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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1983/2018

ATA/742/2018 du 13.07.2018 sur JTAPI/592/2018 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1983/2018-MC ATA/742/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 juillet 2018

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Pierre Bayenet, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 juin 2018 (JTAPI/592/2018)

 


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1960, est originaire d’Algérie.

2) Il est arrivé en Suisse le 4 novembre 1998. Sa demande d’asile a été rejetée le 31 mars 2000.

3) Les autorités algériennes ont émis, le 18 juin 2005, un laissez-passer en faveur de M. A______, né le ______ 1966, pour qu’il puisse embarquer dans un avion à destination de l’Algérie le 27 juin 2005.

4) M. A______ ne s’est pas conformé à la décision de renvoi. Sa disparition a été enregistrée le 3 août 2005.

5) En 2011, il a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public à une peine pécuniaire de soixante jours-amende pour délit contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) et séjour illégal.

6) Démuni de papiers d’identité, il a été arrêté le 27 mai 2015 à l’avenue Cardinal-Mermillod à Carouge pour vol, trafic de haschisch, détention et consommation de haschisch et infraction à la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20).

7) Entendu par la police le même jour, M. A______ a notamment indiqué qu’il vendait du haschisch à raison de trois ou quatre grammes par jour et qu’il en consommait presque tous les jours. Sur une échelle de dix ans, il estimait avoir vendu du haschich pendant quatre ans ; il ne vendait que du haschich. Il le vendait à cinq ou six personnes plusieurs fois par semaine, et également à des gens qui l’accostaient dans la rue, en fonction de ce qu’il avait.

Il était arrivé en Suisse en 1998 et avait déposé une demande d’asile. Il avait obtenu un permis N. Il habitait avec Madame B______ à la, rue C______ à Genève. Il n’avait aucune famille en Suisse.

8) Par jugement du 12 mai 2016, le Tribunal de police l’a condamné à une peine pécuniaire de cent-quatre-vingt jours-amende, avec sursis de quatre ans, pour recel, séjour illégal et infractions aux art. 19 ch. 1 et 19a LStup.

9) Le 27 mai 2018, M. A______ a été arrêté à la place des Augustins pour infractions à la LStup (trafic de haschisch et de marijuana et consommation de haschisch) et à la LEtr. Il a été formellement mis en cause par un toxicomane pour une dizaine de ventes de marijuana depuis 2017.

Lors de son audition par la police le 28 mai 2018, M. A______ a expliqué consommer entre quatre et cinq joints par jour, mais ne pas être trafiquant. Il lui arrivait de « dépanner » de temps en temps des amis. Il bénéficiait de l’aide de l’Hospice général et n’avait pas d’autres moyens de subsistance. Il avait sollicité la délivrance d’un permis B. Son passeport se trouvait en Algérie.

10) M. A______ a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public du 29 mai 2018 à cent cinquante jours-amende pour infractions aux art. 19 al. 1 let. c et d LStup et 115 al. 1 let. b LEtr, et à une amende de CHF 300.- pour infraction à l’art. 19a ch. 1 LStup.

11) Le 29 mai 2018 à 16h30, en application de l'art. 74 LEtr, le commissaire de police a prononcé à l'encontre de M. A______ une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée (interdiction d'accès au centre-ville de Genève) pour une durée de six mois.

12) Par acte du 8 juin 2018, M. A______ a formé opposition devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Il avait déposé une demande de régularisation de sa situation auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) le 6 octobre 2011, laquelle n’avait toujours pas été traitée. Il avait obtenu une autorisation de travail valable dès le 22 janvier 2017 ; elle valait autorisation provisoire au sens de l’art. 17 al. 2 LEtr. Dès lors, l’art. 74 LEtr était inapplicable. Il s’était inscrit au chômage et recherchait activement et efficacement du travail ; il devait se rendre dans le périmètre interdit afin de déposer son curriculum vitae auprès de potentiels employeurs et se rendre à l’office régional de placement sis rue des Gares 16. La décision d’interdiction avait pour conséquence de l’empêcher d’accomplir les obligations découlant de son inscription au chômage. De plus, le médecin qui lui était attitré par l’Hospice général avait son cabinet à la rue D______. Enfin, il s’était opposé à l’ordonnance pénale du 29 mai 2018.

Etait joint à son opposition un chargé de pièces contenant notamment des attestations de résidence de l’OCPM, un formulaire M daté du 22 janvier 2017 concernant une prise d’emploi auprès de E______ Sàrl, divers documents émanant de l’office régional de placement et une fiche d’attribution à un médecin de premier recours pour M. A______.

13) Lors de l'audience, qui s’est tenue le 20 juin 2018 devant le TAPI, M. A______ a indiqué avoir travaillé pour Monsieur F______ dans sa pizzeria située à Carouge de février 2017 à février 2018. Il ne connaissait pas le nom de la pizzeria ni son adresse. Il ne percevait pas de prestations de
l’assurance-chômage, était à la recherche d’un emploi et devait remplir mensuellement dix preuves de recherches. Il n’avait pas d’autres documents concernant l’assurance-chômage que ceux produits. Il n’était plus titulaire d’un permis N, mais au bénéfice d’attestations de résidence. Il percevait des prestations de l’Hospice général et en avait également perçu avant de travailler pour la pizzeria. Il habitait chez une amie qui s’appelait G______, mais il ne connaissait pas son adresse. Il était peintre en bâtiment et recherchait du travail dans ce domaine, mais également dans le domaine de la restauration. Il déposait ses CV dans les entreprises. Il avait différents problèmes de santé et se rendait une fois par mois depuis trois ans chez son médecin, le Docteur H______. Il a confirmé ne pas avoir de document d’identité mais uniquement un acte de naissance. Il était toujours consommateur de haschich.

La représentante du commissaire de police a indiqué que selon les informations en sa possession, la demande d’autorisation de séjour de M. A______ était toujours en examen auprès de l’OCPM. Elle a précisé que si M. A______ devait se rendre chez son médecin ou à un entretien prévu par l’assurance-chômage, il pouvait demander à être mis au bénéfice d’un
sauf-conduit moyennant la production d’une convocation.

Le conseil de l’intéressé a indiqué n’avoir reçu aucune réponse de l’OCPM aux différents courriers de relance. Il avait reçu l’information qu’une audience allait être agendée très prochainement en relation avec l’opposition formée à l’ordonnance pénale. Il a conclu à l’annulation de la décision du 29 mai 2018.

14) Par jugement du 21 juin 2018, le TAPI a rejeté l’opposition et confirmé la décision prise par le commissaire de police.

L’opposant n’était en possession d’aucun titre de séjour. L’autorisation de travail, outre le fait qu’elle n’était plus valable depuis février 2018 dès lors que l’intéressé ne travaillait plus chez E______ Sàrl, était révocable en tout temps. Le fait d’être inscrit au chômage ne conférait pas davantage le droit de demeurer en Suisse. Par ailleurs, les infractions commises permettaient de retenir que M. A______ constituait une menace pour l’ordre et la sécurité publics. M. A______ étant consommateur et trafiquant, il paraissait adéquat de l’éloigner du centre-ville, qui constituait un lieu notoire de trafic de stupéfiants. L’interdiction prononcée ne l’entravait pas dans ses recherches d’emploi. D’une part, il n’était pas autorisé à travailler. D’autre part, de nombreuses entreprises actives dans la peinture en bâtiment se situaient en dehors du centre-ville, étant relevé que l’intéressé n’avait effectué aucune recherche d’emploi dans ce domaine d’activité. Si, comme il l’alléguait, l’opposant recherchait également du travail dans la restauration, un très grand nombre d’établissements publics se trouvaient à l’extérieur du centre-ville. Enfin, l’administré pouvait obtenir un laissez-passer pour se rendre à ses rendez-vous médicaux ou auprès d’autorités étatiques.

15) Par acte expédié le 2 juillet 2018, M. A______ a recouru contre ce jugement, dont il a requis l’annulation, comme celle de la mesure d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée.

Après le rejet de sa demande d’asile, il n’avait pas pu être renvoyé vers l’Algérie. Il avait déposé une demande d’autorisation de séjour le 6 octobre 2012. Il avait communiqué à l’OCPM tous les documents nécessaires au traitement de sa demande selon « l’opération Papyrus ». Son autorisation de travail était valable depuis le 22 janvier 2017. Depuis le 10 avril 2018, il était inscrit à
l’assurance-chômage ; il se rendait régulièrement aux rendez-vous de sa conseillère à l’office régional de placement et devait effectuer dix recherches d’emploi par mois. Il cherchait du travail dans les domaines de la construction et de la restauration.

Le TAPI avait retenu à tort qu’il n’était au bénéfice d’aucune autorisation de séjour. En étant autorisé à travailler, il disposait d’une autorisation de séjour provisoire au sens de l’art. 11 LEtr. La mention « sous réserve de la prolongation du permis de séjour » apposée sur le formulaire M confirmait qu’il était autorisé à séjourner en Suisse durant la procédure de régularisation, soit dans le cadre de l’art. 17 al. 2 LEtr. En outre, il était régulièrement inscrit auprès de l’office cantonal de l’emploi, quand bien même il ne percevait pas de prestations de l’assurance-chômage. L’art. 74 LEtr ne trouvait application qu’en l’absence d’une autorisation de séjour. Enfin, les art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et l’art. 27 et 36 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) avaient été violés. En effet, la mesure querellée ne lui permettait plus de se conformer à ses obligations de chômeur : elle l’empêchait de se rendre aux rendez-vous fixés par l’assurance-chômage et d’effectuer correctement ses recherches dans le domaine de la restauration, le périmètre interdit comportant une concentration d’établissements publics. Son manque de maîtrise du français écrit l’empêchait de soumettre des postulations écrites, les chances d’être engagé étaient augmentées du fait d’une présentation en personne et des entretiens d’embauche étaient usuels.

16) Le TAPI n’a pas formulé d’observations.

17) Le commissaire de police a conclu au rejet du recours.

Contrairement à ses allégations, le recourant ne disposait d’aucun titre de séjour, l’autorisation de travail ne suspendait pas son obligation de quitter la Suisse et ne constituait pas une autorisation de courte durée de séjour ou d’établissement au sens des art. 32, 33, 34 ou 74 LEtr. Le séjour illégal avait d’ailleurs été sanctionné pénalement. Le recourant dissimulait sa véritable identité et refusait de produire tout document apte à l’établir. Le périmètre interdit ne constituait que 2,8 % du territoire cantonal. D’importantes agglomérations, sises hors de la zone interdite, étaient riches en entreprises et commerces de tous genres, auprès desquels l’intéressé pouvait éventuellement trouver du travail. Des sauf-conduits lui seraient octroyés pour se rendre auprès de son médecin et de l’office régional de placement.

18) Dans sa réplique, le recourant a relevé que bien qu’il était au courant depuis octobre 2011 qu’il était toujours sur le territoire genevois, l’OCPM n’a entrepris aucune démarche pour procéder à son renvoi. Une personne autorisée, comme le recourant, à demeurer en Suisse pendant la procédure administrative ne disposait pas d’un titre de séjour, mais sa présence était parfaitement légale.

19) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

20) Le commissaire de police a, par la suite, encore fait parvenir à la chambre de céans une détermination spontanée, datée du 11 juillet 2018.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 74 al. 3 LEtr ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2) Selon l’art. 10 al. 2 1ère phr. LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 4 juillet 2018 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

La chambre administrative est en outre compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle (art. 10 al. 2 2ème phr. LaLEtr).

3) L’écriture du 11 juillet 2018 du commissaire de police étant parvenue à la chambre de céans après que la cause a été gardée à juger et n’ayant pas été autorisée, sera déclarée irrecevable et, par conséquent, écartée du dossier.

4) a. Aux termes de l’art. 74 al. 1 let. a LEtr, l’autorité compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas pénétrer dans une région déterminée si celui-ci n’est pas titulaire d’une autorisation de courte durée, d’une autorisation de séjour ou d’une autorisation d’établissement et trouble ou menace la sécurité et l’ordre publics. Une telle mesure peut être prise indépendamment de l’existence d’une décision de renvoi ou d’expulsion non respectée qui constitue l’autre motif spécifique prévu à l’art. 74 al. 1 let. b LEtr pour lequel l’autorité peut l’ordonner. Tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d'une autorisation (art. 11 al. 1 LEtr).

Les art. 71 al. 1 et 71a de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) énumèrent les types d’autorisations de séjour. L’autorisation de travailler (autorisation M) n’y figure pas. Aux termes de l’art. 17 LEtr, l’étranger entré légalement en Suisse pour un séjour temporaire qui dépose une demande d'autorisation de séjour durable doit attendre la décision à l'étranger (al. 1). L'autorité compétente peut l’autoriser à séjourner en Suisse durant la procédure si les conditions d'admission sont manifestement remplies (al. 2).

b. Le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH n'est pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon
l'art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui (ATF
139 I 145 consid. 2.2 ; 135 II 377 consid. 4.3).

c. Selon l’art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1). Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). La liberté économique protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 137 I 167 consid. 3.1 ; 135 I 130 consid. 4.2).

d. L’interdiction de pénétrer dans une région déterminée ne constitue pas une mesure équivalant à une privation de liberté au sens de l’art. 5 CEDH et n’a donc pas à satisfaire aux conditions du premier alinéa de cette disposition (Tarkan GÖKSU, in Martina CARONI/Thomas GÄCHTER/Daniela TURNHERR [éd.], Bundesgesetz über die Ausländerinnen und Ausländer, Berne, 2010).

Selon le message du Conseil fédéral du 22 décembre 1993 (FF 1994 I 325), les étrangers dépourvus d’autorisation de séjour et d’établissement n’ont pas le droit à une liberté totale de mouvement ; s’agissant d’une atteinte relativement légère à la liberté personnelle de l’étranger concerné, « le seuil, pour l’ordonner, n’a pas été placé très haut » ; il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l’ordre publics. La mesure d'interdiction de pénétrer dans un périmètre déterminé vise en particulier à combattre le trafic de stupéfiants, ainsi qu'à maintenir les requérants d'asile éloignés des scènes de la drogue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_808/2011 du 24 mai 2012 consid. 1.2 ; 2C_437/2009 du 27 octobre 2009 consid. 2.1).

De jurisprudence constante, constitue une menace pour les tiers et une grave mise en danger de leur vie ou de leur intégrité, la participation à un trafic de stupéfiants comme la cocaïne, compte tenu de la dangerosité de ce produit (ATA/142/2012 du 14 mars 2012 ; ATA/118/2011 du 16 février 2011). Le simple soupçon qu'un étranger puisse commettre des infractions dans le milieu de la drogue justifie une mesure prise en application de l'art. 74 al. 1 let. a LEtr (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3.1 et les arrêts cités). De plus, même si la simple présence en des lieux où se pratique le commerce de la drogue ne suffit pas à fonder un soupçon de menace à l'ordre et à la sécurité publics, tel est le cas lorsque la personne concernée est en contacts répétés avec le milieu de la drogue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_808/2011 précité ; 2C_437/2009).

e. Les mesures interdisant de pénétrer dans une région déterminée doivent respecter le principe de la proportionnalité énoncé à l’art. 36 al. 3 Cst. Elles doivent être nécessaires et suffisantes pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés. Il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 137 I 167 consid. 3.6 ; 136 I 197 consid. 4.4.4). En particulier, la délimitation géographique et la durée de la mesure doivent être prises en considération en fonction du but poursuivi. Le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles. (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1).

L’art. 74 al.1 LEtr ne prévoit pas de durée maximale ou minimale, mais laisse une certaine latitude sur ce point à l’autorité compétente, la durée devant être fixée en tenant compte des circonstances de chaque cas d’espèce et en procédant à une balance entre les intérêts en jeu, publics et privés (ATA/802/2015 du 7 août 2015 consid. 7).

5) En l’espèce, le recourant ne dispose d’aucune autorisation de courte durée, de séjour ou d’établissement. L’autorisation de travail délivrée en janvier 2017, dont le recourant déduit le droit de séjour, était valable pour l’emploi exercé auprès de E______ Sàrl. Or, et comme le relève l’intimé, l’autorisation de travail M ne figure pas dans la liste des autorisations de séjour excluant l’application de l’art. 74 al. 1 let. a LEtr, d’une part. Elle spécifie d’ailleurs expressément qu’elle peut être révoquée en tout temps. D’autre part, l’emploi pour lequel l’autorisation de travail M a été établie a pris fin. En outre, la demande d’asile du recourant a été rejetée il y a dix-huit ans et l’intéressé n’a pas collaboré à son renvoi, donnant des indications contradictoires sur sa date de naissance, notamment. Il a, certes, déposé une demande d’autorisation de séjour en 2011. Cette démarche ne lui confère, cependant, aucun titre de séjour en Suisse. L’inaction des autorités depuis 2005 quant à l’exécution de son renvoi n’en fonde pas non plus.

Partant, l’autorité intimée a, à juste titre, retenu l’absence d’une autorisation de courte durée, de séjour et d’établissement au sens de l’art. 74 al. 1 let. a LEtr.

Le recourant s’étant adonné au trafic de drogue et ayant indiqué être
lui-même consommateur de stupéfiants, il y a lieu de retenir, conformément à la jurisprudence précitée, qu’il représente une menace pour l’ordre et la sécurité publics. Le fait de cibler la mesure d’éloignement en la délimitant au centre-ville, qui constitue un lieu notoire de trafic de stupéfiants, est en adéquation avec les fins de sécurité et ordre publics poursuivies par celle-ci. Elle n’empêche pas le recourant de poursuivre ses recherches d’emploi dans le domaine de la restauration, les établissements publics existant dans le reste de la ville de Genève et du canton étant très nombreux. Ainsi, la limitation apportée à la liberté de mouvement du recourant ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa liberté économique. En outre, moyennant un sauf-conduit, préalablement requis auprès de l’autorité intimée, le recourant pourra continuer à se rendre auprès de l’office régional de placement et de son médecin.

Enfin, la mesure a été limitée dans le temps à une durée de six mois, de sorte qu’elle répond également de ce point de vue au principe de la proportionnalité ; le recourant ne critique d’ailleurs pas la durée de l’interdiction de périmètre.

Au vu de ce qui précède, le recours est mal fondé et sera donc rejeté.

6) La procédure étant gratuite, aucun émolument de procédure ne sera prélevé (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 juillet 2018 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 juin 2018 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre Bayenet, avocat du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin et Mme Krauskopf, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

Sylvie Cardinaux

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :