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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3471/2020

ATA/1047/2021 du 06.10.2021 sur JTAPI/682/2021 ( LCI ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3471/2020-LCI ATA/1047/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 6 octobre 2021

sur effet suspensif et mesures provisionnelles

 

dans la cause

 

A______ SA
représentée par Me Julien Blanc, avocat

contre

FONDS INTERCOMMUNAL D'ÉQUIPEMENT (FIE)
représenté par Me Alain Maunoir, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 juin 2021 (JTAPI/682/2021)


Vu le recours formé le 2 septembre 2021 par A______ SA
(ci-après : A______) auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) du 30 juin 2021 rejetant son recours contre la décision du Fonds intercantonal d’équipement (ci-après : FIE) du 25 septembre 2020 déclarant irrecevable la demande de reconsidération du bordereau du 31 décembre 2013 (facture
n° 1______, requérant le payement de CHF 176'880.- sur la base de 4'422 m2 de surface brute de plancher [ci-après : SBP] à CHF 40.- le m2, liée à l’autorisation de construire DD 2______) qu’elle avait formé le 6 juillet 2020, au motif que la modification notable des circonstances alléguée n’était pas suffisamment motivée, et en particulier qu’il n’était pas démontré que l’autorité précédemment compétente pour encaisser la taxe d’équipement y avait renoncé ;

que A______ soutient qu’aucun travail d’équipement n’avait été réalisé par la commune et aucun crédit voté en vue de la réalisation du plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) 3______ dans lequel s’insérait la construction ; que la facture initiale du 4 février 2008 était contestée, et qu’elle avait notamment demandé le 14 juin 2010 de connaître le détail des équipements réalisés avant de la payer, et qu’une employée lui avait indiqué oralement le 22 juillet 2010 que la taxe n’aurait pas dû être facturée, faute de travaux d’équipement accomplis ; que d’autres promoteurs du PLQ avaient obtenu la réduction ou le remboursement de leur taxe d’équipement ; qu’à la suite de la création du FIE en 2016 la pratique de l’office de l’urbanisme avait radicalement changé, puisque de taxes mises en suspens en l’absence de travaux, les bordereaux notifiés plus de cinq ans auparavant devenaient définitifs et exécutoires ; qu’un commandement de payer lui avait été notifié ;

que A______ a conclu préalablement devant la chambre administrative, à la restitution de l’effet suspensif à son recours, le montant étant important et son intérêt privé à ne pas être poursuivie pour le paiement d’une taxe contestée et non exigible l’emportant sur l’intérêt d’une fondation délégataire d’une tâche publique à recouvrer cette taxe avant droit connu ; que le TAPI avait lui-même restitué l’effet suspensif à son recours du 28 octobre 2020 par décision DITAI/481/2020 du 24 novembre 2020 ; que la notification d’un commandement de payer le 17 août 2021 justifiait d’autant plus la restitution de l’effet suspensif, afin de paralyser toute démarche supplémentaire de recouvrement ;

que le 16 septembre 2021 le FIE a conclu au rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif ; que le jugement attaqué constituant une décision négative une restitution de l’effet suspensif ne semblait pas possible ; qu’une poursuite en réalisation du gage immobilier avait été engagée, laquelle n’aboutirait pas dans un futur proche ; que la recourante ne prétendait pas que le versement de la somme litigieuse était susceptible de lui causer des difficultés financières, ni qu’elle avait des craintes concernant la solvabilité du FIE pour le cas où celui-ci devrait in fine lui rembourser le montant ; qu’il existait un intérêt public important à ce que les collectivités publiques chargées notamment de recouvrement de créances de droit public puissent engager avec efficacité et sans nouveau report toute démarche en vue d’obtenir les paiements dus lorsqu’un bordereau était définitif et exécutoire faute de recours ;

que A______ n’a pas répliqué dans le délai qui lui avait été imparti au 27 septembre 2021, et que les parties ont été informées le 1er octobre 2021 que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

Considérant, en droit, qu’interjeté en temps utile et devant la juridiction compétente, le recours est, prima facie, recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10) ;

que les décisions sur mesures provisionnelles sont prises par la présidente ou le
vice-président de la chambre administrative ou, en cas d'empêchement de ceux-ci, par un autre juge (art. 21 al. 2 LPA et art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020) ;

qu'aux termes de l'art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que selon l’art. 48 al. 2 LPA, les demandes en reconsidération n’entraînent ni interruption de délai ni effet suspensif ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence et la doctrine, un effet suspensif ne peut être restitué lorsque le recours est dirigé contre une décision à contenu négatif – ou purement
négative –, soit contre une décision qui porte refus d’une prestation, étant donné que si, sous le régime antérieur, le droit ou le statut dont la reconnaissance fait l’objet du contentieux judiciaire n’existait pas, 1’effet suspensif ne peut être restitué car cela reviendrait à accorder au recourant d’être mis au bénéfice d’un régime juridique dont il ne bénéficiait pas (ATF 127 II 132 ; 126 V 407 ; 116 Ib 344 ; ATA/693/2018 du 5 juillet 2018 consid. 1c et les références citées),

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l’effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis
(ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2 ; ATA/1110/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3), et ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités), de sorte que, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405) ;

que lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu’un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités) ;

qu’en l’espèce, dans un recours du 5 juin 2020 devant le TAPI contre un courrier du FIE du 5 mai 2020 déclarant la taxe exigible, déclaré irrecevable, A______ avait conclu à ce qu’il lui soit préalablement donné acte qu’elle acceptait de consigner auprès des services financiers du pouvoir judiciaire la somme de CHF 176'880.- ; que A______ a ensuite requis le 6 juillet 2020 du FIE qu’il reconsidère la taxe d’équipement compte tenu de la modification notable des circonstances ; que le FIE a déclaré la demande irrecevable ; que le TAPI a rejeté le recours du 28 octobre 2020, estimant que le FIE avait à bon droit considéré que les circonstances n’avaient pas connu de modification notable ;

que A______ expose réclamer la restitution de l’effet suspensif pour faire obstacle aux poursuites civiles ; que l’octroi de l’effet suspensif au recours de A______ reviendrait toutefois à suspendre le jugement du TAPI confirmant la décision d’irrecevabilité prononcée par le FIE, soit à suspendre cette dernière décision d’irrecevabilité ; que la décision d’irrecevabilité équivaut ainsi à un refus et possède partant un contenu négatif, comme l’a justement relevé le TAPI (DITAI/481/2020 citée consid. 9) ;

qu’ainsi la conclusion préalable de A______ constitue en réalité une demande de mesures provisionnelles consistant à faire interdiction au FIE de poursuivre le paiement de la contribution réclamée jusqu’à droit connu sur le fond (cf. DITAI/481/2020 citée consid. 10) ;

que le TAPI, en accordant la mesure provisionnelle le 24 novembre 2020, avait procédé à une pesée des intérêts et pris en compte notamment l’intérêt de A______ à ne pas se dessaisir d’une somme de CHF 176'880.- jusqu’à droit connu, que le paiement avait été requis pour la première fois le 4 février 2008, que l’autorité n’avait pas démontré que le paiement serait devenu urgent depuis douze ans, et que la recourante était restée longtemps sans nouvelles de ses interpellations au sujet de la taxe, et qu’elle avait proposé de la consigner ;

que le TAPI a depuis lors examiné et rejeté le recours sur le fond et considéré que c’était à juste titre que le FIE n’était pas entré en matière sur la demande de reconsidération, faute de faits nouveaux ;

que les circonstances ont donc évolué, et qu’à ce stade de la procédure, le recours devant la chambre de céans n’apparait pas prima facie doté de grandes chances de succès ; que son admission n’entraînerait selon toute vraisemblance qu’un retour de la cause au FIE pour examiner l’étendue de la reconsidération, laquelle pourrait aboutir à l’annulation de la taxe ou à sa confirmation, ou encore à la fixation d’un nouveau montant ; que la recourante, qui a proposé de consigner la taxe, ne saurait soutenir et ne soutient d’ailleurs pas que son versement la priverait de liquidités indispensables ; qu’ainsi son principal intérêt privé dans la balance en vue de mesures provisionnelles peut, à ce stade de la procédure et sans préjudice de l’examen du fond de son recours, être relativisé ; qu’en regard, l’intérêt public à ce que le FIE puisse poursuivre la perception de taxes apparemment entrées en force lorsqu’il a rejeté des demandes de reconsidération, doit être considéré, à ce stade de la procédure, comme prépondérant ;

qu’ainsi la demande de mesures provisionnelles sera refusée ;

qu’il sera statué sur les frais de la présente décision avec l’arrêt au fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la demande d’octroi de l’effet suspensif au recours et de mesures provisionnelles ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n'est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s'il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de
l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Julien Blanc, avocat de la recourante, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à Me Alain Maunoir, avocat du Fonds intercommunal d'équipement (FIE).

 

 

 

La présidente :



 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :