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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/348/2017

ATA/660/2017 du 13.06.2017 sur DITAI/97/2017 ( LCI ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 20.07.2017, rendu le 26.10.2017, SANS OBJET, 1C_386/2017
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/348/2017- LCI ATA/660/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 juin 2017

3ème section

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur A______
représentés par Me Romain Jordan, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC

et

COMMUNE DE B______

représentée par Me Bruno Mégevand, avocat


_________


Recours contre la décision du Tribunal administratif de première instance du 1er mars 2017 (DITAI/97/2017)



EN FAIT

1) Madame A______ et M. A______ sont propriétaires de la parcelle no 1______, du cadastre de la commune de B______, sise au 2______, chemin de la C______, sur laquelle est édifiée une villa qu’ils habitent.

2) Par autorisation définitive par annonce de travaux (DD 3______) publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (FAO) le 21 juillet 2015, le département de l’aménagement du logement et de l’énergie
(ci-après : le département) a autorisé l’aménagement d’une zone 30 km/h sur les chemins de la C______ et de la D______, notamment sur la parcelle no 4______ du domaine public communal.

Sur les plans visés ne varietur le 15 juillet 2015 figurait notamment, en bordure du chemin de la C______, presque en face de la délimitation entre les parcelles nos 4______ et 1______ mais de l’autre côté du chemin, un point de collecte de déchets, constitué de six conteneurs enterrés, sur une surface de 6 m sur 4,2 m.

Dite autorisation est entrée en force, n’ayant fait l’objet d’aucun recours.

3) Un avis d’ouverture de chantier a été déposé auprès du département le 30 septembre 2015, prévoyant les travaux du 28 septembre au 18 décembre 2015.

4) Le 6 octobre 2015, lors de l’exécution des travaux de la déchetterie, M. A______ s’est opposé à cette réalisation. À l’issue des discussions avec les collaborateurs de la commune, les travaux ont été arrêtés.

S’en est suivi un échange de courriers entre la commune et M. A______, ce dernier se plaignant du fait que la déchetterie se situerait à quelques pas du portail donnant sur son jardin et qu’elle causerait de nombreuses nuisances sonores, induirait des parcages de voitures obstruant ainsi l’accès à sa parcelle.

Au cours du mois de novembre 2015, la déchetterie a été construite à une dizaine de mètres de l’emplacement prévu mais toujours en face de la parcelle des époux A______.

5) Le 7 novembre 2016, les époux A______ ont saisi le département d’une « demande d’acte attaquable en lien avec la DD 5______ » ayant constaté que la déchetterie avait été construite sans autorisation.

6) Le 28 novembre 2016, la commune a déposé auprès du département une demande d’autorisation de construire en procédure accélérée pour la « mise en place de six containers enterrés sur le chemin de la C______ ».

7) Le 23 décembre 2016, les époux A______ ont requis du département, à titre provisionnel, l’interdiction de l’usage de la déchetterie et principalement le refus de l’autorisation de construire sollicitée par la commune ainsi que la démolition de la déchetterie.

8) Le 27 décembre 2016 a été publiée dans la FAO la décision d’autorisation de construire sollicitée par la commune et intitulée « création d’un point de collecte de déchets – modification de la chaussée », délivrée le 20 décembre 2016 par le département (APA 6______).

9) Le 26 janvier 2017, les époux A______ ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre l’autorisation de construire APA/6______ en concluant, principalement, à son annulation et, à titre provisionnel, à l’interdiction de l’usage de la déchetterie.

Outre les odeurs de jour et de nuit, les bruits insoutenables, de nombreux insectes pullulaient dans le secteur. Les nuisances liées au stationnement des voitures étaient régulières, également en dehors des horaires d’utilisation prévus de 7h à 21h. Le véhicule de service qui vidait les conteneurs intervenait parfois dès 6h30.

Les mesures demandées pouvaient être, soit le retrait des bennes jusqu’à droit jugé ou le placement d’un panneau interdisant l’utilisation de la déchetterie sous peine de sanction.

10) Par actes du 13 février 2017, la commune et le département ont conclu au rejet des mesures provisionnelles.

11) Le 27 février 2017, le TAPI a procédé à un transport sur place, lors duquel il a été constaté que la déchetterie litigieuse était construite à quelques mètres de la parcelle des époux A______, laquelle était séparée du chemin de la C______ par une haie. La villa était construite à une distance comprise entre 10 et 15 m de la haie, séparée de celle-ci par une pelouse, formant une légère butte sur laquelle se trouvait une piscine.

Les parties ont expliqué que des discussions avaient eu lieu s’agissant de l’éventuelle prise en charge par la commune d’un mur antibruit mais qu’aucun accord n’avait pu être trouvé en raison d’un coût trop important de la solution proposée.

La commune a exposé que la seconde demande d’autorisation avait été déposée à la demande du département en raison de la modification de l’emplacement de la déchetterie.

12) Par décision du 1er mars 2017, le TAPI a rejeté la demande de mesures provisionnelles formée par les époux A______.

Il apparaissait prima facie que la décision querellée concernait uniquement la décision d’APA, la première autorisation qui prévoyait l’emplacement des conteneurs à une dizaine de mètres n’ayant pas été contestée. De ce fait, les nuisances considérables que les époux A______ déclaraient subir et qui n’étaient pas contestées, ne justifiaient pas d’interdire l’usage de la déchetterie à titre provisionnel pour le seul motif que le déplacement de son implantation pourrait, à l’issue de la procédure, être ordonné à quelques mètres de distance, ce qui en terme de nuisances ne devrait pas, à priori, induire une modification significative.

13) Par envoi mis à la poste le 13 mars 2017, les époux A______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice
(ci-après : la chambre administrative) contre la décision du TAPI, notifiée le 2 mars 2017 à leur domicile élu.

Le procès-verbal du transport sur place ne leur avait été communiqué que le 3 mars 2017 ainsi que les pièces déposées par le département concernant la DD 7______.

Le 2 mars 2017, ils avaient à nouveau demandé au département la délivrance d’un acte attaquable constatant que l’autorisation DD 7______ ne portait pas sur la construction d’une déchetterie. Ce courrier était resté sans réponse, le département commettant ainsi un déni de justice.

La décision incidente conduisait à un préjudice irréparable, celui de subir les graves nuisances sonores et olfactives émanant de la déchetterie. Ils encouraient, ainsi que leur fille un grave préjudice pour leur santé psychique et physique qu’aucune compensation financière ne pourrait réellement réparer. Il s’agissait en outre d’un préjudice de nature juridique.

La décision violait le droit à la réplique, le tribunal ayant statué sur la base du transport sur place, dont le procès-verbal n’avait pas été remis ni a fortiori approuvé par les parties, et des pièces n’ayant pas été transmises.

Le TAPI avait constaté de manière inexacte ou incomplète des faits pertinents et la décision violait le droit d’être entendu car elle n’avait pas tranché plusieurs questions essentielles.

La publication dans la FAO qui ne contenait comme indication que « aménagement d’une zone 30 km/h » pour la DD 7______ ne leur était pas opposable, la rendant nulle en tant qu’elle autorisait la construction d’une déchetterie. En leur opposant cette décision, la décision du TAPI violait le droit.

Finalement, la décision préjugeait de la décision finale en estimant que le recours ne concernait que l’emplacement actuel de la déchetterie.

14) Le 24 mars 2017, le TAPI a informé les parties que le procès-verbal de transport sur place ne serait pas modifié mais que les remarques des parties seraient jointes à celui-ci.

15) Le 24 mars 2017, le TAPI a transmis son dossier contenant un extrait du dossier relatif à la décision DD 3______, sans formuler d’observations.

16) Le 31 mars 2017, la commune a déposé des observations en concluant à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet ainsi qu’au versement d’une indemnité de procédure.

17) Le 31 mars 2017, le département a conclu au rejet du recours, répondant point par point aux arguments des recourants.

Le point de collecte des déchets avait été autorisé par la DD 7______ comme cela ressortait clairement des plans à l’instar des bacs à fleurs, trottoirs, potelets, panneaux et seuils autorisés. Le dossier d’autorisation avait été consulté par les recourants le 7 octobre 2016 et ils ne pouvaient affirmer ne pas en avoir eu connaissance.

18) Le 3 mai 2017, le département a renoncé à déposer des observations suite aux écritures de la commune.

19) Le 5 mai 2017, la commune a renoncé à formuler des observations complémentaires.

20) Le 3 mai 2017, les recourants ont répliqué, persistant dans leurs conclusions.

Ils avaient contesté le 7 novembre 2016, auprès du département, la construction de la déchetterie ; or celui-ci n’avait pas considéré leur courrier comme un recours contre la DD 7______ et ne l’avait pas transmis au TAPI.

La distance du domicile des recourants avec la déchetterie était de moins de 5 mètres, à laquelle on pouvait ajouter environ 10 mètres de pelouse. Il y avait dès lors risque de préjudice irréparable. Quant à l’intérêt actuel, rien ne démontrait que le TAPI s’apprêtait à rendre une décision tranchant le fond du litige.

Pour le surplus, l’argumentation des recourants sera reprise en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

21) Le 9 mai 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1) Les décisions du TAPI peuvent faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative (art. 132 al. 1 et 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

En l’espèce, la décision du TAPI est une décision incidente, rejetant une demande de mesures provisionnelles, qui ne représente qu’une étape vers la décision finale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_98/2017 du 13 mars 2017 consid. 1 ; ATA/613/2017 du 30 mai 2017).

Le délai de recours s’agissant d’une décision incidente est de dix jours (art. 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue.

2) Le recours contre une décision incidente n’est ouvert que si ladite décision, à supposer qu’elle soit exécutée, cause un préjudice irréparable à son destinataire. Il est également ouvert si l’admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d’éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 57 let. c LPA).

En l’espèce, l’admission du recours ne mettrait pas fin au litige, lequel porte, à teneur des conclusions prises par les recourants, sur la validité d’une autorisation de construire un point de collecte de déchets constitué de six conteneurs enterrés. La seconde hypothèse visée par l’art. 57 let. c LPA n’est ainsi pas réalisée en l’espèce.

3) Reste à examiner si la décision litigieuse est susceptible de causer un préjudice irréparable aux recourants.

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un préjudice est irréparable au sens de cette disposition lorsqu’il ne peut être ultérieurement réparé par une décision finale entièrement favorable au recourant (ATF 138 III 46 consid. 1.2 ; 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2 ; 133 II 629 consid. 2.3.1). Le préjudice irréparable suppose que le recourant ait un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit immédiatement annulée ou modifiée, comme un intérêt économique ou un intérêt tiré du principe de l’économie de la procédure
(ATF 135 II 30 ; 134 II 137 ; 127 II 132 consid. 2a ; ATA/1187/2015 du 3 novembre 2015 consid. 2c). Le simple fait d’avoir à subir une procédure et les inconvénients qui y sont liés ne constitue toutefois pas, en soi, un préjudice irréparable (ATF 133 IV 139 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_149/2008 du 12 août 2008 consid. 2.1 ; ATA/305/2009 du 23 juin 2009 consid. 2b et 5b et les références citées). Un dommage de pur fait, tel que la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n’est notamment pas considéré comme un dommage irréparable de ce point de vue (ATF 133 II 629 consid. 2.3.1 ; 131 I 57 consid. 1 ; 129 III 107 consid. 1.2.1 ; 127 I 92 consid. 1c ; 126 I 97 consid. 1b).

La chambre administrative a précisé à plusieurs reprises que
l’art. 57 let. c LPA devait être interprété à la lumière de ces principes (ATA/231/2017 du 22 février 2017 consid. 3c et les références citées).

4) En l’espèce, la décision d’autorisation de construire litigieuse a déjà été exécutée et le point de collecte est en activité. Une autre autorisation de construire un point de collecte de déchets qui serait implanté à une dizaine de mètres de la déchetterie litigieuse, toujours devant la parcelle des recourants sur le chemin de la C______ (DD 3______ ), est, en l’état, en vigueur.

Aux vu de ces circonstances, comme l’a retenu à juste titre le TAPI, les importantes nuisances subies par les recourants du fait de l’utilisation du point de collecte ne seraient pas différentes si la déchetterie était déplacée de quelques mètres mais toujours située en face de leur parcelle.

Il n’est dès lors pas possible de considérer que les recourants subissent un préjudice irréparable du fait du refus des mesures provisionnelles, celles-ci n’étant pas susceptibles de supprimer le préjudice. Leur recours sera par conséquent déclaré irrecevable.

5) Vu l’issue de la procédure, un émolument de CHF 750.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 750.- sera allouée à la commune de B______ à charge des recourants, pris conjointement et solidairement, conformément à la jurisprudence constante de la chambre administrative, pour une commune de moins de 10'000 habitants qui a dû recourir à un mandataire (ATA/588/2017 du 23 mai 2017 et les références citées).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 13 mars 2017 par Madame A______ et M. A______ contre la décision du Tribunal administratif de première instance du 1er mars 2017 ;

met à la charge de Madame A______ et M. A______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 750.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 750.- à la commune de B______, à la charge de Madame A______ et M. A______, pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat des recourants, à la commune de B______, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :