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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3282/2014

ATA/312/2015 du 31.03.2015 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE ; EMPLOYÉ PUBLIC ; FONCTIONNAIRE ; ÉTABLISSEMENT DE DROIT PUBLIC ; EXERCICE DE LA FONCTION ; DEVOIR PROFESSIONNEL ; RAPPORTS DE SERVICE ; MESURE DISCIPLINAIRE ; RÉVOCATION DISCIPLINAIRE ; COMPÉTENCE ; DÉLÉGATION DE COMPÉTENCE ; ORGANISATION(PROCÉDURE) ; NULLITÉ
Normes : LPAC.1.al1.lete ; LPAC.2.al1 ; LPAC.2.al4 ; LPAC.5 ; LPAC.11 ; LPAC.17 ; LPAC.16 ; LPAC.21 ; LEPM.1.leta ; LEPM.5.al1 ; LEPM.5.al4 ; LEPM.6.al1 ; LEPM.7 ; LEPM.8 ; LEPM.20
Résumé : Recours d'un fonctionnaire d'un établissement public médical contre une décision de révocation prononcée par le bureau du conseil d'administration. Dès lors que seul le conseil d'administration peut révoquer un fonctionnaire, la chambre administrative a constaté la nullité de la décision.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3282/2014-FPUBL ATA/312/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 mars 2015

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Giuseppe Donatiello, avocat

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE
représentés par Me Pierre Martin-Achard, avocat

 



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1968, a été engagé le 18 janvier 2006 par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), pour une durée indéterminée, en qualité d'employé de cuisine au sein du service de restauration, dépendant du département d'exploitation des HUG, avec effet au 1er mars 2006. Son taux d'activité était de 100 %. Il a été affecté au sein de l'hôpital de D______.

2) Par arrêté du 21 février 2008, M. A______ a été nommé fonctionnaire dès le 1er mars 2008.

3) Le 5 novembre 2010, M. A______ a été convoqué à un entretien de service fixé le 25 novembre 2010 qui avait pour objet son attitude générale, ainsi que l'exécution de son travail.

4) Le 16 décembre 2010, les HUG ont transféré M. A______, dans la même fonction, dès le 1er février 2011, au secteur « cuisine patients » du site E______.

5) Le 26 février 2014, les HUG ont informé M. A______ que dès le 1er avril 2014, il occuperait la fonction d'employé de restauration.

6) Le 28 mars 2014, un rapport interne a été établi par Monsieur B______ du service prévention et sécurité des HUG, secteur surveillance E______.

Selon ce rapport, le 27 mars 2014, aux alentours de 20h54, le service prévention et sécurité des HUG avait reçu une alarme intrusion libellée « DETECT PRESENCE UCP CP Niv. 1 ». Deux agents de sécurité s'étaient rendus sur place et avaient surpris un homme et une femme, les bras chargés de nourriture et de boissons, soit dix escalopes de dinde surgelée (1,2 kg), des raviolis à la viande (3,4 kg), un sac de pain (ballons), quatre-vingt pots de confiture à la fraise et vingt jus de fruits de marque « Granini » à la poire.

Interrogées sur leur présence dans cette zone fermée, les deux personnes avaient expliqué être passées par là, sans se connaître. Après avoir haussé le ton et menacé de faire appel à la police, les intéressés avaient accepté que les agents procèdent à une fouille de leurs effets. Le sac à main de la femme avait permis de découvrir un document d'identité au nom de Madame A______. Dans le portefeuille de l'homme se trouvait un badge des HUG au nom de M. A______. Dès cet instant, le couple A______ avait reconnu être venu pour subtiliser les marchandises retrouvées en leur possession. M. A______ était resté évasif sur le moyen d'accès à cette zone sous contrôle. La fouille sommaire n'avait pas permis de découvrir une clé qui aurait permis d'ouvrir le boitier d'accès, « même si cela [demeurait] très vraisemblable ». Une fois les contrôles effectués, les agents avaient acheminé les intéressés en leurs locaux. Puis, ils les avaient raccompagnés à leur voiture qu'ils avaient fouillée avec leur accord, sans résultat. Au cours de leur interrogatoire, le couple A______ avait enfin indiqué que c'était la première fois qu'ils agissaient de la sorte et que Mme A______ était salariée de l'institution genevoise de maintien à domicile (ci-après : IMAD). La marchandise dérobée avait été laissée sur un chariot par les agents, compte tenu de leur méconnaissance en matière d’hygiène et de manipulation des aliments.

Des photographies des marchandises et de la voiture étaient jointes au rapport.

7) Par décision remise en main propre du 31 mars 2014, le président du Conseil d'administration des HUG a ordonné à titre provisionnel, dès le 31 mars 2014, l'ouverture d'une enquête administrative à l'encontre de M. A______, sa suspension provisoire, ainsi que la suspension de son traitement.

Cette décision était déclarée exécutoire nonobstant recours.

8) Le 7 avril 2014, le président du Conseil d'administration des HUG a informé M. A______ qu'il avait confié l'enquête administrative à Monsieur  C______.

9) Par acte du 10 avril 2014, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision du 31 mars 2014, concluant à la forme à sa recevabilité, préalablement, à la restitution de l'effet suspensif. Principalement, il a conclu, « sous suite de frais et dépens », à l'admission de son recours, à ce qu'il soit dit que la décision précitée était contraire au droit, à son annulation en ce qu'elle ordonnait, à titre provisionnel, la suspension de son traitement, à sa confirmation pour le surplus et à ce que les HUG soient invités à lui verser son traitement dès le 31 mars 2014.

10) Le 24 avril 2014, les HUG ont conclu sur effet suspensif, « sous suite de frais et dépens », à ce que le recours de M. A______ soit déclaré irrecevable et au fond, au rejet de la demande de restitution de l'effet suspensif.

11) Par décision du 5 mai 2014, le président de la chambre administrative a rejeté la demande de restitution de l’effet suspensif.

12) Le 12 mai 2014, les HUG ont conclu, à la forme, à ce que le recours de M. A______ soit déclaré irrecevable, et au fond, à son rejet « sous suite de frais et dépens ».

13) Le 16 juin 2014, M. A______ a répliqué et persisté dans ses conclusions.

14) Par arrêt du 1er juillet 2014, la chambre administrative a rejeté le recours contre la décision incidente des HUG de suspendre le traitement de l’intéressé (ATA/506/2014).

Les faits étaient graves et potentiellement susceptibles de conduire à la révocation du recourant. En outre, il n’était pas certain que les HUG puissent récupérer les salaires payés en cas de licenciement ultérieur. Enfin, l’enquête administrative semblait à bout touchant, dans la mesure où tous les différents protagonistes avaient au moins été entendus une fois par l’enquêteur administratif, de sorte qu’il était envisageable qu’une décision soit rendue sous peu. La décision de suspendre provisoirement l’intéressé sans son traitement pendant cette période était adéquate et proportionnée, au regard des faits de la cause.

15) Le 1er juillet 2014, M. C______ a rendu son rapport.

Au terme de l’enquête, il apparaissait que la version de M. A______ n’était pas crédible et que lui-même et son épouse avaient été interpellés à l’intérieur des cuisines.

16) Le 31 juillet 2014, M. A______ a fait valoir ses observations sur le rapport d’enquête administrative.

17) Par décision du 24 septembre 2014 à l’en-tête des HUG, signée par le président du conseil d’administration et le président du comité de direction, le contrat de travail de M. A______ a été résilié avec effet rétroactif au 31 mars 2014. Sous « objet », il était mentionné « révocation ».

La décision avait été prise, le 22 septembre 2014, à la séance du bureau du conseil d’administration.

Elle se fondait sur les conclusions du rapport d’enquête administrative du 1er juillet 2014, lequel avait démontré la violation des art. 20, 21 et 25 du statut du personnel des HUG, adopté par le Conseil d’administration le 16 décembre 1999 et approuvé par le Conseil d’État le 12 janvier 2000 (ci-après : le statut).

La décision était exécutoire nonobstant recours.

18) Le 27 octobre 2014, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Il a conclu, principalement, à ce qu’il soit constaté que la décision litigieuse était nulle, qu’il soit dit que les rapports de service concernés se poursuivaient, qu’il soit ordonné aux HUG de prononcer une nouvelle décision et de verser au recourant toute rémunération résultant des rapports de service pour la période à compter du 31 mars 2014, le tout sous « suite de frais et dépens ».

Subsidiairement, il devait être constaté que la décision litigieuse était contraire au droit. Elle devait être annulée. La chambre administrative devait dire que les rapports de service concernés se poursuivaient et ordonner aux HUG de verser au recourant toute rémunération résultant desdits rapports pour la période à compter du 31 mars 2014.

Plus subsidiairement, une fois la décision litigieuse annulée, il devait être constaté que les HUG refusaient la réintégration de M. A______. En conséquence, l’indemnité y relative devait être fixée à vingt-quatre mois du dernier traitement brut et les HUG condamnés à verser au recourant CHF 131'683.20 avec intérêts moratoires à 5 % dès le 31 mars 2014 à ce titre. Toutes les conclusions étaient prises sous « suite de frais et dépens ».

L’autorité qui avait prononcé la décision litigieuse était incompétente. Le principe de la présomption d’innocence avait été violé. Subsidiairement, la sanction était disproportionnée.

19) Par réponse du 26 novembre 2014, les HUG ont conclu au rejet du recours sous « suite de frais et dépens ».

L’autorité décisionnaire était compétente. Le Tribunal fédéral avait rejeté l’idée que, sur le plan du droit cantonal, une autorité ne pourrait opérer une sous-délégation que si la norme fondant sa propre compétence l’y autorisait expressément (ATF 118 1a 245, p. 249 et 250). Ainsi, l’art. 2 ch. 5 du règlement du conseil d’administration des HUG relatif à la répartition des compétences en matière de gestion du personnel du 5 octobre 2000 (ci-après : RCA) prévoyait que, par délégation du conseil d’administration, le bureau de celui-ci était compétent pour prononcer la révocation des fonctionnaires. La jurisprudence de la chambre administrative n’avait d’ailleurs jamais contesté la compétence dudit bureau pour une révocation de fonctionnaire (ATA/238/2012 du 24 avril 2012 et ATA/258/2014 du 15 avril 2014). In casu, dans sa séance du 22 septembre 2014, le bureau du conseil d’administration des HUG avait décidé de révoquer avec effet immédiat l’intéressé. Cette décision avait été communiquée à celui-ci à son domicile élu par plis simple et recommandé du 24 septembre 2014, signé par le président du conseil d’administration et le président du comité de direction. S’agissant de l’exigence formelle de la signature collective à deux, celle-ci avait été respectée puisque le courrier du 24 septembre 2014 avait été signé par les deux précités.

Les HUG n’avaient pas violé la présomption d’innocence et la décision était exempte de tout arbitraire.

20) Par réplique du 5 décembre 2014, le recourant a persisté dans ses moyens juridiques et ses conclusions.

21) La cause a été gardée à juger le 8 décembre 2014.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de révocation du recourant.

3)  En tant que membre du personnel des HUG, le recourant est soumis à la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), à son règlement d’application du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), à la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 (LEPM - K 2 05), au statut (art. 1 al. 1 let. e LPAC et 7 al. 2 let. k LEPM), ainsi qu’à la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15).

4) a. Les établissements publics médicaux (ci-après : établissements) comprennent notamment les HUG (art. 1 let. a LEPM).  Les établissements mentionnés à l’art. 1 sont des établissements de droit public dotés de la personnalité juridique (art. 5 al. 1 LEPM).

b. L’établissement est géré par un conseil d’administration dont la composition est fixée par la LEPM (art. 6 al. 1 LEPM).

Le conseil d’administration est le pouvoir supérieur de l’établissement (art. 7 al. 1). Sous réserve des compétences du Grand Conseil et du Conseil d’État, le conseil d’administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour la gestion de l’établissement. Il a notamment comme attribution de nommer et révoquer les fonctionnaires de l’établissement (art. 7 al. 2 let. l LEPM).

Les directions des établissements (hôpitaux et cliniques) exécutent les décisions des conseils d’administration. Elles reçoivent leurs instructions du président du conseil d’administration (art. 8 al. 1 LEPM). Un règlement interne établit les compétences des directions (al. 2).

c. Le conseil d’administration est composé du conseiller d’État chargé du département compétent, d’un membre par parti politique représenté au Grand Conseil, désigné par celui-ci, de six membres désignés par le Conseil d’État, de deux membres désignés par le Conseil d’État, sur proposition, du département de la santé du canton de Vaud, des présidents des Conseils généraux des départements français limitrophes, du président de l’Association des médecins du canton de Genève et de trois membres élus par le personnel. Le Conseil d'État désigne le président du conseil d'administration ; il le choisit pour la durée de quatre ans parmi les membres de ce conseil. Il peut le reconduire deux fois. Un conseiller d'État ne peut occuper ce poste (art. 20 LEMP).

5) La LPAC définit les droits et devoirs des membres du personnel de la fonction publique qui lui sont assujettis (art. 2 al. 1 LPAC). Les membres du personnel de chaque établissement public médical, ainsi que les membres du personnel de l'Hospice général relèvent de l'autorité du conseil d'administration (art. 2 al. 4 LPAC).

Selon l’art. 16 LPAC, traitant des sanctions disciplinaires, les fonctionnaires et les employés qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement soit par négligence, peuvent faire l'objet, selon la gravité de la violation, des sanctions suivantes :

a)  prononcé par le supérieur hiérarchique, en accord avec sa hiérarchie :

1° le blâme ;

b)  prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef du département ou le chancelier d'État, d'entente avec l'office du personnel de l'État ; au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire, par le secrétaire général du pouvoir judiciaire ; au sein de l'établissement, par le directeur général :

2° la suspension d'augmentation du traitement pendant une durée déterminée,

3° la réduction de traitement à l'intérieur de la classe ;

c)  prononcées, à l'encontre d'un fonctionnaire, au sein de l'administration cantonale, par le Conseil d'État ; au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire, par la commission de gestion du pouvoir judiciaire ; au sein de l'établissement par le conseil d'administration :

4° le retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de 3 ans,

5° la révocation.

En cas de révocation, le Conseil d'État, respectivement la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d'administration de l'établissement, peut stipuler que celle-ci déploie un effet immédiat si l'intérêt public le commande (art. 16 al. 2 LPAC).

6) Le statut ne traite pas des modalités de la fin des rapports de service à l’exclusion de l’entretien de service.

7) En l’espèce, le recourant a le statut de fonctionnaire (art. 5 LPAC).

À ce titre, il peut faire l’objet, à certaines conditions, d’une décision de révocation au sens de l’art. 16 al. 1 let. ch. 5° LPAC.

8) Dans un premier grief, le recourant allègue que la décision aurait été prononcée par une autorité incompétente.

En l’espèce, dans sa séance du 22 septembre 2014, le bureau du conseil d’administration des HUG a décidé de révoquer avec effet immédiat l’intéressé. Cette décision a été communiquée à celui-ci à son domicile élu par plis simple et recommandé du 24 septembre 2014, signés par le président du conseil d’administration et le président du comité de direction. Les parties ne contestent pas que la décision de révocation du recourant a été prise par le bureau du conseil d’administration.

En application de l’art. 16 al. 1 let. c LPAC, s’agissant de la catégorie de sanctions disciplinaires les plus graves, une décision de révocation doit être prise par le conseil d’administration de l’établissement. La composition de celui-ci est définie à l’art. 20 LEPM. Il doit ainsi comprendre, outre, notamment, le conseiller d’État en charge du département concerné et des représentants politiques du canton et de la région, des membres élus par le personnel.

Cette compétence du conseil d’administration figure aussi à l’art. 7 al. 2 let. l LEPM qui prévoit expressément que le conseil d’administration a, notamment, pour attribution la révocation des fonctionnaires.

En conséquence, la décision litigieuse ayant été prise par le seul bureau du conseil d’administration, elle a été prononcée par une autorité incompétente et ne répond en conséquence pas aux exigences légales (art. 16 al. 1 let. c LPAC et art. 7 al. 2 let. l LEPM).

9) Les HUG se prévalent d’une possibilité de déléguer.

a. L’art. 11 LPAC prévoit la délégation, mais exclusivement pour l’engagement, la nomination de membres du personnel et la fixation de leur rétribution en application de la LTrait. Une sous-délégation de certaines de ces tâches est même possible, à certaines conditions (art. 11 al. 2 LPAC). Concernant les HUG, le conseil d’administration peut déléguer à la direction générale de l’établissement la compétence de procéder à l’engagement, à la nomination de membres du personnel et de fixer leur rétribution compte tenu des normes énoncées dans la LTrait. Le conseil d’administration peut autoriser la sous-délégation, en faveur des services de l’établissement, de la compétence de procéder à l’engagement de membres du personnel n’ayant pas la qualité de fonctionnaire et de fixer leur rétribution compte tenu des normes énoncées dans la LTrait (art. 11 al. 4 et 5 LPAC).

b. L’art. 17 LPAC traite de la fin des rapports de service. Cette disposition n’est pas pertinente dans le cas d’espèce puisque l’intéressé a fait l’objet d’une révocation, soit d’une sanction disciplinaire et non d’un licenciement au sens des art. 17 et suivants LPAC. Bien que non pertinent, l’art. 17 LPAC permet la comparaison et notamment de constater que, dans ce cas, le législateur a autorisé la délégation, voire la sous-délégation. En effet, en cas de fin de rapports de service, le conseil d’administration est l’autorité compétente pour prononcer la fin des rapports de service (art. 17 al. 1 LPAC). Il peut déléguer cette compétence à la direction générale de l’établissement (art. 17 al. 4 LPAC). Le conseil d’administration peut autoriser la sous-délégation de cette compétence en faveur des services de l’établissement pour les membres du personnel n’ayant pas la qualité de fonctionnaire (art. 17 al. 6 LPAC).

c. La LEPM prévoit que la révocation des employés principaux doit être approuvée par le Conseil d’État (art. 5 al. 4 LEPM ; art. 1 RCA avec un renvoi à 32 RSM). En l’espèce, le recourant est un fonctionnaire. À ce titre, il est soumis non pas à l’art. 5 al. 4 LEPM, pour lequel en tous les cas aucun accord du Conseil d’État ne ressort du dossier, mais à l’art. 7 al. 2 let. l LEPM qui prévoit expressément que le conseil d’administration a notamment pour attribution la révocation des fonctionnaires.

d. En l’espèce, la LPAC autorise, à certaines conditions, la délégation pour l’engagement, la nomination et la fixation du traitement (art. 11 LPAC). Elle l’autorise aussi en cas de résiliation des rapports de service (art. 17 LPAC).

Aucune délégation n’est toutefois prévue pour la révocation d’un fonctionnaire.

L’argument des HUG n’est pas fondé.

10) Les HUG se prévalent du RCA.

Dans son préambule, le RCA fait notamment référence au règlement des services médicaux du 23 juin 2011 (ci-après : RSM) lequel n’est toutefois pas pertinent en l’espèce, le recourant ne faisant pas partie du personnel médical.

Selon le RCA, sur délégation du conseil d’administration, le bureau du conseil d’administration est notamment compétent pour la fin des rapports de service et la révocation des fonctionnaires. Le RCA fait mention des art. 7 LEPM, 16 et 21 LPAC. Ledit bureau est aussi compétent, selon le RCA, en cas de sanction disciplinaire, pour le retour de statut d’employé en période probatoire (art. 16 LPAC).

En l’espèce, compte tenu du considérant qui précède, le conseil d’administration n’avait aucune compétence pour déléguer à une autre autorité que celle désignée par la loi, la possibilité de révoquer un fonctionnaire. Le règlement concerné est donc contraire à la loi sur ce point. Les HUG ne peuvent pas s’en prévaloir.

11) Les HUG se réfèrent à une jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 118 1a 245, p. 249 et 250, cité in Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2001, n. 499, parue in SJ 1993 p. 76) qui autoriserait la délégation du conseil d’administration à son bureau.

Cet arrêt traitant d’une délégation législative en matière cantonale est sans pertinence dans le cas d’espèce. L’arrêt rappelle que d’après le droit fédéral, la délégation de la compétence législative par le législateur cantonal à une autorité administrative est admissible, selon la jurisprudence, si elle n’est pas exclue selon le droit cantonal, si elle est limitée à un domaine précis et si la loi contient elle-même les principes de la règlementation pour autant qu’elle touche gravement la situation des citoyens. L’arrêt précise la condition selon laquelle la loi qui contient la délégation doit être soumise au référendum.

En l’espèce, le législateur cantonal a expressément prévu à l’art. 16 al. 1 let. c ch. 5° LPAC que la décision de révocation d’un fonctionnaire ne pouvait être prise que par le conseil d’administration, respectivement, pour les autres fonctionnaires par le Conseil d’État ou la commission de gestion du pouvoir judiciaire pour ce qui concerne les services centraux et les greffes dudit pouvoir. Une délégation est précisément exclue compte tenu du texte clair de loi. La jurisprudence précitée est sans pertinence dans le cas d’espèce.

Dans un arrêt du 26 février 2013, la chambre de céans avait admis le caractère obligatoire et l’opposabilité du règlement interne sur la protection de la personnalité des membres du personnel des HUG. Au contraire du présent cas, la chambre avait retenu que l’art. 2B al. 3 LPAC pouvait s’interpréter comme une délégation législative conférée au conseil d’administration des HUG pour son propre personnel (ATA/119/2013 du 26 février 2013). Dans le cas d’espèce, non seulement il n’existe pas de délégation législative, mais le législateur cantonal a expressément réglé la question.

Cet argument des HUG est infondé.

12) Les HUG invoquent la jurisprudence de la chambre de céans (ATA/238/2012 du 24 avril 2012 et ATA/258/2014 du 15 avril 2014).

Les deux arrêts cités par l’établissement se réfèrent à une seule et même affaire. Il ne ressort pas clairement des faits retenus dans les arrêts quelle autorité avait pris la décision. Selon l’ATA/238/2012, le bureau du conseil d’administration avait décidé de la révocation, mais les HUG avaient signifié par courrier la résiliation du contrat de travail pour un terme arrivant à échéance plus de trois mois après la correspondance, soit au 30 juin 2011. Les citations entre guillemets mettent précisément en avant l’ambigüité des termes, quand bien même il semble effectivement que la décision ait été prise en l’espèce par le bureau du conseil d’administration. Même à considérer que, dans l’affaire en question, tel ait été le cas et que personne, ni les parties, ni la chambre administrative ne l’aient à l’époque relevé, l’intimé ne peut en déduire un droit à appliquer l’art. 16 LPAC contrairement à son texte clair. De surcroît, l’ATA/238/2012 a été annulé, pour d’autres motifs, par l’arrêt du Tribunal fédéral du 28 juin 2013 (cause 8C_480/2012).

Cet argument est infondé.

13) En conséquence, la décision de révocation devait être prise par le conseil d’administration des HUG. Décidée par le seul bureau dudit conseil, la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente.

14) Il est des cas où les vices affectant une décision sont si graves et si évidents qu'ils empêchent celle-ci d'avoir une existence - et donc des effets - quelconques. La décision nulle est censée n'avoir jamais existé. L'écoulement des délais de recours non utilisés n'a aucun effet guérisseur. Une décision nulle n'a que l'apparence de la décision. La nullité renverse ainsi la présomption de validité des décisions formellement en force. La possibilité de la nullité d'une décision crée une grande insécurité juridique. La nullité ne peut être admise qu'exceptionnellement. Elle n'est reconnue que si le vice dont la décision est entachée est particulièrement grave, s'il est manifeste ou du moins facilement décelable, et si en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Ces conditions sont cumulatives et elles ont pour conséquence que la nullité n'est que très rarement admise. Par ailleurs, des vices de fond n'entraînent que très exceptionnellement la nullité d'une décision alors que de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée, fonctionnelle ou matérielle, de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 132 II 21 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_270/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1 ; ATA/107/2013 du 19 février 2013 consid. 7 ; ATA/773/2011 du 20 décembre 2011 consid. 2 et les références citées ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 908 ss). Enfin, la nullité d'une décision peut être constatée en tout temps et d'office par n'importe quelle autorité, y compris en instance de recours (ATF 136 II 415 consid. 1.2 ; 132 II 342 consid. 2.1).

En l’espèce, l’incompétence de l’autorité qui a pris une décision est un vice particulièrement grave au sens de la jurisprudence précitée et est un motif de nullité.

La constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. La situation prévalant jusqu’au 24 septembre 2014 et telle que fixée par l’ATA/506/2014 du 1er juillet 2014 perdure à ce jour, à savoir que le recourant est toujours fonctionnaire, suspendu, sans traitement, dans l’attente d’une décision.

La nullité de la décision querellée sera donc constatée. En cas de constat de nullité, le recours n'a pas ou plus d'objet, ce qui conduit en principe à son irrecevabilité (ATF 136 II 415 précité consid. 1.2 ; ATA/412/2013 du 2 juillet 2013).

Le recours sera dès lors déclaré irrecevable.

15) Étant donné cette issue, il n'est pas nécessaire de trancher les autres points de droit abordés tant par le recourant que par l’intimé.

16) Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Vu la nullité de la décision attaquée, une indemnité de procédure sera allouée au recourant à concurrence de CHF 1'000.-, à la charge des Hôpitaux universitaires de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

constate la nullité de la décision du 24 septembre 2014 des Hôpitaux universitaires de Genève prise le 22 septembre 2014 par le bureau du conseil d’administration des Hôpitaux universitaires de Genève ;

déclare irrecevable le recours interjeté le 27 octobre 2014 par Monsieur A______ contre la décision du 24 septembre 2014 des Hôpitaux universitaires de Genève ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue à Monsieur A______ une indemnité de CHF 1'000.-, à la charge des Hôpitaux universitaires de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt (la présente décision) et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Giuseppe Donatiello, avocat du recourant ainsi qu'à Me Pierre Martin-Achard, avocat des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :