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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2684/2020

ATA/1219/2021 du 16.11.2021 sur JTAPI/615/2021 ( LDTR ) , REJETE

Descripteurs : PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGES;VENTE;AUTORISATION OU APPROBATION(EN GÉNÉRAL);INTERDICTION D'ALIÉNER;PESÉE DES INTÉRÊTS;INTÉRÊT PRIVÉ;INTÉRÊT PUBLIC;LOGEMENT;MARCHÉ LOCATIF;GARANTIE DE LA PROPRIÉTÉ
Normes : LPA.62.al1.leta; LPA.63; LDTR.1.al1; LDTR.1.al2.letc; LDTR.2.al1.leta; LaLAT.19.al1; LDTR.25; RDTR.11.al1; RDTR.11.al3; RDTR.11.al4; LDTR.39.al1; LDTR.39.al2; LDTR.39.al4; RDTR.13.al1; RDTR.13.al3.letb; Cst.26; Cst.36
Résumé : Recours contre le jugement du TAPI confirmant le refus d'octroyer une autorisation d'aliéner un appartement jusqu'alors offert en location. Examen des conditions légales permettant la délivrance de l'autorisation d'aliéner, non remplies en l'espèce. Pesée des intérêts en présence. En l'occurrence, l'intérêt public au maintien du parc locatif l'emporte sur l'intérêt privé du vendeur et des acheteurs à la vente de l'appartement. Le refus d'octroyer l'autorisation d'aliéner est conforme à la garantie de la propriété. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2684/2020-LDTR ATA/1219/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 novembre 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par CGI Conseils, mandataire

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OCLPF

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 juin 2021 (JTAPI/615/2021)


EN FAIT

1) Sur la parcelle n° 1______ de la commune de Genève Eaux-Vives, sise au ______, est situé un immeuble de logements.

2) Selon l’extrait du registre foncier (ci-après : RF), l’immeuble a été soumis au régime de la propriété par étages (ci-après : PPE) à compter du 26 novembre 1997. Il était auparavant la propriété de la B______ (ci-après : la SI).

3) Selon acte notarié du 16 décembre 2011, Monsieur A______ a acquis, à compter de cette date, par donation de son père, Monsieur C______ , la nue-propriété de l’appartement n° 2.01 de cinq pièces et demie, situé au rez-de-chaussée et inscrit au feuillet ______ de cet immeuble. Ses parents ont conservé l’usufruit sur cet appartement, selon les termes de l’acte notarié précité.

4) L’appartement a été loué pour la dernière fois entre le 1er février 2018 et le 31 janvier 2020, pour un loyer annuel de CHF 43'200.-.

5) Le 10 janvier 2020, M. A______ et les époux Madame D______ et Monsieur E______ (ci-après : les époux) ont établi, devant Maître  F______, notaire, un projet de contrat de vente à terme de l’appartement précité, avec une condition suspensive liée à l’obtention de l’autorisation d’aliéner. Dans l'hypothèse où celle-ci ne serait pas délivrée, le contrat de vente perdrait tous ses effets au 1er mai 2020. Le prix de vente convenu s'élevait à CHF 1'950'000.-.

6) Le 13 janvier 2020, une requête en autorisation d’aliéner a été adressée à l’office du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) du département du territoire (ci-après : le département) sous la plume de Me F______. Le projet d'acte de vente à terme ainsi que le formulaire ad hoc étaient joints à cette demande. Des « convenances personnelles » constituaient le motif de la vente et le but de l’achat était « l'établissement de la résidence principale ».

7) Par acte notarié du 14 janvier 2020, M. A______ et les époux ont conclu, devant Me F______, un contrat de vente à terme portant sur l'appartement de M. A______. Le contrat reprenait les termes du projet s'agissant notamment de la condition suspensive et du prix de vente.

8) Après une première analyse du dossier, le département a informé le notaire qu'il se verrait contraint de rendre une décision de refus s’il devait statuer formellement.

Aucune des conditions légales permettant la délivrance d'une autorisation d'aliéner un appartement n’était remplie.

L’intérêt privé de M. A______ était purement commercial. Il n’avait pas démontré un besoin impératif de vendre l’appartement tandis que celui-ci sortirait du parc locatif – alors qu’il en avait toujours fait partie – dans la mesure où les acquéreurs envisageaient d’y habiter personnellement. Cela aurait pour conséquence d'aggraver la pénurie de logements locatifs. Or, le maintien du parc locatif constituait un intérêt public important. Dès lors, le refus n’apparaissait pas disproportionné.

9) M. A______ a demandé au département de reconsidérer sa position.

Aucune des conditions légales permettant la délivrance d'une autorisation d'aliéner un appartement n’était, certes, remplie, mais il existait des motifs justifiant la vente de l'appartement.

D'une part, il avait un besoin urgent de liquidités. Il devait en effet rembourser un prêt octroyé par son père dans le cadre de ses études effectuées à l’étranger en 2017 et 2018, lequel arrivait à échéance le 30 juin 2020. Son père en exigeait le remboursement.

Il prévoyait également de créer son étude d’avocat et ne pouvait compter sur sa fortune. Il avait donc besoin de l’argent issu de la vente pour mener à bien son projet.

Il joignait la convention de prêt signée avec son père et sa déclaration d’impôt 2018. Cet appartement était son seul élément de fortune et il ne possédait pas d’autres biens immobiliers.

D'autre part, l'appartement était trop grand pour ses besoins. Il souhaitait acquérir un bien de remplacement proche du lieu de vie de ses parents, avec lesquels il habitait actuellement, à ______. Il occuperait personnellement son nouveau logement.

10) Par arrêté VA 2______ du 7 juillet 2020, le département a refusé l’autorisation d’aliéner sollicitée par M. A______.

Le logement considéré entrait dans une catégorie de logements où sévissait la pénurie. Les conditions légales permettant la délivrance d'une autorisation d'aliéner un appartement n’étaient manifestement pas remplies. En effet, l’immeuble en cause avait été soumis au régime de la PPE après sa construction ; l’appartement avait été offert à la location par le passé et n’avait jamais fait l’objet d’une autorisation d’aliéner dans la mesure où il avait été acquis par donation en décembre 2011.

Le fait de préserver l’existence d’un nombre suffisant de logements répondant aux besoins prépondérants de la population relevait d'un intérêt public. Le requérant ne faisait quant à lui pas valoir d’intérêt privé particulier, tandis que l’intérêt privé des acheteurs ne pouvait l’emporter sur ledit intérêt public, l’acquisition étant motivée par un but de convenance personnelle. En outre, destiné à l’habitation personnelle des acquéreurs, l’appartement perdrait son affectation locative. La décision de refus n’était donc pas disproportionnée.

11) M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre l’arrêté précité, concluant à son annulation et à la délivrance de l’autorisation sollicitée.

Aucune des conditions légales permettant la délivrance d'une autorisation d'aliéner un appartement n’était, certes, remplie, mais des motifs d’intérêt privé justifiaient l’octroi de l’autorisation. En particulier, l’appartement avait été individualisé de nombreuses années auparavant. Habitant actuellement chez ses parents, il pouvait tout à fait décider d’occuper son appartement lui-même, ce qui conduirait au même résultat que la vente, soit à la sortie du logement du parc locatif.

L’appartement était son seul bien immobilier et il convenait ainsi d'en tenir compte dans la pesée des intérêts. Il ne pouvait en effet pas être contraint à rester propriétaire du seul bien dont il disposait.

Il avait un besoin important de liquidités afin de rembourser l’emprunt concédé par son père, acquérir un appartement correspondant à ses besoins et ouvrir son étude d’avocats. Son intérêt privé à aliéner le bien était similaire à l'intérêt découlant de la nécessité de satisfaire aux exigences d’un plan de désendettement, même en l'absence d'un tel plan.

12) Le département a conclu au rejet du recours, reprenant son argumentation développée dans sa décision du 7 juillet 2020.

13) Dans sa réplique, M. A______ a contesté intégralement l’interprétation de la situation faite par le département. Son centre de vie se trouvait à ______, commune dans laquelle il souhaitait acheter un appartement plus petit. Celui qu’il souhaitait vendre était en effet trop grand pour ses besoins.

Il ne disposait pas de la fortune nécessaire pour réaliser ses projets personnels et professionnels.

La reconnaissance de dette signée le 15 août 2018 était assimilable à un plan de désendettement, puisqu’il s’engageait à rembourser à son père la somme de CHF 100'000.- à la retraite de ce dernier.

Enfin, l’obliger à rester propriétaire de son appartement portait atteinte à son droit de propriété.

14) Dans sa duplique, le département a indiqué ne pas avoir d’observations supplémentaires à formuler.

15) Par jugement du 15 juin 2021, le TAPI a rejeté le recours.

Aucun motif légal permettant la délivrance d'une autorisation d'aliéner un appartement n'étant réalisé, il convenait de vérifier si un motif prépondérant d’intérêt public ou d’intérêt général s’opposait à l’autorisation d’aliéner querellée.

Les intérêts qui s’opposaient étaient, d’une part, les intérêts privés des acquéreurs et du propriétaire à la vente et, d’autre part, l’intérêt public à la protection du parc locatif. Les acheteurs souhaitaient habiter l’appartement et ne prévoyaient donc pas de maintenir son affectation locative. Leur intérêt, qui était dès lors de pure convenance personnelle, n’était ainsi pas déterminant

Il restait à déterminer si l'intérêt privé de l’intéressé était spécial et primait l'intérêt public à la préservation du marché locatif.

M. A______ alléguait trois motifs pour justifier la vente de son appartement. Le premier était le remboursement d’une dette de CHF 100'000.- à son père ; le deuxième était la création de son étude d’avocats et le dernier était l’achat d’un bien « de remplacement », plus petit, à ______. Il ne démontrait toutefois pas devoir impérativement assainir sa situation et vendre son unique bien immobilier à cet effet. Son intérêt privé et sa volonté de rembourser son père ne pouvaient ainsi être considérés comme similaires à l’intérêt privé de satisfaire aux exigences d’un plan de désendettement.

Les deux autres motifs invoqués par M. A______ n'étaient pas étayés de manière substantielle. Il ne démontrait pas être endetté, ni qu’un manque de liquidités l’aurait empêché de réaliser ses projets, qui n'étaient pas encore concrétisés.

L’intérêt privé du requérant n'était ainsi pas prépondérant face à l’intérêt public et général auquel il devait céder le pas en période de pénurie de logements.

16) Par acte posté le 19 août 2021, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à celle de l'arrêté VA 2______ du 7 juillet 2020. Il a également conclu à ce que la chambre administrative lui octroie l'autorisation d'aliéner sollicitée.

Il précisait préalablement qu'en vue d'acquérir un logement dans la région de ______, il avait conclu un mandat de courtage avec la régie G______. En outre, le délai pour rembourser la somme de CHF 100'000.- à son père avait été repoussé au 31 décembre 2021.

Le TAPI avait constaté les faits de manière inexacte et incomplète, et avait violé la garantie de sa propriété, de sorte que le jugement parvenait à un résultat choquant.

Le TAPI lui reprochait de ne pas avoir suffisamment étayé les raisons qui le poussaient à vouloir vendre son appartement. Or, ce dernier perdait de vue qu'avant de concrétiser un projet, immobilier ou professionnel, il fallait bénéficier de liquidités suffisantes, ce qui n'était pas son cas. Ainsi, contrairement à ce qu'avait retenu le TAPI, il n'existait pas d'autres solutions que la vente de son appartement pour qu'il puisse concrétiser ses projets.

Le TAPI avait fait fi des pièces qu'il avait produites et qui démontraient pourtant qu'il ne disposait pas des liquidités suffisantes pour réaliser ses projets. La déclaration fiscale 2018 démontrait qu'il disposait d'un revenu provenant de son activité indépendante s'élevant à un peu plus de CHF 35'000.-, et ses différents comptes présentaient un solde de CHF 2.95, CHF 9'610.- et CHF 6'472.-. Il avait fait preuve de diligence avant de se lancer « tête baissée » dans des projets qu'il aurait dû ensuite abandonner faute de liquidités.

En tenant compte de tous ces éléments, la pesée des intérêts effectuée par le département aurait conduit à un résultat différent, à savoir que son intérêt privé aurait primé l'intérêt public à la préservation du parc locatif.

Le TAPI ne s'était pas prononcé sur le fait que l'appartement avait déjà été individualisé. Or, dans cette hypothèse, l'autorisation devait être accordée car l'appartement était déjà retiré du marché locatif du fait de la précédente autorisation d'aliéner.

Le département avait violé la garantie de sa propriété en ne tenant pas compte du fait que l'appartement était sa seule propriété et en se bornant à relever que l'intérêt public à la préservation du bien immobilier sur le marché locatif devait primer sur son intérêt privé, dans la mesure où les éléments allégués par ses soins n'avaient pas été suffisamment étayés, ce qui n'était pourtant pas le cas.

Dès lors, il était contraint de rester indéfiniment propriétaire d'un bien immobilier qu'il souhaitait vendre pour réaliser d'autres projets qui avaient été parfaitement prouvés, ce qui constituait une violation crasse et disproportionnée de son droit fondamental à la garantie de la propriété. En outre, s'il décidait d'habiter l'appartement en cause, ce qu'il pouvait librement faire, la conséquence serait la même que la vente, soit la sortie du bien immobilier du parc locatif.

Dans la pesée des intérêts qui avait été effectuée, aucun argument n'avait été invoqué, à part l'affirmation toute générale qu'il fallait préserver le parc locatif et le fait qu'il n'avait pas justifié de sa situation financière, ce qui était faux.

17) Le département a conclu au rejet du recours et persisté dans ses précédentes écritures et conclusions.

18) Sur ce, les parties ont été informées, le 21 septembre 2021, que le cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI confirmant l'arrêté de l'autorité intimée par lequel celle-ci refuse de délivrer au recourant l'autorisation d'aliéner son appartement.

a. La loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) a pour but de préserver l’habitat et les conditions de vie existants ainsi que le caractère actuel de l’habitat notamment dans la deuxième zone de construction (art. 1 al. 1 et 2 al. 1 let. a LDTR ; art. 19 al. 1 let. b de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 - LaLAT - L 1 30). À cet effet, et tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d’appartements, elle prévoit notamment des restrictions quant à l’aliénation des appartements destinés à la location (art. 1 al. 2 let. c LDTR).

b. L'aliénation, sous quelque forme que ce soit (notamment cession de droits de copropriété d'étages ou de parties d'étages, d'actions, de parts sociales), d'un appartement à usage d'habitation jusqu'alors offert en location est soumise à autorisation dans la mesure où l'appartement entre, à raison de son loyer ou de son type, dans une catégorie de logements où sévit la pénurie (art. 39 al. 1 LDTR). Pour remédier à la pénurie d'appartements locatifs dont la population a besoin, tout appartement jusqu'alors destiné à la location doit conserver son affectation locative, dans les limites du chapitre relatif aux mesures visant à lutter contre la pénurie d'appartements locatifs (art. 25 al. 1 LDTR). Il y a pénurie d'appartements lorsque le taux des logements vacants considéré par catégorie est inférieur à 2 % du parc immobilier de la même catégorie (art. 25 al. 2 LDTR). Les appartements de plus de sept pièces n'entrent pas dans une catégorie où sévit la pénurie (art. 25 al. 3 LDTR).

Selon l'art. 11 al. 3 du règlement d'application de la LDTR du 29 avril 1996 (RDTR - L 5 20.01), par appartement jusqu'alors offert en location, au sens de l'art. 39 al. 1 LDTR, il faut entendre l'appartement loué lors du dépôt de la requête en autorisation d'aliéner (let. a), l'appartement vide ou vacant lors du dépôt de la requête en autorisation d'aliéner, mais qui a précédemment été loué par sa ou son propriétaire actuel (let. b), ou l'appartement occupé, lors du dépôt de la requête en autorisation d'aliéner, par sa ou son propriétaire, si celle-ci ou celui-ci a précédemment loué l'appartement considéré (let. c). Nonobstant la teneur de l'art. 11 al. 3 RDTR, une autorisation d'aliéner doit impérativement être requise en cas de vente d'un ou plusieurs appartement(s) acquis par voie d'adjudication (art. 11 al. 4 RDTR).

c. Les catégories de logements où sévit la pénurie sont déterminées chaque année par arrêté du Conseil d'État en fonction du nombre de pièces par appartement (art. 11 al. 1 RDTR). Le Conseil d'État a constaté en 2013, 2019, 2020 et 2021 qu'il y avait pénurie, au sens des art. 25 et 39 LDTR, dans toutes les catégories des appartements d'une à sept pièces inclusivement (arrêtés du Conseil d'État déterminant les catégories de logements où sévit la pénurie en vue de l'application des art. 25 à 39 LDTR des 20 mars 2013, 19 décembre 2018, 1er juillet 2020 et 9 décembre 2020 - ArAppart - L 5 20.03).

En l'espèce, l'appartement concerné – situé dans un immeuble d'habitation en deuxième zone de construction et donc assujetti à la LDTR (art. 2 LDTR) – entre, par son nombre de pièces (cinq pièces et demie), dans une catégorie de logements où sévit la pénurie et a déjà été loué. Son aliénation, notamment par le biais de la vente correspondante, est par conséquent soumise à autorisation, conclusion qui n'est d'ailleurs contestée ni par le recourant, ni par l'autorité intimée.

3) a. Le département autorise l'aliénation d'un appartement si celui-ci a été dès sa construction soumis au régime de la PPE ou à une forme de propriété analogue, sous réserve du régime applicable à l'aliénation d'appartements destinés à la vente régi par l'article 8A de loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35 ; let. a) ; était, le 30 mars 1985, soumis au régime de la PPE ou à une forme de propriété analogue et qu'il avait déjà été cédé de manière individualisée (let. b) ; n'a jamais été loué (let. c) ; a fait une fois au moins l'objet d'une autorisation d'aliéner en vertu de la LDTR (let. d). L'autorisation ne porte que sur un appartement à la fois. Une autorisation de vente en bloc peut toutefois être accordée en cas de mise en vente simultanée, pour des motifs d'assainissement financier, de plusieurs appartements à usage d'habitation ayant été mis en PPE et jusqu'alors offerts en location, avec pour condition que la personne acquéreuse ne peut les revendre que sous la même forme, sous réserve de l'obtention d'une autorisation individualisée (art. 39 al. 4 LDTR).

En cas de réalisation de l'une des hypothèses de l'art. 39 al. 4 LDTR, le département est tenu de délivrer l'autorisation d'aliéner. Il n'y a donc, le cas échéant, pas de place pour une pesée des intérêts au sens de l'art. 39 al. 2 LDTR. Les conditions posées à l'art. 39 al. 4 LDTR sont alternatives (ATA/725/2020 du 4 août 2020 consid. 2f ; ATA/870/2019 du 7 mai 2019 consid. 4b).

b. Au vu de la marge d'appréciation dont elle dispose, lorsqu'aucun des motifs d'autorisation expressément prévus par l'art. 39 al. 4 LDTR n'est réalisé, l'autorité doit rechercher si l'intérêt public l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à aliéner l'appartement dont elle est propriétaire (arrêts du Tribunal fédéral 1C_137/2011 du 14 juillet 2011 consid. 3.3 ; 1C_139/2011 du 14 juillet 2011 consid. 3.3 ; 1C_141/2011 du 14 juillet 2011 consid. 4.3; 1C_143/2011 du 14 juillet 2011 consid. 3.3 ; ATA/545/2020 du 29 mai 2020 consid. 5).

c. Le département refuse l'autorisation lorsqu'un motif prépondérant d'intérêt public ou d'intérêt général s'y oppose. L'intérêt public et l'intérêt général résident dans le maintien, en période de pénurie de logements, de l'affectation locative des appartements loués (art. 39 al. 2 LDTR).

Dans le cadre de l'examen de la requête en autorisation, le département procède à la pesée des intérêts publics et privés en présence (art. 13 al. 1 RDTR). L'intérêt privé est présumé l'emporter sur l'intérêt public lorsque la ou le propriétaire doit vendre l'appartement par nécessité de liquider un régime matrimonial ou une succession (let. a), par nécessité de satisfaire aux exigences d'un plan de désendettement (let. b), ou du fait de la prise d'un nouveau domicile en dehors du canton (let. c ; art. 13 al. 3 RDTR).

Dans la pesée complète des intérêts en présence à laquelle doit se livrer l'autorité, celle-ci ne peut se contenter d'évoquer de manière générale la nécessité de maintenir le logement dans le régime locatif (motif de refus d'ordre général déjà mentionné à l'art. 39 al. 2 LDTR), sans quoi une autorisation de vente ne serait pratiquement jamais possible ; elle doit faire état de circonstances concrètes faisant apparaître que la vente ne répond pas à un réel besoin de l'acquéreur ou du vendeur, par exemple en cas d'opération spéculative ou purement commerciale (arrêts du Tribunal fédéral 1C_416/2016 du 27 mars 2017 consid. 2.4, confirmant l’ATA/593/2016 du 12 juillet 2016 ; 1C_68/2015 du 5 août 2015 consid. 2.4).

d. L'intérêt du vendeur ou de l'acheteur suffit pour autoriser une aliénation (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La LDTR : Démolition, transformation, rénovation, changement d'affectation et aliénation : immeubles de logement et appartements : loi genevoise et panorama des autres lois cantonales, 2014, p. 435 et les références citées).

Si l’appartement est la seule propriété du vendeur, il faut en tenir compte dans l’appréciation des intérêts pour donner un poids certain à cet élément. Sinon, on empêcherait les propriétaires de céder leur bien et on les contraindrait à rester indéfiniment propriétaires, ce qui porterait atteinte au droit de la propriété. (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op.cit., p. 435 et la référence citée). La notion de « seule propriété du vendeur » ne concerne qu'un propriétaire ne possédant qu'un unique bien immobilier, l'appartement concerné (ATA/1313/2019 du 3 septembre 2019 consid. 9).

Le besoin d’assainissement financier du vendeur est un cas particulier de l’intérêt privé du vendeur expressément prévu par l'art. 39 al. 4 § 1 phr. 2 LDTR. Lorsque le vendeur doit vendre un appartement pour assainir sa situation financière (art. 39 al. 4 § 1 phr. 2 LDTR et 13 al. 3 let. b RDTR), le département doit procéder à une pesée des intérêts en présence selon l'art. 39 al. 2 LDTR, à savoir l'intérêt du vendeur à assainir sa situation financière et l'intérêt public à conserver des appartements locatifs. Le requérant doit démontrer par pièces que sa situation financière est mauvaise et qu’il a pris des mesures d’assainissement, ceci pour éviter des poursuites ou une mise en faillite. Un simple désir de se désendetter ne suffit pas. Le vendeur doit prouver avoir mis sur pied un programme d'assainissement de sa situation financière et démontrer que la vente s'inscrit dans ce programme. La production d'avis bancaires, de bilans, de commandements de payer concernant les dettes fiscales notamment ne suffit pas, même si ces documents démontrent que le vendeur est endetté (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op. cit., pp. 446-447 et les références citées).

Lorsque l’intérêt de l'acquéreur à acheter son logement est de pure convenance, il ne s'agit de toute évidence pas d'un intérêt particulier qui serait prépondérant face à l'intérêt public poursuivi par la LDTR (arrêts du Tribunal fédéral 1C_49/2013 du 14 août 2013 consid. 5 ; 1C_357/2012 du 8 janvier 2013 consid. 4.2). Il en va ainsi également d’un intérêt du propriétaire purement commercial (arrêt du Tribunal fédéral 1C_497/2012 du 9 janvier 2013 consid. 5).

e. La politique prévue par la LDTR, qui tend à préserver l'habitat et les conditions de vie existants, en restreignant notamment le changement d'affectation des maisons d'habitation (art. 1 al. 1 et 2 let. a LDTR), procède d'un intérêt public important (arrêts du Tribunal fédéral 1C_416/2016 du 27 mars 2017 consid. 2.3 ; 1C_68/2015 du 5 août 2015 consid. 2.3 ; 1C_143/2011 précité consid. 2.2). Le refus de l'autorisation de vendre un appartement loué lorsqu'un motif prépondérant d'intérêt public ou d'intérêt général s'y oppose n'est pas contraire au principe de la proportionnalité, dès lors qu'il est consécutif, de la part de l'autorité administrative, à une pesée des intérêts en présence et à une évaluation de l'importance du motif de refus envisagé au regard des intérêts privés en jeu. En effet, la restriction à la liberté individuelle ne doit pas entraîner une atteinte plus grave que ne l'exige le but d'intérêt public recherché (ATF 113 Ia 126 consid. 7b/aa ; ATA/1313/2019 du 3 septembre 2019 consid. 7).

4) En l'espèce, le recourant reproche au TAPI d'avoir constaté de façon inexacte et incomplète les faits en faisant fi des pièces qu'il avait produites pour démontrer qu'il ne disposait pas de liquidités suffisantes pour réaliser ses projets. Or, le TAPI a pris en compte lesdites pièces dans la pesée des intérêts qu'il a effectuée. Dès lors, le recourant critique en réalité l'appréciation des preuves réalisée par l'instance précédente, qui relève d'une question de droit.

5) Le recourant reproche également au TAPI de ne pas s'être prononcé sur le fait que l'appartement avait déjà été individualisé. À l'appui de ce grief, il cite des auteurs de doctrine qui considèrent, selon lui, que, dans cette hypothèse, l'autorisation doit être accordée car l'appartement est déjà retiré du marché locatif du fait de la précédente autorisation d'aliéner.

Il perd toutefois de vue que la situation à laquelle il fait référence concerne le cas, prévu par l'art. 39 al. 4 let. d LDTR, dans lequel l'appartement a déjà été aliéné et où cette aliénation a déjà fait l'objet d'une autorisation de vente. Ces deux conditions sont cumulatives (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op.cit., p. 422). Or, l'appartement qui fait l'objet du litige n'a jamais fait l'objet d'une autorisation de vente, pas même à l'occasion de la donation du 16 décembre 2011. L'une des deux conditions cumulatives nécessaires à la délivrance de l'autorisation d'aliéner faisant ainsi défaut, le recourant ne saurait invoquer le fait que son appartement aurait déjà été individualisé pour obtenir une telle autorisation.

Dans ces circonstances, c'est à juste titre que le TAPI a constaté qu'aucun des cas de délivrance des autorisations d'aliéner selon l'art. 39 al. 4 LDTR n'était réalisé.

6) Le recourant remet en cause la pesée des intérêts effectuée par l'autorité intimée et l'instance précédente en application de l'art. 39 al. 2 LDTR.

Comme l'a mentionné le TAPI, il ressort du dossier que les acheteurs souhaitent acquérir l'appartement pour y établir leur résidence principale, de sorte que l'affectation locative de dudit appartement ne sera pas maintenue. En outre, aucun élément en possession de la chambre administrative ne permet d'établir que les acheteurs auraient un besoin impérieux ou urgent d'acquérir cet appartement. Dès lors, leur intérêt, qui est de pure convenance, ne saurait primer l'intérêt public à la préservation du parc locatif genevois, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté.

7) Il convient d'analyser l'intérêt privé du recourant.

a. Ce dernier estime que ses motifs de vente sont similaires à l'intérêt privé mentionné à l'art. 13 al. 3 let. b RDTR, soit la nécessité de satisfaire aux exigences d’un plan de désendettement.

Le TAPI a estimé que tel n'était pas le cas, dans la mesure où le recourant n'avait pas démontré devoir impérativement assainir sa situation. L'instance précédente a notamment considéré, en substance, que la reconnaissance de dette, seul document transmis pas le recourant à l'appui de son grief, ne suffisait pas à démontrer que sa situation était similaire à celle d'une personne devant impérativement se désendetter. Il ressort de la doctrine précitée que l'analyse du TAPI ne prête pas le flanc à la critique, de sorte que la chambre de céans la fera sienne. Au demeurant, on relèvera que le recourant n'a formulé aucune critique à l'égard de cette analyse et que la production d'un accord conclu avec son père et repoussant simplement le délai de remboursement d'un montant de CHF 100'000.- au 31 décembre 2021 ne saurait modifier son résultat.

b. Le fait de ne pas disposer de liquidités suffisantes, à supposer encore que cela soit le cas, ne saurait empêcher le recourant d'étayer les raisons qui le poussent à vouloir vendre son appartement. Un manque de liquidités n'est en effet pas incompatible avec l'élaboration d'un projet relatif à la création d'une étude d'avocats. Or, le recourant n'a pas fourni un document allant dans ce sens. En outre, bien qu'il ait joint à son mémoire de recours devant la chambre administrative une pièce démontrant qu'il a donné un mandat de recherche à une régie afin qu'elle lui trouve un appartement, il ne démontre pas en quoi l'acquisition d'un nouvel appartement adapté à ses besoins lui serait absolument indispensable, ni même ce qui l'empêcherait de louer un appartement.

À l'appui du dépôt de sa demande d'autorisation d'aliéner en janvier 2020, le recourant a produit sa déclaration fiscale 2018 ainsi que des pièces relatives à sa situation financière, faisant état de montants s'élevant à CHF 2.95, 9'610.- et 6'472.- sur ses comptes bancaires à la fin de l'année 2019. S'il apparaît, certes, que ces montants sont insuffisants pour acquérir un logement et créer une étude d'avocats, les documents précités, peu nombreux, ne suffisent toutefois pas à refléter sa situation financière lors du dépôt de sa demande d'autorisation d'aliéner. Par la suite, il n’a actualisé ces pièces ni devant l'instance précédente ni devant la chambre administrative, et n'a fourni aucun autre document permettant d'attester de sa situation financière. Dans ces circonstances et comme l'a retenu à juste titre le TAPI, il n'a pas établi que ses projets seraient irréalisables en raison d'un manque de liquidités. Il ne peut dès lors être suivi lorsqu'il affirme avoir impérativement besoin de l'argent de la vente pour concrétiser ses projets.

Au vu de la doctrine précitée, le recourant critique à juste titre le fait que le TAPI n'a pas pris en compte le fait que son appartement est sa seule propriété, dans la mesure où le jugement entrepris n'en fait pas mention. Néanmoins, ce seul élément ne saurait être décisif dans la pesée des intérêts. Le recourant prétend qu'il pourrait habiter lui-même dans l'appartement et que, dès lors, la conséquence serait la même que la vente de ce dernier, soit sa sortie du parc locatif. Or, il perd de vue que l'appartement n'a jamais fait l'objet d'une autorisation d'aliéner et qu'il n'a donc pas été individualisé, de sorte qu'il demeure dans le parc locatif. Si celui-ci était vendu, il en sortirait, ce qui irait à l'encontre de l'intérêt public à la protection qualitative et quantitative du logement.

Par conséquent, le département a considéré de manière conforme au droit que l'intérêt privé devait céder le pas à l'intérêt public à la protection du parc locatif genevois, ce que le TAPI a confirmé à juste titre.

8) Le recourant estime que le refus de délivrer l'autorisation constitue une violation de la garantie de sa propriété.

a. Comme tout droit fondamental, la propriété, garantie par l'art. 26 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ne peut être restreinte qu'aux conditions de l'art. 36 Cst. La restriction doit donc reposer sur une base légale (al. 1), être justifiée par un intérêt public (al. 2) et respecter le principe de la proportionnalité (al. 3).

Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de préciser que la réglementation mise en place par la LDTR est en soi conforme au droit fédéral et à la garantie de la propriété (ATF 116 Ia 401 consid. 9 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_617/2012 du 3 mai 2013 consid. 2.3 ; 1C_358/2010 du 18 janvier 2011 consid. 3.3).

b. Il ressort de la jurisprudence précitée que l'atteinte à la garantie de la propriété du recourant se fonde sur une base légale suffisante et répond à un intérêt public prépondérant. Elle s'avère également proportionnée, dans la mesure où l'autorité intimée a effectué une pesée des intérêts en présence et évalué l'importance du motif de refus, à savoir la préservation du parc locatif genevois, au regard des intérêts du recourant et des acheteurs.

Le refus de délivrer l'autorisation d'aliéner ne constitue ainsi aucune violation de la garantie de la propriété du recourant.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

9) Un émolument de CHF 900.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 août 2021 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 juin 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 900.- à charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à CGI Conseils, mandataire de Monsieur A______, au département du territoire-OCLPF ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Pedrazzini Rizzi, M. Verniory, Mme Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :