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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3643/2006

ATA/93/2007 du 06.03.2007 ( SI ) , ADMIS

Descripteurs : ; MOYEN DE DROIT CANTONAL ; ACTION PECUNIAIRE ; LÉGALITÉ
Normes : LOJ.56G.al1 ; Cst.5.al1
Résumé : Voyage d'agrément offert par les SIG aux membres de son conseil d'administration. Désistement de l'un des invités et décision des SIG de mettre à sa charge 50% des frais liés à sa participation au voyage. Bien que le litige concerne une contestation de nature pécuniaire (restitution d'une somme d'argent), c'est la voie du recours au Tribunal administratif et non celle de l'action pécuniaire qui est ouverte; rappel des critères de distinction. Dans l'exercice de leurs tâches, les SIG sont soumis aux principes généraux de l'activité administrative, en particulier au principe de la légalité. En l'espèce, la retenue des frais de participation au voyage ne repose sur aucune base légale et contrevient donc au principe de la légalité.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3643/2006-SI ATA/93/2007

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 6 mars 2007

dans la cause

 

Monsieur V_____

contre

 

SERVICES INDUSTRIELS DE GENÈVE


 


1. Monsieur V_____ est député au Grand Conseil de la République et canton de Genève. Il siège en cette qualité au conseil d’administration des services industriels de Genève (ci-après : les SIG ou les intimés).

2. Les SIG effectuent chaque année un voyage sur la base d’un programme mis au point par le bureau du conseil d’administration (ci-après : le bureau). Outre le conseil d’administration et son secrétaire, sont invités à y prendre part les membres de la direction générale des SIG ainsi que divers représentants de l’Etat.

D’une durée de deux jours et demi à trois jours, le voyage est généralement organisé autour d’un thème en relation avec les activités des SIG. Une journée est partiellement ou entièrement consacrée à ce thème, le reste du séjour étant partagé entre des activités culturelles et de détente. L’ensemble des frais de déplacement, d’hébergement et de restauration est pris en charge par les SIG.

3. Prévu depuis le 22 juin 2005, le voyage 2006 des SIG s’est déroulé du 14 au 16 mai 2006 en Italie, dans la région de Vérone et de Venise. Les participants ont été invités à s’y inscrire le 8 février 2006.

4. M. V_____ a annoncé sa participation le 16 février 2006. Le 12 mai 2006, il a cependant annoncé son désistement, en invoquant une surcharge de travail de la commission des finances du Grand Conseil, en lien avec l’établissement du budget cantonal pour l’année 2006.

5. Lors de sa séance du 23 mai 2006, le bureau a pris la décision de mettre à la charge des personnes qui s’étaient désistées peu avant le voyage des SIG 50% du forfait engagé au titre de leur participation.

Le forfait personnel facturé par l’agence organisatrice du voyage 2006 s’élevait à CHF 1’900.-. Il avait pu faire l’objet d’une réduction en raison d’un escompte exceptionnel. Le montant final, qui s’élevait à CHF 712.-, serait déduit des jetons de présence versés aux administrateurs concernés.

6. La décision du bureau a été évoquée lors de la séance du conseil d’administration du 1er juin 2006. M. V_____ a indiqué la contester en raison de la surcharge de travail qu’il avait dû assumer pour le compte de la commission des finances du Grand Conseil.

Le conseil d’administration n’est pas entré en matière. Un membre a relevé que le remboursement intégral du forfait lui avait été réclamé lors de son désistement à un voyage antérieur, un autre précisant qu’il serait souhaitable qu’à l’avenir, les conditions d’annulation figurent dans le programme remis aux participants.

7. Par courrier du 26 juin 2006, le président du conseil d’administration des SIG a informé M. V_____ que la somme de CHF 712.- serait déduite, à raison de trois retenues de CHF 237.-, sur les jetons de présence lui revenant. Ce montant ne comprenait pas les frais fixes, notamment les frais d’avion, qui restaient à payer par les SIG indépendamment du nombre de participants.

8. M. V_____ a fait part de son désaccord avec la position des SIG le 28 juin 2006, en invoquant la gratuité du voyage traditionnellement consentie aux participants. Il a également relevé que les règles internes des SIG ne prévoyaient aucune sanction en cas de désistement. Si tel avait été le cas, il ne se serait pas inscrit ou aurait choisi un autre mode d’hébergement sur place, compte tenu du standing et du caractère luxueux du déplacement.

9. Le 6 juillet 2006, les SIG ont fait savoir à M. V_____ que, dans le souci de permettre un échelonnement du paiement, leur lettre du 26 juin 2006 pouvait être considérée comme une facture, à laquelle il avait la faculté de s’opposer.

10. Le 9 juillet 2006, M. V_____ a contesté à nouveau la position des SIG, en soulignant que son désistement était dicté par des motifs d’intérêt public et que la retenue opérée sur ses jetons de présence ne reposait sur aucune base légale.

11. Le 20 juillet 2006, le président du conseil d’administration a informé M. V_____ qu’il avait transmis au service juridique des SIG le courrier que celui-ci lui avait adressé le 9 précédent.

12. M. V_____ s’est plaint le 20 août 2006 de la première retenue effectuée sur ses jetons de présence auprès du Conseil d’Etat et du président du Grand Conseil.

Le 31 août 2006, le service administratif du Conseil d’Etat l’a informé que le Conseil d’Etat prendrait connaissance de sa requête lors de sa séance du 6 septembre 2006. Le 21 septembre 2006, le président du Grand Conseil a décliné toute compétence pour statuer sur la demande de M. V_____, en raison de l’autonomie des SIG.

13. Après avoir consulté leur service juridique, les SIG ont maintenu leur position par courrier du 14 septembre 2006.

Les conditions générales de l’agence qui avait organisé le voyage prévoyaient un paiement intégral du forfait individuel en cas de désistement annoncé à partir du 1er avril 2006, ce que les participants ne pouvaient ignorer. Le principe de bonne foi et de fidélité des administrateurs imposait à ces derniers d’adopter toutes les mesures à même d’éviter des frais inutiles aux SIG.

14. Le 9 octobre 2006, M. V_____ a recouru au Tribunal administratif. Il a conclu, sous suite de dépens, à l’annulation de la décision des SIG du 14 septembre 2006, ainsi qu’à la restitution des retenues déjà opérées sur ses jetons de présence.

Lesdites retenues avaient été effectuées en violation du principe de la légalité, aucune disposition ne permettant d’exiger le remboursement des frais pour le voyage que les SIG offraient aux membres du conseil d’administration. La mesure attaquée s’avérait par ailleurs arbitraire et contraire aux règles de la bonne foi.

15. Les SIG ont conclu au rejet du recours le 16 novembre 2006. S’il était exact qu’il n’existait pas de prescription interne relative au voyage du conseil d’administration ni, partant, aux conséquences d’un éventuel désistement, le principe de la bonne foi justifiait les retenues opérées sur les jetons de présence de M. V_____.

Le recourant s’était en effet inscrit à un voyage de trois jours, dont il ne pouvait ignorer que les frais n’étaient pas négligeables. Son désistement inopiné, survenu deux jours seulement avant le départ, ne pouvait se fonder sur un cas de force majeure, car il avait appris antérieurement qu’il devait rendre un rapport dans le cadre de ses activités parlementaires. Les SIG avaient valablement recouvré la créance en remboursement dont ils disposaient à l’égard de M. V_____ en opérant une retenue correspondante sur ses jetons de présence.

16. Lors de l’audience de comparution personnelle qui s’est déroulée le 12 janvier 2007, les parties ont campé sur leurs positions.

Le représentant des SIG a exposé que les voyages du conseil d’administration procédaient d’une longue tradition. Le déplacement en Italie qui s’était déroulé en mai 2006 avait regroupé une trentaine de participants. La visite d’une centrale électrique avait eu lieu, de même qu’une rencontre avec diverses personnes possédant des compétences en rapport avec les activités des SIG. Le coût global du voyage, comprenant le montant du forfait individuel facturé par l’agence, les repas et les billets d’avion, s’était élevé à CHF 120’000.- environ. Aucune assurance d’annulation n’avait été conclue.

Des désistements ne se produisaient que rarement. La survenance de plusieurs cas, ces dernières années, avait toutefois conduit le bureau à envisager de facturer aux participants une partie des frais en cas de désistement indu. Quatre cas de remboursement avaient eu lieu. Deux personnes étaient concernées en 2006, dont M. V_____, la rétention s’étant effectuée par déduction sur les jetons de présence. Cette décision avait été prise par le bureau et expliquée au conseil d’administration. Dans les autres cas, le remboursement n’avait pas donné lieu à contestation.

M. V_____ a expliqué avoir pris part à plusieurs voyages des SIG, parfois sans s’inscrire. À une occasion, il s’était désisté, mais bien avant le voyage. À la suite des élections de l’automne 2005, les départements du Conseil d’Etat avaient été remaniés. Les conséquences financières de cette réorganisation avaient dû être intégrées dans le budget 2006, mais elles n’avaient été connues qu’au mois de mars. Comme il était, en qualité de membre de la commission des finances, en charge de la chancellerie d’Etat et du département de l’économie et de la santé, il avait été contraint de recueillir un certain nombre d’informations et de préparer dans un délai très bref deux rapports, juste avant le voyage des SIG. Il avait décidé de privilégier sa charge parlementaire au détriment du voyage, contestant tout comportement fautif.

Lors de l’audience, M. V_____ a déposé le rapport de la commission des finances relatif au budget 2006 de l’Etat de Genève comprenant les textes dont il est l’auteur.

17. Sur quoi les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

1. a. L’acte attaqué indique que la seule voie de contestation ouverte contre la décision de rétention des jetons de présence incriminée « reste un recours au Tribunal administratif, dans la mesure où il est recevable ».

À teneur de son intitulé et de sa formulation, l’acte par lequel M. V_____ a saisi le Tribunal administratif se présente comme un recours au sens de l’article 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 septembre 1941 (LOJ - E 2 05). En tant que le litige porte, au vu des conclusions formulées, sur la restitution de la somme que les SIG ont décidé d’imputer sur les jetons de présence versés au recourant, il concerne une contestation de nature pécuniaire.

b. Il importe, par conséquent, de déterminer si le recours au Tribunal administratif est ouvert ou si la voie à emprunter n’est pas plutôt, en la circonstance, celle de l’action pécuniaire au sens de l’article 56G LOJ. Pour concerner la recevabilité de l’instance, cette question fait l’objet d’un examen d’office, sans que le Tribunal administratif soit lié par les arguments et les conclusions des parties, conformément à l’article 11 alinéa 2 la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 ; ATA/353/2005 du 24 mai 2005 consid. 1, RDAF 2005 II 603).

c. En l’espèce, l’éventualité d’une action pécuniaire appelle une réponse négative, dès lors que cette voie de droit présente, conformément à l’article 56G alinéa 1 LOJ, un caractère subsidiaire par rapport au recours (ATA/271/2006 du 16 mai 2006 consid. 5 ; ATA/828/2005 du 6 décembre 2005; ATA/873/2004 du 9 novembre 2004) et que, comme indiqué ci-dessous, la voie du recours au Tribunal administratif est effectivement ouverte en l’occurrence.

2. a. L’article 36A alinéa 1 de la loi sur l’organisation des services industriels de Genève du 5 octobre 1973 (LSIG - L 2 35), précise que le recours contre les décisions des SIG est régi par les articles 56A et suivants LOJ et par la LPA. D’après l’article 36A alinéa 2 LSIG, le conseil d’administration peut, par règlement, instituer des procédures de réclamation ou de recours auprès d’instances internes. Dans les cas où de telles voies sont ouvertes, le recours au Tribunal administratif n’est recevable que si elles ont été préalablement épuisées.

b. La réglementation applicable aux SIG, en particulier le règlement intérieur approuvé le 30 juin 2005 par le conseil d’administration conformément à l’article 16 alinéa 2 lettre a LSIG, ne contient aucune disposition instituant une voie de réclamation ou de recours préalablement à la saisine du Tribunal administratif au sens de l’article 36A alinéa 2 LSIG.

c. De surcroît, le courrier par lequel les SIG ont fait part, le 14 septembre 2006, à M. V_____ de leur intention d’opérer une retenue sur les jetons de présence qui lui sont dus s’analyse sans conteste comme une décision au sens de l’article 4 alinéa 1 LPA. Dès lors qu’en raison de sa qualité de membre du conseil d’administration des SIG, le recourant est censé percevoir cette forme d’indemnité, il est au bénéfice d’un droit qui lui est reconnu par la loi. De fait, la clause de l’article 56B alinéa 3 lettre a LOJ, qui exclut le recours au Tribunal administratif en cas de prestations pécuniaires auxquelles la loi ne donne pas un droit, ne trouve pas application en l’espèce. Le recours, qui a par ailleurs été exercé dans le délai et selon les formes prévues par la loi au sens des articles 64 et 65 LPA, est ainsi recevable.

