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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/787/2010

ATA/604/2010 du 01.09.2010 sur DCCR/509/2010 ( PE ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR; RECONSIDÉRATION; MODIFICATION DES CIRCONSTANCES; MAJORITÉ(ÂGE); RESSORTISSANT ÉTRANGER
Normes : LEtr.42.al1 ; LPA.48 ; LPA.80.leta ; LPA.80.letb
Résumé : L'office cantonal de la population (OCP) devait entrer en matière sur la demande de reconsidération du recourant, ressortissant kosovare, portant sur la décision de ne pas renouveler son autorisation de séjour. En effet, ce dernier invoquait le fait que sa demande de rente d'invalidité en cours d'instruction ne serait plus exportée au Kosovo, suite à l'expiration de la convention entre la Confédération suisse et la République Populaire Fédérative de Yougoslavie relative aux assurances sociales. Cet élément constitue un fait nouveau postérieur à la décision entrée en force, qui entraînerait prime facie une péjoration de sa situation personnelle. La cause est donc renvoyée à l'OCP pour nouvelle décision après examen au fond de la demande de reconsidération.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/787/2010-PE ATA/604/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 1er septembre 2010

1ère section

dans la cause

 

Monsieur G______ R______
Mesdames M______ et K______
R______
Messieurs E______ et S______ R______

représentés par Me Marie-Paule Honegger, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION

_________


 

Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 30 mars 2010 (DCCR/509/2010)


EN FAIT

1. Monsieur G______ R______, né le ______ 1963 est ressortissant du Kosovo. Il est père de quatre enfants, nés au Kosovo: M______, née le ______ 1988 ; K______, née le ______ 1990 ; E______, né le ______ 1992 ; S______, né le _______ 1993.

2. Le 3 octobre 2001, il a épousé à Genève une ressortissante suisse, dont il s'est séparé en octobre 2003. Le divorce ne sera prononcé que le 28 août 2007.

3. L’office cantonal de la population (ci-après : OCP) lui a délivré une autorisation de séjour au titre de regroupement familial avec son épouse. Ladite autorisation a été régulièrement renouvelée jusqu'à l'échéance du 2 octobre 2005.

4. Par décision du 12 décembre 2006 l'OCP a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de M. R______ au motif que le lien conjugal avec son épouse était rompu. Un délai au 12 mars 2007 lui a été imparti pour quitter la Suisse

5. Le 3 juillet 2007, statuant sur recours de l'intéressé, la commission cantonale de recours de police des étrangers, remplacée le 1er janvier 2009 par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission) a confirmé la décision susmentionnée.

6. En date du 7 septembre 2007, l'OCP a imparti à M. R______ un délai à fin novembre 2007 pour quitter le territoire cantonal et l'a en outre avisé qu’il invitait l'office fédéral des migrations (ci-après : ODM) à étendre la décision cantonale de renvoi à l’ensemble du territoire de la Confédération.

7. Par décision du 9 octobre 2007, l'ODM a prononcé l’extension à tout le territoire de la Confédération de la mesure cantonale de renvoi ordonnée à l’égard de M. R______. Au vu de la décision rendue le 12 décembre 2006 par l’OCP, confirmée par la commission le 3 juillet 2007, et compte tenu des dispositions de la législation sur les étrangers alors en vigueur, la poursuite du séjour en Suisse de l’intéressé ne se justifiait plus. L’exécution du renvoi était licite, raisonnablement exigible et possible.

8. Le 9 novembre 2007, M. R______ a interjeté recours contre la décision de l'ODM auprès du Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF). Il avait eu le 3 février 2006 un accident qui lui avait occasionné une incapacité de travail complète et l’avait conduit à déposer, au mois de décembre 2006, une demande de prestations auprès de l’assurance invalidité fédérale (ci-après : AI). Après avoir repris un emploi, il avait été victime, le 4 juin 2007, d’un nouvel accident qui avait nécessité une opération du genou droit en été 2007 ce qui l’avait empêché totalement de poursuivre l’exercice de son activité lucrative. Il bénéficiait toujours de soins pour ses problèmes de dos et de genou. En outre, il devait subir une intervention chirurgicale au mois de novembre 2007 en raison de problèmes urologiques. Par ailleurs, il était traité par un médecin-psychiatre. Il concluait à l’annulation de la décision querellée de l’ODM et à l’octroi en sa faveur de l’admission provisoire en raison de l’inexigibilité de l’exécution de son renvoi.

9. Dans le courant du mois de janvier 2008, les quatre enfants de M. R______ sont entrés en Suisse de manière clandestine, avec l'assistance de leur mère et de leur père, sans qu'il ait été établi que ce dernier était à l'origine de cette initiative.

10. Le 8 octobre 2008, Mmes M______ et K______ et MM. E______ et S______ R______ ont déposé à l'OCP une demande d'autorisation de séjour pour regroupement familial.

11. Par arrêt du 19 août 2009, le TAF a rejeté le recours de M. R______.

Selon les informations à disposition, l’infrastructure sanitaire et médicale s’était sensiblement améliorée au Kosovo ces dernières années. En particulier, les affections psychiques pouvaient y être soignées et les médicaments utiles - en tous les cas sous leur forme générique - y étaient en général disponibles, notamment les antidépresseurs. Ce n’était que si le traitement requis était lourd et pointu qu’une mesure de substitution pouvait être envisagée. L’état de santé de l'intéressé ne pouvait, au vu de l’ensemble des renseignements médicaux communiqués au TAF, être qualifié de précaire au point de nécessiter un traitement médical conséquent et complexe qui, au vu des infrastructures médicales existantes au Kosovo, n’y serait pas disponible. La situation médicale de M. R______ ne s’opposait pas à l’exécution de son renvoi. Les démarches administratives que celui-ci pouvait encore être appelé à effectuer dans le cadre de la demande de prestations AI déposée en 2006 étaient susceptibles d’être accomplies par l'intermédiaire de son mandataire en Suisse.

12. Le 28 octobre 2009, l'OCP a imparti à M. R______ un délai au 20 janvier 2010 pour quitter la Suisse.

13. En date du 29 octobre 2009, l'OCP a constaté que la demande d'autorisation de séjour au titre du regroupement familial présentée par MM. E______ et S______ R______ était devenue sans objet vu le renvoi de leur père. Un délai au 20 janvier 2010 leur était imparti pour quitter la Suisse en compagnie de ce dernier.

Deux autres courriers, identiques, ont été adressés le même jour respectivement à Mmes M______ et K______ R______.

Aucun de ces courriers ne comportait d'indication des voies et délai de recours.

14. Le 18 janvier 2010, M. R______ a sollicité de l'OCP l'annulation du délai de départ imparti tant à lui-même qu'à ses enfants. Il demandait à être mis au bénéfice d'une autorisation pour travailleur étranger tombé malade et devenu invalide en Suisse, cela en dérogation aux mesures de limitation et, pour ses enfants, requérait la délivrance d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

Son état de santé physique et psychique s'était péjoré depuis l'arrêt du TAF, ce dont attestaient les certificats médicaux postérieurs à cette décision. Il était en incapacité de travail totale et durable. Son dossier médical était à l'étude auprès du service médical de l'AI en raison de cette évolution. La famille subsistait grâce aux prestations versées par la caisse de chômage et une aide de l'Hospice général. Il remplissait les critères d'un cas d'extrême gravité et ses enfants pouvaient se prévaloir du droit au regroupement familial.

15. Dans un communiqué du 29 janvier 2010, les autorités fédérales ont annoncé qu'à partir du 1er avril 2010, la convention de sécurité sociale conclue avec l'ex-Yougoslavie (convention entre la Confédération suisse et la République Populaire Fédérative de Yougoslavie relative aux assurances sociales, du 8 juin 1962 - RS 0.831.109.818.1 - ci-après : la convention), ne s'appliquera plus au Kosovo et qu'en principe, de nouvelles prestations ne seraient désormais accordées aux ressortissants de cet Etat que s'ils avaient leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse, comme c'était le cas pour les citoyens de tous les autres Etats avec lesquels aucun accord n'avait été conclu (http://www.news.admin.ch/message/index.html?lang=fr, consulté le 16 août 2010).

16. Le 1er février 2010, l'OCP a informé M. R______ qu'en raison de son mariage avec une ressortissante suisse, il était déjà soustrait aux mesures de limitation et, dès lors, ne pouvait pas déposer une demande fondée de dérogation pour cas d'extrême gravité. Sa requête devait donc être traitée comme une demande de réexamen de la décision du 12 décembre 2006 ayant acquis force de chose jugée. Cela étant, les circonstances ne s'étant pas modifiées de façon notable depuis dite décision, il refusait d'entrer en matière sur la demande de réexamen. Un nouveau délai de départ de Suisse au 10 mars 2010 lui était imparti.

Cette décision était exécutoire nonobstant recours.

17. Le 3 février 2010, l'OCP a adressé un courrier à chacun des enfants majeurs de M. R______, et un courrier unique à ses deux enfants mineurs, les avisant que leur demande d'autorisation de séjour était devenue sans objet en raison du refus d'entrée en matière sur la demande de réexamen de la décision du 12 décembre 2006 présentée par leur père. Un délai de départ au 10 mars 2010 leur était imparti. Ces courriers ne comportaient aucune indication des voie et délai de recours.

18. Par acte unique du 4 mars 2010, M. G______ R______ a recouru auprès de la commission contre la décision du 1er février 2010, d'une part et Mmes M______ et K______ et MM. E______ et S______ R______ ont recouru contre les décision du 3 février 2010, d'autre part, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours, à leur comparution personnelle et à l'audition de témoins, et principalement, à l'annulation des décisions querellées et à ce que l'OCP soumette à l'ODM, avec préavis favorable, leur requête d'être mis au bénéfice d'exception aux mesures de limitation.

Ils reprenaient leur argumentation présentée à l'appui de leur requête du 18 janvier 2010. Dans la mesure où l'OCP avait considéré la démarche de M. R______ comme une demande de réexamen de la décision du 12 décembre 2006, il ne pouvait être suivi lorsqu'il estimait qu'aucun fait nouveau ne se serait produit depuis cette date, puisqu'il mentionnait lui-même la demande de prestations AI déposée le 20 décembre 2006.

19. Le 11 mars 2010, l'OCP s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif au recours et a conclu au rejet de ce dernier, persistant dans les termes de ses décisions.

20. Le 30 mars 2010, après avoir entendu M. G______ R______, la commission a rejeté le recours et confirmé "les décisions de renvoi" prononcées par l'OCP le 1er février 2010 à l'encontre de M. G______ R______ et le 3 février 2010 à l'encontre de Mmes M______ et K______ et MM. E______ et S______ R______.

Déposée le 18 janvier 2010, la demande d'autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité était régie par la loi fédérale sur les étrangers, du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20). M. R______ ayant été exempté des mesures de limitation suite à son mariage avec une ressortissante suisse, il ne pouvait l’être une seconde fois, même si la cause du non assujettissement avait disparu. Bien que divorcé, il ne pouvait donc plus présenter de demande d'exemption et l'OCP avait traité à juste titre sa requête comme une demande de reconsidération de sa décision du 12 décembre 2006. Les faits allégués à l'appui de cette demande ne constituaient pas des faits nouveaux et l'intéressé ne démontrait pas que les circonstances s'étaient modifiées dans une mesure notable depuis la première décision. Le TAF avait examiné en détail les possibilités de prise en charge médicale de M. R______ au Kosovo et considéré que les démarches administratives qu'il pourrait encore être appelé à effectuer dans le cadre de la demande de prestations AI étaient susceptibles d'être accomplies par l'intermédiaire de son mandataire en Suisse.

21. Par acte du 14 mai 2010, Mmes M______ et K______ et MM. G______, E______ et S______ R______ ont recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision susmentionnée, adressée aux parties le 13 avril 2010, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours, à leur comparution personnelle et à l'audition de témoins, et principalement, à l'annulation de la décision querellée et à ce que l'OCP soumette à l'ODM, avec préavis favorable, leur requête d'être mis au bénéfice d'exception aux mesures de limitation.

Ils reprenaient leur argumentation antérieure, en ajoutant qu'en raison du non-renouvellement de la convention les ressortissants du Kosovo n'étaient plus en mesure, depuis le 1er avril 2010 de percevoir leur rente faute de domicile en Suisse.

22. Le 18 mai 2010, la commission a transmis son dossier.

23. Le 20 mai 2010, l'OCP s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif et a conclu au rejet du recours, reprenant les motifs à l'appui de ses décisions des 1er et 3 février 2010.

24. Les 27 mai et 17 juin 2010, M. R______ a communiqué au tribunal de céans, à la demande de ce dernier, des pièces relatives à des aspects formels de la procédure ainsi que la copie d'un courrier de rappel de l'office cantonal de l'AI à l'intention du médecin chargé de rendre un rapport dans le cadre de l'instruction de la demande de prestations AI déposée en décembre 2006.

25. Le 2 juillet 2010, les parties ont été avisées que la cause apparaissait en état d'être jugée, un délai au 16 juillet 2010 étant accordé à M. R______ et à ses enfants pour formuler toute requête complémentaire. Ils n'ont pas fait usage de cette possibilité.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

La demande de M. R______ et de ses enfants a été formulée le 18 janvier 2010. C’est dès lors au regard de la LEtr qu’il convient d’examiner leurs cas (art. 123 al. 1 LEtr).

2. Selon l'art. 69 al. 1 LPA, la juridiction chargée de statuer est liée par les conclusions des parties mais non par les motifs que ces dernières invoquent.

3. Les recourants ont sollicité leur comparution personnelle et l'audition de témoins.

Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 127 I 54 consid. 2b p. 56 ; 127 III 576 consid. 2c p. 578 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C.573/2007 du 23 janvier 2008 consid. 2.3). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; 130 I 425 consid. 2.1 p. 428 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C.402/2008 du 27 juin 2008 consid. 3.2 ; 2P.205/2006 du 19 décembre 2006 consid. 2.1 et les arrêts cités ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 2b).

In casu, outre que la procédure est en principe écrite (art. 18 LPA) et que le Tribunal administratif est la seconde instance, les éléments factuels figurant au dossier permettent au tribunal de céans de statuer sans procéder à l'audition des recourants, ni à celle de témoins.

4. La jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de droit constitutionnel a également déduit du droit d’être entendu le droit d’obtenir une décision motivée. L’autorité n’est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives, mais doit se prononcer sur celles-ci (ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 ; 133 II 235 consid. 5.2 p. 248 ; 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.571/2008 consid. 3.1 ; cf. aussi ACEDH Kraska c/ Suisse du 19 avril 1993 ; ATA/429/2008 du 27 août 2008).

Il suffit, du point de vue de la motivation de la décision, que les parties puissent se rendre compte de sa portée à leur égard et, le cas échéant, recourir contre elle en connaissance de cause (Arrêts du Tribunal fédéral 1C.33/2008 du 20 mai 2008 consid. 2.1 ; 1B.255/2007 du 24 janvier 2008 consid. 2.1 et arrêts cités ; ATA/489 2008 du 23 septembre 2008 consid. 7).

Dans le cas particulier, force est de constater que la commission a purement et simplement rejeté le recours de Mmes M______ et K______ et de MM. E______ et S______ R______ sans une ligne de motivation, ne traitant la cause que sous l'angle du recours de M. G______ R______. Elle n'a fourni aucune justification à cette confusion entre la situation juridique du père et celle de ses enfants dont deux, Mmes M______ et K______ R______ sont majeures, ignorant la jurisprudence du tribunal de céans selon laquelle le cas de l'enfant devenu majeur doit être dissocié de celui de ses parents, l'OCP devant rendre une décision sur le droit propre qu'aurait l'enfant à poursuivre son séjour en Suisse (ATA/41/2010 du 26 janvier 2010). Nonobstant la gravité de ce déni de justice, il n'y a toutefois pas lieu de retourner le dossier à la juridiction de première instance, vu ce qui suit.

5. M. R______ persiste à vouloir que son cas soit examiné sous l'angle d'une dérogation aux mesures de limitation de l'admission des étrangers en Suisse.

