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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2273/2015

ATA/1243/2018 du 20.11.2018 sur JTAPI/1079/2017 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 08.01.2019, rendu le 11.11.2019, REJETE, 1C_12/2019
Descripteurs : CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; 5E ZONE ; LAC LÉMAN ; PERMIS DE CONSTRUIRE ; CONFORMITÉ À LA ZONE ; AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL)
Normes : LPRLac.3.al1; LPRLac.7.al1; LPRLac.13.al1; LPRLac.13.al2; LCI.15; LCI.58.al3; LCI.59A
Parties : PEDRAZZINI Jean-Pierre, PEDRAZZINI Suzanna et Jean-Pierre / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC, BASTARD-FERBACH Alexandra
Résumé : Rejet d'un recours contre une autorisation de construire deux villas dans la zone de protection des rives du lac. Pas d'abus du pouvoir d'appréciation du département pour avoir accordé la dérogation au nombre de niveaux en se fondant sur le préavis de la CMNS. Pas de violation des clauses d'esthétiques en l'absence de cohérence des constructions du quartier.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2273/2015-LCI ATA/1243/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 novembre 2018

3ème section

 

dans la cause

 

Madame Susanna et Monsieur Jean-Pierre PEDRAZZINI
représentés par Me Yves Magnin, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC

Madame Alexandra BASTARD FERBACH
représentée par Me Guy Zwahlen, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 octobre 2017 (JTAPI/1079/2017)


EN FAIT

1) Madame Alexandra BASTARD FERBACH est propriétaire de la parcelle no 259, feuille 22 de la commune de Cologny, d'une surface de 2'113 m2, sise en zone 5 et dans la zone de protection des rives du lac, à l'adresse 19, chemin Byron. Le terrain est en pente et dans sa partie haute, il est bordé par le chemin Byron qui est lui-même en pente.

Une habitation d'un logement, d'une surface au sol de 328 m2 est construite sur la parcelle.

2) Mme BASTARD FERBACH a requis l'autorisation de construire deux villas sur sa parcelles par demandes déposées auprès du département de l'aménagement, du logement et de l'énergie devenu celui du territoire (ci-après : le département) les 17 juin et 9 septembre 2014. Les requêtes, enregistrées respectivement sous DD 106'975-1 et DD 107'225-1 par le département ont été refusées les 25 juillet et 22 septembre 2014.

3) Le 13 octobre 2014, Mme BASTARD FERBACH a déposé une demande d'autorisation de construire enregistrée sous DD 107'317-1.

Le projet prévoyait la construction de deux villas contigües avec piscines, vérandas et couverts à voitures, après démolition de la villa existante.

4) Lors de l'instruction de la requête faite par le département, les préavis suivants ont notamment été recueillis :

- Le 16 octobre 2014, l'inspection des constructions relevait dans son préavis favorable sous conditions qu'en raison de la différence de 70 cm entre la terrasse et les locaux (fitness/salle de jeux), ceux-ci étaient considérés comme sous-sol.

- le 13 novembre 2014, défavorable de la commune de Cologny au motif de l'impact important sur le côté lac, la façade nord-ouest présentant cinq niveaux construits superposés. Par ailleurs, la surface du sous-sol était « faussement non habitable ».

- le 19 novembre 2014, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS), soit pour elle la sous-commission nature et sites
(ci-après : SCNS), a demandé la modification du projet.

- le 13 janvier 2015, la SCNS a préavisé favorablement sous condition le projet. Malgré un édicule d'accès soumis à dérogation, l'impact dans le site n'était pas significatif et ne péjorait pas la situation du secteur en comparaison des constructions voisines. La commission accordait donc exceptionnellement la dérogation de l'art. 7 de la loi sur la protection générale des rives du lac du
4 décembre 1992 (LPRLac - L 4 10), sous condition de mettre en place une toiture végétalisée extensive non accessible sur la surface restante de la toiture. Elle se référait à un préavis rendu le 4 décembre 2013, sur demande de l'architecte du projet, dans lequel la commission considérait que les nouvelles constructions donnaient lieu à une diminution générale de l'impact en comparaison avec l'immeuble existant.

5) Par décision du 21 mai 2015 et publiée le 29 mai 2015 dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO), le département a accordé l'autorisation sollicitée DD 107'317-1.

6) Par mémoire du 29 juin 2015, Madame Susanna et Monsieur Jean-Pierre PEDRAZZINI, propriétaires de la parcelle no 258, feuillet 22 de la commune de Cologny, sise au 17 chemin Byron, au sud-ouest de la parcelle concernée par l'autorisation de construire, ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre celle-ci en concluant à son annulation.

La décision violait leur droit d'être entendu, le dossier ne contenant pas tous les préavis de la CMNS, et la volte-face de celle-ci était inexplicable.

La construction litigieuse prévoyait cinq niveaux, soit trois de plus que ce qui était légalement permis.

Un règlement de quartier du 14 avril 1934, dont les diverses dispositions prohibaient la construction de plus d'une villa par lot et la construction de toits plats était violé.

Le projet nuisait à l'esthétique de la zone et les locaux autorisés au sous-sol devaient être considéré comme « faussement non habitables ».

7) Le 14 août 2015, Mme BASTARD FERBACH a répondu au recours en concluant à son rejet. Elle produisait le préavis de la CMNS du 4 décembre 2013.

8) Le 1er septembre 2015, le département a déposé des observations en concluant au rejet du recours.

9) Le 24 septembre 2015, Mme et M. PEDRAZZINI ont répliqué, persistant dans leurs conclusions.

10) Les 15 et 16 octobre 2015, le département et Mme BASTARD FERBACH ont dupliqué.

11) Sur requête commune des parties, l'instruction de la procédure a été suspendue une première fois par décision du 19 novembre 2015 pour une durée d'une année, puis une seconde fois par décision du 29 novembre 2016.

12) Le 10 août 2017, Mme BASTARD FERBACH a invité le TAPI à reprendre la procédure, les parties n'étant pas parvenues à un accord.

13) Par jugement du 12 octobre 2017, le TAPI a rejeté le recours.

Il résultait des explications des parties intimées ainsi que du préavis de la CMNS du 4 décembre 2013, rendu dans le cadre de la précédente requête en autorisation de construire qu'une modification du projet avait été obtenue et que la commission y avait donné son approbation. Le préavis du 19 novembre 2014 avait été rendu sur la base de l'examen d'un projet qui n'était plus d'actualité, le projet final ne prévoyant aucune superstructure sur le toit.

La dérogation octroyée portait sur les entrées, d'une surface de 23 m2 surmontant les deux niveaux entiers d'une des villas. Le projet consistait en la construction de deux villas, l'une surplombant l'autre composée de deux niveaux entiers et d'une entrée qui les surmontait. Le couvert à voiture adjacent à cette entrée était, vu du lac, presqu'entièrement caché derrière elle. L'entrée et le couvert à voiture étaient au même niveau que le niveau inférieur de la seconde villa, laquelle disposait d'un niveau supérieur. Enfin, au-dessus de ce niveau se situait la seconde entrée. Depuis le lac, les deux villas semblaient se superposer et compter cinq niveaux comme s'il s'agissait d'un seul bâtiment. Le projet était conforme à l'art. 7 LPRLac.

Le règlement de quartier invoqué avait perdu sa validité et n'avait pas fait l'objet d'une approbation postérieure à l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700).

La surface de l'ensemble du projet de deux villas était à peine supérieure à celle de la villa actuelle. Les vues aériennes disponibles permettaient de constater que l'ensemble du périmètre comptait déjà, en particulier au nord et nord-est du projet, des immeubles qui le dépassaient largement en taille et volume. Aucune violation de l'art. 58 al. 3 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) n'était constatée.

Quand bien même le niveau des locaux en sous-sol était partiellement visible en façade, il n'était pas possible de considérer que cette particularité était destinée à contourner la loi, sauf à faire un procès d'intention au bénéficiaire de l'autorisation de construire.

14) Par acte mis à la poste le 13 novembre 2017, Mme et M. PEDRAZZINI ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice
(ci-après : chambre administrative) contre le jugement du TAPI en concluant principalement à son annulation et à celle de l'autorisation de construire ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure. Préalablement, ils demandaient la production par le département de douze documents en lien avec les préavis rendus par la CMNS les 4 décembre 2013, 19 novembre 2014 et 7 janvier 2015 ainsi que la production de dossiers d'autorisation DD 106'975-1 et 107'225-1, et à ce qu'un transport sur place soit ordonné.

La partie supérieure de la parcelle de l'intimée se situait à plus de trois mètres au-dessus de l'entrée de leur propriété et ses jardins en terrasses dominaient de plus de deux mètres le leur.

Le règlement de 1934 était toujours en vigueur et correspondait parfaitement à la volonté claire de protection contre les atteintes à l'esthétique des rives du lac telle qu'elle ressortait des travaux parlementaires de la LPRLac.

L'emprise visuelle des deux villas avec piscines, vérandas et couverts à voitures était identique à celle de constructions en zone 4B.

Le département avait abusé de son pouvoir d'appréciation en relation avec la violation de l'art. 7 et 13 LPRLac. Les villas étaient constituées de trois niveaux ce qui était proscrit par l'art. 7 LPRLac et, depuis le lac, les deux villas semblaient se superposer pour compter cinq niveaux comme s'il s'agissait d'un seul bâtiment.

La LPRLac limitait la surface des nouvelles constructions à 20 % de la surface du terrain excluant l'application de l'art. 59 al. 4 LCI visant les constructions en ordre contigu et sous forme d'habitat groupé qui étaient donc prohibées dans le périmètre des rives du lac. En fixant des règles de construction détaillées quant au nombre de niveaux, les toitures et les lucarnes, l'art. 7 LPRLac traitait de maisons individuelles uniquement, seules admises dans le périmètre des rives du lac.

Uniques en leur genre dans le quartier, les villas projetées n'étaient pas en cohérence avec les autres maisons familiales. Leurs dimensions, leur situation et leur aspect extérieur nuiraient gravement au caractère du quartier, violant ainsi les art. 15 et 58 LCI.

Les terrasses des villas projetées surplomberaient leur terrain et leur maison de façon à créer une perte d'intimité inadmissible.

15) Le 21 novembre 2017, le TAPI a transmis son dossier, renonçant à formuler des observations.

16) Le 21 décembre 2017, le département a déposé des observations, concluant au rejet du recours.

Lorsque la SCNS avait préavisé défavorablement le projet, elle avait considéré, par erreur, la présence de cinq niveaux côté lac et demandé un projet modifié. Lors de cette séance, le collaborateur en charge du secrétariat était différent de celui qui était en charge lors de la première présentation du projet, le 4 décembre 2013, ce qui expliquait la méprise. Le préavis du 7 janvier 2015, particulièrement motivé, expliquait la situation. Les documents demandés par les recourants, notamment les ordres du jour des séances de la CMNS n'étaient pas publics, de même que les procès-verbaux des séances des commissions, ainsi que tout autre échange ou document à caractère interne.

Les dossiers DD 106'975 et DD 107'225 étaient joints.

L'art. 7 LPRLac ne limitait que le nombre de nivaux habitables et prévoyait des dérogations, tout comme le faisait l'art. 13 LPRLac. Le préavis de la CMNS était pris en considération de manière prépondérante.

Les autres griefs n'étaient pas fondés non plus.

17) Le 11 janvier 2018, Mme BASTARD FERBACH a déposé des observations, concluant au rejet du recours ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure.

Il y avait de nombreuses villas semblables à celles en projet dans le quartier soumis à la même zone et aux mêmes restrictions relatives à la protection des rives du lac, édicule d'accès compris. Des photographies étaient produites de villas sises chemin de Byron et Diodati ainsi qu'une photographie d'une estrade provisoire en bois correspondant à la hauteur de la terrasse de la villa la plus proche de la limite de propriété permettant de constater qu'en raison de la présence d'une haie, il n'y avait aucune vue en direction de la parcelle des recourants, seul le toit de la villa et un balcon intégré dans le toit étaient visibles. Quant à l'édicule d'accès qui était une cage d'escalier, il ne s'agissait pas d'un lieu de vie.

Il y avait eu plusieurs demandes d'autorisation de construire parce que le projet avait été adapté en fonction des impératifs de l'aménagement du lieu, de la protection du paysage et des demandes faites par l'administration et des exigences de la CMNS.

Il était erroné d'affirmer que les terrasses des villas projetées surplomberaient davantage le terrain et la maison des recourants que celles de la maison actuelle.

La surface habitable des deux villas correspondait aux 22 % de la surface de la parcelle et celles-ci étaient d'un standard de haute performance énergétique
(ci-après : HPE).

Pour le surplus, les griefs des recourants étaient contestés point par point.

18) Le 1er mars 2018, les recourants ont réitéré leur demande qu'un transport sur place soit ordonné.

Seule cette mesure d'instruction permettait de constater que le projet bouleverserait l'harmonie du quartier avec une emprise disproportionnée en regard de la surface de la parcelle, écrasant par là même leur villa.

19) Le 25 juin 2018, le département a produit des observations, persistant dans leurs conclusions.

20) Le 5 juillet 2018, Mme BASTARD FERBACH a persisté dans ses conclusions.

21) Les recourants n'ont pas déposé d'observations dans le délai imparti et les parties ont été informées que la cause était gardée à juger le 15 août 2018.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 137 II 266 consid. 3.2). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d'obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige
(ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 138 IV 81 consid. 2.2).

En l'espèce, la chambre administrative renonce, par une appréciation anticipée des preuves, à procéder aux mesures d'instruction demandées par les recourants. Le dossier contient en effet tous les éléments pertinents et utiles pour statuer, notamment un dossier de photographies produites par les intimés ainsi que les préavis de la CMNS.

3) Les recourants soutiennent que seules des maisons individuelles seraient admises dans le périmètre des rives du lac, excluant les constructions en ordre contigu. Ils fondent leur raisonnement sur la LPRLac qui limite la surface des nouvelles constructions à 20 % de la surface du terrain, excluant de ce fait l'application de l'art. 59 al. 4 LCI visant ce type de constructions.

a. Le terrain sur lequel devrait être érigées les constructions litigieuses se trouve en 5ème zone à bâtir, dite zone villa, mais également dans la zone à protéger des rives du lac. Les dispositions légales concernant le périmètre à protéger des rives du lac se superposent aux prescriptions réglant l'affectation des diverses zones ordinaires (ATA/63/2009 du 4 février 2009).

b. L'art. 59 al. 1 LCI porte sur le rapport de surface en 5ème zone à bâtir. Le rapport de 25 % peut être porté à 27,5 % lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique (ci-après : HPE), respectivement à
30 % lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique, reconnue comme telle par le service compétent (art. 59 al. 1 LCI).

c. À l'intérieur du périmètre de protection, la surface des constructions exprimées en m2 de plancher ne doit pas excéder 20 % de la surface des terrains situés zone 5. L'art. 59 al. 4 LCI n'est donc pas applicable (art. 3 al. 1 LPRLac).

Pour les biens-fonds sis en 5ème zone et dans le périmètre de la LPRLac, ces disposition impliquent une limitation de la densité à 0.2 avec une augmentation variant entre 10% et 20% supplémentaires pour les constructions avec le standard énergétique adéquat, mais excluant des dérogations plus importantes visant une densité supérieure telles que prévues à l'art. 59 al. 4 LCI (François BELLANGER, Les droits à bâtir : une notion virtuelle pour une valeur réelle, in Festschrift Andreas Auer, Direkte Demokratie, 2013, p. 291).

En conséquence, il appert que le législateur a fait le choix de limiter la densité des constructions en fixant un rapport de surface maximal entre la surface de la parcelle et celle des surfaces brutes de plancher des constructions. Rien ne permet de retenir, comme le font les recourants que le nombre de constructions serait limité à une seule habitation par parcelle. Cette limitation serait d'ailleurs inefficace, les parcelles pouvant être divisées.

En l'espèce, les constructions prévues respectent le standard HPE et le projet prévoit un rapport de surface de 22 %. Le projet s'avère donc conforme tant à la LPRLac qu'à la LCI et le grief des recourant sera écarté.

4) Les recourants invoquent une violation de la LPRLac en raison du nombre de niveaux des constructions autorisées.

a. Dans le but de protéger les rives du lac et les zones sensibles voisines, la LPRLac instaure un certain nombre de restrictions aux constructions qui peuvent être érigées dans le périmètre à protéger.

Ainsi notamment, les constructions situées en 5ème zone ne peuvent en principe comporter que deux niveaux avec toiture plate ou un niveau avec toiture habitable, le nombre de niveaux étant déterminé sur la façade côté lac (art. 7
al. 1 LPRLac).

b. Si les circonstances le justifient et que cette mesure ne porte pas atteinte au but général poursuivi par la loi, le département peut déroger aux art. 6 à 11 de la loi. Dans ce cadre, les requêtes en autorisation de construire font l'objet d'un préavis de la commune concernée, de la CMNS, le cas échéant de la direction générale de l'agriculture et de la nature, ainsi que de la commission consultative de la diversité biologique (art. 13 al. 1 et 2 LPRLac dont la formulation est identique à l'ancien art. 13 LPRLac, en vigueur jusqu'au 17 novembre 2017 sur ces points).

5) a. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/51/2013 du 21 janvier 2013 novembre 2011 et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/417/2009 du 25 août 2009).

b. Lorsque la consultation de la CMNS est imposée par la loi, le préavis de cette commission a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours (ATA/126/2013 du 26 février 2013). La CMNS se compose pour une large part de spécialistes, dont notamment des membres d'associations d'importance cantonale, poursuivant par pur idéal des buts de protection du patrimoine (art. 46 al. 2 LPMNS). À ce titre, son préavis est important (ATA/126/2013 précité).

c. Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de
celles-ci (ATA/373/2016 du 3 mai 2016 et les références citées). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/373/2016 précité). De même, s'agissant des jugements rendus par le TAPI, la chambre administrative exerce son pouvoir d'examen avec retenue car celui-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/373/2016 précité).

6) Pour l'octroi d'une dérogation, la LPRLac exige dans les circonstances du cas d'espèce, les préavis de la commune et de la CMNS (art. 13 al. 2 LPRLac).

a. La commune a préavisé défavorablement le projet au motif notamment qu'il présentait cinq niveaux construits superposés et que la surface du sous-sol était « faussement non habitable ».

Or, les constructions projetées comprennent chacune deux niveaux plus un sous-sol ainsi qu'un édicule formant l'entrée, d'une surface de 23 m2, qui les surmontent. Il n'est dès lors pas possible d'additionner les niveaux, comme le fait la commune, s'agissant de deux constructions distinctes. Quant au sous-sol, la LCI prévoit que les locaux dont le plancher se trouve au-dessous du niveau général du sol adjacent, ce qui est le cas en l'espèce, ne peuvent servir à l'habitation. Il n'est dès lors pas possible de retenir sans faire un procès d'intention aux intimés, comme le fait la commune, que ce sous-sol serait « faussement non habitable ». En effet, la chambre de céans a déjà retenu que pour une construction faite sur un terrain en pente, le sous-sol qui était plus ou moins apparent en façade n'était pas pris en compte dans le nombre de niveaux de la construction au sens de l'art. 7 LPRLac, ceux-ci ne concernant que les niveaux habitables (ATA/375/2004 du 11 mai 2004).

b. La dérogation portant sur un troisième niveau, correspondant à celui de l'entrée, a été octroyée, sur la base du préavis favorable de la CMNS ayant procédé à un examen complet du projet. Cette dernière a ainsi exigé la mise en place d'une toiture végétalisée extensive non accessible sur la surface restante de la toiture afin de permettre une meilleure intégration des constructions dans le site. La CMNS a relevé le 4 décembre 2013 que malgré un édicule d'accès soumis à dérogation, l'impact dans le site n'était pas significatif et ne péjorait pas « la situation du secteur en comparaison des constructions voisines ».

Au vu de ce qui précède, il appert que le département n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en accordant la dérogation au nombre de niveaux, comme le permet l'art. 13 al. 1 et 2 LPRLac, en se fondant sur le préavis de la CMNS.

7) Les recourants font grief au département d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation en relation avec la violation d'un règlement de quartier du 9 avril 1934 et l'art. 58 al. 3 LCI. Ils invoquent également l'art. 15 LCI. Les constructions nuiraient au caractère du quartier ou du site.

a. Sous le titre « esthétique des constructions », la LCI prévoit que le département peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public (art. 15 al. 1 LCI). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d'architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département.

b. Le département peut interdire des constructions en ordre contigu, lorsque par leur échelle, leur importance ou leur esthétique, elles nuiraient au caractère du quartier ou du site (art. 58 al. 3 LCI).

c. Un règlement de quartier du 9 avril 1934, prévoyant des charges et servitudes particulières imposées aux acquéreurs des lots du morcellement de partie de la propriété de Monsieur David RAMU, à Montalègre, commune de Cologny, a été produit par les recourants. Ce règlement prévoit notamment que chaque lot ne pourra contenir qu'une seule villa et interdit les toits plats (art. 1
et 2 du règlement du 9 avril 1934).

8) S'agissant en premier lieu de l'application du règlement du 9 avril 1934 au projet de construction, la LAT est entrée en vigueur le 1er janvier 1980. Les plans d'affectation adoptés avant cette date ont conservé leur validité jusqu'au moment de l'approbation par l'autorité compétente des plans établis selon cette loi (art. 35 al. 3 LAT), mais au plus tard durant huit ans, soit jusqu'au 1er janvier 1988 (art. 35 al. 1 let. b LAT). Au-delà de cette dernière date, faute d'une approbation formelle par cette autorité, ils ont perdu leur validité en ce qui concerne le territoire destiné à la construction (ATF 120 Ia 227 consid. 2c p. 233 ; ATA/25/2005 du 18 janvier 2005 et les références citées).

En l'espèce, le règlement, même s'il devait être qualifié de plan d'affectation, ne trouve plus application dès lors qu'il n'a pas été approuvé formellement dans le délai de huit ans à compter de l'entrée en vigueur de la LAT, ce que les recourants ne contestent pas. Il est donc caduc et même son inscription au registre foncier, sous forme de servitude foncière en faveur de l'État, ne pourrait lui donner force obligatoire en tant que norme de droit public (ATA/200/2008 précité).

Le grief sera donc écarté.

9) Quant à la violation des clauses d'esthétiques invoquées, contenues aux art. 15 et 58 al. 3 LCI, il sera renvoyé au raisonnement fait ci-dessus concernant le préavis de la CMNS qui s'avère également prépondérant en la matière, s'agissant de l'intégration du projet, les recourants ne faisant d'ailleurs que substituer leur propre appréciation à celle faite par la CMNS et le TAPI.

Les recourants allèguent une cohérence qui existerait dans les constructions du quartier qui sont contredites par les constatations suivantes : des photographies aériennes disponibles sur le système d'information du territoire genevois (SITG) ainsi que celles produites par l'intimée, montrent que notamment les bâtiments sis à proximité de la parcelle litigieuse, 14 et 16, chemin Diodati, sur les parcelles
nos 818 et 798 ainsi que 3D et 8, chemin de Byron, sur les parcelles nos 2'229 et 2'230, possèdent des toits plats. Il peut être constaté également que les parcelles situées dans le périmètre comptent plusieurs bâtiments plus massifs dont certains avec un toit plat (3D et 21, chemin Byron par exemple), et que sur la parcelle voisine no 1'597, deux bâtiments (B1147 et B1148) ont des surfaces de plus de 1'200 m2 chacun au sol et un toit plat.

Quant à la différence entre la construction existante et celles prévues, les plans font apparaître une surface au sol un peu plus étendue mais compte tenu des distances aux limites de parcelles et à la présence de la haie, les photographies prises depuis l'estrade construite à l'emplacement prévu de la terrasse de l'habitation supérieure, qui n'ont pas été contestées par les recourants, démontrent qu'aucune perte d'intimité telle qu'alléguée ne peut être constatée, seul le toit de la villa des recourants ainsi que, à la même hauteur que l'estrade, le balcon intégré dans le toit, étant visibles depuis cette terrasse.

Le grief doit être écarté.

10) Entièrement infondé, le recours sera rejeté.

Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge des recourants pris conjointement et solidairement (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à l'intimée, à la charge des recourants (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 novembre 2017 par Madame Susanna et Monsieur Jean-Pierre PEDRAZZINI contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 octobre 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de Madame Susanna et
Monsieur Jean-Pierre PEDRAZZINI, pris conjointement et solidairement ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Madame Alessandra BASTARD FERBACH, à la charge de Madame Susanna et Monsieur Jean-Pierre PEDRAZZINI pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Magnin, avocat des recourants, à Me Guy Zwahlen, avocat de l'intimée, au département du territoire - oac, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :