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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3876/2013

ATA/258/2015 du 10.03.2015 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE ; RAPPORTS DE SERVICE ; PÉRIODE D'ESSAI ; RÉSILIATION ; LICENCIEMENT ADMINISTRATIF ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; PROPORTIONNALITÉ ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE
Normes : Cst.29; LPAC.5; LPAC.6; LPAC.17; LPAC.21; LPAC.22; RPAC.45; RPAC.47
Résumé : Rejet du recours de l'employée d'une institution publique contre la résiliation des rapports de service, intervenue durant la période probatoire. Si les éléments qui lui sont reprochés ne constituent pas, pris individuellement des fautes professionnelles graves, ils révèlent, pris dans leur ensemble, des manquements de nature à entamer le lien de confiance indispensable à la poursuite des relations de travail. La décision de licenciement ordinaire s'avère ainsi conforme au droit et n'apparaît ni disproportionnée, ni entachée d'arbitraire.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3876/2013-FPUBL ATA/258/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 mars 2015

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Christian Dandrès, avocat

contre

INSTITUTION GENEVOISE DE MAINTIEN À DOMICILE (IMAD)



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1965, a été engagée à plein temps dès le 1er septembre 2011, par la fondation des services d'aide et de soins à domicile, devenue depuis lors l'institution genevoise de maintien à domicile (ci-après : IMAD), en qualité d'infirmière diplômée au sein de l'unité d'accueil temporaire et de répit (ci-après : UATR).

2) Le 15 mai 2012, elle a déposé sa candidature pour un poste de suppléante responsable d'équipe ; celle-ci n'a toutefois pas été retenue.

3) Le 21 novembre 2012, l'intéressée a fait l'objet d'un entretien périodique d'évaluation et de développement des compétences (ci-après : l'entretien d'évaluation) portant sur la période du 1er septembre 2011 au jour de l'entretien ; il s'agissait de sa première évaluation, basée sur son cahier des charges.

Son travail a été globalement qualifié de bon. Elle était une excellente professionnelle et bénéficiait d'une longue expérience, en particulier dans le domaine de la gériatrie. C'était une collaboratrice précieuse, tant pour l'activité que pour l'équipe, au sein de laquelle son tempérament gai et dynamique faisait d'elle un élément moteur. Elle savait se positionner et faire valoir son point de vue. Diplomate et à l'écoute, elle était appréciée tant des clients que de leurs proches. Cela la portait naturellement et par goût à l'encadrement des stagiaires et élèves et, plus tard, à une orientation possible vers l'enseignement.

Les différents critères relatifs à son savoir-faire et son savoir-être ont par ailleurs tous été évalués comme points forts ou adéquats pour la fonction.

4) Le 27 février 2013, Mme A______ a adressé une lettre à sa responsable d'équipe. Après qu'elle eut constaté une erreur de dosage de médicaments commise le 13 février 2013 par l'une de ses collègues, cette dernière l'avait menacée à plusieurs reprises, faisait preuve de violences à son égard et cherchait à l'évincer.

Des entretiens ont eu lieu dans ce contexte les 14 février et 5 mars 2013.

5) Lors d'un entretien du 18 mars 2013, dont la teneur a été confirmée par courrier du 19 mars 2013, la direction des ressources humaines de l'IMAD a informé Mme A______ de ce qu'une enquête interne avait été ouverte à son encontre, suite à la plainte d'une cliente le 28 février 2013. Dans l'attente des résultats de ladite enquête, elle était provisoirement suspendue de toutes obligations de travail.

6) Le 19 mars 2013, elle a été convoquée à un entretien de service pour le 8 avril 2013, ayant pour objet les points suivants :

-       problèmes d'attitude et de comportement vis-à-vis des clients et des collègues  ;

-       les plaintes des clients à son encontre ;

-       sa responsabilité d'infirmière en lien avec la prise en charge clientèle ;

-       la cohérence dans les observations des dossiers clients ;

-       la cohérence dans l'analyse et le jugement clinique.

7) Le 17 avril 2013, la direction des ressources humaines a établi un compte-rendu faisant suite à cet entretien de service, lors duquel Mme A______ était accompagnée par une secrétaire syndicale.

L'enquête interne avait été menée par la responsable des pratiques professionnelles, ainsi que par la responsable d'équipe UATR. Les points énoncés dans la convocation avaient été repris durant l'entretien. Des dysfonctionnements importants avaient été constatés dans huit situations cliniques analysées, lesquelles lui avaient été exposées. En substance, il lui était reproché d'avoir adopté un comportement inapproprié lors de certains soins ou prestations, ainsi que d'avoir tenu des propos inopportuns à l'égard de clients, cas échéant de leurs proches. Des erreurs de traitement et d'administration avaient également été relevées.

À l'issue de l'entretien, l'intéressée avait fait part des difficultés qu'elle rencontrait en raison de la situation, ainsi que du sentiment d'injustice qu'elle ressentait. Elle avait demandé un second entretien de service afin de pouvoir compléter ses explications sur les cas évoqués, dès lors qu'elle n'avait pas été en mesure de se déterminer sur chacun d'entre eux. La responsable d'équipe UATR avait indiqué que la séance était destinée à lui exposer des situations préoccupantes et à l'entendre à leur sujet, sans qu'aucun jugement ne soit posé. Un second entretien allait être fixé.

8) Le 19 avril 2013, la direction des ressources humaines a donné suite au courrier de Mme A______ du 27 février 2013 et à l'entretien y relatif du 5 mars 2013, lors duquel la responsable d'équipe UATR lui avait demandé d'exposer les faits à l'origine du conflit avec sa collègue. Après s'être exprimée sur le contexte, elle avait indiqué bien s'entendre avec sa collègue, le comportement de celle-ci ayant changé après qu'elle fût devenue suppléante responsable d'équipe. Elle avait hésité à envoyer son courrier du 27 février 2013 car elle avait besoin de se protéger. Elle avait décliné la proposition de rencontre avec ses collègues qui lui avait été faite. Elle avait cependant rencontré individuellement certains de ses collègues et était à présent d'accord de procéder éventuellement à un tour de table, lequel serait organisé en cas de besoin.

9) Le 14 mai 2013, un compte-rendu a été établi, portant sur un second entretien de service ayant eu lieu le 6 mai 2013, après que les éléments des dossiers concernés eurent été mis à la disposition de l'intéressée, qui les a consultés le 2 mai 2013. Elle avait été à nouveau accompagnée d'une secrétaire syndicale. Les cas mentionnés lors du précédent entretien avaient été abordés et les explications de Mme A______ à leur sujet complétées.

Elle avait été avisée à l'issue de l'entretien que la libération de son obligation de travailler était maintenue. Consciente des difficultés qu'elle rencontrait, sa hiérarchie lui avait suggéré de rencontrer le service de santé et sécurité au travail. Un délai lui était accordé pour faire valoir ses observations.

10) Le 21 mai 2013, Mme A______ a repris et complété de manière détaillée ses explications concernant les huit cas cliniques ayant interpellé sa hiérarchie, au sujet desquels elle avait été convoquée.

Les conditions d'exercice de son droit d'être entendue n'avaient pas été pleinement respectées, dès lors que certains des faits sur lesquels elle avait été interrogée remontaient à l'année 2011 et portaient parfois sur des détails, de sorte qu'elle n'était pas en mesure de se souvenir de tout. Le nombre de faits qui lui étaient reprochés étaient par ailleurs trop élevé ; l'enquête avait mis en exergue des faits relatifs à huit clients, lesquels avaient parfois eu jusqu'à trois griefs, sans compter les propos relatés par des collègues. Elle n'avait enfin pas pu prendre connaissance du rapport d'enquête et n'avait ainsi pas pu se déterminer quant à son contenu, en particulier sur les éléments émanant de ses collègues.

La suspension de travail dont elle faisait l'objet était disproportionnée au regard des événements, ce d'autant que l'UATR n'était pas un domicile isolé ; le personnel y travaillait en équipe et les situations étaient traitées chaque jour en colloque.

Elle avait l'impression que les reproches qui lui étaient faits étaient une conséquence de sa lettre du 27 février 2013 dénonçant le comportement hostile d'une collègue à son égard. Elle se sentait accusée de tous les maux, y compris de fautes que d'autres avaient commises et qu'elle-même avait eu à relever. Elle avait tout d'abord été mutée dans une autre UATR suite à la plainte d'une cliente. Elle avait été convoquée de manière inattendue à l'entretien du 18 mars 2013, lors duquel il lui avait été notifié verbalement de rentrer chez elle, dans un état psychique lamentable, sans qu'elle ne soit orientée vers une quelconque aide, ni informée explicitement de la raison pour laquelle elle devait quitter immédiatement son travail. Elle ressentait cette mise à l'écart subite comme une punition injuste, alors qu'elle se vouait corps et âme à son travail.

11) La direction des ressources humaines a convoqué Mme A______ à un entretien le 24 juin 2013, afin de lui communiquer la position de l'IMAD.

Lors de cet entretien, un courrier intitulé « fin des relations de travail » lui a été remis en mains propres.

Au cours des entretiens de service des 8 avril et 6 mai 2013, huit situations cliniques lui avaient été exposées afin de l'entendre au sujet de sa pratique. Après qu'elle se fût exprimée par oral et par écrit, plusieurs dysfonctionnements avaient été constatés, en particulier :

-       des incohérences dans l'analyse et le jugement cliniques ;

-       des erreurs, des incohérences et des manques d'observations dans les dossiers clients ;

-       une inadéquation dans la prise en charge des clients en lien avec sa responsabilité d'infirmière.

Ces éléments étaient constitutifs de manquements professionnels et avaient fortement entamé le lien de confiance indispensable à la poursuite des rapports de travail, raison pour laquelle la direction des ressources humaines confirmait sa décision de mettre fin aux relations de travail avec effet au 30 septembre 2013. Elle était libérée de son obligation de travailler jusqu'à cette échéance. Le service de santé et sécurité au travail se tenait à sa disposition en cas de besoin. Cette décision était exécutoire nonobstant recours.

12) Le 2 juillet 2013, Mme A______ a informé l'IMAD de ce qu'elle se trouvait en incapacité totale de travailler depuis le 10 mai 2013 pour une durée indéterminée ; elle avait été hospitalisée le 24 juin 2013, jour de son licenciement. Elle était ainsi au bénéfice d'un certificat médical à cette date, de sorte que la résiliation des rapports de travail avait eu lieu en temps inopportun et devait être annulée.

Elle avait été suspendue de ses fonctions durant trois mois avant de connaître l'issue de l'enquête dont elle avait fait l'objet, période durant laquelle sa santé s'était rapidement détériorée. L'infirmière du service de santé de l'IMAD lui avait déconseillé de se mettre en arrêt maladie, dès lors qu'elle ne travaillait déjà plus, étant suspendue.

Elle s'était présentée à l'entretien du 24 juin 2013 persuadée qu'une discussion allait avoir lieu au sujet des conditions de reprise de son travail et du lieu. C'était pour cette raison que son médecin l'avait autorisée à s'y rendre. Elle ne s'était pas du tout attendue à se voir notifier son licenciement et celui-ci lui avait causé un tel choc qu'elle s'était effondrée à la sortie de l'entretien et avait dû être admise aux urgences.

13) Le 4 juillet 2013, la direction des ressources humaines a considéré que le licenciement intervenu le 24 juin 2013 était nul de plein droit et réputé n'avoir jamais eu lieu, dès lors que l'intéressée se trouvait en incapacité de travailler à cette date. La procédure allait néanmoins se poursuivre dès la fin du délai de protection.

Contrairement à ce qu'alléguait Mme A______, l'infirmière du service santé s'était préoccupée de son aptitude ou non au travail et l'avait invitée à produire un certificat médical si son médecin-traitant la jugeait inapte. Or, l'IMAD n'était en possession d'aucune attestation pour la période de suspension de l'obligation de travailler.

14) Le 9 août 2013, l'IMAD a informé Mme A______ que la direction générale avait décidé de prolonger sa période probatoire d'une année à compter du 1er septembre 2013. Sa nomination en qualité de fonctionnaire était ainsi reportée, dès lors que ses prestations avaient été jugées insuffisantes, vu les courriers des 17 avril et 14 mai 2013.

15) Par décision du 29 octobre 2013, exécutoire nonobstant recours, l'IMAD a mis fin aux relations de travail avec effet au 28 février 2014, le délai de protection de nonante jours étant échu, pour les motifs indiqués dans le courrier du 24 juin 2013 dont une copie était annexée. Mme A______ était libérée de l'obligation de travailler jusqu'à l'échéance du délai de congé. Le service santé et sécurité au travail se tenait à sa disposition en cas de besoin.

16) Par acte du 2 décembre 2013, Mme A______ a recouru contre la décision précitée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), sous la plume d'un avocat, concluant préalablement à la production de son courrier du 27 février 2013 et principalement au constat de la nullité de la décision litigieuse. Elle concluait subsidiairement à son annulation, cas échéant au constat de son caractère illégal et au paiement d'une indemnité équivalant à six mois de traitement.

Dans son courrier du 19 avril 2013, faisant suite à celui de l'intéressée du 27 février 2013, l'IMAD ne s'était pas positionnée quant au contenu de cette missive et n'avait pas mentionné la suite qu'elle entendait y donner. C'était toutefois à partir de cette période que ses ennuis avaient commencé, alors que son entretien d'évaluation quelques mois plus tôt témoignait de ses qualités personnelles et professionnelles.

La nature et la portée des reproches qui lui avaient été faits dès le mois de mars 2013 concernant les prestations dispensées à huit patients n'étaient pas compréhensibles et semblaient refléter une volonté de « monter en épingle » des situations objectivement non problématiques. Elle s'était par exemple vue reprocher de ne pas avoir servi le thé au visiteur d'une cliente, alors que l'IMAD exigeait de ses collaborateurs qu'ils ne le fassent pas. Les griefs à son encontre avaient par ailleurs été étendus entre les entretiens de service des 8 avril et 6 mai 2013. À l'issue de ce dernier entretien, sa suspension avait été maintenue, bien que l'enquête dont elle faisait l'objet fût achevée. Lors de l'entretien du 24 juin 2013, l'IMAD avait maintenu l'intégralité de ses reproches à son égard, sans indiquer dans quelle mesure elle avait pris en considération ses explications. Son attention n'avait jamais été attirée sur l'éventualité d'un licenciement avant que la lettre du 24 juin 2013 ne lui soit remise en mains propres.

Cette décision de résiliation des rapports de service était nulle, dans la mesure où, conformément à la loi applicable contenant une clause de délégation, elle ne pouvait être prise par le directeur des ressources humaines et la directrice des prestations, mais devait l'être par la direction générale de l'intimée. Une sous-délégation en faveur d'un service de l'institution, en l'occurrence la direction des ressources humaines, n'était pas autorisée.

Au surplus, les règles sur la suspension des agents publics avaient été violées, dès lors que celles-ci ne prévoyaient comme seul motif de suspension que l'attente du résultat d'une enquête administrative. Or, elle avait été suspendue durant plusieurs mois alors qu'aucune enquête administrative n'avait été diligentée, l'enquête interne dont elle avait fait l'objet ne pouvant être considérée comme telle. Sa suspension ne lui avait pas été formellement notifiée et avait été maintenue après que le résultat de l'enquête interne lui ait été communiqué, alors que les conclusions ne permettaient pas de considérer qu'elle avait commis une faute grave ou qu'elle représentait une menace pour la santé de ses patients et de ses collègues, ni pour les missions essentielles du service public. Enfin, les personnes ayant décidé de cette mesure, à savoir la responsable des UATR et celle des ressources humaines, n'étaient pas compétentes d'un point de vue juridique.

Aucun motif fondé et objectif ne justifiait son licenciement, y compris en période probatoire. Les griefs mentionnés lors du premier entretien de service étaient vagues et ne permettaient pas de motiver la résiliation des rapports de travail. Ils avaient de plus varié lors du second entretien de service. L'intimée avait soulevé des faits antérieurs à l'entretien d'évaluation du 21 novembre 2012 et qui n'avaient pas été abordés à cette occasion. Les situations qui lui avaient été exposées lors des entretiens de service étaient insuffisamment étayées ; l'IMAD avait notamment reproché à la recourante une situation dont elle n'était pas responsable, ce qu'elle ne pouvait ignorer puisque cette dernière l'avait dénoncée dans son courrier du 27 février 2013 et abordée lors de l'entretien du 5 mars 2013. La décision de licenciement était ainsi dépourvue de bonne foi et entachée d'arbitraire. Tant la méthode utilisée par l'IMAD, que son résultat apparaissaient choquants. Enfin, l'intimée avait mentionné, dans son courrier du 24 juin 2013, des manquements de nature à entamer le lien de confiance indispensable à la poursuite des rapports de travail, tandis qu'elle avait indiqué, dans son courrier du 9 août 2013, que le report de la nomination était dû à des prestations insuffisantes, lesquelles n'avaient au demeurant pas été mentionnées lors des entretiens de service. Sa situation professionnelle ne pouvait pas s'être dégradée en quatre mois, depuis son entretien d'évaluation, à tel point que sa suspension puis son licenciement se justifiaient.

L'IMAD avait pris des mesures radicales, telles que la suspension et la résiliation des rapports de travail, sans attendre l'issue de la prolongation de la période probatoire qui avait été décidée par la direction générale. Même à considérer que les reproches faits à Mme A______ étaient fondés, elle aurait pu mettre à profit ce délai de douze mois pour remplir les exigences de sa fonction ; il aurait été nécessaire de lui donner la possibilité de se ressaisir, ce d'autant que les prétendus dysfonctionnements n'avaient duré que quatre mois.

Enfin, son droit d'être entendue n'avait pas été respecté. Elle avait rencontré des difficultés à faire valoir son point de vue. De nombreuses situations dont elle n'avait pas connaissance lui avaient été soumises lors du premier entretien de service, de sorte qu'il avait fallu organiser un second entretien afin de lui permettre de se déterminer en toute conscience. Or, elle n'avait pas pu consulter l'enquête interne lors de ce second entretien, alors que l'essentiel des griefs reposait sur les résultats de celle-ci. L'IMAD n'avait en outre pas tenu compte de ses explications avant de rendre sa décision et n'avait pas jugé utile de discuter avec elle de ses arguments pertinents énoncés tant oralement que par écrit. L'éventualité d'une résiliation des rapports de service n'avait par ailleurs jamais été évoquée avant la lettre du 24 juin 2013, de sorte que la recourante n'avait pas été en mesure de se prononcer sur les conséquences des dysfonctionnements qui lui étaient reprochés.

17) Le 23 janvier 2014, l'IMAD a conclu au rejet du recours.

L'incident ayant opposé la recourante à l'une de ses collègues avait été clos par l'entretien du 5 mars 2013 à ce sujet, l'intéressée ayant décliné la proposition d'une rencontre avec ses collègues.

Le matin du 26 février 2013, une cliente avait été retrouvée prostrée dans son lit, se plaignant de la manière dont l'avait traitée l'infirmière de nuit, soit Mme A______. La plainte de cette cliente n'avait pas été récoltée par la collègue avec laquelle elle était en froid, mais par d'autres membres du personnel présents ce jour-là. C'était suite à cet événement que la hiérarchie l'avait convoquée le 18 mars 2013 et informée qu'elle était dispensée de son obligation de travailler - salaire maintenu - jusqu'à l'issue de l'enquête interne.

Les dysfonctionnements relevés dans huit situations et exposés au cours des entretiens de service l'avaient été de manière factuelle et objective. Le fait que son entretien d'évaluation ait eu lieu quatre mois auparavant n'était pas pertinent. Elle avait pu s'exprimer à chaque étape de la procédure sur toutes les situations présentées et la décision de résiliation des rapports de travail avait été rendue après examen de la totalité du dossier, y compris de ses observations.

L'autorité ayant rendu la décision attaquée était compétente. Par décision du 5 novembre 2012 dont copie était jointe, le conseil d'administration de l'IMAD avait, comme le permettait la loi, délégué à la direction générale l'engagement, la nomination ou son report, ainsi que la résiliation des rapports de travail des membres du personnel. Cette même décision autorisait la sous-délégation, en faveur des services de l'institution, de la compétence de procéder à l'engagement et à la résiliation des rapports de travail des membres du personnel n'ayant pas la qualité de fonctionnaire. Par décision du 17 décembre 2012, le conseil d'administration avait validé le document intitulé « compétences et signatures », indiquant notamment que la direction des ressources humaines était compétente pour résilier les rapports de travail d'un collaborateur non fonctionnaire. L'organisation et la gouvernance de l'IMAD étaient conformes aux législations applicables.

La suspension de l'obligation de travailler de la recourante, se trouvant toujours en période probatoire, avait été décidée dans le but de préserver les intérêts des clients de l'IMAD, compte tenu des événements à l'origine de cette décision. Il en allait de la réputation de l'institution auprès de ses clients et de la sécurité de ces derniers, ce d'autant plus que le domaine d'intervention à domicile et des UATR était particulier, le personnel agissant souvent, voire exclusivement seul. Le fait de dénier à l'employeur la possibilité de libérer son employé de l'obligation de travailler dans une telle situation apparaissait sans fondement. Les règles concernant la suspension des agents publics et l'enquête administrative s'appliquaient aux fonctionnaires et non aux employés se trouvant en période probatoire. Il avait par ailleurs été proposé à l'intéressée de prendre contact avec le service de santé du personnel durant sa suspension.

Son droit d'être entendue avait été respecté, dès lors que deux entretiens de service avaient été organisés et qu'elle avait eu accès aux dossiers des clients à l'égard desquels des dysfonctionnements avaient été constatés. Elle avait ainsi pu se déterminer à chaque étape de la procédure et sur toutes les situations soulevant une problématique de prise en charge et/ou de suivi. La première plainte d'une cliente avait alerté la hiérarchie qui avait procédé à un passage en revue des dossiers et situations dans lesquels Mme A______ était intervenue. Toutes les situations posant problèmes lui avaient été soumises lors des divers entretiens. Les observations qu'elle avait formulées à la suite des comptes rendus d'entretien faisaient partie intégrante du dossier, mais n'avaient pas à être discutées, infirmées ou intégrées dans lesdits comptes rendus.

La problématique relationnelle entre la recourante et sa collègue avait fait l'objet d'un traitement distinct et n'avait aucun lien avec les manquements professionnels ayant abouti à la décision de licenciement. Les comptes rendus d'entretien détaillaient de manière exhaustive les manquements reprochés dans les différentes situations et dans les dossiers clients concernés. Les incohérences dans l'analyse et le jugement clinique, ainsi que les erreurs et déficiences des observations mentionnées dans les dossiers mettaient en évidence son manque de rigueur et de professionnalisme dans la gestion de telles situations, que l'IMAD ne pouvait tolérer. Sa tendance à banaliser les erreurs commises n'était pas de nature à rassurer l'employeur, bien au contraire. C'est pourquoi les manquements mis en évidence au cours de la procédure avaient sérieusement entamé la confiance nécessaire à la poursuite des relations de travail dans un domaine où le rôle de l'infirmière et sa rigueur professionnelle sont primordiaux et où l'exactitude du contenu des dossiers est indispensable pour le suivi du client par l'ensemble des professionnels appelés à intervenir. La décision de licenciement était par conséquent justifiée et ne pouvait être qualifiée d'arbitraire. La poursuite des rapports de travail durant la prolongation de la période probatoire ne pouvait pas être envisagée compte tenu des manquements constatés, de leur importance et de la spécificité du travail en UATR ou à domicile. Néanmoins, dans l'hypothèse où l'IMAD aurait failli dans le cadre du licenciement, l'indemnité sollicitée par la recourante était disproportionnée.

18) Le 3 juin 2014, Mme A______ a sollicité des mesures d'instruction, en particulier son audition, l'audition des membres du personnel ayant récolté la plainte de la cliente au matin du 26 février 2013, celle de quatre anciens collègues pouvant confirmer qu'elle effectuait son travail de manière satisfaisante, comme l'attestait d'ailleurs le certificat de travail qui lui avait été adressé, dont une copie était jointe, ainsi que celle de son médecin pouvant confirmer qu'elle avait été affectée par la manière dont son employeur l'avait traitée.

19) Le 25 août 2014, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

Mme A______ a confirmé les termes de son recours et maintenu sa position quant à la question de la compétence, car la loi ne contenait pas de clauses autorisant la sous-délégation. Elle ne travaillait pas et percevait le chômage en France ; elle avait toutefois effectué quelques missions temporaires dans sa profession. Elle ne s'expliquait pas les plaintes émanant de la cliente au matin du 26 février 2013, dans la mesure où elle s'en était occupée de manière normale. Elle avait été suspendue quinze jours plus tard, avait été convoquée à un premier entretien de service lors duquel d'autres reproches lui avaient été faits, sur lesquels elle avait pu s'exprimer dans un second temps. Elle contestait ces griefs. Elle estimait avoir correctement retranscrit les éléments qui étaient ressortis des colloques avec ses collègues. Elle avait été extrêmement déstabilisée par l'annonce de son licenciement, auquel elle ne s'attendait pas et suite auquel elle avait été hospitalisée dix jours. La fin des rapports de travail n'avait pas été évoquée lors des entretiens antérieurs. Cet événement avait eu des répercussions non seulement pour elle-même, mais également pour son mari et ses enfants ; sa fille se trouvait avec elle lorsqu'elle avait été licenciée puis transportée à l'hôpital.

Les représentantes de l'IMAD ont persisté dans leurs écritures, en particulier sur le point de la compétence. L'institution avait une directive précise réglant l'intervention en cas de suspicion de maltraitance, laquelle avait été suivie de près dans ce dossier. Dans le cadre des investigations, le service des pratiques professionnelles avait relevé plusieurs éléments posant problèmes, lesquels avaient été traités lors des entretiens de service et avaient conduit au licenciement. Celui-ci avait été annoncé lors du troisième entretien de service. L'IMAD était attentive à l'accompagnement du personnel dans un tel moment, notamment en demandant à son service de santé d'être disponible. En l'occurrence, la représentante syndicale qui accompagnait la recourante avait explosé et abruptement interrompu l'entretien, empêchant son accompagnement, ce qui était regrettable.

La chambre administrative déciderait des suites de la procédure lorsqu'elle serait en possession des pièces permettant de documenter les reproches faits à la recourante.

20) Le 15 septembre 2014, l'IMAD a transmis d'une part la directive relative au traitement des situations de suspicion et/ou maltraitance de la personne âgée et, d'autre part, les dossiers des cinq situations cliniques dans lesquelles des annotations figuraient. Elle a également communiqué le nom de l'infirmière qui avait retrouvé la cliente prostrée et en pleurs dans son lit au matin du 26 février 2013, ainsi que de celle à qui la situation avait été rapportée.

21) Le 3 novembre 2014, Mme A______ a relevé que, dans la mesure où l'IMAD n'avait pas communiqué les documents relatifs à la première cliente à s'être plainte et dont elle s'était servie comme prétexte pour la suspendre, ce grief devait être écarté. Le contenu de la directive produite mettait en évidence le fait que l'IMAD n'avait pas respecté ses propres règles dans le traitement de la plainte de cette cliente. La procédure décrite n'avait pas été suivie, dès lors que le dossier ne contenait aucune trace de l'enquête interne ou d'une évaluation sérieuse des prétendues plaintes.

Il ressortait en outre des documents produits que ses notes retranscrivaient fidèlement le suivi de ses patients et qu'elle en informait dûment ses collègues. Le passage en revue du document contenant les notes des soignants sur le suivi des patients (CARDEX) ne permettait pas de retenir un quelconque manquement, ni une manière de procéder critiquable. Pour chacune des situations décrites, ses observations et actions étaient justifiées. Le terme « recadrer » qu'elle avait utilisé concernant certains patients, ne pouvait être considéré comme un manquement à ses devoirs, dans la mesure où cela signifiait que le soignant veillait à clarifier, préciser, définir le cadre de son action lorsque le patient percevait mal sa situation et celle de l'équipe de soins. Ses collègues utilisaient également ce terme, sans qu'il n'y soit vu le reflet d'un comportement inadapté vis-à-vis des clients.

Elle n'avait pas commis d'infraction à ses devoirs de service qui aurait pu justifier son licenciement. Elle ne représentait pas une menace pour les clients ; l'IMAD avait d'ailleurs attendu presque vingt jours entre le 26 février 2013, date de la prétendue plainte de la cliente, et le prononcé de sa suspension.

Elle a au surplus persisté dans ses arguments s'agissant de la violation du droit d'être entendu et de la compétence de l'autorité ayant rendu la décision de licenciement et requis l'audition de quatre personnes.

22) Le 6 novembre 2014, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 31 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 - LPAC - B 5 05 ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. La recourante sollicite diverses mesures d'instructions, en particulier l'audition de plusieurs témoins, anciens collègues ou médecins, en vue d'attester qu'elle avait effectué son travail de manière satisfaisante et qu'elle avait été très affectée par son licenciement, cas échéant de compléter les explications qu'elle avait apportées s'agissant des situations cliniques problématiques qui lui avaient été soumises.

b. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 127 I 54 consid. 2b p. 56 ; 127 III 576 consid. 2c p. 578 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C.424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C.58/2010 du 19 mai 2010 consid. 4.3 ; 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 et les arrêts cités ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 2b). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 133 II 235 consid 5.2 p. 248 ; 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C.424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; 2C.514/2009 du 25 mars 2010 consid. 3.1).

c. En l'espèce, la chambre de céans renoncera à procéder aux actes d'instruction sollicités, notamment l'audition de plusieurs témoins, dans la mesure où ils ne sont pas de nature à influer sur l'issue du litige et où elle dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer en connaissance de cause.

3) La recourante est soumise à la LPAC, ainsi qu'au règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), applicables par renvoi de l'art. 22 de la loi sur l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile du 18 mars 2011 (LIMAD - K 1 07).

Engagée dès le 1er septembre 2011 en qualité d'infirmière au sein de l'intimée et ayant vu sa nomination reportée d'une année à compter du 1er septembre 2013, elle avait le statut d'employée et se trouvait en période probatoire au moment de la résiliation des rapports de service le 29 octobre 2013 (art. 5 et 6 LPAC ; art 45 al. 1 let a a contrario et 47 al. 1 RPAC).

4) a. Dans un grief d'ordre formel, la recourante conclut préalablement au constat de la nullité de la décision litigieuse, laquelle aurait été rendue par une autorité ne disposant pas de la compétence requise.

b. À teneur de l'art. 17 LPAC, le conseil d’administration peut déléguer la compétence de prononcer la fin des rapports de service à la direction générale de l’établissement (al. 4) et peut autoriser la sous-délégation de cette compétence en faveur des services de l’établissement pour les membres du personnel n’ayant pas la qualité de fonctionnaire (al. 6).

Par décisions des 5 novembre et 17 décembre 2012, le conseil d'administration de l'intimée a autorisé la sous-délégation, en faveur des services de l'institution, en particulier à la direction des ressources humaines, de la compétence de procéder à l'engagement et à la résiliation des rapports de travail des membres du personnel n'ayant pas la qualité de fonctionnaire.

c. En l'espèce, la décision litigieuse a été rendue par la direction des ressources humaines de l'intimée et signée par la directrice des prestations et le directeur des ressources humaines. Elle est ainsi conforme aux dispositions précitées, de sorte que ce grief sera écarté.

5) La recourante conteste les reproches de l'intimée et soutient que la décision attaquée aurait été rendue en violation des règles sur la suspension des agents publics, en l'absence de motifs justifiant son licenciement, ainsi qu'en violation des principes de la proportionnalité et d'interdiction de l'arbitraire, ainsi que du droit d'être entendu.

6) a. À teneur de l'art art. 21 al. 1 LPAC, pendant le temps d’essai et la période probatoire, chacune des parties peut mettre fin aux rapports de service ; le membre du personnel n’ayant pas qualité de fonctionnaire est entendu par l’autorité compétente ; il peut demander que le motif de résiliation lui soit communiqué. Selon l’art. 20 al. 3 LPAC, lorsque les rapports de service ont duré plus d’une année, le délai de résiliation est de trois mois pour la fin d’un mois.

b. Les membres du personnel de l'État sont néanmoins protégés contre les risques d’une résiliation en temps inopportun des rapports de service, les dispositions du code des obligations étant applicables par analogie (art. 44A RPAC).

L’art. 336c al. 1 let. b de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220) prévoit qu’après le temps d’essai, l’employeur ne peut pas résilier le contrat pendant une incapacité de travail totale ou partielle résultant d’une maladie ou d’un accident non imputables à la faute du travailleur, et cela, durant trente jours au cours de la première année de service, durant nonante jours de la deuxième à la cinquième année de service et durant cent quatre-vingt jours à partir de la sixième année de service.

En l'espèce, la recourante se trouvait en incapacité de travail avec effet au 10 mai 2013 lorsque la première décision de licenciement du 24 juin 2013 est intervenue, ce dont elle a avisé l'intimée le 2 juillet 2013. Cette dernière l'a toutefois déclarée nulle de plein droit et a attendu l'issue de la période de protection de nonante jours avant de lui notifier une seconde décision de fin des rapports de travail le 29 octobre 2013. Le délai de résiliation du contrat de travail a, par conséquent, été respecté.

c. La loi ne prévoit pas d’autres conditions pour le licenciement d’employés, alors que les fonctionnaires ne peuvent être licenciés qu’en présence d’un motif objectivement fondé, dûment constaté, démontrant que la poursuite des rapports de service est rendue difficile en raison de l’insuffisance des prestations, du manquement grave ou répété aux devoirs de service ou de l’inaptitude à remplir les exigences du poste (art. 22 LPAC). Durant la période probatoire, l’administration dispose ainsi d’un très large pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité de la poursuite des rapports de service. Elle reste néanmoins tenue au respect des principes et droits constitutionnels, notamment la légalité, la proportionnalité, l’interdiction de l’arbitraire et le droit d’être entendu (ATA/96/2014 du 18 février 2014 ; ATA/214/2013 du 9 avril 2013 ; ATA/50/2013 du 29 janvier 2013 et les références citées).

d. Selon l'art. 61 LPA, le pouvoir d’examen de la chambre administrative se limite à la violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (al. 1 let. a). Elle ne peut ainsi pas revoir l'opportunité de la décision litigieuse (al. 2).

7) a. Selon l'art. 28 LPAC, dans le cadre d'une procédure pour sanctions disciplinaires, le membre du personnel auquel il est reproché une faute de nature à compromettre la confiance ou l'autorité qu'implique l'exercice de sa fonction peut être suspendu à titre provisionnel et sans délai, avec ou sans traitement, dans l'attente du résultat d'une enquête administrative ou d'une information pénale.

L'intimée dispose de directives internes, produites dans le cadre de la présente procédure, faisant état de la marche à suivre dans le traitement de suspicion et/ou de maltraitance de la personne âgée. Il ressort notamment de ces directives qu'en cas de suspicion de maltraitance, l'intimée doit analyser la situation afin de définir le problème sous forme d'éléments objectivables et d'en déterminer le degré de gravité et d'urgence. Elle doit notamment rencontrer le soignant concerné et réfléchir aux stratégies de prévention à mettre en place.

b. Une décision est arbitraire lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. À cet égard, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 128 I 177 consid. 2.1 p. 182 ; arrêt du Tribunal fédéral 4P.149/2000 du 2 avril 2001 consid. 2 et les arrêts cités ; ATA/171/2015 du 17 février 2015 consid. 9c ; ATA/633/2014 du 19 août 2014 consid. 6d ; ATA/439/2014 du 17 juin 2014 consid. 6d ; ATA/126/2007 du 20 mars 2007 consid. 9a).

c. Le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c p. 222 et les références citées).

Traditionnellement, le principe de la proportionnalité se compose des règles d’aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, l’on choisisse celui qui porte l’atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 p. 482 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 11).

8) En l'espèce, le litige ne s'inscrit pas dans le contexte d'une procédure pour sanction disciplinaire au sens des art. 27 ss LPAC, mais dans celui du licenciement ordinaire d'une employée, non fonctionnaire, au sens de l'art. 21 al. 1 LPAC. Les dispositions précitées concernant une enquête administrative, cas échéant une suspension, ne sont dès lors pas applicables. L'intimée s'est néanmoins conformée à ses directives internes suite à la plainte d'une cliente à l'encontre de la recourante le 26 février 2013. En effet, soupçonnant d'éventuelles maltraitances, elle a dans un premier temps observé la situation, puis a convoqué l'intéressée le 18 mars 2013 pour lui faire part de ses préoccupations. Elle l'a informée de ce qu'une enquête interne était ouverte en vue d'éclaircir les faits de manière objective et l'a, dans cette attente, suspendue de son obligation de travailler, tout en maintenant son traitement. Au vu du domaine particulier qu'est celui des soins à domicile ou en UATR, le personnel travaillant le plus souvent seul et de manière autonome auprès de personnes dont la santé et la sécurité doivent être assurées, ainsi que de la nature des éléments relevés sur lesquels était fondée l'enquête, l'intimée n'avait d'autre choix que de suspendre à titre préventif la recourante en attendant d'avoir une vision complète de la situation.

Par ailleurs, il ressort du dossier que, tout au long de la procédure, que ce soit oralement au cours des entretiens de service ou par écrit entre chacune des rencontres avec sa hiérarchie, la recourante a eu largement l'occasion de se déterminer et s'est abondamment exprimée au sujet de chacune des situations qui lui ont été soumises et des autres problématiques soulevées, conformément à l'art. 21 al. 1 LPAC et aux dispositions générales de la LPA. Elle a en outre pu accéder sans obstacles aux documents pertinents de son dossier et de ceux des clients mentionnés au cours de l'enquête. Lorsqu'elle a indiqué lors du premier entretien de service qu'elle n'était pas en mesure de se prononcer sur des cas dont elle n'avait pas pu prendre connaissance, l'intimée a organisé un second entretien de service afin d'y remédier. Il n'apparaît pas que cette dernière n'aurait aucunement tenu compte des explications fournies par l'intéressée à chaque étape de la procédure. Il ne peut en revanche pas être fait grief à l'intimée de ne pas avoir transmis l'enquête interne à la recourante, dès lors que cette enquête, qui a consisté en un examen approfondi des prestations professionnelles de l'intéressée, ne s'est vraisemblablement pas soldée sur un rapport formellement établi et que ses résultats ont été dûment et régulièrement exposés à la recourante au cours des entretiens de service. Enfin, elle ne peut se prévaloir de n'avoir pas été formellement avertie que le dernier entretien du 24 juin 2013 allait porter sur la résiliation des rapports de travail dans la mesure où, au vu de la situation au cours des mois précédents, en particulier la tenue de deux entretiens de service et le fait qu’elle était suspendue, elle pouvait s'attendre à ce que la discussion porte sur un éventuel licenciement.

La recourante conteste les faits que lui a reprochés l'intimée au cours de la procédure ayant conduit à son licenciement et considère, en tout état, que les éléments mentionnés ne permettaient pas de justifier la résiliation des rapports de service. Il convient néanmoins de relever que, si l'enquête interne n'a pas permis de démontrer des maltraitances au sens strict du terme, elle a mis en lumière plusieurs dysfonctionnements, à savoir des incohérences dans l'analyse et le jugement clinique, des erreurs, des incohérences et des manques d'observations dans les dossiers des clients, ainsi qu'une inadéquation dans la prise en charge des clients en lien avec sa responsabilité d'infirmière. Certes, les éléments qui lui sont reprochés ne constituent pas, pris individuellement, des fautes professionnelles pouvant être qualifiées de graves. Toutefois, pris dans leur ensemble, les griefs formulés à son égard reflètent une imprécision globale dans sa manière de travailler, ainsi qu'une gestion approximative de ses dossiers. L'intimée, ayant fait usage de son large pouvoir d'appréciation en la matière, était par conséquent fondée à considérer que de tels manquements professionnels étaient de nature à entamer le lien de confiance indispensable à la poursuite de la relation de travail. Cela se justifie d'autant plus que, compte tenu du contexte particulier dans lequel évoluent les soignants au sein de l'intimée, cette dernière se doit de pouvoir compter sur un personnel particulièrement fiable. Dans ces conditions, le fait que la première évaluation de la recourante ait été positive n'est pas susceptible de modifier la décision de l'intimée.

Au surplus, aucun élément objectif du dossier ne permet d'établir un lien entre le différend ayant opposé la recourante à l'une de ses collègues et les événements ayant alerté sa hiérarchie et déclenché la procédure ayant conduit au licenciement.

Partant, bien que la chambre de céans n'entende pas minimiser les conséquences qu'ont pu avoir, sur la recourante et son entourage, les évènements auxquels elle a été confrontée, qu'il s'agisse de sa suspension, de son licenciement, ou de la période entre les deux, il s'avère que la décision de résiliation des rapports de service est conforme au droit et n'apparaît pas disproportionnée, ni entachée d'arbitraire.

9) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1’000.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée.

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 décembre 2013 par Madame A______ contre la décision de l'institution genevoise de maintien à domicile (IMAD) du 29 octobre 2013 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1’000.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'aucune indemnité de procédure ne sera allouée ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par
les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Dandrès, avocat de la recourante ainsi qu'à l'institution genevoise de maintien à domicile (IMAD).

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Junod et Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges, M. Schifferli, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :