotisations (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 129/04 du 14 janvier 2015 consid. 2) ou d’un actionnaire majoritaire qui s’est occupé, du moins en partie, de ces tâches (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 305/00 du 6 septembre 2001 consid. 4).

9.3. Il incombe à la caisse, qui supporte les conséquences de l'échec de la preuve, d'alléguer les faits fondant la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS et permettant d'établir qu'une personne occupait au sein d'une société la position d'un organe au sens matériel (ATF 114 V 213 consid. 5 in fine ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 20/01 du 21 juin 2001 consid. 5).

10.

10.1 L’obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l’employeur, des prescriptions régissant l’assurance-vieillesse et survivants (RCC 1978 p. 259 ; RCC 1972 p. 687). Il faut donc un manquement d’une certaine gravité. Pour savoir si tel est le cas, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret (ATF 121 V 243 consid. 4b).

Selon la jurisprudence constante, se rend coupable d’une négligence grave l’employeur qui manque de l’attention qu’un homme raisonnable aurait observée dans la même situation et dans les mêmes circonstances. La mesure de la diligence requise s’apprécie d’après le devoir de diligence que l’on peut et doit en général attendre, en matière de gestion, d’un employeur de la même catégorie que celle de l’intéressé. En présence d’une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l’attention qu’elle doit accorder au respect des prescriptions. Une différenciation semblable s’impose également lorsqu’il s’agit d’apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l’employeur (ATF 108 V 189). Les faits reprochés à une entreprise ne sont pas nécessairement imputables à chacun des organes de celle-ci. Il convient bien plutôt d’examiner si et dans quelle mesure ces faits peuvent être attribués à un organe déterminé, compte tenu de la situation juridique et de fait de ce dernier au sein de l’entreprise. Savoir si un organe a commis une faute dépend des responsabilités et des compétences qui lui ont été confiées par l’entreprise (ATF 108 V 199 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.2). La négligence grave mentionnée à l’art. 52 LAVS est admise très largement par la jurisprudence (ATF 132 III 523 consid. 4.6).

Commet notamment une faute grave, l’organe qui verse des salaires pour lesquels les créances de cotisations qui en découlent de par la loi ne sont pas couvertes (SVR 1995 AHV n° 70 p. 214 consid. 5 ; voir également l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_338/2007 du 21 avril 2008 consid. 3.1). Commet également une faute grave celui qui ne démissionne pas de ses fonctions alors qu’il se trouvait, en raison de l’attitude du tiers, dans l’incapacité de prendre les mesures qui s’imposaient s’agissant du paiement des cotisations ou qui se trouvait dans l’incapacité d’exercer son devoir de surveillance (voir par exemple : arrêts du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.3 ; 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).

10.2 La responsabilité de l’employeur au sens de l’art. 52 LAVS suppose enfin un rapport de causalité (naturelle et) adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et la survenance du dommage. La causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2).

La causalité adéquate peut être exclue, c’est-à-dire interrompue, l’enchaînement des faits perdant alors sa portée juridique, lorsqu’une autre cause concomitante - la force majeure, la faute ou le fait d’un tiers, la faute ou le fait de la victime - constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l’on ne pouvait pas s’y attendre. L’imprévisibilité de l’acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate ; il faut encore que cet acte ait une importance telle qu’il s’impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l’événement considéré, reléguant à l’arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l’amener, en particulier le comportement de l’auteur (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 95/05 du 10 janvier 2007 consid. 4).

11.    Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

12.          

12.1 En l’espèce, selon les statuts de l’association, le comité – dont font partie la présidente et le trésorier - est autorisé à faire tous les actes qui se rapportent au but de l’association et a les pouvoirs les plus étendus pour la gestion des affaires courantes (art. 13).

Le comité est notamment chargé de veiller à l’application des statuts, de rédiger les règlements, d’administrer les biens de l’association, d’engager et de licencier les collaborateurs et de déléguer des compétences spécifiques à une direction opérationnelle (art. 16).

L’association est valablement engagée par la signature collective à deux des membres du comité, avec le président ou un vice-président.

Compte tenu de ces éléments, il est évident que la présidente et le trésorier, tous deux membres du comité, doivent être considérés comme des organes matériels de l’association.

Ils sont en charge des affaires courantes dont font partie le paiement des salaires et le paiement des cotisations sociales. Le cas échéant, ils sont tenus de déléguer des compétences spécifiques à une direction opérationnelle.

C’est le lieu de rappeler que selon les directives sur la perception des cotisations dans l’AVS, AI et APG (ci-après : DP), l’administrateur qui ne demande aucun renseignement sur le paiement et les décomptes des cotisations, ne donne pas d’instruction, n’ordonne pas de contrôle, alors que les pertes prennent des proportions menaçantes agit par négligence grave. La passivité, en dépit de la connaissance éventuelle du défaut de paiement de cotisations dues, doit être considérée comme une négligence grave (DP : no 8304)

En leur qualité d’organe de la société, il incombait aux recourants, pendant la période durant laquelle ils étaient organes de l’association, de veiller personnellement au paiement des cotisations et contributions paritaires courantes et arriérées, en mettant en œuvre toutes les mesures de vérification utiles, afin que l’association soit à même de remplir ses obligations d’employeur.

Compte tenu de ce qui précède, la chambre de céans considère qu’il est établi que les recourants avaient pour devoir de veiller au paiement des cotisations sociales, ce qu’ils n’ont pas fait.

12.2 La présidente invoque comme fait justificatif son état de santé qui, selon elle, l’a empêchée de faire face à ses obligations ; elle produit à cet effet un certificat médical daté du 8 juin 2021, signé par le docteur E______, psychiatre et psychothérapeute en réponse à un questionnaire envoyé par la mandataire de la recourante.

Le médecin traitant confirme que la présidente souffrait d’un état dépressif sévère, sans symptômes psychotiques et que sa capacité de travail était nulle de juillet 2015 à avril 2016, puis de 50 % de mai à juillet 2016 et qu’elle avait à nouveau une capacité de travail nulle, depuis le mois d’août 2016.

Elle souffrait d’un isolement social, de crises de panique, de troubles de la mémoire récente, de procrastination, de ralentissement psychomoteur, d’idées suicidaires et d’une incapacité à assurer le quotidien. En raison de l’intensité des troubles cognitifs et de la sévérité de la dépression, la présidente était incapable d’exercer ses fonctions.

Elle bénéficiait d’un suivi psychiatrique mensuel et d’une psychothérapie hebdomadaire et prenait des antidépresseurs, soit de la Fluoxétine 40 mg par jour, et un anxiolytique, soit du Temesta deux fois 1mg par jour.

Selon la jurisprudence topique en matière d'assurances sociales, il sied de rappeler qu’en ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants.

En l’occurrence, il n’est toutefois pas nécessaire de quereller le bien-fondé du certificat médical établi par le médecin traitant de la recourante, dans la mesure où cette dernière avait la possibilité de nommer une personne à qui elle pouvait déléguer la surveillance du paiement des salaires et des cotisations sociales, ce qu’elle n’a pas fait, à teneur des documents figurant au dossier. Étant précisé qu’il est peu vraisemblable que la dépression l’ait soudainement saisie, de telle manière qu’elle ait été, du jour au lendemain, privée de toute possibilité de demander de l’aide au vice-président ou de déléguer les compétences qu’elle n’était plus en mesure d’assumer, voire de démissionner, si elle ne se sentait plus capable d’assumer ses fonctions.

La présidente était d’ailleurs encore en fonction, et apparemment apte à assumer ces dernières (puisqu’à teneur du certificat médical produit, elle n’aurait été empêchée qu’à partir du mois de juillet 2015), alors que les cotisations sociales de l’année 2014 et du début de l’année 2015 n’étaient pas payées ; elle pouvait donc déjà se rendre compte de la situation financière difficile de l’association et réagir en conséquence, ce d’autant plus qu’elle invoquait déjà l’existence de problèmes financiers à l’appui du courrier de licenciement de son trésorier, daté du 25 septembre 2014 et signé par elle.

Compte tenu de ce qui précède, la chambre de céans considère que la recourante n’a pas démontré, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu’elle était inapte à exercer ou déléguer ses fonctions ou démissionner, pour des motifs excusables.

Sous l’angle de la causalité, on peut admettre que sa maladie n’était pas prévisible, mais cela ne suffit pas, en soi, à interrompre le rapport de causalité adéquate ; la maladie de la présidente n’était pas d’une soudaineté telle qu’elle s’impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l’événement considéré, reléguant à l’arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l’amener. En effet, avant que son état de santé psychique ne se péjore au point qu’elle n’avait plus les moyens d’intervenir, la présidente aurait dû demander de l’aide, prendre les mesures de délégation qui s’imposaient ou donner sa démission, ce qu’elle n’a pas fait, laissant ainsi la situation financière empirer.

La présidente porte donc la responsabilité de son inaction dans le paiement ou la surveillance du paiement des cotisations sociales, ce qui a causé le dommage dont l’intimée réclame le remboursement.

12.3 Le trésorier invoque le fait que la période pendant laquelle il était en fonction a été calculée de manière erronée par l’intimée et soumet, à cet égard, un courrier de licenciement daté du 25 septembre 2014, par lequel l’association l’informe de son licenciement avec effet au 31 décembre 2014, suite à la restructuration de l’entreprise qui traverse des problèmes financiers.

À teneur de l’inscription figurant au RC, ses pouvoirs en tant que trésorier ont été radiés au 18 décembre 2014.

Sur les attestations de salaire 2014 et 2015 produites par les recourants, le nom du trésorier apparaît pour l’année 2014 avec le salaire correspondant ; en revanche, aucun salaire ne lui a été payé en 2015, ce qui confirme qu’il n’était plus en activité, en tant que trésorier, dès le 1er janvier 2015.

Par ailleurs, aucun indice ne laisse penser que le recourant a continué à agir en qualité de trésorier « occulte » de l’association, après son licenciement au 31 décembre 2014.

Selon une jurisprudence constante, c'est la démission effective de l'organe qui fixe en principe les limites temporelles de la responsabilité (ATF 123 V 172 consid. 3a ; ATF 112 V 1 consid. 3c p. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_713/2013 du 30 mai 2014 consid. 4.3.2). Un administrateur ne peut alors être tenu pour responsable que du dommage résultant du non-paiement des cotisations qui sont venues à échéance et qui auraient dû être versées entre le jour de son entrée effective au conseil d'administration et celui où il a quitté effectivement ses fonctions, soit pendant la durée où il a exercé une influence sur la marche des affaires. Demeurent réservés les cas où le dommage résulte d'actes qui n'ont déployé leurs effets qu'après le départ du conseil d'administration (ATF 126 V 61 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 263/02 du 6 février 2003 consid. 3.2).

La jurisprudence susmentionnée s’applique, mutatis mutandis, aux organes d’une association ; dès lors, le trésorier ne saurait être tenu pour responsable des négligences dans le paiement des cotisations sociales, après son licenciement.

Compte tenu de ce qui précède, il convient d’ores et déjà d’admettre partiellement le recours du trésorier, au sens que sa responsabilité en tant qu’organe ne court que jusqu’au 18 décembre 2014 et non pas jusqu’au jour de la faillite, soit le 31 août 2016, comme retenu de manière erronée par l’intimée dans la décision querellée.

Pour le surplus, de la même manière que pour la présidente, il appartenait en premier lieu au trésorier de l’association de s’assurer du paiement des salaires et des cotisations sociales. La maladie de la présidente qui – selon le recourant – a entraîné la situation financière difficile de l’association, puis sa faillite, ne représente pas un fait justificatif pouvant l’exonérer de sa responsabilité dans le paiement des cotisations sociales.

Par ailleurs, sous l’angle de la causalité, ladite maladie ne s’impose pas comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l’événement considéré, reléguant à l’arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l’amener. C’est, au contraire, le comportement du trésorier, qui n’était pas malade et pouvait donc assumer ses responsabilités à l’égard de l’association jusqu’au 18 décembre 2014, qui apparaît comme la cause du dommage.

Le recourant est donc également responsable de son inaction dans le paiement ou la surveillance du paiement des cotisations sociales, ce qui a causé le dommage dont l’intimée réclame le remboursement.

13.    Les recourants invoquent enfin que les montants des cotisations sociales qui leur sont réclamés sont erronés.

L’intimée a admis ce grief, sur le principe, puisqu’elle a confirmé dans le cadre de la présente procédure, par son courrier du 30 septembre 2021 à la chambre de céans, qu’elle communiquerait prochainement sa détermination sur le « montant de la masse salariale contestée par les recourants ».

L’intimée s’est postérieurement déterminée sur ce point de manière ambivalente, par courrier du 15 novembre 2021. S’agissant de la masse salariale de l’année 2014, l’intimée a admis qu’il existait une différence « peu sensible », pour les cotisations paritaires 2014 fixées en sus et concluant que le montant final « n’était de loin pas choquant » et ne « pouvait plus être contesté ».

S’agissant de la masse salariale de l’année 2015, l’intimée a exposé, dans le même courrier, n’avoir constaté aucune situation de doublon dans le calcul de la masse salariale et que le rapport avait fait l’objet d’une décision formelle rectificative, qui n’avait pas été contestée et était aussi entrée en force. Il est exact que la décision de taxation de l’année 2015 est entrée en force et ne saurait être revue.

En ce qui concerne la décision de taxation définitive, pour la période 2014, le fait qu’elle soit entrée en force sans contestation formelle n’est pas opposable au trésorier, qui avait déjà quitté ses fonctions au moment où la décision de taxation définitive a été notifiée à l’association.

En effet, selon les DP, version 2021, ch. 8074, la créance en réparation du dommage fondée sur une décision de paiement rétroactif, entrée en force n’est examinée, dans la procédure selon l’art. 52 LAVS, que s’il y a des éléments pour conclure à une inexactitude évidente des montants fixés. Si la décision de cotisations arriérées est notifiée à une époque postérieure à l’ouverture de la faillite, la possibilité de réexaminer la créance en réparation du dommage quant à son montant reste garantie. De même, une décision de cotisations peut être librement réexaminée dans le cadre de la procédure en réparation du dommage lorsque la personne mise en cause n’était plus organe de l’employeur, au moment où la décision a été rendue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_901/2007 du 8 octobre 2008).

Le Tribunal fédéral a établi ce principe dans son arrêt 9C_901/2007 consid. 5.1 « Zu beantworten bleibt die Frage, in welchem zeitlichen Rahmen der Beschwerdeführer ersatzpflichtig ist. Das kantonale Gericht hat für das Bundesgericht verbindlich (Art. 105 Abs. 1 BGG) festgestellt, dass der Beschwerdeführer am 1. November 2002 aus der Gesellschaft ausgeschieden ist. Ab diesem Zeitpunkt hat es ihn - anders als noch die Verwaltung - von der Ersatzpflicht ausgenommen und die Forderung soweit korrigiert.

Diese Anpassung ist grundsätzlich richtig, denn nach der Rechtsprechung ist für das Ende der Organstellung auf das Datum des tatsächlichen Ausscheidens abzustellen (anstelle vieler vgl. BGE 126 V 61 E. 4a sowie MARCO REICHMUTH, Die Haftung des Arbeitgebers und seiner Organe nach Art. 52 AHVG, Diss. Freiburg 2008, Rz. 244 f. mit Hinweisen) und haftet eine Person grundsätzlich nur für jenen Schaden, der durch die Nichtbezahlung von Beiträgen verursacht ist, die zu einem Zeitpunkt zur Zahlung anstanden, als sie eine formelle, materielle oder faktische Organstellung innehatte und somit disponieren sowie Zahlungen an die Ausgleichskasse veranlassen konnte (vgl. BGE 103 V 120 E. 5 S. 123 sowie MARCO REICHMUTH, a.a.O., Rz. 256 f. mit Hinweisen) ».

Dans le même arrêt, sous consid. 5.2, le Tribunal fédéral ne manque pas de rappeler que toute personne morale a un intérêt à se défendre contre des demandes de paiement rétroactif injustifiées, d'une part parce qu'elle ne veut pas payer des sommes qui ne sont pas dues, d'autre part parce que les organes agissant pour la personne morale ont également un intérêt tout particulier à se défendre contre des paiements injustifiés, en raison de leur éventuelle responsabilité personnelle (traduction libre) (arrêt H 14/00 du 30 juillet 2001, consid. 3d).

Le Tribunal fédéral poursuit, sous consid. 5.4, en exposant que les anciens organes qui ont quitté l'entreprise n'ont généralement pas la possibilité, en cas de notification ultérieure de la décision de cotisation, d'influencer la société pour qu'elle conteste la décision. Le débiteur des cotisations et donc le destinataire de la décision est la société. Un ancien organe de la société n'est pas légitimé à porter la demande de cotisation devant les tribunaux. Il n'est pas non plus toujours vrai que les organes encore en place, par exemple d'une entreprise dont l'activité s'est endormie, s'occupent encore suffisamment de l'administration. Si, en revanche, la personne mise en cause a cessé d'être un organe à ce moment-là et qu'elle n'avait donc plus la possibilité de contester ou de faire contester la décision de cotisation en sa qualité d'organe, la décision de cotisation doit pouvoir être librement examinée dans le cadre de la procédure en dommages-intérêts (traduction libre).

Compte tenu de ce qui précède, l’intimée – qui a la charge de la preuve - ne peut faire l’économie de démontrer l’exactitude de ses calculs pour les cotisations sociales concernant la masse salariale 2014, ce d’autant moins qu’elle admet la possibilité qu’il existe une « différence », ce qui se traduit par le fait que le montant de la masse salariale, partant le montant des cotisations, partant le montant du dommage réclamé au recourant, est probablement erroné.

En ce qui concerne la recourante, cette dernière était en fonction au sein de l’association lorsque les décisions de taxation pour l’année 2014 et pour l’année 2015 ont été notifiées ; dès lors, elle avait la possibilité de s’y opposer et lesdites décisions de taxation lui sont opposables.

14.     

14.1 S’agissant de la quotité du montant du dommage réclamé par l’intimée aux recourants, le montant du dommage correspond à celui pour lequel la caisse de compensation subit une perte. Appartiennent à ce montant les cotisations paritaires (cotisations patronales et d’employés ou ouvriers) dues par l’employeur, les contributions aux frais d’administration, les intérêts moratoires, les taxes de sommation et les frais de poursuite (DP, nos 8016 et 8017). Les éventuelles amendes prononcées par la caisse de compensation ne font pas partie du dommage et doivent le cas échéant être déduites (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 142/03 du 19 août 2003 consid. 5.5).

14.2 Néanmoins, si la responsabilité des recourants au sens de l’art. 52 LAVS doit être confirmée pour les périodes litigieuses, soit pour les années 2014 et 2015 pour la présidente et 2014 pour le trésorier, comme exposé ci-dessus, il n’existe toutefois pas de base légale suffisante pour rechercher les employeurs ou leurs organes pour le dommage résultant du défaut de paiement des cotisations dues en vertu de la LAMat (cf. ATAS/79/2020 du 30 janvier 2020 consid. 14).

Partant, il y a lieu de déduire du dommage de l’intimée les cotisations impayées découlant de la LAMat, comme cela a été signalé par la chambre de céans à l’intimée.

14.3 De plus, en ce qui concerne la détermination précise du dommage, il apparaît que l’intimée n’a pas donné intégralement suite aux injonctions de la chambre de céans, communiquées dans son courrier du 13 juillet 2022.

S’il est aisé de déduire le montant des cotisations LAMat ne pouvant pas être incluses dans le dommage, la caisse n’a, par contre, pas communiqué à la chambre de céans le montant des intérêts desdites créances et les frais de sommation et de poursuite s’y rapportant. Le tableau présenté en pièce 3 du chargé de l’intimée, auquel cette dernière renvoie, ne donne pas le détail des intérêts moratoires, qui s’élèvent ainsi à un montant global, respectivement, de CHF 4'535.30 pour l’année 2014 et de CHF 900.55 pour l’année 2015 sans qu’il soit possible de calculer avec exactitude et de soustraire le montant des intérêts dus, en relation avec les créances des cotisations LAMat, pour les années 2014 et 2015.

De même, le montant global retenu pour les frais de sommation et les frais de poursuite n’est pas détaillé ni documenté, étant une nouvelle fois rappelé que l’intimée à la charge de prouver la quotité du dommage qu’elle invoque et le lien avec les créances qu’elle réclame.

La présente cause sera donc renvoyée à l’intimée afin qu’elle calcule de manière précise la masse salariale 2014, partant, le montant des cotisations sociales, partant, le montant du dommage réclamé au recourant, uniquement pour l’année 2014.

Pour l’ensemble de ses prétentions à l’égard des deux recourants, l’intimée devra ensuite déduire le montant des cotisations LAMat ainsi que les intérêts moratoires, les frais de sommation et les frais de poursuite qui se rapportent strictement aux cotisations LAMat.

15.         Compte tenu de ce qui précède, le recours de la présidente sera très partiellement admis sur la question du montant du dommage ; le recours du trésorier sera partiellement admis sur la question du montant du dommage et de la période pour laquelle il est responsable en tant qu’organe ; les décisions seront annulées et la cause renvoyée à l’intimée, pour nouvelles décisions.

16.          

16.1 La recourante, assistée par une mandataire professionnellement qualifiée et n’obtenant que très partiellement gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 800.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

16.2 Le recourant, assisté par une mandataire professionnellement qualifiée et obtenant partiellement gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 1’600.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 RFPA).

17. Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).

 

 

 


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare les recours recevables.

Au fond :

2.        Admet très partiellement le recours de la présidente au sens des considérants et annule la décision du 11 mai 2021.

3.        Renvoie la cause à l’intimée, pour nouveau calcul du montant du dommage imputé à la présidente, excluant les cotisations impayées découlant de la LAMat, ainsi que les intérêts moratoires et les frais administratifs et de poursuite s’y rapportant et nouvelle décision.

4.        Rejette le recours de la présidente pour le surplus et confirme sa responsabilité pour les années 2014 et 2015.

5.        Alloue à la présidente, à charge de l’intimée, une indemnité de CHF 800.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Admet partiellement le recours du trésorier au sens des considérants et annule la décision du 11 mai 2021.

7.        Renvoie la cause à l’intimée, pour nouveau calcul du montant du dommage imputé au trésorier, excluant les cotisations sociales de l’année 2015 ainsi que, pour l’année 2014, les cotisations impayées découlant de la LAMat et les intérêts moratoires, les frais administratifs et les frais de poursuite s’y rapportant et nouvelle décision.

8.        Rejette le recours du trésorier pour le surplus et confirme sa responsabilité pour l’année 2014.

9.        Alloue au trésorier, à charge de l’intimée, une indemnité de CHF 1’600.- à titre de participation à ses frais et dépens.

10.    Dit que la procédure est gratuite.

 

 

 

 

11.    Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon l’art. 85 LTF, s’agissant de contestations pécuniaires, le recours est irrecevable si la valeur litigieuse est inférieure à 30’000 francs (al. 1 let. a). Même lorsque la valeur litigieuse n’atteint pas le montant déterminant, le recours est recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (al. 2). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le