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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/529/2013

ATAS/1290/2013 du 20.12.2013 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/529/2013 ATAS/1290/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 décembre 2013

3ème Chambre

 

En la cause

Madame G__________, domiciliée à CAROUGE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Jacques EMERY

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

 

1.        Le 23 novembre 2010, Madame G__________ (ci-après : l’assurée), née en 1951, a déposé une demande de prestations auprès du SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES (ci-après : SPC).

2.        Par décision du 29 mai 2012, portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 mai 2012, le SPC lui a reconnu le droit à des prestations complémentaires cantonales (PCC) à compter du 1er mars 2007 ; s’y ajoutaient, à compter du 1er janvier 2011, des prestations complémentaires fédérales (PCF).

3.        Le 28 juin 2012, l’assurée s’est opposée à cette décision en contestant les montants retenus à titre de fortune immobilière et de produit de cette fortune de 2007 à 2012, soit :

-         à titre de fortune : 99'045 fr. 35 en 2007, 104'666 fr. 85 en 2008, 98'172 fr. 10 en 2009, 87'781 fr. 15 en 2010, 82'765 fr. 70 en 2011 et 71'169 fr. 55 en 2012.

-         et, à titre de produit de cette fortune : 4'960 fr. 15 en 2007, 4'756 fr. 80 en 2008, 4'721 fr. 60 en 2009, 3'970 fr. 55 de janvier à octobre 2010, 4'148 fr. 50 en novembre 2010, 4'148 fr. 50 en décembre 2010, 3'907 fr. 45 en 2011 et 3'413 fr. 95 en 2012.

L’assurée a allégué que sa fortune immobilière avait fait l’objet de trois expertises qui avaient déterminé :

-         qu’elle avait un droit de propriété coopérative sur un logement de 39,23 m2 situé à Gliwice, en Pologne, évalué à 157'000 PLN soit 43'960 CHF ;

-         qu’elle avait hérité de la succession de feu son époux, H__________, décédé en mars 1993, le tiers d’un immeuble sis à Pale, en Bosnie-Herzégovine, évalué à 34'994 KM (BAM = 21'596 CHF = 7'198 CHF pour sa part) ;

-         qu’elle était enfin copropriétaire d’un tiers d’un immeuble sis à Novi Sad, en Serbie, d’une valeur de 48'000 Euros, ce qui correspondait, pour un tiers, à 16'000 Euros, c’est-à-dire à 19'210 CHF.

La bénéficiaire en a tiré la conclusion que sa fortune immobilière ne pouvait donc s’élever, au total, qu’à 70'368 CHF.

Elle a contesté également l’évaluation du produit de cette fortune en alléguant que, selon la loi, la valeur locative ne peut être retenue que pour les logements occupés par le propriétaire ou l’usufruitier, alors qu’elle n’a jamais pu occuper aucun de ces logements.

Elle a affirmé n’avoir aucun contact avec Madame IA__________, fille de son défunt mari, dont elle ignore les coordonnées. Quant à son fils, Monsieur IB__________, il s’est montré menaçant envers elle lorsqu’elle s’est rendue en Serbie en 1994 et n’a jamais versé un centime aux autres héritiers pour la location de l’immeuble qu’il y occupe depuis 17 ans. L’immeuble se trouvant en Bosnie est quant à lui occupé par des squatters et se trouvait, en 1995 déjà, dans un état de délabrement avancé. Enfin, l’appartement situé en Pologne est loué à une famille qui paie les charges à la société coopérative et ne verse à l’assurée que 80 CHF par mois, de manière irrégulière. C’est à ces 960 CHF annuels que se résume le produit de la fortune immobilière.

4.        Par décision du 9 janvier 2013, le SPC a rejeté l’opposition et confirmé sa décision du 29 mai 2012.

Le SPC considère qu’il ressort clairement des attestations produites que la bénéficiaire détient un droit de propriété coopérative sur un appartement en Pologne d’une valeur de 157'000 PNL, une part de propriété commune sur une maison en Bosnie d’une valeur de 11'665 BAM (1/3 de 34'995 BAM) et une part de copropriété sur une maison en Serbie d’une valeur de 16'000 Euros (1/3 de 48'000 Euros).

5.        Par écriture du 11 février 2013, l’assurée a interjeté recours contre cette décision.

La recourante réitère les explications fournies dans son opposition, alléguant qu’elle n’a jamais pu toucher le moindre centime de la fortune dont elle a hérité et invoque la jurisprudence de la Cour pour soutenir qu’en attendant de disposer de sa part d’héritage, elle a été obligée de puiser dans sa fortune pour couvrir ses besoins vitaux, à tout le moins à hauteur des prestations complémentaires auxquelles elle aurait eu droit en l’absence d’héritage.

6.        Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 11 mars 2013, a conclu au rejet du recours.

L’intimé soutient que les déclarations de la recourante ne permettent pas de conclure qu’elle ne peut jouir des prérogatives que lui confèrent ses droits de propriétaire sur les biens immobiliers dont il est question.

Par ailleurs, il fait remarquer que la situation de la recourante n’est pas similaire à celle évoquée dans la jurisprudence à laquelle elle se réfère puisqu’il ne s’agit pas ici d’une révision du droit aux prestations consécutive à un héritage mais de l’établissement du droit aux prestations à la suite d’une première demande : les biens dont la recourante a hérité ne sont pas des prétentions successorales mais des immeubles dont elle pouvait disposer durant la période considérée. Dans ces conditions, l’intimé considère qu’il n’y a pas lieu de soustraire un montant fictif de la fortune au prétexte que la recourante ne peut prétendument pas disposer de ses biens.

7.        Une audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 6 juin 2013.

La recourante a confirmé posséder une part de propriété dans une coopérative. Il s'agit d'un appartement situé en Pologne dont la valeur telle que retenue par le SPC (157'000 PNL) correspond à celle qui était valable en 2010, dont la recourante indique qu’elle ignore comment elle a évolué depuis lors. Cet appartement est occupé par le fils d'un couple d'amis et sa compagne. Lui est en stage et elle est étudiante, de sorte que leurs moyens sont limités, raison pour laquelle la recourante a accepté qu'ils ne lui versent que les montants des frais. A la question de savoir pourquoi elle n’avait pas choisi de louer cet appartement à quelqu'un d'autre pour un loyer normal, la recourante a répondu que la situation en Pologne était difficile et que, par le passé, elle avait eu un locataire qui n'avait rien versé pendant longtemps. Selon elle, il serait difficile de trouver un locataire solvable et qui s'acquitte d'un loyer normal, d'autant qu'étant éloignée, elle ne peut veiller à ce que tout se passe bien.

Par ailleurs, la recourante a hérité de son mari, d'une part de copropriété d'une maison en Bosnie. Les deux autres copropriétaires sont les enfants de son défunt mari. La recourante a allégué avoir vu la maison pour la dernière fois en 1992, au début de la guerre. Elle croit savoir qu’elle a été squattée par une famille jusqu'en 1997. La recourante a produit des photographies pour démontrer que la maison est inhabitable.

Le troisième immeuble sur lequel elle dispose d’une part de propriété commune se trouve en Serbie. Il s'agit également d'un bien qui appartenait à son mari et dont elle a hérité avec ses deux enfants. Cette maison est occupée par le fils de son mari, qui n'a jamais rien payé, ni à elle ni à la troisième copropriétaire.

La recourante a indiqué avoir donné procuration, en 1993, à un avocat en Serbie pour tenter de récupérer sa part, sans succès. Il s'est avéré que la maison avait été construite sans autorisation.

L’intimé a fait remarquer qu’il faudrait à tout le moins que la recourante produise des documents attestant des démarches entreprises. Il a relevé qu’au vu de la modicité du montant retenu à titre de produit immobilier (445 fr. par mois environ), il ne pouvait en l’état que persister dans ses conclusions.

La recourante a indiqué être en mesure de produire un document provenant d'un Tribunal en Serbie confirmant que la maison a été construite sans autorisation, qu'il faudrait verser une certaine somme pour régulariser la situation et que, jusque-là, tout est bloqué.

8.        Le 21 juin 2013, la recourante a produit :

-         une procuration signée en date du 2 février 2005 en faveur d’un avocat pour la représenter auprès du tribunal s’agissant de la question de l’héritage de son défunt mari ;

-         un contrat de rémunération pour l’aménagement d’un terrain à bâtir en Serbie (contrat relatif au règlement des obligations réciproque pour l’aménagement d’un terrain à bâtir pour un ouvrage construit sans autorisation de construire) ;

-         une lettre de l’avocate de la recourante lui indiquant qu’un accord avait été conclu et signé mais non finalisé du fait qu’elle n’avait pas obtenu l’accord du fils du défunt ;

-         une décision de succession du Tribunal de Novi Sad ;

-         une quittance du paiement d’une provision à un avocat en date du 6 avril 1993.

La recourante a expliqué que les démarches entreprises en vue d’obtenir l’autorisation de construire du bâtiment de Novi Sad n’avaient pas abouti faute d’accord du fils du défunt.

9.        Par écriture du 30 juillet 2013, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

Il rappelle que la recourante a accepté la succession de feu son conjoint et s’étonne qu’elle n’ait pas fait usage de son droit de répudiation si les biens immobiliers en question n’avaient aucune valeur et ne rapportaient aucun rendement.

L’intimé relève encore que ni la loi ni un devoir d’assistance morale n’obligeaient la recourante à renoncer à la perception d’un loyer s’agissant de son appartement en Pologne.

Enfin, les documents produits ne prouvent ni n’attestent que la recourante a été entravée de manière durable dans les prérogatives que lui confèrent ses droits de propriétaire sur les biens immobiliers, soit le droit d’user et de jouir des immeubles.

En conséquence, il considère qu’il n’est pas démontré que les produits immobiliers retenus ne peuvent être obtenus ni même qu’ils seraient manifestement erronés ou excessifs.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC ; RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC; RS J 4 25).

La compétence de la Cour de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        La LPGA, en vigueur depuis le 1er  janvier 2003, s’applique aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1er  al. 1er LPC).

3.        Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 et 60 LPGA; art. 9 de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC; RSG  J 4 20], art. 43 LPCC).

4.        Le litige porte sur le point de savoir si les montants retenus par l’intimé à titre de fortune immobilière et de revenu de celle-ci dans le calcul des prestations complémentaires l’ont été à juste titre.

5.        Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de vieillesse de l'assurance-vieillesse et survivants, conformément à l'art. 4 al. 1 let. a LPC.

Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1er LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. Les revenus déterminants comprennent notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière (art. 11 al. 1 let. b LPC) et les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (art. 11 al. 1 let. g LPC).

Ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

6.        Concernant la fortune immobilière, l’art. 17 OPC-AVS/AI dispose que la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l'impôt cantonal direct du canton du domicile (al. 1). Lorsque des immeubles ne servent pas d'habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale (al. 4). En cas de dessaisissement d'un immeuble, à titre onéreux ou gratuit, est déterminante la valeur vénale pour savoir s'il y a renonciation à des parts de fortune au sens de l'art. 11 al. 1 let. g LPC.

7.        La valeur locative du logement occupé par le propriétaire ou l'usufruitier ainsi que le revenu provenant de la sous-location sont estimés selon les critères de la législation sur l'impôt cantonal direct du canton de domicile, ou à défaut, ceux de l'impôt fédéral direct (cf. art. 12 de l’ordonnance sur les prestations complé-mentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité [OPC-AVS/AI ; RS 831.301]).

A Genève, l’art. 24 al. 2 de loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP – RSG D 3 08), entrée en vigueur le 1er janvier 2010, dispose notamment que la valeur locative est déterminée en tenant compte des conditions locales. Le loyer théorique des villas et des appartements en copropriété par étage occupés par leur propriétaire est fixé en fonction notamment de la surface habitable, du nombre de pièces, de l'aménagement, de la vétusté, de l'ancienneté, des nuisances éventuelles et de la situation du logement.

Les loyers et fermages doivent, en principe, être pris en compte pour leur montant contractuel. Toutefois, lorsque ce montant est inférieur à celui qui est usuellement pratiqué dans la région, c’est ce dernier qui doit être pris en compte. Il en va de même dans les cas où aucun loyer n’a été convenu, ou dans les cas où l’immeuble est vide lors même qu’une location serait possible (Directives de l’OFAS concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, valables dès le 1er avril 2011 [DPC], ch. 3433.03).

Lorsqu’un immeuble n’est pas situé dans le canton de Genève, l’administration fiscale peut faire recours à un taux forfaitaire de 4.5% de la valeur du bien pour fixer la valeur locative, et ce dans la mesure où les conditions locales ne peuvent pas être déterminées aisément, contrairement aux immeubles situés dans le canton (ATAS/237/2012 ; ATAS/43/2010 ; ATAS/732/2009). Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de juger que l’emploi de ce taux n'apparaissait pas comme excessif (ATF non publié P 57/05 du 29 août 2006).

8.        Il y a dessaisissement au sens de l'art. 11 al. 1 let. g LPC lorsque les possibilités d'obtenir un revenu d'un immeuble ne sont pas exploitées ou ne le sont qu'insuffisamment. On doit admettre qu'il y a renonciation au revenu d'un immeuble lorsqu'il serait exigible de l'ayant droit et objectivement possible de mettre le bien immobilier à disposition d'un tiers moyennant finance. Une telle mise à disposition est objectivement possible lorsque la nature du droit d'utilisation le permet, lorsque le bien immobilier se prête à une exploitation à titre onéreux – à titre d'exemple, un immeuble décrépi qui n'a plus été entretenu car son propriétaire vit en établissement médico-social depuis des années, ne peut être loué – et lorsqu'il existe une demande pour des biens immobiliers utilisables de mêmes nature, surface et situation (Ralph JÖHL, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV in SBVR, 2ème éd. 2007, p. 1783 ss n. 210 et n. de bas de page 732).

On ajoutera que, de manière générale, la prise en compte d'un revenu dessaisi dans le calcul des prestations complémentaires n'est possible que dans les cas où un tel revenu peut effectivement être réalisé. On pensera notamment au gain hypothétique imputé au conjoint d'un bénéficiaire, qui ne peut être retenu lorsque c'est en raison de motifs conjoncturels que l'intéressé ne trouve pas d'emploi (ATFA non publié P 88/01 du 8 octobre 2002, consid. 3). De même, les éléments de fortune se trouvant à l’étranger et ne pouvant être transférés en Suisse ou réalisés pour une raison quelconque ne doivent pas être pris en considération dans la fortune du bénéficiaire (ch. 3443.06 des Directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI [DPC] publiées par l'OFAS dans leur version valable dès le 1er avril 2011). Le dessaisissement suppose un élément de volonté, lequel s'analyse à la lumière du principe de responsabilité personnelle dans l'acquisition des moyens nécessaires à la subsistance (JÖHL, op. cit., p. 1835 n. 273).

9.        Enfin, on rappellera que le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré et le défaut de preuve va au détriment de la partie qui entendait tirer un droit du fait non prouvé (ATF 126 V 319 consid. 5a; ATFA non publié I 339/03 du 19 novembre 2003, consid. 2).

10.    En l'espèce, s’agissant de la valeur des biens immobiliers de la recourante, il y a lieu de se référer aux explications données par l’intimé dans sa réponse.

On relèvera à cet égard que les valeurs retenues pour les biens en question correspondent précisément à celles alléguées par la recourante (soit 157'000 PNL pour l’appartement en Pologne, 1/3 de 34'995 BAM pour la maison en Bosnie et 1/3 de 48'000 Euros pour la maison en Serbie). Quant aux montants retenus par l’intimé, ils ont été obtenus en convertissant les valeurs en question en francs suisses, ce qui est correct : s’agissant du taux de conversion applicable pour le calcul de la fortune immobilière et de la valeur locative y relative, il y a en effet lieu d’appliquer les Directives émises par l’Office fédéral des assurances sociales en matière de prestations complémentaires (DPC). Or, celles-ci prévoient que, pour les rentes et pensions versées en devises d’Etats parties à la Convention de libre passage CH-UE et à l’Accord de l’AELE, les taux de conversion applicables sont ceux fixés par la Commission administrative des communautés européennes pour la sécurité sociale des travailleurs migrants et publiés au Journal officiel de l’Union européenne. Le cours de conversion applicable est celui déterminant du début de l’année correspondante (ch. 2087.1 DPC). Bien que ces directives concernent les rentes servies, elles sont applicables mutatis mutandis aux autres éléments composant les revenus déterminants, tels que la fortune immobilière.

Il y a donc lieu de confirmer les montants retenus à titre de fortune immobilière.

11.    Quant à ceux retenus à titre de produit de cette fortune, il convient de relever en premier chef que l’argument de la recourante selon lequel aucune valeur ne peut être retenue puisqu’elle n’occupe pas les biens et n’en est pas usufruitière tombe à faux : en ce cas, comme le fait remarquer l’intimé à juste titre, une valeur locative doit également être prise en considération à titre de bien dessaisi s’il s’avère que la recourante a renoncé à obtenir un revenu sur ces immeubles ou s’il s’avère qu’ils ne sont exploités qu'insuffisamment.

C’est ce qu’il convient à présent de vérifier.

S’agissant de l’appartement sis en Pologne, il apparaît clairement que la recourante a renoncé au revenu qu’elle aurait pu en obtenir en mettant le bien immobilier à disposition de tiers sans en exiger un loyer minimal. Ses explications quant au fait qu’il lui serait difficile d’obtenir un tel loyer au vu de la situation économique en Pologne et du fait qu’elle ne se trouve pas sur place ne convainquent pas. Il semble plutôt que la recourante ait accepté de renoncer à percevoir un loyer afin de rendre service à des connaissances, ce qui est louable mais, dans la mesure où elle n’y est tenue par aucune obligation légale, il y a bel et bien dessaisissement sur ce point.

S’agissant de l’appartement occupé par le fils du défunt mari de la recourante, cette dernière allègue qu’il lui a été impossible, à elle comme à l’autre copropriétaire, de percevoir le moindre centime. Certes, la recourante a produit un certain nombre de pièces mais force est de constater qu’aucune ne permet de reconnaître, au degré de la vraisemblance prépondérante requis, que toutes les démarches ont été tentées pour permettre à la recourante de faire valoir ses droits. On comprend qu’elle a mandaté des avocats dans le cadre de la succession mais aucun document officiel ne vient attester de démarches judiciaires entreprises par la recourante envers son beau-fils.

S’agissant de l’appartement qui se trouve en Serbie, un document confirme qu’il y a bien eu un problème d’autorisation de construire et que la situation a été bloquée par le beau-fils de la recourante. Sur ce point seul, la Cour de céans peut admettre que la recourante a démontré n’avoir pu faire valoir ses droits pour obtenir un rendement de l’objet.

Enfin, la recourante entend tirer argument de la jurisprudence de la Cour de céans (ATAS/1267/2012) et soutient qu’il conviendrait de tenir compte du fait qu’elle ne peut disposer de sa part d’héritage et est obligée de puiser dans sa fortune pour couvrir ses besoins vitaux, à tout le moins à hauteur des prestations complémentaires auxquelles elle aurait eu droit en l’absence d’héritage. Cet argument tombe à faux. En effet, ainsi que le fait remarquer l’intimé, cette jurisprudence, applicable en cas de révision du droit aux prestations consécutive à un héritage ne s’aurait s’appliquer à la situation de la recourante, puisque la succession, la concernant, est bel et bien liquidée.

12.    Le recours est donc très partiellement admis en ce sens qu’il doit être renoncé à tenir compte des 4,5% de revenu concernant l’objet situé en Serbie (dont la valeur de la part de copropriété s’élève à 1/3 de16’000 Euros). La cause sera renvoyée à l’intimé à charge pour ce dernier de recalculer le droit aux prestations de la recourante dans cette mesure.

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet très partiellement au sens des considérants.

3.        Renvoie la cause à l’intimé à charge pour ce dernier de recalculer le droit aux prestations complémentaires en ne tenant compte d’aucun revenu de la fortune s’agissant du bien immobilier sis en Serbie.

4.        Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de 1’000 fr. à titre de participation à ses frais et dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF; RS 173.110) aux conditions de l’art. 95 LTF pour ce qui a trait aux prestations complémentaires fédérales, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire (articles 113 ss LTF) aux conditions de l’art. 116 LTF pour ce qui a trait aux prestations complémentaires cantonales. Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le