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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1732/2021

ATA/1280/2021 du 23.11.2021 ( TAXIS ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1732/2021-TAXIS ATA/1280/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 novembre 2021

2ème section

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Sandy Zaech, avocate

contre

AÉROPORT INTERNATIONAL DE GENÈVE

 



EN FAIT

1) M. A______ exerce la profession de chauffeur de taxi et conduit un véhicule immatriculé GE 1_____.

2) Il avait obtenu le 15 septembre 2017 de l’Aéroport international de Genève
(ci-après : AIG) une carte n° 2_____ lui donnant accès aux zones réservées aux taxis et VTC dans les zones de prise en charge sur les parkings de l’AIG.

Il s’était engagé à cet effet à respecter le règlement sur les conditions d’accès au périmètre de l’AIG du 20 juin 2017 (ci-après : RCAP-AIG) et avait pris connaissance du fonctionnement des zones réservées.

3) Le 12 décembre 2019, à l’occasion d’un constat d’infraction de stationnement dans la zone de dépose professionnelle, l’AIG a rappelé à M. A______ l’obligation de se conformer au RCAP-AIG et a renoncé à toute poursuite.

4) Il ressort d’un constat d’infraction au RCAP-AIG établi le 3 août 2020 par M. B_____, agent de sécurité assermenté sous le matricule
C_____, au service de la société D_____ AG, mandatée par l’AIG pour la surveillance de ses parkings, que le même jour, à 19h30, en tête de la zone de prise en charge des taxis à l’arrivée, un groupe de touristes lui avait demandé de chercher un taxi pouvant prendre en charge huit personnes et leurs bagages.

Il leur avait indiqué un chauffeur, qui leur avait proposé un prix de CHF 600.-. Les touristes avaient ensuite approché M. A______, dont le véhicule ne pouvait accueillir huit passagers, qui leur avait montré le tarif officiel de CHF 750.-. Entendant la conversation, M. B_____ avait indiqué aux touristes que le chauffeur précédent leur avait offert une réduction.

M. A______ s’était alors énervé et lui avait crié « Tu te tais, tu n’as pas à discuter les prix ». « C’est pas la première fois, ferme ta gueule ». Il lui avait demandé de baisser le ton, sans quoi il ferait l’objet d’un constat d’infraction et partirait « à vide ». M. A______ s’était énervé de plus belle et lui avait dit « Tu n’es personne pour me dire que je dois partir ! ». Il lui avait répondu qu’il était « en défaut de courtoisie clairement caractérisé », qu’il allait lui demander son badge d’accès, qu’il ne chargerait pas de clients et qu’il partirait « à vide ». Le chauffeur avait alors commencé à l’insulter, lui disant « Ta gueule connard, je pars pas, j’appelle les flics. Tu n’as pas le droit de faire ça gros con ». Le chauffeur avait appelé la police et était remonté dans son taxi. Il ne lui avait plus parlé mais était resté à proximité du véhicule.

Comme le chauffeur s’adressait à nouveau à lui, il lui avait répondu qu’il ne lui parlerait pas dans l’attente de la police, sur quoi celui-ci lui avait dit « Oui la police arrive et c’est toi connard qui vas dégager ».

La patrouille de police était arrivée, mais avait aussitôt dû repartir pour une urgence. Il avait eu le temps d’indiquer aux policiers que tout serait écrit sous forme de rapport. Il était allé à la guérite rédiger le constat d’infraction, puis était ressorti, s’était dirigé vers le chauffeur de taxi lui avait demandé son badge d’accès à la suite de l’infraction de défaut de courtoisie et ce dernier lui avait alors dit « Va te faire foutre ».

Il avait indiqué au chauffeur que ses propos feraient l’objet d’un second rapport d’infraction et qu’il devait quitter la zone « à vide » sans charger de clients. Le chauffeur l’avait suivi, s’était rapproché de lui et lui avait dit « Vas-y maintenant tu montes dans mon taxi et je te casse en deux, on va plus loin je te casse en deux ». Il lui avait répondu qu’il était ridicule, qu’il pourrait être son père et qu’il ne rentrerait pas dans ce jeu avec lui et lui avait enjoint de partir « à vide ». Le chauffeur l’avait alors à nouveau insulté, le traitant de « connard » et avait refusé de partir.

Conformément à la procédure, il avait fait appel à la police. Le chauffeur avait fini par lui présenter son badge, ce dont il l’avait remercié, indiquant qu’il ne ferait pas de rapport pour la non présentation du badge. La police était arrivée, et il lui avait indiqué que le chauffeur était « en défaut de courtoisie caractérisée », mais refusait de partir « à vide ». Après avoir discuté avec la police, le chauffeur était parti. En passant à sa hauteur vers la barrière alors qu’il discutait avec l’agente de police, il lui avait dit « Aujourd’hui c’est moi qui pars mais demain tu es viré ». La policière était intervenue et lui avait demandé de cesser ses menaces.

5) Le 13 août 2020, l’AIG a adressé à M. A______ une copie du constat du 3 août 2020, l’informant qu’il envisageait de prononcer une mesure administrative et lui a donné la possibilité d’exercer son droit d’être entendu dans les quinze jours.

6) Dans le délai prolongé par deux fois jusqu’au 2 novembre 2020, M. A______ a contesté avoir insulté l’agent de sécurité.

Le groupe de touristes s’était scindé en deux après que le premier taxi eut refusé de prendre la course pour un prix de CHF 500.-. Les uns avaient trouvé un taxi qui les avait pris en charge et le second groupe s’était dirigé vers le taxi GE 3_____, mais celui-ci, qui n’était pas en première position, les avait accompagnés vers lui. Il discutait le prix avec ses futurs trois clients lorsque l’agent de sécurité s’était approché et lui avait indiqué que le prix avait déjà été discuté avec un autre taxi. Il lui avait répondu qu’il n’avait pas à se mêler de la négociation du prix d’une course. Le chauffeur du taxi GE 3_____, également présent, lui avait tenu le même propos. Les chauffeurs des taxis GE 4_____, GE 5_____ et GE 6_____, également présents, pouvaient attester que l’agent de sécurité s’était mêlé sans droit de la négociation du prix d’une course et qu’il n’avait à aucun moment insulté ce dernier. L’agent de sécurité avait abusé de son pouvoir et outrepassé son mandat. Il s’opposait formellement au prononcé d’une quelconque mesure administrative à son encontre.

7) Le 21 décembre 2020, l’AIG a informé M. A______ qu’il avait procédé à des investigations supplémentaires. L’examen du relevé des passages de la barrière d’accès à la zone réservée avait permis d’identifier les dix-huit véhicules en attente derrière le sien. Les taxis GE 5_____ et GE 7_____ se trouvaient en queue de file d’attente, et le taxi GE 6_____ se trouvait dans la réserve des taxis et non dans la zone de prise en charge. Les chauffeurs étaient tenus de rester dans leurs véhicules.

Il disposait de tous les éléments nécessaires pour prendre une décision et ne procéderait pas à l’audition des autres chauffeurs de taxis. Il envisageait de rendre une décision d’avertissement à son encontre.

Il prenait note des allégations au sujet de l’agent de sécurité et procéderait aux investigations adéquates auprès de son prestataire.

8) Dans le délai prolongé au 18 janvier 2021, M. A______ s’est plaint de ne pas disposer des relevés exhaustifs d’accès à la zone réservée. Il s’est étonné que des investigations devaient encore être conduites au sujet de l’agent de sécurité. Il était menacé d’une sanction sur la seule base des allégations d’un agent qui divergeaient des siennes et sans que soient entendus les chauffeurs de taxi présents, ce qui violait son droit d’être entendu. Âgé de 67 ans, il était très affecté par le procès injuste qui lui était fait. L’AIG devait entendre les témoins ou renoncer à toute sanction.

9) Le 11 février 2021, l’AIG a adressé à M. A______ une copie complète de son dossier ainsi que du relevé des accès à la zone réservée, ce dernier document caviardé pour des motifs de protection des données personnelles, en application de la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD - A 2 08). Il maintenait sa décision de ne pas entendre les témoins, pour les motifs exposés dans son précédent courrier.

10) Le 24 février 2021, M. A______ a à nouveau contesté le caviardage du relevé de passage de la barrière et noté que les éléments qu’il avait apportés au sujet des autres taxis présents lors de l’altercation étaient corrects. Un nouveau refus de fournir des documents non caviardés constituerait une violation de son droit d’être entendu.

Il contestait toujours les déclarations de l’agent de sécurité et renouvelait la demande d’audition des autres chauffeurs de taxis.

11) Le 15 avril 2021, l’AIG a infligé à M. A______ un avertissement. La décision était immédiatement exécutoire nonobstant recours.

Le 3 août 2020, il s’était fortement énervé contre l’agent de sécurité, lui avait crié de « fermer [sa] gueule » et « d’aller [se] faire foutre », et l’avait notamment traité de « connard » et de « gros con ». Il avait refusé de quitter « à vide « la zone réservée lorsque l’agent le lui avait demandé et la police était intervenue pour régulariser la situation suite à son refus.

Les agents de sécurité et notamment celui qui avait dressé le constat, étaient assermentés. Les faits étaient établis et constituaient une infraction à l’art. 3
al. 6 RCAP-AIG.

12) Par acte remis à la poste le 17 mai 2021, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation. À titre subsidiaire, la cause devait être renvoyée à l’AIG pour nouvelle décision. Subsidiairement (recte : préalablement), les chauffeurs des taxis portant les plaques GE 3_____, GE 4_____, GE 5_____ et GE 6_____ devaient être entendus et le relevé de passage du 3 août 2020 devait être produit non caviardé.

Les faits avaient été constatés de manière inexacte. Les agents de sécurité mandatés par l’AIG n’étaient pas assermentés, contrairement à ce que celui-ci indiquait.

Les chauffeurs de taxis dont le témoignage était requis avaient aussi pu constater que l’agent de sécurité s’était mêlé de la négociation du prix d’une course alors qu’il ne s’agissait pas là de son travail et qu’il n’avait à aucun moment été insulté.

La police n’avait établi aucun rapport. Le constat dressé par l’agent de sécurité n’avait une valeur probante que « peu persuasive et peu pertinente ». En se fondant sur lui, l’AIG avait commis un abus de son pouvoir d’appréciation.

La sanction était infondée.

13) Le 21 juin 2021, l’AIG a conclu au rejet du recours.

L’agent de sécurité concerné était assermenté au sens de l’art. 46 al. 2 du règlement d'exécution de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 21 juin 2017 (RTVTC - H 1 31 01) et s’était notamment engagé à « dire, dans les rapports de service, toute la vérité sans faveur ni animosité » au sens de l’art. 5 de la loi sur la prestation des serments du 24 septembre 1965 (LSer - A 2 15).

L’AIG était compétent pour déterminer, dans son périmètre, les zones de prise en charge dont l’accès était réservé aux voitures de transport avec chauffeur, à réglementer et surveiller cette activité, fixer des critères d’exclusion temporaire ou définitive et rendre en sa qualité d’autorité administrative les décisions découlant de l’application du RCAP-AIG. En cas d’infraction, les agents assermentés dressaient des rapports. Aucun élément objectif ne justifiait en l’espèce de s’écarter de la force probante du rapport établi. Aucun abus du pouvoir d’appréciation n’avait été commis. L’AIG disposait d’un large pouvoir d’appréciation pour prendre une mesure. Le prononcé d’un avertissement constituait une mesure non coercitive et proportionnée au cas d’espèce.

14) Le 13 août 2021, M. A______ a répliqué.

Il prenait note que l’agent de sécurité était assermenté. Toutefois, à la différence des policiers, il était impliqué dans le litige et était la cause directe de la sanction, de sorte qu’il n’était pas un tiers neutre et son rapport manquait d’objectivité.

Le rapport caviardé établissant sa présence à l’aéroport n’était que de moindre pertinence. L’examen des positions des taxis n’avait aucune valeur probante. Le refus d’entendre les chauffeurs de taxi constituait une violation de son droit d’être entendu. Les propos discourtois qu’on lui reprochait n’avaient pas été prouvés. Le résultat des investigations effectuées sur l’agent de sécurité n’était pas encore connu. La décision était constitutive d’un abus du pouvoir d’appréciation et arbitraire.

15) Le 17 août 2021, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) À titre préliminaire, le recourant réclame son audition, l’audition des chauffeurs des taxis GE 3_____, GE 4_____, GE 5_____ et GE 6_____ et la production du relevé des passages du 3 août 2020 non caviardé.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1). En particulier, l’autorité de jugement peut renoncer à faire citer des témoins, qu’ils soient à charge ou à décharge, si, dans le cadre d’une appréciation anticipée des preuves, elle peut dénier à ces témoignages une valeur probante décisive pour le jugement (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc et 6c/dd ; 124 I 274 consid. 5b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_377/2014 du 26 mai 2015 consid. 6.1 ; 6B_907/2009 du 3 novembre 2010 consid. 7.1).

b. En l’espèce, le recourant a pu s’exprimer de manière circonstanciée sur les agissements qui lui sont reprochés, devant l’AIG puis la chambre de céans. Il n’indique pas quels éléments déterminants supplémentaires son audition pourrait apporter.

S’agissant des témoignages, le recourant ne conteste pas que l’agent de sécurité avait été sollicité par les touristes pour trouver un taxi en mesure de les prendre en charge et a admis qu’une altercation s’était produite. Il soutient que l’agent de sécurité se serait mêlé sans droit de la négociation du prix d’une course, ce dont pourraient attester les témoins.

La question de la légitimité de l’intervention de l’agent de sécurité, qui avait été consulté par les touristes et entendait les renseigner sur les tarifs, est sans incidence sur les reproches adressés au recourant par l’AIG, les insultes et les grossièretés ne constituant en aucun cas une réponse adéquate ou acceptable à une intervention, fût-elle inappropriée. La circonstance n’a ainsi pas à être établie par témoignages.

Le recourant ne conteste pas avoir dû quitter la zone réservée « à vide », ni que la police avait dû intervenir à deux reprises, qu’à la seconde intervention, il avait fini par présenter sa carte, était parti et qu’une agente de police lui avait dit de cesser ses menaces. Il conteste avoir proféré des propos grossiers contre l’agent de sécurité et affirme être resté courtois et aimable, ce dont pourraient témoigner quatre chauffeurs de taxi.

De jurisprudence constante, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport établi par des agents assermentés, qu’il s’agisse d’agents de police (ATA/502/2018 du 22 mai 2018 et les références citées), d’agents de détention (ATA/1073/2021 du 12 octobre 2021 consid. 3d), ou de personnel assermenté en général (ATA/1122/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6a).

En l’espèce, le rapport établi par l’agent de sécurité est très détaillé et circonstancié, et décrit de manière dynamique la chronologie des événements, dont les étapes saillantes (consultation de l’agent par les touristes, intervention de l’agent, altercation, interventions de la police, départ du chauffeur) ne sont d’ailleurs pas contestées par le recourant. Ce dernier se limite à contester avoir tenu des propos offensants, sans plus de précisions. Ce faisant, il ne rend pas vraisemblable que le rapport de l’agent assermenté pourrait être contraire à la vérité. La valeur probante accrue de ce dernier n’est ainsi pas affectée et l’audition des témoins ne se justifie pas.

Il sera encore observé que les chauffeurs de taxis dont le recourant sollicite l’audition, se trouvaient éloignés du sien, en bout de file ou dans une autre zone ainsi que l’établit l’AIG et qu’il paraît par ailleurs improbable que des tiers aient pu être présents lorsqu’il avait suivi l’agent de sécurité puis lorsqu’il avait quitté la zone réservée et se serait à chaque fois adressé à lui de manière menaçante.

Le recourant demande enfin la production de la liste des entrées et sorties de la zone réservée, non caviardée. Il n’expose cependant pas en quoi ce document serait utile à la solution du litige et ne critique en particulier pas la place qu’auraient selon l’AIG occupé dans la file les taxis qu’il évoque, étant précisé que l’audition des chauffeurs de taxi présents ce jour-là n’apparait pas nécessaire.

Il ne sera pas donné suite aux actes d’instruction réclamés par le recourant.

3) Selon le recourant, le refus par l’AIG d’entendre les témoins consacrerait une violation de son droit d’être entendu. En se fondant sur le seul rapport de l’agent de sécurité, l’AIG aurait en outre établi les faits de manière arbitraire.

a. Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 ; 133 III 235 consid. 5.3). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 137 I 195 consid. 2.2). Garanti par l'art. 29 Cst., il comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu'une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_656/2016 du 9 février 2017 consid. 3.2 et les références citées).

Selon l'art. 19 LPA, l'autorité établit les faits d'office. Elle n'est pas limitée par les allégués et les offres de preuves des parties. À teneur de l'art. 20 al. 1 LPA, l'autorité réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties. Elle recourt s'il y a lieu aux moyens de preuve énumérés à l'art. 20 al. 2 LPA, notamment en entendant les parties (let. b) et des témoins (let. c). Elle peut renoncer à entendre des témoins, dans le cadre d’une appréciation anticipée des preuves.

En procédure administrative, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 phr. 2 LPA ;
ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/874/2020 du 8 septembre 2020 consid. 5a ; ATA/659/2017 du 13 juin 2017 consid. 2b et les références citées).

Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. À cet égard, il n'y a lieu de s'écarter de la solution retenue par l'autorité précédente que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 232 consid. 6.2 ; ATA/423/2021 du 20 avril 2021 consid. 5c).

b. En l’espèce, pour les mêmes motifs évoqués plus haut (consid. 2), l’AIG était fondé à écarter les réquisitions de preuve du recourant et à se fier au rapport détaillé établi par l’agent de sécurité.

L’AIG a en effet établi que ce dernier avait été assermenté conformément à l’art. 2 RTVTC en qualité d’agent chargé de la surveillance de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 (LTVTC - H 1 31), ce que le recourant a d’abord contesté puis fini par reconnaître. Or, ainsi qu’il a été rappelé, les rapports établis par les agents assermentés bénéficient, de jurisprudence constante, d’une valeur probante accrue. Le recourant n’a pour sa part pas rendu vraisemblable que le rapport pourrait être contraire à la réalité.

Le recourant fait valoir qu’à la différence des agents de police, l’agent de sécurité était impliqué dans le litige et était la cause directe de la sanction, de sorte qu’il n’était pas un tiers neutre et que son rapport manquait partant d’objectivité. Il ne saurait être suivi. L’agent de sécurité, chargé d’assurer le respect de la LTVTC, est par nature « impliqué » dans les interventions qu’il accomplit dans le cadre de sa mission et le « litige » oppose en réalité le recourant à l’AIG au sujet de la sanction. L’agent de sécurité établit les faits avec véracité, conformément à son serment, mais la sanction est prononcée par l’AIG. Son cas ne se distingue pas de celui de policiers qui établiraient, dans le cadre de leur intervention, les faits à l’origine d’une sanction prononcée par le service des contraventions, le Ministère public ou le juge pénal.

Le recourant soutient que l’agent de sécurité aurait établi un rapport contraire à la vérité pour justifier son intervention illégitime. Il se contente ce faisant de formuler une hypothèse explicative, sans y apporter un commencement de vraisemblance. La chambre de céans observera que le rapport adopte un ton neutre, ne paraît trahir ou rapporter ni émotion ni parti-pris de son auteur et détaille comment celui-ci a gardé son sang-froid et pris ses distances lorsque le recourant s’est emporté.

Le recourant fait valoir que les agents de police n’ont établi aucun rapport. Il perd de vue que les agissements pour lesquels ils avaient été appelés pouvaient ne pas revêtir de qualification pénale ou ne pas nécessiter de rapport pour d’autres motifs et que M. B_____ avait indiqué aux policiers qu’il établirait lui-même un rapport administratif des événements.

Le recourant se plaint enfin de n’avoir pas été informé du résultat de l’enquête que l’AIG aurait dit vouloir conduire au sujet de l’agent de sécurité. Il avait affirmé le 2 novembre 2020 que l’agent avait abusé de son pouvoir outrepassant le mandat qui lui avait été confié par l’AIG et ce dernier avait répondu le 21 décembre 2020 que « s’agissant des allégations concernant l’agent impliqué, [il] en [prenait] bonne note et [l’informait] qu’il procédait aux investigations adéquates à ce sujet auprès de [son] prestataire ».

Il a été vu que l’AIG peut sanctionner des chauffeurs notamment parce qu’ils ne respectent pas les obligations légales liées à la fixation des tarifs (art. 31 al. 2 let. d LTVTC). Il en découle que la surveillance peut porter sur la tarification, de sorte que le recourant ne rend finalement pas vraisemblable que l’agent aurait outrepassé ses prérogatives en indiquant que le précédent taxi avait fait une offre aux touristes. Ainsi, que l’AIG ait investigué ou non l’attitude de l’agent de surveillance est sans effet sur les agissements du recourant et leur élucidation.

L’AIG pouvait ainsi, sans entendre de témoins, sans violer le droit d’être entendu du recourant et sans commettre d’excès ou d’abus de son pouvoir d’appréciation, tenir pour établi que celui-ci avait proféré le 3 août 2020 à l’endroit de l’agent des propos grossiers et injurieux.

Le grief sera écarté.

4) Le recourant reproche à l’AIG d’avoir violé la loi en lui infligeant une sanction.

a. L’art. 17 al. 1 LTVTC dispose que tout chauffeur est tenu par un devoir général de courtoisie. Selon l’al. 3 de la même disposition, tout chauffeur doit en tout temps rendre visible sa carte professionnelle à des fins d'identification par ses clients et par les agents chargés de veiller à l'application de la loi.

L’art. 31 LTVTC attribue à l’AIG la compétence de réguler l'accès des taxis et des voitures de transport avec chauffeur à son périmètre (al. 1). L’AIG peut notamment fixer des critères d'exclusion temporaire ou définitive de la zone réservée, en particulier lorsque le chauffeur exerce en étant sous le coup d'une mesure ou d'une sanction administrative, s'il entrave la circulation dans la zone réservée, s'il viole le devoir de courtoisie ou crée un trouble à l'ordre public, s'il refuse indûment des courses ou des moyens de paiement usuels, ou s'il ne respecte pas les obligations légales liées à la fixation des tarifs (al. 2 let. d). Il dispose de la compétence de réglementer ce domaine (al. 3).

Selon l’art. 35 al. 1 LTVTC, les agents de la force publique et tout autre agent ayant mandat de veiller à l'observation de la présente loi et de ses dispositions d'application sont compétents pour prendre les dispositions nécessaires à faire cesser les actes illicites et pour dresser les constats d'infractions.

Selon l’art. 46 al. 2 RTVTC, le personnel affecté par l’AIG au contrôle du respect des prescriptions est assermenté.

b. Le 20 juin 2017, la direction de l’AIG a adopté le RCAP-AIG (accessible à l’adresse : https://www.gva.ch/en/Downloads/Professionnels/Reglemement_AIG_ LTVTC.pdf).

L’AIG est compétent pour rendre les décisions découlant de l’application du RCAP-AIG (art. 2 al. 1 let. e).

Dans la zone de prise en charge réservée, les chauffeurs de taxi sont notamment tenus de rester à l’intérieur de leur véhicule ou à proximité immédiate de celui-ci, de faire preuve de courtoisie et d’amabilité à l’égard des usagers du site aéroportuaire, des potentiels clients, des autres chauffeurs de taxis ou de VTC et des représentants de l’AIG ou du personnel mandaté par ce dernier.

En cas de constat du non-respect d’une des obligations incombant aux chauffeurs de taxi, l’AIG ou le personnel mandaté par ce dernier peut exiger que la situation soit immédiatement régularisée ou que le chauffeur concerné quitte immédiatement la zone de prise en charge réservée. Par ailleurs, l’AIG peut prononcer une sanction (art. 3 al. 6 et art. 6 al. 1).

En cas de constat du non-respect d’une des obligations incombant aux chauffeurs de taxi ou aux chauffeurs de VTC, l’AIG ou le personnel mandaté par lui dresse un constat d’infraction (art. 6 al. 2). L’AIG interpelle le chauffeur concerné pour que celui-ci se détermine, par écrit, dans un délai de quinze jours, sur le contenu du constat d’infraction (art. 6 al. 3). Passé ce délai, l’AIG peut prononcer l’une des mesures suivantes : l’avertissement, l’exclusion temporaire de la zone réservée ou l'exclusion définitive de la zone réservée (art. 6 al. 4). Un tableau détaille la typologie des infractions et y associe des sanctions. L’avertissement sanctionne les infractions de faible gravité, soit notamment la non visibilité de la carte professionnelle, le fait de souiller la zone réservée et une entrave légère à la fluidité du trafic. Il peut également sanctionner des infractions de moyenne gravité, comme l’entrave à la circulation et le non-respect des instructions.

c. En l’espèce, l’AIG a qualifié les propos grossiers tenus par le recourant à l’endroit de l’agent de surveillance d’infractions au devoir général de courtoisie. Cette qualification ne souffre pas de critique.

L’AIG a infligé au recourant un avertissement, soit la sanction la plus légère. Cette sanction apparaît, au regard du tableau susmentionné, proportionnée à la faute commise, compte tenu de l’absence d’antécédents du recourant, ce que ce dernier ne conteste d’ailleurs pas.

En tous points infondé, le recours sera rejeté.

5) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 mai 2021 par M. A______ contre le la décision de l’Aéroport international de Genève du 15 avril 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de M. A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sandy Zaech, avocate du recourant, ainsi qu'à l'Aéroport international de Genève.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :