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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3143/2015

ATA/35/2018 du 16.01.2018 sur JTAPI/796/2016 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 23.02.2018, rendu le 10.08.2018, REJETE, 2D_16/2018
Rectification d'erreur matérielle : page 5, paragraphe 8, référence jurisprudence rectifiée en ATA/1541/2017 au lieu de ATA/154/2017 en date du 9 février 2018.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3143/2015-PE ATA/35/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 janvier 2018

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Arnaud Moutinot, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 août 2016 (JTAPI/796/2016)


EN FAIT

1) Monsieur A______, ressortissant russe né le ______ 1989, est arrivé en Suisse le 4 octobre 2006. Jusqu’au 30 septembre 2014, il a été mis au bénéfice d’une autorisation pour études, délivrée le 24 novembre 2006 par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), puis régulièrement renouvelée, pour suivre des études de droit sanctionnées par une maîtrise en droit économique obtenue le 17 septembre 2014.

2) Le 19 janvier 2015, l’OCPM a délivré à l’intéressé une autorisation de séjour de courte durée pour recherche d’emploi, valable jusqu’au 17 mars 2015.

3) Le 16 mars 2015, la société B______ (ci-après : B______) a déposé auprès de l’OCPM une demande d’autorisation de séjour à l’année avec activité lucrative (permis B) en faveur de M. A______, dont le profil répondait aux critères d’un poste qu’elle cherchait à pourvoir afin de développer ses activités en Russie.

4) Par décision du 8 avril 2015, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT), auquel l’OCPM avait transmis la demande de B______ pour raison de compétence, a refusé d’y donner une suite favorable au motif qu’elle ne présentait pas un intérêt économique ou scientifique prépondérant et que l’ordre de priorité n’avait pas été respecté.

Cette décision, mentionnant les voies et délais de recours, accompagnée d’un double à l’attention de l’employé concerné, a été notifiée à B______, qui n’a pas recouru.

5) Par décision du 30 avril 2015, statuant sur une demande de réexamen de B______ du 15 avril 2015, l’OCIRT a confirmé son refus du 8 avril 2015.

Cette décision, mentionnant les voies et délais de recours, accompagnée d’un double à l’attention de l’employé concerné, a été notifiée à B______, qui n’a pas recouru.

6) Par décision du 3 juin 2015, l’OCIRT a écarté une nouvelle demande de réexamen déposée par B______ le 19 mai 2015. Dite décision, comportant les voies et délais de recours, a été notifiée à B______, qui n’a pas recouru.

7) Le 10 août 2015, l’OCPM a informé M. A______ que la demande de permis B déposée par B______ en sa faveur ne pouvait pas être agréée, en raison de la décision rendue par l’OCIRT le 3 juin 2015, qui liait les autorités compétentes en matière d’étrangers. En conséquence, un délai au 7 septembre 2015 lui était imparti pour quitter la Suisse, le renvoi étant possible, licite et raisonnablement exigible.

8) Par acte du 14 septembre 2015, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision précitée, concluant à son annulation et à l’octroi d’un permis B. Les conditions de l’intérêt économique prépondérant et de l’ordre de priorité étaient remplies et il était parfaitement intégré en Suisse.

9) Le 8 août 2016, le TAPI a rejeté le recours.

L’objet du litige était la décision de l’OCPM du 10 août 2015, et non la décision de l’OCIRT du 3 juin 2015, qui était entrée en force. L’OCPM étant lié par cette décision, seule la légalité du renvoi pouvait être contestée. Le renvoi n’apparaissait pas impossible, illicite ou déraisonnablement exigible.

10) Le 14 septembre 2016, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant à son annulation et à l’octroi de l’autorisation de séjour sollicitée.

Les décisions de l’OCIRT ne lui avaient pas été notifiées car il n’était pas partie à la procédure devant cette autorité alors même qu’il était le principal intéressé à l’octroi du permis B sollicité. Il ne pouvait donc développer ses griefs contre leurs motifs qu’à l’occasion du recours contre la décision de renvoi qui en découlait. Ne pas examiner ces griefs relevait du formalisme excessif, violant ainsi son droit d’être entendu.

11) Le 19 septembre 2016, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

12) Le 11 octobre 2016, l’OCPM a conclu à la confirmation du jugement attaqué.

Il était lié par la décision de l’OCIRT contre laquelle B______, qui avait déposé la demande de permis pour le compte de M. A______, n’avait pas recouru. Faut de recours de l’employeur, M. A______ n’avait pas qualité pour agir.

13) Le 25 novembre 2016, M. A______ a exercé son droit à la réplique, persistant dans ses conclusions. Le jugement querellé consacrait une violation de l’art. 6 CEDH, sous la forme de l’absence de respect de la garantie de l’accès au juge.

14) Le 14 décembre 2016, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l’opportunité d’une décision prise en matière de police des étrangers, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la LEtr, du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, contrario).

3) Tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d’une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour. Il doit la solliciter auprès de l’autorité compétente du lieu de travail envisagé (art. 11 al. 1 LEtr). La demande d’autorisation doit être déposée par l’employeur (art. 11 al. 3 LEtr).

Qu’il s’agisse d’une première prise d’emploi, d’un changement d’emploi ou du statut de travailleur salarié vers un statut de travailleur indépendant, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l’admission en vue de l’exercice de l’activité lucrative (art. 40 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 - LEtr - RS 142.20 et art. 83 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 - OASA - RS 142.201).

4) Dans le canton de Genève, le département de la sécurité et de l’économie (ci-après : le département) est l’autorité compétente en matière de police des étrangers, compétence qu’il peut déléguer à l’OCPM (art. 1 al. 1 et art. 2 LaLEtr) sous réserve des compétences dévolues à l’OCIRT en matière de marchés de l’emploi. La compétence pour traiter les demandes d’autorisation de séjour avec prise d’emploi est dévolue à l’OCIRT (art. 17A de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 - LIRT - J 1 05 et 35A du règlement d'application de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 23 février 2005 - RIRT - J 1 05.01).

La décision préalable rendue par l’OCIRT lie l’OCPM, qui peut néanmoins refuser l’autorisation si des considérations autres que celles qui ont trait à la situation de l’économie ou du marché du travail l’exigent (art. 6 al. 6 du règlement d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 9 mars 2009 - RaLEtr - F 2 10.01).

5) De même que les décisions de l’OCPM, celles de l’OCIRT peuvent faire l’objet d’un recours auprès du TAPI avant de pouvoir être déférées à la chambre administrative (art. 3 LaLEtr).

6) En l’espèce, l’employeur qui souhaitait engager le recourant n’a pas recouru contre aucune des trois décisions de l’OCIRT refusant pour la première et confirmant le refus pour les deux autres, sur demande de réexamen de l’employeur. Les trois décisions comportaient l’indication des voies et délais de recours.

Force est ainsi de constater qu’il a finalement renoncé à contester le refus d’autorisation préalable et ne peut plus engager le recourant.

7) Les ressortissants étrangers ne bénéficient en principe d’aucun droit à l’obtention de l’autorisation de séjour et de travail nécessaire en vertu de l’art. 11 al. 1 LEtr, sauf s’ils peuvent le déduire d’une norme particulière du droit fédéral ou d’un traité international (ATF 130 II 281 consid 2.1 ; 128 II 145). Tel n’est pas le cas du recourant, qui ne le prétend du reste pas.

8) Il résulte de ce qui précède que le recourant ne peut demander par le biais d’un recours contre la décision de l’OCPM un contrôle de la décision de l’OCIRT (ATA/412/2014 du 3 juin 2014 consid. 8), dès lors que dans le système prévu par la LEtr et ses dispositions d’application, l’octroi d’un permis B suppose une autorisation préalable délivrée à l’employeur et non à l’employé, qui n’est pas partie à la procédure préalable devant l’autorité et ne dispose pas d’un droit de recours propre lorsque l’employeur lui-même ne recourt pas, puisqu’il n’y alors plus de demande d’autorisation pour prise d’emploi en cours, donc plus d’objet au recours. Il n’y a là aucune violation de la garantie d’accès au juge dès lors que même intéressé à la délivrance d’une autorisation de séjour, il n’est pas destinataire de l’autorisation préalable et qu’il ne dispose d’aucune prétention envers l’employeur qui renonce à recourir contre un refus de ladite autorisation (ATA/1541/2017 du 28 novembre 2017 consid. 3).

Les griefs du recourant à l’encontre de la décision de l’OCIRT du 3 juin 2017 seront donc écartés.

9) Pour le surplus, le recourant ne fait pas valoir de griefs visant la décision de l’OCPM elle-même.

10) Aux termes de l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, tout étranger dont l’autorisation est refusée, révoquée ou qui n’est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyé. La décision de renvoi est assortie d’un délai de départ raisonnable (art. 64 d al. 1 LEtr).

a. Le renvoi d’un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l’exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEtr). La portée de cette disposition étant similaire à celle de l’ancien art. 14a de la loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE), la jurisprudence rendue et la doctrine en rapport avec cette disposition légale restent donc applicables (ATA/244/2012 du 24 avril 2012 ; ATA/750/2011 précité ; ATA/848/2010 du 30 novembre 2010).

b. Le renvoi d’un étranger n’est pas possible lorsque celui-ci ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEtr). Il n’est pas licite lorsqu’il serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEtr). Il n’est pas raisonnablement exigible s’il met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr).

11) En l’espèce, le recourant n’a plus d’autorisation de séjour à la suite de l’échéance de son autorisation de séjour pour études et de son autorisation de séjour de courte durée ainsi que du refus d’autorisation préalable de l’OCIRT. Dans la mesure où il ne peut se prévaloir d’aucun droit lui permettant, à un autre titre, de résider en Suisse, et qu’aucun motif tombant sous le coup de l’art. 83 LEtr n’interdit, à teneur du dossier, un tel renvoi, la décision du 10 août 2015 de l’OCPM est conforme au droit et le TAPI ne pouvait que la confirmer.

12) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté dans la mesure où il est recevable.

13) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette dans la mesure où il est recevable le recours interjeté le 13 septembre 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 août 2016 ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge du recourant ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

 

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Arnaud Moutinot, avocat du recourant, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Junod, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.