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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3531/2008

ATA/179/2009 du 07.04.2009 ( IP ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 26.05.2009, rendu le 07.04.2010, ADMIS, 8C_453/2009
Descripteurs : ; ACTION PECUNIAIRE ; SALAIRE ; CLASSE DE TRAITEMENT
Normes : LOJ.56G ; LTrait.4 ; RTrait.2 ; RComEF.1
Résumé : Action pécuniaire déclarée irrecevable. La collocation de la fonction de formateur d'enseignant en classe 20 telle qu'elle résulte de l'analyse du service d'évaluation des fonctions est une proposition faite au département. L'enseignante ne peut s'en prévaloir pour réclamer la différence entre le traitement qu'elle a reçu et celui qu'elle aurait obtenu en classe 20.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3531/2008-IP ATA/179/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 7 avril 2009

 

dans la cause

 

Madame Y______
représentée par Me Christian Bruchez, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE


 


EN FAIT

1. Madame Y______, née le ______ 1950, a été engagée au département de l’instruction publique (ci-après : DIP) puis confirmée dans ses fonctions de maîtresse enfantine dès le 1er septembre 1973.

2. En juin 1981, elle a obtenu sa licence en sciences de l’éducation de l’Université de Genève.

3. Dès l’année scolaire 2002-2003, Mme Y______ a exercé la fonction de formatrice dans le dispositif d’encadrement et de suivi des suppléants et des remplaçants (DESR) à un taux de 100%.

Son traitement correspondait à son salaire de maîtresse de l’enseignement primaire équivalant à la classe 16, annuité 15, auquel s'ajoutait une indemnité de CHF 7'700.- par an, soit CHF 583,90 par mois.

4. Soucieuse de voir la fonction de formateur réévaluée, l'association genevoise des formateurs d’enseignants (AGFE), fondée en 1995, a interpellé à plusieurs reprises la direction de l’enseignement primaire à ce sujet.

Pour répondre à cette préoccupation, un groupe de travail a été créé en 2003 dont l’objectif était la réorganisation de la formation continue de l’enseignement primaire et l'établissement d'un projet de cahier des charges pour les formateurs.

5. Le 19 mai 2005, un projet de cahier des charges pour la fonction de formateur d'enseignants a été élaboré par la direction de l'enseignement primaire. Ce projet, validé par les services du DIP et présenté à la commission paritaire des enseignants, a été soumis au service d'évaluation des fonctions le 5 octobre 2005.

6. Dans un courrier du 7 octobre 2005, le conseiller d’Etat en charge du DIP a informé l’AGFE que les procédures de réévaluation des fonctions étaient suspendues, la formation initiale et la formation continue traversant une forme de mutation. L’enseignement primaire ne pouvait dès lors pas prendre seul des décisions susceptibles de se révéler contradictoires avec les orientations futures du département en matière de formation des adultes. La création d’une fonction spécifique de formateur, autre que celle d’enseignant détaché, n’était donc pas envisageable et la réévaluation de la fonction déboucherait, le moment venu, sur un réajustement de l’indemnité perçue par tous les formateurs.

7. Suite à une décision du Conseil d’Etat du 21 février 2007 autorisant la reprise des évaluations et au protocole d’accord entre le Conseil d’Etat et les associations représentatives du personnel du 13 septembre 2006 qui prévoyait la mise en œuvre des résultats d’évaluation au 1er septembre 2007 pour les enseignants, la directrice adjointe des ressources humaines du DIP a demandé à l’office du personnel de l’Etat (ci-après  : OPE) de procéder à l'évaluation de la fonction de formateur.

8. Dans une note du 19 juillet 2005, l'OPE a proposé, conformément à la méthode en vigueur à l’Etat de Genève, les dénominations, profils, pondérations et classifications suivants :

"formateurs de l’enseignement primaire

formatrices de l’enseignement primaire

profils : M B J B I ;

189 points - classe maximum 20".

9. Par courrier du 27 juillet 2007, la directrice adjointe des ressources humaines du DIP a répondu à l'OPE.

La proposition effectuée paraissait tout-à-fait cohérente. Toutefois, les fonctions de formateur de l’enseignement primaire faisaient partie des fonctions spéciales exercées par les maîtres et maîtresses de l’enseignement primaire. Au vu des évolutions qui allaient intervenir dans la réorganisation de la formation des enseignants avec la mise en place de l’Institut universitaire de formation des enseignants (IUFE) et dans la perspective de la création d’une nouvelle direction générale de l’enseignement obligatoire, il était souhaitable de maintenir la situation actuelle.

De ce fait, le département avait décidé de coulisser les formateurs en classe 18 selon les nouvelles classifications des enseignants du primaire et de maintenir l’octroi d’une indemnité correspondant à la différence entre les classes 18/00 et 20/00.

10. Par courrier du 24 août 2007, Mme Y______ a été informée par le service des ressources humaines du DIP que, pour l’instant, le maintien de la situation actuelle des formateurs de l'enseignement primaire, soit des enseignants détachés pour la formation, avait été privilégiée. Le département avait dès lors décidé, sur la base des conclusions de l’OPE, d’appliquer pour ces collaborateurs, les nouvelles classifications des enseignants du primaire et de leur octroyer une indemnité. Cela signifiait que le salaire des formateurs, maîtres généralistes détachés de l’enseignant ordinaire et/ou de l’enseignement spécialisé, coulissait de la classe 16 à la classe 18. Outre ce coulissement, les formateurs se voyaient accorder une indemnité qui correspondait à la différence de deux classes (16/00 à 18/00 ou 18/00 à 20/00).

 

 

11. Le 29 septembre 2008, Mme Y______ a déposé une action pécuniaire auprès du Tribunal administratif. Elle conclut au versement par l’Etat de Genève de la somme de CHF 3'913,85 avec intérêts à 5% dès le 29 février 2008 et de CHF 65'771,40 avec intérêts à 5% dès le 31 août 2005.

Le choix du département de coulisser son traitement en classe 18 et de maintenir l'octroi d'une indemnité correspondant à la différence entre la classe 18/00 et 20/00 n'était pas susceptible de recours. En ne respectant pas la décision du service d’évaluation des fonctions, le DIP l’avait privée d’un coulissement en classe 20. Cette situation lui causait un préjudice financier. L'action pécuniaire était ainsi recevable et elle sollicitait le versement de la différence entre son traitement en classe 18 annuité 15 pour l’année 2007-2008 et celui qui aurait été le sien en classe 20 annuité 15, ainsi que l’adaptation correspondante de son traitement pour les années précédentes.

Elle travaillait en tant que formatrice d’enseignants depuis l’année scolaire 2002-2003. En vertu de l’article 2 du règlement d’application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’Etat et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RTrait - B 5 15.01), la classe prévue pour la fonction était déterminée par le résultat de l’évaluation des fonctions. En l'occurrence, le service d'évaluation des fonctions avait examiné le cahier des charges du formateur et avait attribué la classification suivante : « classe maximum 20 ». Malgré cette décision, le DIP avait maintenu la situation existante. Ainsi, les formateurs restaient positionnés dans des classes différentes selon leur fonction antérieure d’enseignement. Cette démarche violait le règlement instituant une commission de réexamen en matière d’évaluation des fonctions du 7 avril 1982 (RComEF - B 5 15.04) qui prévoyait une procédure d’opposition contre les décisions relatives à l’évaluation des fonctions, à l’exclusion des décisions prises lors de l’engagement. Le DIP, qui avait été informé du résultat de l'analyse par la note du 19 juillet 2007 de l'OPE, n’avait pas fait opposition. Il avait adressé un simple refus par courrier du 27 juillet 2008. Faute d’opposition dans les trente jours auprès de la commission de réexamen, la décision du service de l’évaluation des fonctions était devenue définitive et devait être respectée par le DIP. L’Etat de Genève devait dès lors être condamné à lui verser la différence entre son traitement en classe 18 annuité 15 pour l’année 2007-2008 et celui qui aurait été le sien en classe 20 annuité 15.

En classe 20 annuité 15, elle aurait reçu la somme brute de CHF 141'484,35 pour l’année scolaire 2007-2008, prime de fidélité comprise. Or, elle n’avait reçu que CHF 137'570,50 brut pour son activité à 100%, indemnité de méthodologue et prime de fidélité comprises. L’Etat de Genève devait donc lui verser la somme brute de CHF 3'913,85, avec intérêt moyen à 5% l’an dès le 29 février 2008.

Par ailleurs, elle avait exercé l’activité de formatrice depuis 2002. Durant toute la durée de son activité de formatrice elle avait effectué le même travail que celui décrit dans l’évaluation du 19 juillet 2007. Pour les années précédant l’année scolaire 2007-2008, son activité n’avait donc pas non plus été rémunérée à sa juste valeur, ce qui constituait une violation de l’article 4 alinéa 2 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’Etat et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15) et du principe de l’égalité de traitement garanti par la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). Pour rétablir une situation conforme au droit pour ces périodes également, l’Etat de Genève devait être condamné à lui verser la différence entre le montant effectivement reçu et le traitement qui aurait été le sien en classe 20 pour une activité à 100%, ce qui correspondait à la somme brute de CHF 65'771,40 pour les années scolaires 2003-2004, 2004-2005, 2005-2006 et 2006-2007 avec intérêts moyens à 5% l’an dès le 28 février 2005.

12. Le 29 octobre 2008, le DIP s’est opposé à l’action pécuniaire.

Le projet de cahier des charges pour les formateurs de l’enseignement primaire avait été déposé en automne 2005 au service d'évaluation des fonctions. Après examen du dossier, l'OPE avait proposé au DIP, en juillet 2007, les dénomination, profil, pondération et classification suivants : « formateur de l’enseignement primaire ; formatrice de l’enseignement primaire ; profil M B J B ; 189 points - classe maximum 20 » tout en précisant que le requis à l’exercice de la fonction était une licence universitaire mention enseignement, assortie d’une expérience préalable de cinq ans en tant que maître de l’enseignement primaire. Il s’agissait d’une proposition au DIP et non d’une décision. Le DIP avait trouvé la proposition de l'OPE cohérente mais avait considéré qu’il n’était pas opportun de créer une fonction de formateur au sein de l’enseignement primaire en rangeant cette catégorie de personnes dans le personnel administratif et technique. Le DIP avait ainsi mis en attente la proposition de l'OPE. Il avait toutefois décidé que, conformément à l’article 1 alinéa 2 du règlement relatif aux indemnités du corps enseignant du 2 mai 2007, l’ensemble des formateurs recevrait une indemnité de deux classes, soit, pour les formateurs de disciplines généralistes comme la demanderesse, une indemnité correspondant à la classe 20.

Le service d'évaluation des fonctions n’avait pas rendu une décision. Il avait fait une proposition. Aucune disposition légale empêchait le DIP de ne pas suivre cette proposition. Ce n’était que si le département avait exprimé son désaccord et que l'OPE avait maintenu sa position en rendant une décision qu’il aurait appartenu au DIP de faire opposition auprès de la commission de réexamen en matière d’évaluation des fonctions. Ainsi, il était erroné de prétendre que la décision du DIP violait le RComEF.

Même à considérer que les enseignants formateurs généralistes avaient été mis en classe 20, Mme Y______ aurait été au bénéfice d’une classe 20 annuité 13 et non d’une classe 20 annuité 15. En effet, selon les règles en matière de coulissement fixées à l’article 8 RTrait, le passage de la classe 18 annuité 15 correspondait à la classe 20 annuité 13.

Enfin, ce n’était qu’à compter du 1er septembre 2007, soit à la date d’entrée en vigueur de la réévaluation des fonctions de maître/maîtresse au sein de l’enseignement primaire que les formateurs auraient été mis dans cette nouvelle classe 20. En effet, lors de sa séance du 29 novembre 2004, le Conseil d’Etat avait décidé que les nouvelles classifications de fonctions acceptées dans le cas de restructuration de grands groupes prenaient effet à la date fixée par le Conseil d’Etat, soit au 1er septembre 2007 pour les fonctions réévaluées des maîtres de l’enseignement primaire. La volonté du Conseil d’Etat qui sous-tendait cette décision visait à éviter tout effet rétroactif aux décisions concernant les réévaluations. De ce fait, il avait été convenu que le versement d’une indemnité aux maîtres de l’enseignement primaire pour leur activité de formateur prendrait également effet au 1er septembre 2007. Ainsi, Mme Y______ aurait reçu pour l’année scolaire 2007-2008 un salaire annuel brut de CHF 125'238.- et non de CHF 141'484,35 comme allégué dans ses écritures.

13. Le 16 janvier 2009, Mme Y______ a déposé des observations complémentaires. Elle maintient ses conclusions.

Le raisonnement du DIP selon lequel la note du 19 juillet 2007 du service des ressources humaines de l'OPE ne constituait pas une décision, mais une proposition ne se fondait sur aucune base légale. Les termes employés dans le courrier du 5 octobre 2005, comme dans celui du 19 juillet 2007, démontraient clairement que le service d'évaluation des fonctions prenait des décisions et qu’il ne s’agissait pas de propositions faites au département. N'ayant pas fait l'objet d'une opposition au sens du RComEF, la décision du service précité était devenue définitive et devait être respectée par le DIP. En ne la respectant pas, celui-ci avait violé le règlement.

S’agissant du calcul des annuités, la fonction qu’elle exerçait avait fait l’objet d’une réévaluation et non d’un changement de fonction avec promotion. C’était donc à tort que le DIP se fondait sur l’article 8 RTrait. Si le département avait respecté la décision du service d’évaluation des fonctions, elle aurait été au bénéfice d’une classe 20 annuité 15 car elle aurait dû d’emblée être placée dans cette classe et cette annuité. Enfin, la décision du Conseil d’Etat selon laquelle les fonctions réévaluées des maîtres de l’enseignement primaire prendrait effet au 1er septembre 2007 et celle du département au terme de laquelle le versement d’une indemnité aux maîtres de l’enseignement primaire pour leur activité de formateurs prendrait également effet au 1er septembre 2007 ne se fondait sur aucune base légale.

14. Le 20 janvier 2009, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. L'action pécuniaire ayant été déposée avant l'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi sur l'organisation judiciaire du 18 septembre 2008, il convient de déterminer le droit applicable.

2. Le 18 septembre 2008, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a modifié la loi d’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ - E 2 05). Cette novelle, entrée en vigueur le 1er janvier 2009, répond à l'article 29a Cst qui garantit l'accès au juge et à l'article 86 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) qui oblige les cantons à instituer des tribunaux supérieurs statuant en dernière instance comme autorités précédant immédiatement le Tribunal fédéral. Elle a notamment entraîné l'abrogation de l'article 56B alinéa 4 LOJ et la modification de l'article 56G LOJ. Ainsi, le Tribunal administratif est désormais compétent pour connaître des recours contre les décisions concernant le statut et les rapports de service des fonctionnaires et autres membres du personnel de l’Etat et l'action pécuniaire est devenue une action contractuelle réservée aux prétentions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision et qui découlent d'un contrat de droit public.

3. Selon l'article 162 LOJ, les juridictions administratives connaissent de tous les recours entrant dans leurs attributions déposés postérieurement à l'entrée en vigueur de la modification du 18 septembre 2008 (art. 162 al. 2 LOJ). Les recours interjetés avant l’entrée en vigueur de la modification du 18 septembre 2008 et pendants devant une autre juridiction sont transmis d’office au Tribunal administratif s’ils entrent dans sa compétence en vertu des dispositions du nouveau droit (art. 162 al. 4 LOJ).

Cette disposition ne traite pas du droit applicable à l'action pécuniaire déposée avant l'entrée en vigueur de la modification législative. Il convient dès lors de se référer aux principes généraux de droit intertemporel.

4. En principe, le nouveau droit s’applique à toutes les situations qui interviennent depuis son entrée en vigueur. En particulier, en l’absence de dispositions transitoires, les nouvelles règles de nature procédurale doivent s’appliquer immédiatement à toutes les affaires pendantes (ATF 130 V 560, 562 ; ATF 111 V 46, 47 ; Arrêt du Tribunal administratif fédéral A-5714/2007 du 18 mars 2008, consid. 3.4 et les réf. citées ; ATA/356/2008 du 24 juin 2008 ; voir aussi U. HAEFELIN/G. MÜLLER/F. UHLMANN, Allgemeines Verwaltungs-recht, Zurich, 2006, p. 66, no 327a ; P. MOOR, Droit administratif, vol. I, Berne, 1994, p. 171), sous réserve de deux exceptions. Premièrement, si une autorité compétente selon l’ancien droit a été saisie avant l’entrée en vigueur du nouveau droit et n’a pas été abolie par ce dernier, elle reste compétente pour connaître de l’affaire en cause (ATF 130 V 90, 93). Deuxièmement, les nouvelles règles de procédure ne peuvent être appliquées immédiatement que si elles restent dans une certaine continuité avec le système antérieur, sans en bouleverser les fondements (ATF 112 V 356, 360 ; U. HAEFELIN/G. MÜLLER/F. UHLMANN, op. cit., p. 66, n° 327a). Une règle nouvelle qui modifie la procédure à suivre devant l'autorité dont la décision est entreprise ne saurait être appliquée par l'autorité de recours. Une telle application conférerait un effet rétroactif à la règle de procédure (B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle, 1991, p. 123, n° 594).

5. En l'occurrence, en ouvrant une voie de recours contre les décisions relatives au statut et aux rapports de service des fonctionnaires et autres membres du personnel de l'Etat, le nouveau droit a restreint les possibilités pour intenter une action pécuniaire. La procédure à suivre devant l'autorité de recours n'est ainsi pas identique selon le nouveau ou l'ancien droit. Il convient dès lors d'appliquer à la présente procédure, introduite par-devant le tribunal de céans avant la modification législative, les règles de la LOJ dans leur ancienne teneur.

6. Mme Y______ réclame le versement de la différence entre son traitement en classe 18 annuité 15 et celui qui serait le sien en classe 20 annuité 15.

7. a. Aux termes de l'article 56G aLOJ, une action pécuniaire devant le Tribunal administratif est ouverte pour les actions relatives à des prétentions de nature pécuniaire fondées sur le droit public cantonal qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision au sens de l'article 56A alinéa 2 LOJ et qui découlent des rapports entre l'Etat, les communes, les autres corporations et établissements de droit public et leurs agents publics (al. 1 let. a).

b. De jurisprudence constante, l’action pécuniaire est subsidiaire au recours, et n’est soumise à aucun délai, sous réserve de la prescription ou de la péremption du droit de fond (ATA/828/2005 du 6 décembre 2005 ; ATA/873/2004 du 9 novembre 2004).

8. a. Sont des prétentions de nature pécuniaire, c'est-à-dire appréciables en argent, celles qui tendent directement à l'octroi de sommes en espèces, notamment au paiement de traitements, d'allocations, d'indemnités ou de prestations d'assurances. Rentrent aussi dans cette catégorie les droits qui sont étroitement liés à un rapport juridique appréciable en argent. Le Tribunal administratif a ainsi reconnu que les prétentions concernant le paiement des heures supplémentaire et la prétention en versement d'une indemnité pour vacances non prises étaient de nature pécuniaire (ATA/222/2006 du 11 avril 2006).

b. Ne sont, en revanche, pas des prétentions de nature pécuniaire celles qui ont trait à la création, à l'établissement et à la disparition des rapports de service, à l'obtention d'une promotion ou d'un avancement, aux vacances, à la reconnaissance d'un diplôme, à la réintégration dans une classe de fonction antérieure et à l'évaluation ou à la réévaluation d'une fonction, car alors la prétention a en réalité deux objets, l'un pécuniaire et l'autre de nature différente. Comme l'aspect pécuniaire n'est pas susceptible d'être jugé de manière indépendante de l'autre objet pour lequel l'autorité hiérarchique dispose d'un pouvoir d'appréciation entier, personne ne saurait alors exiger d'elle qu'elle accorde une prestation dont l'octroi est laissé à sa discrétion. Dans ces cas, peu importe en définitive que le litige débouche sur l'allocation d'une somme d'argent, celle-ci apparaissant comme secondaire (ATA/222/2006 précité).

9. Mme Y______ fonde son action pécuniaire sur le rapport du service d'évaluation des fonctions.

10. L'autorité ou l'organe de nomination fixe la rémunération des membres du personnel dans un acte d'engagement ou de nomination, en application de l'échelle des traitements et du tableau de classement des fonctions (art. 5 LTrait).

11. a. Le Conseil d’Etat établit et tient à jour le règlement et le tableau de classement des fonctions permettant de fixer la rémunération de chaque membre du personnel en conformité de l’échelle des traitements (art. 4 al. 1 Ltrait). Les règlements et tableaux de classement des fonctions, établis et tenus à jour par d’autres autorités ou organes de nomination dans le cadre de leurs compétences respectives, sont soumis à l’approbation du Conseil d’Etat (art. 4 al. 3 LTrait).

b. La classe prévue pour la fonction est déterminée par le résultat de l'évaluation des fonctions. La liste des fonctions, mise à jour et approuvée par le Conseil d'Etat, est à disposition à l'office du personnel de l'Etat (art. 2 RTrait).

12. a. Selon l'article 1 alinéa 1 RComEF, une commission de réexamen est instituée. Elle permet aux membres du personnel de l'Etat et des établissements publics médicaux de demander le réexamen des décisions relatives à l'évaluation des fonctions (rangement, cotation, classification).

b. Sont susceptibles d'opposition toutes les décisions relatives à l'évaluation des fonctions mentionnées à l'article 1 à l'exclusion des décisions prises lors de l'engagement (art. 4 RComEF).

Peuvent faire opposition, dans un délai de 30 jours dès réception de la décision, les membres du personnel de l'Etat et des établissements publics médicaux intéressés à titre individuel ou collectif pour la fonction qui les concerne ainsi que le département, l'établissement concerné ou le Grand Conseil, ce dernier étant représenté par son bureau (art. 5 et 6 RComEF).

c. Après avoir vérifié la procédure et l'objectivité de l'analyse effectuée par l'office du personnel, la commission se prononce sur la décision contestée en formulant une proposition au Conseil d'Etat (art. 11 al. 1 RComEF). Le Conseil d'Etat statue en dernier ressort et communique sa décision à l'intéressé.

13. Selon le mémento des instructions de l'office du personnel de l'Etat (ci-après : MIOPE), dans le cadre d'une demande d'évaluation, lorsque le département est d'accord avec la proposition de l'OPE, celle-ci devient dès lors une décision de l'office du personnel. Si le département n'est pas d'accord avec la proposition, il adresse à l'office du personnel de l'Etat, service d'évaluation des fonctions, une lettre dûment motivée (cf. fiche n° 02.01.01 du 1er février 2000, mise à jour le 1er octobre 2008 - http://domem.ge.ch/df/miope/miope.nsf).

14. Il ressort des textes légaux précités que la seule autorité compétente pour modifier la classification d'une fonction existante est le Conseil d'Etat. Le service d'évaluation des fonctions n'a pas autorité pour décider de la collocation d'une fonction dans une classe déterminée. Ce service émet une proposition qui est soumise à validation et à ratification par le Conseil d'Etat.

15. En l'espèce, un processus de réévaluation de la fonction de formateur d'enseignement a été engagé dès 2002. Il a abouti au dépôt d'un projet de cahier des charges auprès de l'OPE en octobre 2005. En juillet 2007, cet office a proposé les dénominations, profil, pondération et classification correspondant à ceux de "formateurs de l’enseignement primaire - formatrices de l’enseignement primaire - profils : M B J B I ; 189 points - classe maximum 20". Le DIP a jugé cette proposition cohérente mais a préféré maintenir la situation existante vu les évolutions qui allaient intervenir avec la réorganisation de la formation des enseignants et la création d’une nouvelle direction générale de l’enseignement obligatoire.

Conformément aux termes utilisés dans le rapport d'évaluation, la collocation de la fonction de formateur d'enseignement en classe maximum 20 est une proposition et non une décision. Cette proposition ne fixe pas la rémunération des membres du personnel qui ne peuvent pas s'en prévaloir pour réclamer le versement d'un salaire déterminé. Contrairement aux allégués de Mme Y______, elle n'est pas davantage devenue une décision directement applicable faute d'avoir fait l'objet d'une opposition par le département. En effet, comme vu précédemment, la classification de la fonction de formateur reste du seul ressort du Conseil d'Etat. Par ailleurs, le département n'avait pas à faire opposition dans la mesure où il ne contestait pas les conclusions de l'analyse. La demande de Mme Y______ en tant qu'elle se fonde sur le rapport d'évaluation du 27 juillet 2007 doit dès lors être déclarée irrecevable.

16. Suite à la proposition du l'OPE, le département a, par courrier du 24 août 2007, informé Mme Y______ que les formateurs, maîtres généralistes détachés de l’enseignant ordinaire et/ou de l’enseignement spécialisé, voyaient leur salaire coulisser de la classe 16 à la classe 18 et qu'une indemnité correspondant à la différence de deux classes (16/00 à 18/00 ou 18/00 à 20/00) leur était octroyée. Il a ainsi fixé l'étendue du droit au traitement et à l'indemnité complémentaire de Mme Y______. Comme cette décision touche à la réévaluation de la fonction de formateur, elle ne peut faire l'objet d'un recours sous l'ancienne teneur de la LOJ.

Cette décision ne peut également pas être remise en cause par le biais d'une action pécuniaire. Or, le préjudice financier invoqué par Mme Y______ n'est pas susceptible d'être examiné sans revoir la rémunération des formateurs telle qu'elle résulte du courrier du DIP du 24 août 2007. La demande déposée par Mme Y______ doit donc être déclarée irrecevable.

17. Au vu de ce qui précède, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de Mme Y______ (art. 87 LPA). Il ne sera alloué aucune indemnité de procédure.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

déclare irrecevable l'action pécuniaire interjetée le 29 septembre 2008 par Madame Y______ ;

met à la charge de Madame Y______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt  peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les articles 113 et suivants LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt  et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Bruchez, avocat de Madame Y______ ainsi qu'au département de l'instruction publique.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :