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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1494/2009

ATA/466/2010 du 29.06.2010 ( FPUBL ) , ADMIS

Recours TF déposé le 01.09.2010, rendu le 12.07.2011, REJETE, 8C_706/2010
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1494/2009-FPUBL ATA/466/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 29 juin 2010

 

dans la cause

 

Monsieur M______

représenté par Mes Claudio Realini et Eric Vazey, avocats

 

contre

 

 

CONSEIL D’ÉTAT



 

EN FAIT

 

1. Monsieur M______ a été engagé en qualité de greffier de juridiction au Tribunal administratif à compter du 1er septembre 1981.

2. Dès le 1er juin 1985, M. M______ a été nommé administrateur du Palais de justice. Son traitement a été arrêté en classe 25, annuité 3.

3. Par arrêté du 29 août 2001, le Conseil d’Etat a promu M. M______ à la fonction de secrétaire général du Pouvoir judiciaire. Son traitement a été arrêté en classe 29, annuité 10.

Le 18 avril 2005, le Conseil d’Etat a fixé le traitement de M. M______ en classe 30, annuité 11, avec effet au 1er janvier 2003. Dès le 1er janvier 2004, le traitement a été porté en classe 30, annuité 12.

M. M______, le Procureur général et la commission de gestion du Pouvoir judiciaire (ci-après : la commission) ont demandé, à plusieurs reprises depuis 2003, la réévaluation du traitement du secrétaire général du Pouvoir judiciaire. Il faut toutefois relever que, dans un premier temps, M. M______ a refusé sa réévaluation en classe 32 au motif qu’il se situerait ainsi dans une classe de traitement supérieure à celle des magistrats.

Le 20 décembre 2007, le Procureur général a interpellé le Conseil d’Etat pour l’informer que la commission avait, le 3 décembre 2007, décidé de demander le classement de la fonction de secrétaire général du Pouvoir judiciaire dans une classe de fonction analogue à celle de secrétaire général d’un département ou de la Chancellerie, soit la classe 32

Par courrier du 20 mars 2008, cette requête a été rappelée au Conseil d’Etat par la directrice des ressources humaines du Pouvoir judiciaire.

Le 3 décembre 2008, M. M______ a interpellé le directeur général de l’office du personnel de l’Etat (ci-après : l’office du personnel) au sujet du classement de la fonction de secrétaire général en classe 32.

Le 19 décembre 2008, l’office du personnel a indiqué que le dossier était toujours à l’étude.

Le 31 décembre 2008, le traitement de M. M______ se situait en classe 30, annuité 13.

Le 1er janvier 2009, ce traitement a été porté - sur sa fiche de salaire - en classe 30, annuité 17, suite à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les traitements.

Lors de la séance du 25 mars 2009, le Conseil d’Etat a décidé de porter le traitement du secrétaire général du Pouvoir judiciaire en classe 32.

Par arrêté du 25 mars 2009, le Conseil d’Etat a ainsi attribué à M. M______, avec effet au 1er avril 2009, un traitement équivalent à la classe 32, annuité 10. Dit arrêté a été notifié par une voie et à une date inconnues. Il ne comportait ni motivation, ni indication des voie et délai de recours.

Le 24 avril 2009, le bureau de la commission de gestion a invité le Conseil d’Etat à mettre en vigueur cette nouvelle classification avec effet au 1er octobre 2008.

Par acte daté du 26 avril 2009, remis à un bureau de poste le 27 avril 2009, M. M______, agissant en personne, a recouru au Tribunal administratif en concluant, préalablement, à la suspension de la procédure jusqu’à notification d’une décision du Conseil d’Etat indiquant les voies de recours. Au fond, il conclut, principalement, à la modification de classification de la fonction, soit d’être classé en classe 32 annuité 10 dès le 1er janvier 2008 et en classe 32, annuité 22 dès le 1er janvier 2009. Subsidiairement, il conclut à une classification en classe 32, annuité 10 dès le 1er janvier 2008 et en classe 32, annuité 22 dès le 1er avril 2009.

Le même jour, M. M______ a interpellé le Conseil d’Etat. Il l’a informé du dépôt du recours précité et a requis la notification d’une décision indiquant les voies de recours.

Le 16 juin, les conseils de M. M______ ont sollicité un délai pour compléter le recours.

Le 17 juin, le Conseil d’Etat a pris acte des démarches de M. M______ et a refusé de notifier une décision car le Tribunal administratif était déjà saisi.

Par acte du 30 juin 2009, le Conseil d’Etat s’est opposé au recours. Le classement de fonction notifié au recourant le 25 mars 2009 était conforme au droit, en particulier à la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’Etat et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait – B 5 15). Le recours devait être rejeté.

Les parties ont été convoquées à une audience de comparution personnelle le 9 juillet 2009. M. M______ n’a pas déféré à la convocation. Ses conseils ont indiqué ne jamais avoir reçu de convocation du tribunal.

Par mémoire du 31 août 2009, M. M______ a complété son recours. Il a, principalement, conclu à ce que le tribunal de céans constate que sa fonction devait être classée en classe 32 dès le 1er janvier 2008, à son classement en classe 32, annuité 12 dès le 1er mai 2008, « sous suite de frais et dépens ». Son droit d’être entendu avait été violé car il n’avait reçu aucune décision motivée. La LTrait imposait le classement en classe 32, en particulier le nouveau système prévu dès le 1er janvier 2009. Le principe d’égalité de traitement était violé, le traitement du secrétaire général de la chancellerie et celui du sautier du Grand Conseil ayant été fixé en classe 32 avant le 1er avril 2009. Enfin, le Conseil d’Etat ne pouvait passer outre le souhait de la commission de gestion sans violer le principe de la séparation des pouvoirs.

Dans ses observations complémentaires du 16 octobre 2009, le Conseil d’Etat a persisté dans ses conclusions tendant au rejet du recours de M. M______.

Le 2 novembre 2009, M. M______ a requis l’ouverture d’enquêtes et la production des pièces en possession du Conseil d’Etat pour déterminer le statut du secrétaire général du Pouvoir judiciaire.

Entendues en audience de comparution personnelle le 12 janvier 2010, les parties ont persisté dans leur position.

a. Le recourant a exposé ne jamais avoir été entendu avant la prise de décision relative à sa classe de traitement et n’avoir reçu aucune décision sur ce point, à l’exception de l’arrêté du Conseil d’Etat du 25 mars 2009. Il a sollicité le droit de consulter le dossier en mains du Conseil d’Etat à ce sujet, ce qui lui a été refusé. Seul le dossier en possession du Pouvoir judiciaire était à sa disposition.

b. Le représentant du Conseil d’Etat a confirmé que les fonctionnaires n’étaient jamais entendus avant la notification d’un arrêté modifiant la classe de fonction et qu’aucune décision formelle n’était notifiée dans ce contexte. Les éléments relatifs à la fixation du traitement ne figuraient pas dans le dossier du fonctionnaire. La seule pièce à disposition était l’arrêté du Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat a par ailleurs indiqué que les conclusions constatatoires prises dans le complément au recours du 31 août 2009 étaient irrecevables.

Le Tribunal administratif a ordonné au Conseil d’Etat de produire d’ici au 22 janvier 2010 les pièces en sa possession et qui avaient été utilisées par ses membres pour rendre l’arrêté du 25 mars 2009. La production du dossier administratif de M. M______ a en outre été requise du Pouvoir judiciaire.

Par courrier du 20 janvier 2010, le Conseil d’Etat a refusé de faire droit à la requête du tribunal. Ses séances n’étaient pas publiques et ses membres devaient s’abstenir de renseigner des tiers sur des délibérations et opinions émises au cours d’une séance. Le dossier en mains du tribunal de céans contenait toutes les informations et les documents nécessaires pour faire aboutir la procédure.

Le 29 janvier 2010, la direction des ressources humaines du Pouvoir judiciaire a remis au juge délégué le dossier. A l’exception de la copie des arrêtés de nomination ou de fixation du traitement, aucun document relatif au calcul du traitement n’y figurait.

Les parties n’ayant plus requis d’actes d’instruction après avoir été dûment interpellées, la cause a été gardée à juger le 13 avril 2010.

EN DROIT

1. a. Le 18 septembre 2008, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a modifié la loi d’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ - E 2 05). Cette novelle, entrée en vigueur le 1er janvier 2009, répond à l'art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) qui garantit l'accès au juge et à l'art. 86 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) qui oblige les cantons à instituer des tribunaux supérieurs statuant en dernière instance comme autorités précédant immédiatement le Tribunal fédéral.

b. Cette modification législative a notamment entraîné l'abrogation de l'ancien art. 56B al. 4 LOJ. Le Tribunal administratif est désormais compétent, en sa qualité d'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative, pour connaître également des recours contre les décisions concernant le statut et les rapports de service des fonctionnaires et autres membres du personnel de l’Etat (art. 56A al. 1 et 2 LOJ). Quant à l'art. 56G LOJ qui réglementait l'ancienne action pécuniaire largement utilisée pour régler le contentieux financier de la fonction publique, sa teneur a été modifiée. Il s'intitule dorénavant « action contractuelle » et est réservé aux prétentions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision et qui découlent d'un contrat de droit public.

c. Le but du législateur est de simplifier le contentieux administratif de la fonction publique. La voie du recours au Tribunal administratif est ouverte en cas de litige entre un agent public et une collectivité publique portant sur des prétentions pécuniaires, dans tous les cas où la détermination relative à celles-ci peut sans difficulté faire l'objet d'une décision ordinaire (PL 10253, ad art. 56G LOJ, p.49).

d. Interjeté le 27 avril 2009 contre l’arrêté du Conseil d’Etat du 25 mars 2009 fixant le traitement du recourant en classe 32 avec effet au 1er avril 2009, le recours est recevable quant à son objet. La recevabilité la conclusion constatatoire nouvelle prise par le recourant le 31 août 2009 sera en revanche laissée ouverte au vu de l’issue du recours.

2. Interjeté le 27 avril 2009 contre un arrêté du 25 mars 2009 qui n’a pas été notifié par pli recommandé, le recours a été déposé en temps utile, aucun délai n’ayant commencé à courir (art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). En effet, lorsque la notification a lieu, comme en l’espèce par une voie inconnue – vraisemblablement par la voie du service du courrier – c'est à l'autorité dont elle émane qu'il incombe de prouver la date de réception du pli (ATA/157/2007 du 27 mars 2007 et les références citées). Faute pour le Conseil d’Etat de pouvoir le démontrer en l’espèce, le recours du 27 avril 2009 a été interjeté en temps utile.

3. a. Le recourant allègue que le Conseil d’Etat est lié par les prises de position de la commission de gestion sur son traitement et qu’il ne peut s’en écarter sans violer le principe de séparation des pouvoirs. En d’autres termes, le recourant soutient que le Conseil d’Etat ne peut que ratifier la décision de la commission de gestion. Il s’agit d’une question relative à la compétence du Conseil d’Etat, auteur de la décision dont est recours, qu’il convient de traiter en premier lieu.

b. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le principe de la séparation des pouvoirs est garanti, au moins implicitement, par toutes les constitutions cantonales ; il représente un droit constitutionnel dont peut se prévaloir le citoyen. Ce principe assure le respect des compétences établies par la constitution cantonale. Il appartient donc en premier lieu au droit public cantonal de fixer les compétences des autorités. Le principe de la séparation des pouvoirs interdit à un organe de l'Etat d'empiéter sur les compétences d'un autre organe (ATF 134 I 322 consid. 2.2). En l’espèce, il faut déterminer si le Conseil d’Etat est compétent pour statuer sur le traitement du secrétaire général du Pouvoir judiciaire.

4. a. L’art. 75A al. 1 LOJ prévoit que l’organisation et la gestion des moyens administratifs dévolus au fonctionnement du Pouvoir judiciaire sont assurées par une commission de gestion. Jusqu’au 31 octobre 2009, l’art. 75A al. 2 LOJ réglait les compétences respectives du Conseil d’Etat et de la commission de gestion en matière de personnel : la commission de gestion choisit le personnel des services centraux et des greffes. Ce personnel lui est rattaché hiérarchiquement, soit par délégation au secrétaire général du Pouvoir judiciaire. Il est géré administrativement par l’office du personnel sur délégation de la commission de gestion. Le statut de la fonction publique selon la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et la LTrait lui sont applicables. La commission de gestion exerce les compétences conférées au chef du département en matière disciplinaire par la loi générale précitée. L’acte formel d’engagement et de nomination du personnel, le retour d’un fonctionnaire au statut d’employé en période probatoire pour une durée maximale de trois ans et la résiliation des rapports de service sont effectués par le Conseil d’Etat, sur préavis de la commission de gestion.

b. A teneur de la lettre claire de cette disposition le Conseil d’Etat était, jusqu’au 31 octobre 2009, compétent pour adopter tous les actes formels relatifs à l’engagement et la nomination du personnel, y compris pour fixer le traitement du personnel du Pouvoir judiciaire. La commission de gestion n’avait qu’à émettre un préavis.

c. Cette interprétation est confirmée par le projet de loi PL 9951, qui a été traité par le Grand Conseil, et qui avait, notamment, pour objectif de prévoir une nouvelle teneur de l’art. 75C LOJ, afin de confier à la commission de gestion le pouvoir d’engager et gérer librement le personnel du Pouvoir judiciaire. Ce projet de loi a finalement été rejeté par le Grand Conseil lors de la session du 26 juin 2009.

d. Les compétences de la commission de gestion ont ensuite été modifiées par adoption du projet de loi PL 9952, entré en vigueur le 1er novembre 2009. En jugeant nécessaire de modifier la LOJ afin de confier l’engagement et la gestion du personnel à la commission de gestion, le législateur a confirmé que l’art. 75A LOJ dans sa teneur jusqu’au 31 octobre 2009 n’accordait pas une compétence décisionnelle à la commission de gestion.

e. En application de l’art. 75A al. 2 LOJ alors en vigueur, le Conseil d’Etat était ainsi compétent pour adopter l’arrêté du 25 mars 2009, querellé dans la présente procédure. Le grief de violation du principe de la séparation des pouvoirs doit ainsi être rejeté.

5. Le recourant se plaint d’une violation du droit d’être entendu, faute d’avoir reçu une décision motivée.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst, le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; ATF 2C_573/2007 du 23 janvier 2008 consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/415/2008 du 26 août 2008 consid. 6a et les arrêts cités). Le droit d’accès au dossier a, notamment, pour but de permettre à l’administré et à l’autorité de recours de déterminer les bases sur lesquelles s’est fondée l’administration pour arrêter sa décision. En effet, afin de pouvoir juger des bases de la décision, le citoyen et le juge doivent pouvoir accéder au dossier (J-P MÜLLER/M. SCHEFER, Grundrechte in der Schweiz, 4e éd., Berne, 2008, p. 871). Une autorité peut toutefois interdire la consultation du dossier si l'intérêt public ou des intérêts privés prépondérants l'exigent. Le refus d'autoriser la consultation des pièces ne peut s'étendre qu'à celles qu'il y a lieu de garder secrètes et ne peut concerner les propres mémoires des parties, les documents qu'elles ont produits comme moyens de preuves, les décisions qui leur ont été notifiées et les procès-verbaux relatifs aux déclarations qu'elles ont faites (art. 45 al.1 et 2 LPA). De plus, une pièce dont la consultation est refusée à une partie ne peut être utilisée à son désavantage que si l'autorité lui en a communiqué par écrit le contenu essentiel se rapportant à l'affaire et lui a donné en outre l'occasion de s'exprimer et de proposer les contre-épreuves (art. 45 al. 3 LPA). Ainsi, le refus d'autoriser la consultation des pièces doit être limité à ce qui est strictement nécessaire et dès lors répondre au principe de la proportionnalité (ATA/62/2010 du 3 février 2010, consid. 5.b).

b. La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATA/422/2010 du 22 juin 2010, consid. 6.b ; ATA/279/2010 du 27 avril 2010, consid. 2.c ; ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 consid. 2b ; ATA/430/2008 du 27 août 2008 consid. 2 ; P. MOOR, Droit administratif, Les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2e éd., Berne 2002, ch. 2.2.7.4 p. 283). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72 et les arrêts cités ; ATF 1C.63/2008 du 25 août 2008 consid. 2.1) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; ATA/422/2010 du 22 juin 2010, consid. 6.b). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/422/2010 du 22 juin 2010, consid. 6.b ; ATA/279/2010 du 27 avril 2010, consid. 2.c ; ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 consid. 2.b).

6. La question de savoir si le recourant s’est déterminé avant la notification de l’arrêté dont est recours, en particulier au moyen de son pli du 3 décembre 2008, peut demeurer ouverte. Il en va de même pour la conformité au droit de la pratique du Conseil d’Etat de transmettre un arrêté sans motivation particulière pour la fixation du traitement. Le recourant n’a en effet jamais eu accès à son dossier relatif à la fixation de son traitement par le Conseil d’Etat. L’accès au dossier personnel en main du Pouvoir judiciaire est à cet égard insuffisant car celui-là ne contient aucun élément relatif au calcul du traitement, respectivement à la fixation de la date du nouveau traitement. Il n’existe ainsi aucune évaluation ou aucun document susceptible d’exposer comment et sur quelle base le nouveau traitement du recourant a été calculé. Par courrier du 20 janvier 2010, le Conseil d’Etat a en outre refusé de produire les pièces qui étaient en ses mains lors de l’adoption de l’arrêté dont est recours au motif que les séances du Conseil d’Etat ne sont pas publiques et que ses membres doivent s’abstenir de renseigner des tiers sur les délibérations et les opinions émises au cours d’une séance (art. 30 du règlement pour l’organisation du Conseil d’Etat de la République et canton de Genève – RCE – B 1 15.03). Cette motivation n’est pas une justification conforme à l’art. 45 LPA pour refuser au recourant l’accès à toutes les pièces qui ont fondé la fixation de son traitement. L’art. 30 RCE permet en effet uniquement au Conseil d’Etat de refuser de communiquer les arguments qui ont été échangés entre les membres du Conseil d’Etat lors de la délibération qui a précédé l’adoption de l’arrêté dont est recours. En revanche, elle ne permet pas d’exclure de la consultation tous les documents qui ont été utilisés par le Conseil d’Etat lors de la délibération, ce d’autant plus que le Conseil d’Etat n’en a pas communiqué le contenu essentiel au recourant (art. 45 al. 3 LPA). En refusant au recourant l’accès au dossier et en refusant de produire, en mains du tribunal de céans, les pièces qu’il a utilisées, le Conseil d’Etat a ainsi violé le droit d’accès au dossier du recourant. Conformément aux principes applicables en matière de droit d’être entendu, il faut examiner si cette violation a pu être réparée par la procédure devant le Tribunal administratif.

7. a. Selon le Tribunal fédéral, l'évaluation de fonctions déterminées en relation avec d'autres fonctions ou sur la base d'exigences précises ne peut jamais être réalisée de manière objective et neutre, mais contient, par la force des choses, une grande part d'appréciation, dont la concrétisation dépend de la façon dont une certaine tâche est perçue par la société, respectivement par l'employeur (ATF 1C_245/2007 du 30 octobre 2007, consid. 2.1 ; ATF 125 II 385, consid. 5b et les références citées). Le point de savoir si différentes activités doivent être considérées comme étant de même valeur dépend d'estimations qui peuvent conduire à des résultats différents (ATF 1C_245/2007 du 30 octobre 2007, consid. 2.1 ; ATF 129 I 161, consid. 3.2). L'autorité compétente dispose sur ce point d'un grand pouvoir d'appréciation (cf. ATF 125 II 285, consid. 5b). Tant qu'elle ne tombe pas dans l'arbitraire et qu'elle respecte le principe de l'égalité de traitement, elle peut choisir, parmi la multitude de critères envisageables, les éléments qu'elle considère comme pertinents pour la fixation de la rémunération de ses employés (ATF 1C_245/2007 du 30 octobre 2007, consid. 2.1 ; ATF 129 I 161, consid. 3.2 et les arrêts cités).

b. Le Tribunal administratif ne dispose ainsi pas d’un pouvoir de cognition identique au Conseil d’Etat pour contrôler la fixation du traitement du recourant, ni pour déterminer la date applicable à son nouveau traitement (art. 61 al. 2 LPA). La procédure de recours n’a ainsi pas pu réparer la violation du droit d’être entendu qui résulte du refus du Conseil d’Etat de laisser le recourant accéder à son dossier. Ce d’autant plus que le Conseil d’Etat a refusé de remettre ce dossier au tribunal, qui n’a pas pu examiner son contenu. Le tribunal de céans ne peut, dans ces circonstances, statuer sur la conformité au droit de l’arrêté dont est recours faute de pouvoir examiner les pièces qui ont été utilisées par le Conseil d’Etat. Le Tribunal administratif ne sait par exemple pas si la commission de réexamen instituée par le règlement instituant une commission de réexamen en matière d’évaluation des fonctions (RFCom – B 5 14.04) a été saisie, respectivement pour quel motif elle n’a pas été saisie (sur cette procédure, cf. ATA/179/2009 du 7 avril 2009, consid. 12).

c. La violation du droit d’accès au dossier du recourant doit conduire à l’admission du recours. L’arrêté du Conseil d’Etat du 25 mars 2009 sera annulé (ATA/422/2010 du 22 juin 2010) et le dossier retourné à l’autorité intimée pour qu’elle laisse le recourant avoir accès au dossier avant la prise d’une nouvelle décision.

10. Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et le dossier renvoyé au Conseil d’Etat. Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge du Conseil d’Etat qui succombe. Une indemnité de procédure de CHF 1’500.- sera allouée au recourant, qui y a conclu (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 avril 2009 par Monsieur M______ contre l’arrêté du Conseil d’Etat du 25 mars 2009 ;

au fond :

l’admet ;

annule l’arrêté du Conseil d’Etat du 25 mars 2009 ;

renvoie le dossier au Conseil d’Etat au sens des considérants ;

met à la charge du Conseil d’Etat un émolument de CHF 1’500.- ;

alloue à Monsieur M______ une indemnité de procédure de CHF 1’500.- , à la charge de l’Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt  peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt  et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Maîtres Claudio Realini et Eric Vazey, avocats du recourant, ainsi qu’au Conseil d’Etat.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, MM. Bonard, Torello, Bellanger et Grodecki, juges suppléants.

Au nom du Tribunal administratif :

 

la greffière-juriste. :

 

M. Tonossi

 

 

le juge présidant :

 

E. Hurni

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

la greffière :