Le recourant a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial à son mariage avec une ressortissante suisse, l'art. 7 al. 1 de loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers du 26 mars 1931(LSEE - RS 142.20), alors en vigueur et dont le principe est repris par l'art. 42 al. 1 LEtr, prévoyant que le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolongation d'une telle autorisation (ATF 128 II 145). Ce type d'autorisation n'est pas soumis aux conditions de limitation du nombre d'étrangers, qui concernent des autorisations à l'octroi desquelles l'étranger n'a pas droit. Indépendamment des jurisprudences anciennes non publiées appliquant l'ancien droit mentionnées tant par l'OCP que par la commission, cela résulte d'ailleurs de la systématique comme du texte de la loi, l'art. 30 LEtr traitant des dérogations aux conditions d'admission soumises au régime ordinaire des art. 18 à 29 LEtr et mentionnant comme première exception possible les personnes admises dans le cadre du regroupement familial, mais qui ne sont ni conjoint ni enfant d'un ressortissant suisse, dont le statut est réglé sur la base des art. 42 et ss LEtr. C'est donc à juste titre que celui-là n'est pas entré en matière sur la demande de dérogation pour cas d'extrême gravité (art. 30 al. 1 let. b) présentée par le recourant.

6. L'OCP a traité cette requête comme une demande de reconsidération de sa décision du 12 décembre 2006, mais n'est pas entré en matière, vu l'absence de modification de circonstances.

a. Les décisions revêtues de l’autorité de la chose jugée ou décidée peuvent faire l'objet d'une demande de réexamen pour reconsidération par l'autorité administrative qui a pris la décision de base, ou d'une procédure en révision devant une autorité administrative supérieure, une instance quasi judiciaire ou un tribunal, selon que leur auteur est une autorité ou un tribunal (B. KNAPP, Précis de droit administratif, 4e éd., Bâle 1991, n°1137).

b. Une demande de réexamen peut être présentée, en tout temps, par toute personne qui aurait la qualité pour recourir contre la décision, objet de la demande au moment du dépôt de celle-ci. Elle a pour but d'obtenir la modification de la décision d'origine ; le plus souvent elle tendra à la révocation d'une décision valable à l'origine imposant une obligation à un particulier. Lorsqu'elle est dirigée contre une décision dotée de l'autorité de la chose décidée, la demande de réexamen peut être motivée par des raisons relatives à des erreurs de droit, des erreurs de fait ou des erreurs d'appréciation de l'opportunité (ATA/366/2003 du 13 mai 2003 ; B. KNAPP, op. cit. n°1770 ss).

c. L'existence d'une procédure de réexamen ne peut pas avoir pour conséquence qu'une autorité doive sans cesse reprendre les mêmes affaires (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.271/2004 du 7 octobre 2004, consid. 3). L'autorité doit seulement procéder à un nouvel examen si la loi le lui impose (ATF 100 Ib 372 3b ; ATA/366/2003 du 13 mai 2003 ; B. KNAPP, op. cit. n° 1778 ss). Au-delà de cela, l'auteur de la demande de réexamen n'a aucun droit à obtenir une nouvelle décision, ni à exiger de l’autorité qu’elle procède à un nouvel examen.

7. Aux termes de l'art. 48 LPA, une autorité administrative n'a l'obligation de reconsidérer ses décisions que lorsqu'il existe un motif de révision au sens de l'art. 80 let. a et b LPA ou que les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision.

M. R______ n'ayant pas allégué qu'un crime ou un délit aurait influencé la décision du 12 décembre 2006 de l'OCP (art. 80 let. a LPA), il reste à examiner si les éléments qu'il invoque constituent des faits ou des moyens de preuve nouveaux (art. 80 let. b LPA), ou une modification notable des circonstances (art. 48 al.1 let. b LPA).

8. Des faits nouveaux justifiant la reconsidération d'une décision sont des événements qui se sont produits antérieurement à la procédure précédente, mais dont l'auteur de la demande de réexamen a été empêché, sans sa faute, d’en faire état à cette occasion. Quant aux preuves nouvelles, elles doivent se rapporter à des faits antérieurs à la décision attaquée. Encore faut-il qu'elles n'aient pas pu être administrées lors du premier procès ou que les faits à prouver soient nouveaux, au sens où ils ont été définis (ATF 108 V 171 ss ; 99 V 191 ; 98 II 255 ; 86 II 386 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif 1984, p. 944).

En l'espèce, les éléments dont M. R______ se prévaut sont postérieurs à la décision du 12 décembre 2006, certains ayant pu être examinés par le TAF dans son arrêt du 19 août 2009 contre la décision d'extension du renvoi du 7 octobre 2007 de l'ODM. Ce ne sont donc pas des faits nouveaux au sens de l'art. 80 let. b LPA.

9. Il reste à examiner si ces éléments postérieurs sont susceptibles de constituer une modification suffisamment notable des circonstances pouvant entraîner une reconsidération de la décision du 12 décembre 2006.

L'argumentation relative à l'évolution de l'état de santé n'est à cet égard pas convaincante, le recourant ne fournissant pas d'indication ou de pièces permettant de considérer que les appréciations faites par le TAF sur les possibilités de prise en charge médicale au Kosovo ne seraient plus pertinentes.

Quant à l'expiration de la convention, il ressort du communiqué que dès le 1er avril 2010, les prestations en matière d'invalidité ne seront accordées que si la personne est domiciliée en Suisse. Les rentes, en particulier, ne seront plus exportées à l'étranger, sous réserve de droits acquis. Or, la procédure AI entamée par M. R______ est toujours pendante et la nouvelle règlementation peut avoir comme conséquence que son départ au Kosovo lui fermerait toute possibilité de recevoir des prestations auxquelles il pourrait avoir droit s'il demeurait en Suisse. Cela entraînerait une péjoration prima facie importante de sa situation personnelle. Il s'agit donc d'une modification de circonstances notable susceptible d'entraîner une reconsidération de la décision du 12 décembre 2006. Le refus d'entrer en matière du 1er février 2010 de l'OCP doit ainsi être annulé, cette autorité devant examiner la requête au fond.

10. L'annulation de la décision précitée entraîne celle des décisions de renvoi du 3 février 2010 adressées à Mmes M______ et K______ et à MM E______ et S______ R______. Elles sont en effet motivées par le seul refus d'entrer en matière sur la demande de reconsidération de la décision du 12 décembre 2006.

11. Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis. La décision de la commission sera annulée de même que la décision du 1er février 2010 de l'OCP concernant M. G______ R______ et les trois décisions du 3 février 2010 de l'OCP concernant respectivement Mme M______ R______, Mme K______ R______, et MM. E______ et S______ R______. Le dossier sera renvoyé à l'OCP pour nouvelles décisions après examen au fond de la demande de reconsidération de la décision du 12 décembre 2006.

Le tribunal de céans statuant au fond, la question de l'effet suspensif du recours est devenue sans objet.

Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de l'OCP. Une indemnité de CHF 500.- sera allouée à chacun des recourants, à la charge de l'Etat de Genève (art. 87 LPA).

 

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 mai 2010 par Monsieur G______ R______, Mesdames M______ et K______ R______ et Messieurs E______ et S______ R______ contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 30 mars 2010 ;

au fond :

l'admet partiellement;

annule la décision du 30 mars 2010 de la commission cantonale de recours en matière administrative ;

annule la décision du 1er février 2010 de l'office cantonal de la population concernant Monsieur G______ R______ ;

annule la décision du 3 février 2010 de l'office cantonal de la population concernant Madame M______ R______ ;

annule la décision du 3 février 2010 de l'office cantonal de la population concernant Madame K______ R______ ;

annule la décision du 3 février 2010 de l'office cantonal de la population concernant Messieurs E______ et S______ R______ ;

renvoie le dossier à l'office cantonal de la population pour nouvelles décisions ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de l'office cantonal de la population ;

alloue une indemnité de CHF 500.- à Monsieur G______ R______, à la charge de l'Etat de Genève ;

alloue une indemnité de CHF 500.- à Madame M______ R______, à la charge de l'Etat de Genève ;

alloue une indemnité de CHF 500.- à Madame K______ R______, à la charge de l'Etat de Genève ;

alloue une indemnité de CHF 500.- à Monsieur E______ R______, à la charge de l'Etat de Genève ;

alloue une indemnité de CHF 500.- à Monsieur S______ R______, à la charge de l'Etat de Genève ;

dit que, les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Marie-Paule Honegger, avocate des recourants, à la commission cantonale de recours en matière administrative, à l'office cantonal de la population ainsi qu'à l'office fédéral des migrations, à Berne, pour information.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

M. Tonossi

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 


Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.