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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4451/2009

ATAS/1267/2012 (3) du 18.10.2012 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

Recours TF déposé le 27.11.2012, rendu le 22.10.2013, REJETE, 9C_968/2012
Descripteurs : PC ; OBJET DU LITIGE ; RESTITUTION(EN GÉNÉRAL) ; MODIFICATION DES CIRCONSTANCES ; SUCCESSION ; AMORTISSEMENT(ÉCONOMIE) ; REVENU DE LA FORTUNE ;
Normes : LPC 10 al. 1 let. a; LPCC 3
Résumé : Selon la jurisprudence, la part d'héritage d'un bénéficiaire des prestations complémentaires doit être prise en considération dans le nouveau calcul desdites prestations dès la mort du de cujus. Dans la mesure où l'on considère ainsi de manière fictive que le bénéficiaire a disposé de sa part dès le décès du défunt, il convient de tenir compte de la même manière, dans le calcul des prestations, des dépenses que l'intéressé aurait dû consentir, en attendant de pouvoir disposer de l'héritage, pour pourvoir à son entretien à défaut de prestations complémentaires. Les montants prévus par l'art. 10 al. 1 let. a LPC et à l'art. 3 LPCC sont présumés correspondre aux dépenses absolument essentielles à une existence décente. Il paraît donc justifié de s'y référer, sans que le bénéficiaire ait à prouver les frais effectifs qui ont été les siens. En d'autres termes, on présume qu'en attendant de disposer de sa part d'héritage, l'intéressé aura dû puiser dans sa fortune pour couvrir ses besoins vitaux et ce, à tout le moins à hauteur des prestations complémentaires auxquelles il aurait eu droit en l'absence d'héritage. Dans ses nouveaux calculs, le SPC devra donc déduire ces montants forfaitaires de celui de la fortune pour chaque année écoulée depuis le décès.
Rectification d'erreur matérielle : Page 1, 26.10.2012/SKA/MIS
En fait
En droit

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4451/2009 ATAS/1267/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 octobre 2012

 

 

En la cause

Madame S__________, domiciliée rue de la Mairie 4, 1207 Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Nathalie LANDRY Laurence CRUCHON *rectification d'une erreur matérielle le 26.10.2012/SKA/MIS

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, 1208 Genève

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame S__________ (ci-après : la bénéficiaire), née en 1944, est au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité.

2.        Du 1er décembre 2007 au 31 décembre 2008, elle a touché des prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) et cantonales (ci-après : PCC) à hauteur de 1'344 fr. par mois (542 fr. + 802 fr.), ainsi qu'un subside pour son assurance-maladie.

3.        Le loyer de sa bénéficiaire ayant augmenté, le SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES (ci-après : SPC), par décision du 9 février 2009, a recalculé le montant des prestations complémentaires octroyées dès le 1er janvier 2009. Dans ses calculs, il a tenu compte de son nouveau loyer (13'200 fr./an), mais également de sa rente d'invalidité (1'693 fr./mois), de sa fortune (1'676 fr.), des intérêts annuels de l'épargne (17 fr.). Cela l'a conduit à reconnaître à sa bénéficiaire le droit à des prestations complémentaires fédérales et cantonales de 966 fr., respectivement de 827 fr., et à un subside pour l'assurance-maladie de 419 fr. par mois.

4.        Par courrier du 24 février 2009, la bénéficiaire a informé le SPC qu'elle avait hérité de sa tante, décédée le 29 décembre 2007. Elle a précisé que la succession, pas encore liquidée, se composait notamment d'une maison vendue fin décembre 2008 et que le notaire chargé de la succession venait de lui verser un acompte de deux tiers sur sa part successorale, soit un montant de 87'405 fr. Elle a joint à son envoi un courrier rédigé le 24 février 2009 par Me Gérard DEFACQZ, notaire en charge de la succession, dont il ressortait que sa part dans la succession non partagée de feue sa tante était estimée à 131'108 fr. 54.

5.        Le 4 mai 2009, la bénéficiaire a adressé au SPC copie d'un avis de crédit de 37'778 fr. 53 - montant viré par Me DEFACQZ à titre de deuxième versement sur sa part successorale. Elle y a joint l'avis de crédit relatif au premier versement effectué le 19 février 2009 (87'405 fr. 70).

6.        Le 18 septembre 2009, le SPC a rendu une nouvelle décision tenant compte de l'augmentation de fortune annoncée.

Il a procédé au calcul rétroactif du droit aux prestations complémentaires de la manière suivante :

 

 

 

- pour la période du 1er décembre 2007 au 31 janvier 2008 :

PCF PCC

besoins vitaux / revenu minimum vital 18'140 fr 27'754 fr.

loyer brut annuel 8'064 fr. 8'064 fr.

total des dépenses reconnues 26'204 fr. 35'818 fr.

rente AI annuelle 19'692 fr. 19'692 fr.

fortune 6'790 fr 70 12'732 fr. 55

produit de la fortune 1'018 fr 45 1'018 fr. 45

total des revenus 27'501 fr. 33'443 fr.

différence dépenses-revenu 1'297 fr. 2'375 fr.

montant des prestations complémentaires 0 fr. 2'375 fr.

montant mensuel 0 fr. 198 fr.

 

- pour la période du 1er février au 31 décembre 2008 :

PCF PCC

besoins vitaux / revenu minimum vital 18'140 fr. 27'754 fr.

loyer brut annuel 8'064 fr. 8'064 fr.

total des dépenses reconnues 26'204 fr. 35'818 fr.

rente AI annuelle 19'692 fr. 19'692 fr.

fortune 10'186 fr. 05 20'372 fr. 05

produit de la fortune 1'018 fr. 45 1'018 fr 45

total des revenus 30'897 fr. 41'083 fr.

différence dépenses-revenu - 4'693 fr. - 5'265 fr.

montant mensuel 0 fr. 0 fr.

 

- pour la période postérieure au 1er janvier 2009, compte tenu de la modification de loyer de la bénéficiaire :

PCF PCC

besoins vitaux / revenu minimum vital 18'720 fr. 28'642 fr.

loyer brut annuel 13'200 fr. 13'200 fr.

total des dépenses reconnues 31'920 fr. 41'842 fr.

rente AI annuelle 20'316 fr. 20'316 fr.

fortune 10'186 fr. 05 20'372 fr. 05

produit de la fortune 1'018 fr. 45 1'018 fr. 45

total des revenus 31'521 fr. 42'106 fr.

différence dépenses-revenu 399 fr. - 264 fr.

montant mensuel 34 fr. 0 fr.

 

Le total des prestations dues selon le calcul rétroactif était de 702 fr. pour la période du 1er décembre 2007 au 30 septembre 2009. La bénéficiaire ayant touché des prestations complémentaires à hauteur de 33'609 fr. durant cette même période, il en résultait un trop-perçu de 32'907 fr. dont le SPC réclamait la restitution.

7.        Le 16 octobre 2009, la bénéficiaire s'est opposée à cette décision en alléguant que les démarches entreprises pour retrouver les héritiers de sa tante avaient pris un certain temps, qu'il en était allé de même de la vente de la maison dont le produit faisait partie de l'héritage et que ce n'était que le 24 février 2009 que le notaire l'avait informée du montant qu'elle toucherait concrètement et avait procédé au versement des deux tiers de sa part. La bénéficiaire a fait remarquer qu'avant cela, elle n'aurait pas été en mesure de subvenir à ses besoins sans les prestations complémentaires, puisqu'elle n'avait pas encore reçu sa part d'héritage. Elle a fait valoir que la liquidation de la succession n'était intervenue que le 24 août 2009.

Elle a ajouté que les prestations reçues depuis mars 2009 l'avaient été en parfaite bonne foi, puisqu'elle avait dûment informé le SPC de la modification de sa situation financière.

Subsidiairement, elle a demandé à pouvoir bénéficier d'une remise et la prise en compte de dépenses supplémentaires.

8.        Par décision du 9 novembre 2009, le SPC a confirmé celle du 18 septembre 2009 en rappelant que les héritiers acquièrent les créances successorales de plein droit dès l'ouverture de la succession et que la bénéficiaire avait donc disposé dès ce moment d'une créance correspondant au montant de sa part successorale, quand bien même le montant y relatif ne lui avait été versé que plus tard.

9.        Par acte du 10 décembre 2009, la bénéficiaire a interjeté recours auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales - alors compétent - en concluant, sous suite de dépens, à l'annulation de la décision du 9 novembre 2009 en tant qu'elle portait sur son droit aux prestations fédérales et cantonales pour le mois de décembre 2007 et à l'octroi d'une remise totale de sa dette. La recourante faisait valoir que, selon la loi, la fortune déterminante était celle au 1er janvier de l'année où la prestation était servie. Or, au 1er janvier 2007, elle ne disposait d'aucune fortune, le décès de sa tante étant survenu en décembre de cette année-là. La recourante invoquait en outre sa bonne foi et soutenait que, les dépenses reconnues et les dépenses supplémentaires étant supérieures au revenu déterminant retenu, la restitution de la somme réclamée la placerait manifestement dans une situation financière difficile.

10.    Le Tribunal cantonal a admis le recours par arrêt du 14 octobre 2010 (ATAS/1051/2010). Après avoir rappelé que, selon la jurisprudence, la part d'héritage d'un bénéficiaire des prestations complémentaires doit être prise en compte dès l'ouverture de la succession, il a relevé que, lors d'un nouveau calcul des prestations complémentaires, il y a lieu de partir des faits tels qu'ils se présentaient réellement durant la période de restitution déterminante et de tenir compte de toutes les modifications intervenues, peu importe qu'elles influent le revenu déterminant à la hausse ou à la baisse.

En application de ces principes, le Tribunal cantonal a repris le calcul des prestations du 1er décembre 2007 au 30 septembre 2009 en tenant compte de la diminution de la fortune que la recourante aurait subie si elle avait dû subvenir à ses besoins en y prélevant les montants palliant la diminution de prestations complémentaires dès le mois de décembre 2007. Compte tenu de la fortune et du produit de celle-ci dès le 1er décembre 2007, le droit rétroactif à des prestations s'établissait comme suit :

-       du 1er au 31 décembre 2007 : PCC de 198 fr./mois ;

-       en janvier 2008 : PCC de 203 fr. ;

-       du 1er février au 31 décembre 2008 : pas de prestations ;

-       du 1er janvier au 30 septembre 2009 : 274 fr./mois (dont 71 fr. à titre de PCC).

Compte tenu de ces calculs, le montant à restituer s'élevait à 30'742 fr. Le recours a été partiellement admis en ce sens et la cause renvoyée à l'intimé pour décision sur la demande de remise.

11.    L'intimé a alors saisi le Tribunal fédéral en faisant valoir que, du 1er décembre 2007 au 30 septembre 2009, en l'absence de dépenses justifiées et acquittées par l'intéressée, il fallait considérer que sa fortune était restée la même jusqu'à la décision en restitution du 18 septembre 2009. L'intimé a défendu l'argument que la jurisprudence ne permettait pas la soustraction fictive et a posteriori de dépenses hypothétiques et nullement prouvées et que seules les modifications intervenues durant la période de restitution déterminante pouvaient entrer en considération.

12.    Le 19 décembre 2011, le Tribunal fédéral a admis ce recours (arrêt 9C_948/2010) au motif que le Tribunal cantonal avait étendu l'objet du litige - puisque les conclusions de la recourante ne portaient que sur le mois de décembre 2007 -, sans donner à l'intimé la possibilité de se déterminer, violant ainsi son droit d'être entendu, et renvoyé la cause à la juridiction cantonale afin que celle-ci statue à nouveau après avoir donné aux parties la possibilité de s'exprimer sur l'extension de l'objet du litige au-delà du 31 décembre 2007 et sur l'existence, durant la période en question, de faits susceptibles d'affecter, à la hausse ou à la baisse, les revenus déterminants de la bénéficiaire des prestations.

13.    Par courrier du 24 janvier 2012, la Cour de céans, désormais compétente, a donc accordé aux parties un délai pour se déterminer sur l'existence - durant la période du 31 décembre 2007 au 30 septembre 2009 - d'éléments influant sur les revenus déterminants de la bénéficiaire des prestations.

14.    L'intimé s'est déterminé le 29 février 2012 en se référant à l'argumentation développée dans son recours de droit public et en ajoutant que le raisonnement à la base de l'arrêt du 14 octobre 2010 était contraire aux dispositions réglementaires et « aberrant ».

L'intimé soutient que le bénéficiaire de prestations complémentaires ne subit pas de dommage selon qu'il puise dans sa fortune pour ses besoins vitaux ou qu'il ait recours aux prestations complémentaires. Dans les deux cas, ses besoins vitaux sont couverts, conformément au but de la législation. Autrement dit, tant que la fortune d'un bénéficiaire est affectée à la couverture de ses besoins vitaux, les prestations complémentaires sont réduites d'autant, ce qui implique une diminution de la restitution. A l'inverse, si la fortune n'est pas utilisée pour couvrir les besoins vitaux, les prestations complémentaires et, partant, le montant à restituer, sont d'autant plus élevés.

15.    La recourante s'est également déterminée par écriture du 29 mars 2012.

Elle requiert l'extension de l'objet du litige à la période faisant l'objet de la décision de restitution et conclut à l'annulation des décisions des 18 septembre et 9 novembre 2009, au versement de prestations complémentaires à hauteur de 1'344 fr. pour décembre 2007, à l'imputation des frais réglés par ses soins sur la fortune dès le mois de janvier 2008, à la soustraction de la dette envers l'intimé dès janvier 2009, à un nouveau calcul des prestations complémentaires en fonction de ces éléments et à la remise totale de la dette.

La recourante relève que les éléments du calcul de la décision litigieuse ne correspondent pas à sa situation effective. Elle mentionne les éléments suivants :

-          le loyer payé jusqu'au 15 janvier 2009 s'élevait à 8'160 fr. par année - dont un acompte de charges de 1'440 fr. - ; c'est dès lors ce montant qui aurait dû être retenu jusqu'en février 2009 ;

-          la recourante s'est acquittée en 2007 et 2008 de cotisations pour les assurances sociales (112 fr. 30 en 2007 et 9 fr. par trimestre en 2008) ;

-          dans la mesure où elle n'avait pas encore reçu sa part d'héritage en décembre 2007, le produit de la fortune pris en compte pour cette période devrait également être revu ;

-          ses primes d'assurance-maladie se sont élevées à 419 fr. 60 en 2008 et à 407 fr. 60 en 2009 ;

-          dès le mois de janvier 2009, le montant correspondant aux prestations complémentaires qui lui ont été versées devrait être soustrait de sa fortune fictive ;

-          sa fortune a diminué de 30'000 fr. depuis 2009, date dès laquelle elle a dû puiser dans ses ressources pour pallier l'arrêt du versement des prestations complémentaires.

A l'appui de sa position, la recourante a produit :

-          un avis de majoration augmentant son loyer à 6'720 fr. et un acompte de charges (1'440 fr./an) valable dès le 1er juillet 2001;

-          une facture et un récépissé de cotisations sociales de 112 fr. 30 pour 2007;

-          trois factures et récépissés de cotisations trimestrielles aux assurances sociales de 9 fr. pour 2008;

-          un certificat d'assurance-maladie de base de 419 fr. 60 par mois pour 2008;

-          un certificat d'assurance-maladie de base de 407 fr. 60 par mois pour 2009;

-          un bordereau de taxation 2008 faisant état d'une fortune mobilière de 14'886 fr.

-          un bordereau de taxation 2009 indiquant une fortune mobilière de 147'565 fr.;

-          un bordereau de taxation 2010 retenant une fortune mobilière de 117'753 fr.;

16.    Par écriture du 26 avril 2012, l'intimé s'est opposé à l'extension de l'objet du litige au-delà du mois de décembre 2007 en relevant que, pour ce mois, seule était litigieuse la date de prise en compte de la part d'héritage de la recourante et en alléguant que, sur ce point, la décision respectait rigoureusement les dispositions légales.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941 en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010 (aLOJ; RS E 2 05), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaissait, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC ; RS 831.30). Il statuait aussi, en application de l'art. 56V al. 2 let. a aLOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité du 25 octobre 1968 (LPCC; RSG J 7 15).

Depuis le 1er janvier 2011, cette compétence revient à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice, laquelle reprend la procédure pendante devant le Tribunal cantonal des assurances sociales (art. 143 al. 6 de la LOJ du 26 septembre 2010).

La compétence de la Cour de céans pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        La recevabilité du recours a d'ores et déjà été admise.

3.        Le litige porte donc sur la question de savoir si les calculs auxquels s'est livré l'intimé le 18 septembre 2009 concernant la période du 1er décembre 2007 au 30 septembre 2009 et la décision de restitution en découlant sont conformes au droit.

Dans son écriture du 26 avril 2012, l'intimé s'est opposé à ce qu'il a qualifié d'extension d'objet du litige. Or, l'objet du litige dans la procédure administrative est le rapport juridique qui, dans le cadre de l'objet de la contestation déterminé par la décision, constitue, d'après les conclusions du recours, l'objet de la décision effectivement attaquée (ATF 125 V 413 consid. 1b). En l'espèce, si la recourante a d'abord limité ses conclusions au mois de décembre 2007 dans son recours, elle les a étendues à l'ensemble de la période couverte par la décision de restitution dans son écriture du 29 mars 2012. Il ne s'agit cependant aucunement d'une extension de l'objet du litige puisque la décision attaquée porte sur toute la période litigieuse. Les parties ont par ailleurs eu l'occasion de se déterminer sur l'ensemble de cette période à la suite à l'arrêt du Tribunal fédéral. L'intimé ne peut dès lors exiger que la période examinée se limite à celle ayant fait l'objet des conclusions initiales de la recourante.

4.        Les dispositions légales régissant l'octroi de prestations complémentaires et leur restitution ont été exposées dans l'arrêt du Tribunal du 14 octobre 2010 aux considérants 5, 6 et 9 duquel il est renvoyé.

5.        S'agissant de savoir à compter de quand doit être prise en compte la modification de fortune de la recourante suite au décès de sa tante, il convient de rappeler qu'en cas de changements dans la fortune ou les revenus déterminants, la prestation complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée lorsque les dépenses reconnues, les revenus déterminants ou la fortune subissent une diminution ou une augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement longue. Sont déterminants les dépenses nouvelles et les revenus nouveaux et durables, convertis sur une année, ainsi que la fortune existant à la date à laquelle le changement intervient (art. 25 al. 1 let. c OPC-AVS/AI). La nouvelle décision doit porter effet dès le début du mois au cours duquel le changement a été annoncé, mais au plus tôt à partir du mois dans lequel celui-ci est survenu (art. 25 al. 2 let. b OPC-AVS/AI). A la suite d'une diminution de fortune, un nouveau calcul de la prestation complémentaire annuelle ne peut être effectué qu'une fois par an (art. 25 al. 3 OPC-AVS/AI).

6.        Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, la part d'héritage d'un bénéficiaire des prestations complémentaires doit être prise en compte dès l'ouverture de la succession qu'il acquiert de plein droit (art. 560 al. 1 du Code civil suisse [CC; RS 210]), soit au décès du de cujus (art. 537 al. 1 CC) et non seulement à partir du moment où le partage est réalisé (RCC 1992 p. 347 consid. 2c ; ATFA non publié P 22/06 du 23 janvier 2007, consid. 5; ATFA non publié P 61/04 du 23 mars 2006, consid. 4; ATFA non publié P 54/02 du 17 septembre 2003, consid. 3.3).

Dans son arrêt du 14 octobre 2010, le Tribunal cantonal n'a pas remis en cause ce principe jurisprudentiel mais a relevé que, conformément à la jurisprudence, un nouveau calcul des prestations complémentaires suppose que toutes les modifications intervenues durant la période de restitution déterminantes soient prises en compte (ATF 122 V 19, VSI 1996 p. 214). Notre Haute-Cour a indiqué qu'il y avait lieu de partir des faits tels qu'ils se présentaient réellement durant la période en cause. L'intimé en tire la conclusion qu'aucune soustraction fictive de la fortune n'est possible et qu'en l'absence de dépenses justifiées et acquittées, on ne peut déduire de dépenses de la fortune de la recourante, qui n'a pas varié jusqu'à la décision de restitution du 18 septembre 2009, et que les dépenses prises en compte par l'arrêt cantonal sont hypothétiques et nullement prouvées.

Il convient par ailleurs de relever que le Tribunal fédéral a souligné dans un arrêt récent, concernant un cas similaire à celui de la recourante, que ni la loi, ni la jurisprudence ne permettent de procéder à l'amortissement systématique et indépendant des circonstances du cas d'espèce de la fortune du bénéficiaire (ATF non publié 9C_20/2011 du 20 février 2012, consid. 4).

Si la Cour de céans n'entend pas remettre en cause le principe selon lequel un amortissement systématique n'est pas prévu par la loi, il y a néanmoins lieu de rappeler que, jusqu'à la date du partage, l'héritier ne dispose que d'une expectative successorale et que la valeur de la succession n'est en principe ni déterminée, ni déterminable au moment du décès. En l'espèce, la masse successorale était notamment composée d'un immeuble dont on ignorait à quelle date et à quel prix il serait aliéné. Ce n'est d'ailleurs qu'en février 2009 que le notaire en charge de la liquidation de la succession a été en mesure d'estimer la part revenant à la recourante. Jusqu'aux versements de l'exécuteur testamentaire, cette dernière n'a dès lors disposé que des revenus déterminants dont l'intimé a tenu compte dans sa décision du 9 février 2009. Force est donc de constater que la prise en compte de la fortune à la date du décès du de cujus plutôt qu'à celle du partage effectif de la succession ne repose pas sur un accroissement réel des ressources à cette date mais sur la fiction que l'héritier a - dès cette date - la maîtrise de la part de succession qui lui sera finalement dévolue, en vertu du principe de la saisine ancré à l'art. 560 CC. Qui plus est, dans le cas présent, la recourante n'était pas même certaine de participer à la succession puisqu'en tant que nièce de la défunte, elle n'était pas héritière réservataire (cf. art. 470 CC).

Au considérant 3.3 de son arrêt précité du 17 septembre 2003, le Tribunal fédéral a au demeurant relevé que le nouveau calcul des prestations complémentaires ne peut être entrepris à la date d'ouverture de la succession, dès lors que le montant de la fortune héritée ne peut être déterminé et qu'il n'est pas certain que l'augmentation de la fortune soit suffisante pour exclure le droit aux prestations complémentaires. Compte tenu de ce qui précède, l'augmentation de la fortune d'un héritier au décès du défunt n'est pas concrète, celui-ci ne pouvant en principe pas en disposer avant que la succession ne soit réglée. Dans la mesure où la jurisprudence permet d'en tenir compte dès la mort du de cujus dans le nouveau calcul des prestations complémentaires malgré son caractère encore fictif à cette date, il ne serait pas conforme à la jurisprudence selon laquelle les modifications tant à la hausse qu'à la baisse des revenus déterminants doivent être prises en compte dans le nouveau calcul que les dépenses qu'un bénéficiaire aurait dû consentir depuis cette même date pour pourvoir à son entretien à défaut de prestations complémentaires ne soient pas prises en compte dans le nouveau calcul au motif que dites dépenses sont également fictives.

7.        L'intimé soutient que les dépenses retenues par le Tribunal cantonal dans son arrêt du 14 octobre 2010 ne seraient pas prouvées.

Or, les charges prises en considération correspondent à la part des prestations complémentaires qui n'aurait pas dû être versée, étant rappelé que les prestations complémentaires sont destinées à fournir aux personnes les plus mal loties socialement un revenu minimum (Message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 21 septembre 1964, FF 1964 II 706) et qu'elles doivent ainsi permettre à leurs bénéficiaires de subvenir à leurs besoins vitaux, conformément à l'art. 112a de la Constitution (Cst; RS 101). Le montant prévu par l'art. 10 al. 1 let. a LPC inclut notamment les frais de nourriture, d'habillement, de soins corporels de consommation d'énergie (électricité, gaz, etc.), de communication, de transport ou de loisirs (ATF non publié 9C_945/2011 du 11 juillet 2012, consid. 5.1). Ainsi, les montants prévus par l'art. 10 al. 1 let. a LPC et par l'art. 3 LPCC sont présumés correspondre aux dépenses absolument essentielles afin de garantir une existence décente aux bénéficiaires de prestations complémentaires. Ils sont de plus de nature forfaitaire, ce qui implique que les bénéficiaires de prestations complémentaires n'ont pas à prouver les frais encourus chaque année pour ce poste. On doit dès lors ériger en présomption que les assurés dont les revenus ne couvrent pas les dépenses reconnues au sens de la loi et qui ne sont pas au bénéfice de prestations complémentaires ne peuvent couvrir leurs besoins vitaux et qu'ils doivent, cas échéant, puiser dans leur fortune à cette fin. Partant, il est erroné de soutenir que le tribunal cantonal aurait tenu compte de dépenses non justifiées, dès lors que celles-ci sont présumées indispensables à la subsistance de l'assuré.

On ajoutera que dans les cas où il s'agit de déterminer si un bénéficiaire a affecté son capital du 2ème pilier à un but de prévoyance, point qui a une incidence sur son droit aux prestations complémentaires cantonales conformément à l'art. 2 al. 4 LPCC, l'intimé procède également à un calcul théorique de la couverture des besoins vitaux afin d'analyser le droit aux prestations cantonales sans que les bénéficiaires n'aient à établir par pièces les dépenses relatives à leurs besoins vitaux.

La Cour de céans retiendra donc, au degré de vraisemblance prépondérante requis par la jurisprudence, qu'à défaut de prestations complémentaires, la recourante aurait prélevé dans ses deniers un montant correspondant auxdites prestations pour subvenir à ses besoins, d'autant que cela est corroboré par la diminution de la fortune ressortant de son bordereau de taxation 2010, qui démontre que la recourante a dû puiser dans sa fortune pour combler la réduction des prestations complémentaires.

La Cour de céans considère que soustraire de la fortune la part manquante des prestations complémentaires ne constitue pas un amortissement systématique mais ne fait que tenir compte des besoins vitaux bien réels des bénéficiaires.

8.        En second lieu, l'intimé soutient que le raisonnement à la base de l'arrêt du 14 octobre 2010 serait contraire aux art. 23 al. 1 et 25 al. 3 OPC-AVS/AI. Ces dispositions prévoient que sont pris en compte pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle les revenus de l'année précédente et la fortune au 1er janvier de l'année concernée et que le nouveau calcul de la prestation complémentaire ne peut être effectué qu'une fois par année.

On voit cependant mal en quoi le tribunal cantonal aurait violé ces dispositions dans la mesure où il a confirmé l'accroissement (fictif) de la fortune de la recourante dès décembre 2007 en application de ces dispositions (considérant 8 de l'arrêt).

9.        En troisième lieu, l'intimé argue que tant que la fortune est affectée à la couverture des besoins vitaux du bénéficiaire, les prestations complémentaires sont réduites d'autant, ce qui implique une diminution de la restitution. En d'autres termes, selon l'intimé, le bénéficiaire n'encourt pas de désavantage du fait que sa fortune doit être consacrée à son entretien.

Il est exact qu'un assuré au bénéfice d'une rente de l'assurance-vieillesse ou de l'assurance-invalidité n'a droit à des prestations complémentaires que s'il n'est pas en mesure de couvrir son minimum vital grâce à ses autres revenus (Ralph JÖHL, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, SBVR, 2ème éd. 2007, p. 1746 n. 162). C'est précisément sur ce raisonnement que s'est fondé le tribunal cantonal dans son arrêt du 14 octobre 2010 puisqu'il a tenu compte, dans son calcul, de l'utilisation de la fortune de la bénéficiaire pour couvrir ses besoins vitaux. Il apparaît nécessaire de rappeler à l'intimé que l'on se trouve ici en présence d'un calcul rétroactif puisque des prestations complémentaires ont déjà été versées de manière indue, précisément en raison du fait qu'il n'a pas été tenu compte de la possible exploitation de la fortune de la recourante lors du calcul initial des prestations. Il est donc nécessaire de réévaluer la situation en tenant compte de cet élément pour déterminer le montant des prestations à restituer.

10.    La recourante revient quant à elle sur certains éléments du calcul.

a) Elle fournit ainsi ses certificats d'assurance-maladie pour 2008 et 2009.

Selon l'art. 22 al. 5 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal ; RSG J 3 05), le montant des subsides ne peut être supérieur à la prime de l'assurance obligatoire des soins. Les bénéficiaires des prestations du service ont droit à un subside égal au montant de leur prime d'assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l'intérieur. La prime cantonale moyenne était en 2008 et 2009 de 5028 fr. par année pour les adultes, soit 419 fr. par mois (ordonnance du DFI relative aux primes moyennes en 2008 de l'assurance obligatoire des soins pour le calcul des prestations complémentaires, RO 2007 5173 et ordonnance du DFI relative aux primes moyennes en 2009 de l'assurance obligatoire des soins pour le calcul des prestations complémentaires, RO 2008 5185). Si le subside versé en 2008 à titre de subside est correct, la différence entre le subside de 2009 et le montant des primes acquittées par la recourante doit être prise en compte. Il y aura également lieu de tenir compte du montant réel du loyer payé jusqu'à mi-janvier 2009, soit 8'160 fr. et non 8'064 fr., ainsi que des cotisations aux assurances sociales acquittées par la recourante, qui font partie des dépenses reconnues (art. 10 al. 3 let. c LPC).

b) La recourante conclut en outre à ce que le produit de la fortune ne soit pas pris en compte avant qu'elle n'ait réellement perçu sa part d'héritage, c'est-à-dire au moment du versement de celle-ci. Selon l'art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière. Selon le chiffre 2100 1/06 des directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (DPC) éditées par l'OFFICE FÉDÉRAL DES ASSURANCES SOCIALES (OFAS) dans leur teneur au 1er janvier 2009, font partie du revenu de la fortune mobilière, le revenu du capital, notamment les intérêts bruts des dépôts d'épargne et des papiers-valeurs, les parts de bénéfice de tous genres ainsi que les intérêts actifs des objets mobiliers et des sommes prêtées. Les frais bancaires dûment établis inhérents à la tenue du compte sont, sur demande de l'ayant droit, portés en déduction des intérêts bruts générés par le placement correspondant. La jurisprudence a précisé que la prise en compte dans le calcul des prestations complémentaires d'un revenu hypothétique de la fortune n'intervient pas seulement en cas de dessaisissement simultané de la part de fortune en question et que le bénéficiaire qui conserve à domicile un capital d'une certaine importance est réputé avoir renoncé à des éléments du revenu déterminant (VSI 1997 p. 264, consid. 3b). Il y a donc en principe lieu de tenir compte d'un revenu hypothétique si un capital en espèces entrant dans le calcul des prestations complémentaires n'est pas placé à intérêts (cf. ch. 3482.10 1/12 DPC dans leur version en force dès le 1er janvier 2012).

En l'espèce, l'intimé a tenu compte dans la décision querellée d'un revenu de la fortune héritée par la recourante. Cela étant, le capital qui lui a été versé par le notaire en charge de la succession en février et mai 2009 comprenait selon toute vraisemblance déjà les intérêts générés par la masse successorale. En effet, il est plus que probable que le produit de la vente de la maison de feue la tante de la recourante a été placé sur un compte portant intérêts avant d'être réparti entre les héritiers. Dans ce cas, il ne se justifierait pas de tenir compte en sus d'un revenu hypothétique de cette fortune. L'intimé devra sur ce point procéder aux mesures d'instruction qui s'imposent afin de déterminer si la part successorale de la recourante comprenait ou non des intérêts.

c) Quant à la soustraction de la dette envers l'intimé dès janvier 2009 de la fortune de la recourante, il y a lieu de rappeler que cette dernière ne s'est pas encore acquittée de ce montant et qu'elle en a sollicité la remise. Il n'y a dès lors pas lieu de soustraire ce montant de sa fortune.

11.    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de confirmer le principe dégagé par l'arrêt du 14 octobre 2010, selon lequel le calcul rétroactif des prestations complémentaires suite à un héritage doit prendre en considération la diminution de la fortune que le bénéficiaire aurait encourue afin de subvenir à ses besoins personnels calculés conformément à la législation en matière de prestations complémentaires fédérales et cantonales.

La cause est renvoyée à l'intimé afin que celui-ci procède aux mesures d'instruction nécessaires sur le produit de la fortune puis procède au nouveau calcul selon les modalités exposées dans l'arrêt du 14 octobre 2010, en tenant également compte du loyer réel ainsi que des cotisations aux assurances sociales et des primes d'assurance-maladie acquittées.

La recourante, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité de dépens de 2'000 fr.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

conformément à l'art. 133 al. 2 LOJ

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Renvoie la cause à l'intimé pour nouveau calcul au sens des considérants et nouvelle décision.

4.        Condamne l'intimé à verser à la recourante une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF; RS 173.110) aux conditions de l'art. 95 LTF pour ce qui a trait aux prestations complémentaires fédérales, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire (articles 113 ss LTF) aux conditions de l'art. 116 LTF pour ce qui a trait aux prestations complémentaires cantonales. Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La présidente

 

 

Juliana BALDE

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le