3. a. Les SIG sont un établissement de droit public autonome fondé sur les articles 158 à 160 de la Constitution de la République et canton de Genève du 24 mai 1847 (Cst. gen. - A 2 00). Ils assument une mission de service public consistant à fournir dans le canton de Genève l’eau, le gaz, l’électricité et de l’énergie thermique, ainsi qu’à traiter les déchets et les eaux usées, conformément aux articles 1 LSIG et 1 de leur règlement intérieur. L’article 159 Cst. gen. précise que l’organisation des SIG est réglée par la loi. À teneur de l’article 5A LSIG, ses organes administratifs sont le conseil d’administration et le conseil de direction.

b. Le conseil d’administration, autorité supérieure des SIG, est investi des pouvoirs de gestion les plus étendus. Il a notamment pour attributions de fixer les compétences du bureau du conseil et du comité de direction, d’établir le statut du personnel et de nommer et révoquer le personnel, sous réserve des compétences dont bénéficie le comité de direction et des dispositions du statut concernant le droit de recours (art. 16 al. 1 et 2 let. b, m et n LSIG ; ATA/864/2005 du 20 décembre 2005 consid. 2).

c. L’article 1 lettre d du règlement intérieur des SIG prévoit de manière générale que, dans l’exercice de leurs tâches, les SIG agissent dans le respect des dispositions légales et réglementaires fédérales et cantonales applicables. La même disposition (let. i première phrase) précise qu’ils sont soumis aux principes généraux de l’activité administrative, au premier rang desquels figure le principe de la légalité. C’est par conséquent à l’aune de ce principe que la résolution du litige doit prioritairement être appréhendée.

4. a. Le respect de la légalité est un principe fondamental de l’Etat régi par le droit qui est explicitement consacré par l’article 5 alinéa 1 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). D’après ce principe, toute activité étatique doit, en particulier, reposer sur une base légale. L’autorité est ainsi tenue de fonder son action et les diverses décisions qu’elle est amenée à prendre sur un texte normatif suffisamment précis et déterminé (ATF 131 I 26 ; 130 I 5 ; ATA/561/2006 du 17 octobre 2006 consid. 2).

b. Pour gouverner l’action de l’Etat et de ses organes, le principe de la légalité embrasse, plus largement, l’activité de l’ensemble des collectivités et des autres institutions de droit public, de quelque niveau qu’elles soient. Outre son assise constitutionnelle, l’importance de ce principe résulte de son champ d’application étendu, qui recouvre aussi bien l’administration qui restreint les droits des particuliers que celle dite de promotion (ATF 130 I 5 ; 123 I 3 ; 103 Ia 369 ; ATA/345/2006 du 20 juin 2006 consid. 6 ; J.-F. AUBERT/P. MAHON, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, Zurich 2003, p. 41 et les autres références citées).

5. a. En dépit des dépenses fort considérables qu’elle implique - soit CHF 120'000.- pour la seule année 2006 -, l’organisation d’un voyage d’agrément de plusieurs jours, accessoirement teinté d’une dimension professionnelle, n’est prévue par aucune disposition légale, ni par le règlement intérieur des SIG. Il en va de même en ce qui concerne les conditions entourant la participation des membres du conseil d’administration et des autres invités, tout comme les conséquences financières liées à un éventuel désistement de la part des personnes inscrites.

b. Selon l’article 15 alinéa 4 LSIG, la rémunération des membres du conseil d’administration est déterminée par le Conseil d’Etat, alors que les indemnités et les jetons de présence font l’objet d’un règlement d’application relatif à la rémunération des administrateurs, conformément à l’article 5 lettre d iv. deuxième alinéa du règlement intérieur des SIG.

L’article 2 du règlement d’application relatif aux indemnités versées aux membres du conseil d’administration des SIG arrête à CHF 5’500.- par an le montant de l’indemnité des administrateurs. Les jetons de présence sont fixés à CHF 330.- et sont versés du fait de la participation aux séances du conseil d’administration, aux séances de commission, aux séminaires et séances d’information pour les membres qui ont été convoqués, ainsi qu’aux séances de commissions paritaires. Aucune disposition ne prévoit la retenue des jetons de présence.

c. Dans le cas d’espèce, la retenue opérée sur les jetons de présence versés au recourant résulte d’une décision du bureau qui a simplement été portée à la connaissance des membres du conseil d’administration. À teneur des écritures, des pièces produites et des déclarations des parties, elle ne repose sur aucune espèce d’acte de rang normatif, pas plus qu’elle ne résulterait d’une pratique éprouvée, alors même qu’elle a pour effet de porter atteinte aux droits qui sont reconnus au recourant de percevoir des jetons de présence.

Pour cette raison déjà, la décision attaquée contrevient au principe de la légalité et doit être annulée, sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur les motifs que le recourant a avancés pour décliner sa participation audit voyage.

6. a. Doit, dans le même sens, être écarté l’argument de compensation soulevé par les intimés.

Pour certes présenter un caractère général qui lui permet de trouver application dans le domaine du droit public indépendamment de disposition législative topique, le régime de la compensation prévu à l’article 120 de la loi fédérale complétant le code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations -CO - RS 220) suppose que celui qui entend s’en prévaloir soit lui-même au bénéfice d’une créance exigible (ATA/494/2006 du 19 septembre 2006 consid. 3c ; ATA/554/1998 du 1er septembre 1998 consid. 6 ; U. HÄFELIN/G. MÜLLER/F. UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5ème éd., Zurich 2006, p. 170 ; P. MOOR, Droit administratif, vol. II, Les actes administratifs et leur contrôle, 2ème éd., Berne 2002, p. 90s. ; B. KNAPP, Droit administratif, 4ème éd., Bâle 1991, p. 163).

b. En l’occurrence, les SIG ne possèdent aucune créance à l’égard du recourant en restitution des frais qu’ils ont engagé pour le voyage qu’ils ont organisé du 14 au 16 mai 2006 en Italie et qu’ils ont, conformément à ce qui paraît être leur pratique constante, offert aux participants.

Non seulement aucune espèce de disposition légale ou réglementaire ne leur permet d’exiger le remboursement litigieux, comme indiqué ci-dessus, mais de surcroît, les quelques cas de remboursement qui ont pu se produire par le passé sont toujours intervenus sur une base purement volontaire. Il serait dans ces conditions choquant et, partant, arbitraire au sens de l’article 9 Cst. d’exiger de son destinataire le remboursement d’une prestation censée lui être offerte.

7. a. Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être admis et la décision attaquée annulée. Les montants retenus par les intimés sur les jetons de présence dus au recourant qui, par ailleurs, l’ont été indépendamment de l’effet suspensif traditionnellement attaché au recours (art. 66 al. 1 LPA), seront restitués à ce dernier, moyennant un intérêt de 5%, calculé à compter du 14 septembre 2006.

b. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge des SIG, qui succombent (art. 87 LPA).

c. Aucune indemnité ne sera versée au recourant, en tant que celui-ci n’est pas formellement représenté par un avocat et qu’il n’a pas exposé de frais au titre de la défense de ses intérêts.

d. Conformément à l’article 112 alinéa 1 lettre d de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.100), en vigueur depuis le 1er janvier 2007, l’autorité cantonale de dernière instance indique la voie qui permet de saisir le Tribunal fédéral. Le recourant obtenant le plein de ses conclusions, seule se pose la question de savoir si les SIG bénéficient d’une voie de recours.

Dans le cas présent, la question d’un éventuel recours pour violation de la législation fédérale au sens de l’article 95 lettre a LTF ne se pose pas, aucune norme de ce niveau ne trouvant matière à s’appliquer. Seule reste envisageable l’éventualité d’un recours formé pour violation des droits fondamentaux, conduisant le Tribunal fédéral à opérer, le cas échéant, un contrôle portant sur la constitutionnalité du présent arrêt. Or, le recours en matière de droit public au sens de l’article 82 lettre a LTF mettant en œuvre ce type de contrôle n’est pas ouvert aux intimés.

Les SIG revêtent en effet la forme d’un établissement de droit public autonome qui, en cette qualité, n’est pas titulaire des droits fondamentaux permettant d’entreprendre une décision cantonale (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.300/2004 du 14 décembre 2004 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1P.555/1999 du 27 janvier 2000). Les établissements de droit public cantonaux ne font, par ailleurs, nullement partie des institutions auxquelles l’article 89 alinéa 2 LTF ouvre la voie du recours en matière de droit public pour violation des droits fondamentaux (F. BELLANGER, Le recours en matière de droit public, in : F. Bellanger/T. Tanquerel (éd.), Les nouveaux recours fédéraux en droit public, Zurich 2006, p. 63s.). Enfin, il n’est pas contesté qu’en opérant une retenue sur les jetons de présence du recourant, les intimés ont agi en qualité de détenteurs de la puissance publique, et non comme le ferait un simple particulier. La voie du recours constitutionnel subsidiaire prévue par l’article 113 LTF n’étant, pour les mêmes raisons, pas ouverte non plus, le présent arrêt présente un caractère définitif. Partant, il ne contiendra aucune mention quant à la possibilité de saisir le Tribunal fédéral.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

déclare recevable le recours interjeté le 9 octobre 2006 par Monsieur V_____ contre la décision des services industriels de Genève du 14 septembre 2006 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision attaquée ;

ordonne la restitution de la somme de CHF 712.- à Monsieur V_____, avec intérêts à 5% à compter du 14 septembre 2006 ;

met à la charge des services industriels de Genève un émolument de CHF 1’500.- ;

dit qu’aucune indemnité n’est allouée ;

communique le présent arrêt à Monsieur V_____ et aux services industriels de Genève.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges, M. Hottelier, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste  adj. :

 

 

 

P. Pensa

 

la vice-présidente :

 

 

 

L. Bovy

 

 


 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :