Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/4122/2010

ATA/474/2014 du 24.06.2014 sur JTAPI/689/2013 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : OCDE ; CONCURRENCE ; DISTRIBUTION DISSIMULÉE DE BÉNÉFICES ; PRESTATION APPRÉCIABLE EN ARGENT ; FARDEAU DE LA PREUVE ; DEVOIR DE COLLABORER ; INTÉRÊT DÉBITEUR
Normes : LIFD.57 ; LIFD.58 ; LHID.24 ; LIPM.12.leth
Résumé : Selon les règles de répartition du fardeau de la preuve en matière fiscale, il incombe à l'administration fiscale de démontrer l'existence d'une prestation appréciable en argent, ou d'une distribution dissimulée de bénéfice. Si cette preuve est apportée, le contribuable doit alors prouver que les charges comptabilisées sont justifiées par l'usage commercial. Pour déterminer si le contribuable a effectué une prestation sans contre-prestation correspondante, il y a lieu de vérifier si le principe de pleine concurrence est respecté. S'agissant de sociétés de services et des marges bénéficiaires appliquées par elles, la méthode du prix de revient majoré (ou « cost plus »), ne doit être employée qu'en dernier recours. En effet, ce n'est que s'il n'existe pas de marché libre et que la méthode du prix comparable ne peut pas être appliquée que la méthode du prix de revient peut exceptionnellement être envisagée. En l'espèce, l'administration fiscale a employé cette méthode à tort, sans démontrer qu'une autre ne pouvait pas être utilisée. Par conséquent, l'existence d'une distribution dissimulée de bénéfice n'a pas été démontrée à satisfaction.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4122/2010-ICCIFD ATA/474/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 juin 2014

2ème section

 

dans la cause

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

contre

A______ (actuellement B______ SA, à Fribourg)
représentée par Fiduciaire Verifid SA, mandataire

________

 

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 juin 2013 (JTAPI/689/2013)


EN FAIT

1) Le présent litige porte sur l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2003 et 2004 de la société A______, inscrite au registre du commerce de Genève en 1953 et aujourd’hui radiée.

Celle-ci avait pour but l’importation, l’exportation, l’achat, la vente et la représentation de tous articles de coutellerie, de ménage et autres articles similaires. Elle pouvait en outre faire, soit pour son compte, soit pour le compte de tiers, toutes opérations financières, commerciales, mobilières ou immobilières, se rattachant directement ou indirectement à son but et s’intéresser sous toutes formes à toutes entreprises similaires.

Durant les années fiscales 2003 et 2004, la société était détenue à 100 % par la société D______ SA à Fribourg, qui l’avait acquise de la société E______ SA, à Fribourg également. A______ avait par ailleurs une filiale à F______, la société G______ SA. Toutes ces sociétés avaient des administrateurs communs.

En 2006, A______ a repris les actifs et passifs de G______ SA, avant de fusionner avec D______ SA, sous la raison sociale H______ SA.

En 2009, cette nouvelle entité a fusionné avec la société E______ SA, sous la raison sociale B______ SA, à I______ (Fribourg).

2) Dans sa déclaration fiscale 2003, A______ a mentionné un bénéfice net imposable de CHF 32’883.- et un capital propre de CHF 550’552.-.

3) Par courrier du 3 mars 2005, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) l’a informée de ce qu’un contrôle aurait lieu en ses locaux les 6 et 7 avril suivants, lors duquel certains documents relatifs à l’année comptable 2003 devraient être mis à sa disposition.

4) Entre le 28 avril et le 8 juin 2005, un échange de correspondance a eu lieu entre l’AFC-GE et A______, lors duquel cette dernière a fourni diverses informations et documents complémentaires relatifs à sa comptabilité.

5) Le 14 juin 2005, l’AFC-GE a demandé à la contribuable de prouver dans les faits que la société D______ SA possédait bien une organisation, du personnel, et que ce personnel permettait à A______ d’acquérir son chiffre d’affaires.

6) Le 28 juin 2005, A______ a répondu que sa nouvelle direction avait pris conscience de la nécessité de devoir procéder à des changements importants dans son approche stratégique, notamment au niveau de l’assortiment de ses produits, de ses sources d’approvisionnement, de ses fournisseurs et de son marketing. N’ayant pas la taille suffisante pour s’offrir à elle seule et à l’interne les services d’un management à la taille de ses ambitions, son conseil d’administration avait décidé de faire appel à la société D______ SA, qui employait deux grands professionnels de la distribution d’articles non-food en Suisse, à savoir Monsieur J______ et Monsieur K______.

a. Les travaux fournis par M. J______ avaient eu plusieurs conséquences positives pour A______ : elle avait pu développer des activités avec de nouveaux clients, tels que L______ ou M______, ce malgré la disparition entre 2001 et 2003 des chaînes N______, O______, du rachat de P______ par Q______, de la disparition de l’achat régional de R______ et de la disparition de S______, soit des pertes globales de chiffre d’affaires de plus de CHF 1’500’000.-. Grâce à M. J______, l’environnement informatique avait été totalement muté sans perte d’un seul jour de facturation et le personnel avait mis à jour ses connaissances pour une meilleure utilisation des outils à disposition. Il avait effectué des expertises logistiques qui avaient abouti à la modification profonde des méthodes d’organisation du travail, ce qui avait entraîné un gain de productivité global, une cartographie générale informatisée du stock permettant un contrôle accru de la gestion des marchandises, une baisse du niveau des stocks et une baisse du nombre d’erreurs de préparation.

b. M. K______ était personnellement chargé des relations clientèles directes avec des grands magasins tels que T______, U______ ou V______. Malgré la perte globale des parts de marché des grands magasins dans la distribution suisse et la disparition de la chaîne O______, A______ avait stabilisé, voire augmenté, son chiffre d’affaires. M. K______ s’occupait également des relations clientèles dans le secteur du marché suisse de l’habitat avec pour conséquence une hausse sensible du chiffre d’affaires de A______ dans ce secteur, qui atteignait près de CHF 1’000’000.- par année. M. K______ avait effectué plusieurs expertises stratégiques sur le positionnement de A______ dans son secteur d’activité en fonction des mutations à venir, ce qui avait notamment donné lieu au challenge de taille consistant à racheter une société sise à W______ en janvier 2004, qui réalisait un chiffre d’affaires équivalent à 60 % de celui de A______, et qui exportait 60 % de son activité. M. K______ avait également effectué des expertises en marketing, publicité et communication, dont la mise en œuvre avait eu un impact positif sur la société. Il s’occupait auprès de D______ SA de l’analyse stratégique des sources d’achat et de la définition des groupes de produits stratégiques à développer ou à rechercher. Ces analyses avaient conduit entre autres choses à la reprise par A______ de la distribution des X______ pour la Suisse, soit la réalisation en 2003 d’un chiffre d’affaires d’environ CHF 444’000.-, et à la reprise en décembre 2003 de la distribution de Y______ pour la Suisse, soit la réalisation en 2003 d’un chiffre d’affaires de CHF 27’000.- et en 2004 de CHF 132’000.-. Les achats de couverts avaient été réorientés massivement vers l’Indonésie, ce qui avait permis d’augmenter le taux de marge de la société de 2 % dans ce secteur, lequel représentait du reste 21,5 % de son chiffre d’affaires global.

Les différents services que D______ SA lui rendait étaient tout simplement vitaux pour l’acquisition de son chiffre d’affaires.

7) Les 22 et 28 novembre 2005, l’AFC-GE a notifié à A______ les bordereaux de taxation ICC et IFD 2003. L’ICC était fixé à CHF 44’519,25 sur la base d’un bénéfice imposable de CHF 177’169.- et d’un capital imposable de CHF 550’552.-. L’IFD se montait quant à lui à CHF 15’053,50 sur la base d’un bénéfice imposable de CHF 177’100.-.

Une reprise de CHF 4’000.- a été effectuée sur des frais forfaitaires non admis, et une autre de CHF 140’286.- sur un total d’honoraires de CHF 448’813.- payés à D______ SA.

Cette seconde reprise était motivée par les observations suivantes :

« Les honoraires de CHF 448’813.- proviennent de la refacturation au prix coûtant de la totalité des frais encourus dans la société mère D______ SA pour le compte de H______ SA. Or, les frais en question incorporent des intérêts passifs (fixés à CHF 140’246.- [recte : CHF 140’286.-]) dont la refacturation ne se justifie pas commercialement et fiscalement.

En effet, ces intérêts sont manifestement afférents en totalité au prêt que D______ SA a obtenu pour financer l’acquisition de la participation dans H______ SA, participation qui ne constitue pas un actif nécessaire à la réalisation des prestations de services rendues à cette dernière.

D______ SA et H______ SA ne constituent en réalité qu’une seule et même entité économiquement et fiscalement. Dans une consolidation de leurs comptes respectifs, la participation dans H______ SA, le prêt l’ayant financé en partie ainsi que les intérêt[s] y relatifs n’apparaîtraient plus ».

8) A______ a formé réclamation contre ces deux bordereaux de taxation par lettre du 23 décembre 2005, contestant uniquement la reprise de CHF 140’286.- effectuée sur les honoraires.

Elle était détenue à 100 % par D______ SA. Cette dernière lui facturait des honoraires liés à des travaux de conseils, de planifications stratégiques, de soutien informatique et autres.

Le prêt ayant financé l’acquisition de A______ par D______ SA et figurant dans les états financiers de cette dernière avait été accordé par une société tierce. En conséquence, si les comptes de A______ étaient consolidés avec ceux de D______ SA, la totalité de ce prêt ainsi que les intérêts y relatifs apparaîtraient.

Se référant à son courrier du 28 juin 2005, elle rappelait que pour des raisons de confidentialité vis-à-vis de sa concurrence, A______ ne pouvait en aucun cas déléguer à une autre entreprise le travail qu’elle sous-traitait à D______ SA. C’est pourquoi la participation de D______ SA dans la société A______ était un actif nécessaire à la réalisation des services qu’elle lui rendait. Les intérêts passifs payés par D______ SA étaient des charges justifiées du point de vue fiscal et commercial, les ayants droit économiques de D______ SA d’une part, et de son créancier d’autre part, n’étant pas les mêmes.

9) Dans sa déclaration fiscale 2004, la contribuable a mentionné un bénéfice net imposable de CHF 53’615.- et un capital propre imposable de CHF 604’167.-.

10) Les 19 et 22 décembre 2006, l’AFC-GE a taxé A______ pour l’ICC et l’IFD 2004. L’ICC était fixé à CHF 53’789,75 sur la base d’un bénéfice imposable de CHF 215’118.- et d’un capital imposable de CHF 604’617.-. L’IFD se montait quant à lui à CHF 182’83,50 sur la base d’un bénéfice imposable de CHF 215’100.-.

Une reprise de CHF 12’972.- a été effectuée sur des frais forfaitaires non admis, et une autre de CHF 148’531.- sur un total d’honoraires de CHF 519’629.- payés à D______ SA.

Les motifs de cette dernière reprise étaient les mêmes que ceux exposés dans le cadre de la taxation 2003.

11) Le 18 janvier 2007, A______ a élevé réclamation contre les bordereaux de taxation 2004, contestant, pour les mêmes raisons que celles invoquées dans le cadre de sa réclamation 2003, la reprise de CHF 148’531.- effectuée sur les honoraires.

12) Par lettre du 11 juin 2010, l’AFC-GE a demandé à A______ de lui remettre les documents suivants :

- une copie des comptes de bilan et de résultat pour les exercices 2002 à 2005 de E______ SA, société rattachée au groupe appartenant à MM. J______ et K______, et ayant effectué un prêt à D______ SA pour le financement de la participation de cette dernière dans A______, cédée le 1er janvier 2000 ;

- une copie des décisions de taxation ICC et IFD 2002 à 2005 de E______ SA.

Enfin, l’AFC-GE souhaitait savoir si E______ SA avait bénéficié d’un statut fiscal particulier pendant ces mêmes années.

13) Le 6 juillet 2010, A______ a remis à l’AFC-GE les documents demandés et répondu que E______ SA n’avait pas bénéficié d’un statut fiscal particulier.

14) Par quatre décisions séparées du 14 octobre 2010, l’AFC-GE a rejeté l’ensemble des réclamations 2003 et 2004.

Les honoraires excessifs devaient être considérés comme une distribution dissimulée de bénéfice, au sens des art. 12 let. h de la loi sur l’imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15) et 58 al. 1 let. b de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11).

15) Le 15 novembre 2010, A______ a recouru contre ces décisions auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), dont les compétences ont depuis le 1er janvier 2011 été reprises par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à l’annulation des reprises litigieuses.

Le montant des honoraires non admis correspondait à la rubrique « intérêts débiteurs » des comptes de charges de D______ SA, dont elle remettait les états financiers pour les années 2003 et 2004. Ces charges n’avaient pas été facturées à A______ et n’avaient dès lors pas été imposées chez elle. Il ressortait de ses comptes que le montant des frais financiers encourus par elle en 2003 était de CHF 137’768.- et de CHF 124’916.- pour 2004. Ces montants n’incluaient donc pas les sommes de CHF 140’286.- pour 2003 et de CHF 148’531.- pour 2004 que D______ SA lui aurait prétendument facturées, comme le soutenait l’AFC-GE.

D______ SA et A______ ne constituaient pas une même société sur le plan économique et fiscal. Il s’agissait bien de deux sociétés anonymes ayant chacune une personnalité juridique propre.

Pour le surplus, A______ persistait dans les termes de ses réclamations, renvoyant en particulier aux explications fournies à l’AFC-GE par courrier du 28 juin 2005.

16) Dans sa réponse du 30 mai 2011, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

a. La société H______ SA (nouvelle) avait fait l’objet de diverses opérations et restructurations.

M. J______, M. K______, Monsieur Z______, Monsieur AA______ et Monsieur AB______ apparaissaient de manière récurrente dans l’administration des sociétés G______ SA, A______, D______ SA et E______ SA.

Au 1er janvier 2000, E______ SA, à Fribourg, avait vendu sa participation dans A______ à D______ SA, société du groupe détenue par MM. J______ et K______. Le montant de l’acquisition avait été financé par un prêt de E______ SA à D______ SA. Cette dernière détenait donc A______ à 100 %.

Le 1er janvier 2006, A______ avait fusionné avec sa filiale G______ SA. La nouvelle entité avait ensuite été absorbée par sa société mère, D______ SA. Cette dernière avait changé sa raison sociale en celle de son ex-fille, soit H______ SA (nouvelle), et transféré son siège de Fribourg à F______ (Genève). Le 21 décembre 2006, H______ SA avait été radiée du registre du commerce par suite de fusion, ses actifs et passifs ayant été repris par E______ SA, laquelle avait changé sa raison sociale en B______ SA.

b. Lors d’un déplacement du service du contrôle de l’AFC-GE dans les locaux de la contribuable le 6 avril 2005, M. Z______ lui avait présenté une convention, sur laquelle figurait la rémunération des services rendus par D______ SA à A______, soit « l’assistance dans la gestion stratégique et dans la gestion informatique en mettant à sa disposition du personnel hautement qualifié ».

c. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il appartenait à la société de prouver que les prestations litigieuses étaient justifiées par l’usage commercial, afin que les autorités fiscales puissent s’assurer que seules des raisons commerciales, et non les étroites relations personnelles et économiques entre la société et le bénéficiaire de la prestation, avaient conduit à la prestation insolite.

d. E______ SA avait consenti à D______ SA un prêt pour financer l’acquisition de sa participation dans A______. Les intérêts passifs sur ce prêt dans D______ SA se retrouvaient chez E______ SA en tant qu’intérêts actifs. Toutefois, si les comptes des sociétés E______ SA, D______ SA et A______ étaient consolidés sur le plan suisse, la situation serait neutre au niveau du bénéfice imposable consolidé, pour autant que E______ SA ne soit pas au bénéfice d’un statut fiscal particulier sur le plan cantonal fribourgeois au cours des périodes fiscales concernées, ce que la contribuable avait d’ailleurs confirmé par courrier du 6 juillet 2010. L’AFC-GE reconnaissait cependant que ce raisonnement était erroné, car le droit fiscal suisse ne connaissait ni n’appliquait de fiscalité de groupe ou d’imposition de groupe. Les deux dernières phrases figurant sous « observations » dans les procès-verbaux de taxation 2003 et 2004 étaient par conséquent erronées (« D______ SA et H______ SA ne constituent en réalité qu’une seule et même entité économiquement et fiscalement. Dans une consolidation de leurs comptes respectifs, la participation dans H______ SA, le prêt l’ayant financé en partie ainsi que les intérêts y relatifs n’apparaîtraient plus »).

e. Les honoraires versés par A______ à D______ SA étaient excessifs. Les quatre conditions cumulatives caractérisant une distribution dissimulée de bénéfice étaient réalisées.

Tout d’abord, en acceptant de payer des honoraires excessifs à D______ SA, A______ avait octroyé à celle-ci une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante. Le principe de pleine concurrence n’avait pas été respecté et, partant, la contribuable n’aurait pas accordé cette prestation dans de telles conditions à un tiers : dans le cadre des sociétés de service, il était d’usage d’utiliser la méthode du prix de revient majoré. Cette méthode consistait à permettre à la société affiliée de couvrir ses frais et de générer une marge bénéficiaire appropriée (« cost plus »). Cette marge adéquate était généralement fixée à 5 % des dépenses engagées pour les sociétés de service afin de satisfaire aux normes fiscales. Cette méthode ne prenait en compte que les frais généraux afférents à l’activité de services, qui seraient susceptibles d’être refacturés à des clients avec une marge bénéficiaire, dans des circonstances identiques.

Pour 2003, considérant un total de frais généraux admis de CHF 350’848.-, les honoraires admis se montaient à CHF 368’390.- (CHF 350’848.- x 105 %). Les honoraires excessifs s’élevaient donc à CHF 155’726.- (CHF 524’116.- comptabilisés - CHF 368’390.- admis). Or, seule une reprise de CHF 140’286.-, par conséquent favorable à la contribuable, avait été effectuée. Si les honoraires comptabilisés étaient admis en totalité, la marge bénéficiaire s’élèverait à 49 % au lieu de 5 %, soit près de dix fois la marge minimum usuelle admise, ce qui paraissait peu vraisemblable économiquement.

Selon le même calcul, le total des frais généraux admis pour l’année 2004 était de CHF 378’345.-. Considérant une marge de 5 %, les honoraires admis s’élevaient à CHF 397’262.- (CHF 378’345.- x 105 %). Or, A______ en avait comptabilisé CHF 519’629.-, soit une somme supérieure de CHF 122’367.-. Une reprise de CHF 148’531.-, soit une différence défavorable à la contribuable de CHF 26’164.-, avait été effectuée. Si l’AFC-GE avait admis la totalité des honoraires comptabilisés, la marge bénéficiaire se serait élevée à 37 % au lieu de 5 %, soit plus de sept fois la marge minimum usuelle admise, ce qui paraissait également peu vraisemblable économiquement.

De plus, il apparaissait que des amortissements de CHF 128’839.- apparemment pratiqués sur les équipements et installations dans D______ SA, avaient plus que doublé par rapport à ceux pratiqués en 2003, ce qui permettait de douter de la justification totale desdits amortissements. En conséquence de quoi, la différence de CHF 26’164.- signalée en défaveur de la contribuable était sujette à caution.

Ensuite, la prestation octroyée, à savoir les honoraires, avait été versée à l’actionnaire unique de la contribuable, soit la société mère D______ SA.

Enfin, la disproportion entre la prestation de A______ et la contre-prestation de D______ SA était manifeste compte tenu de son ampleur, de sorte que les organes de A______ auraient pu se rendre compte de l’avantage qu’ils accordaient.

17) Par jugement du 5 décembre 2011 (JTAPI/1418/2011), le TAPI a admis le recours de A______, renvoyé le dossier à l’AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation dans le sens des considérants et mis un émolument de CHF 500.- à la charge de l’AFC-GE.

18) Par acte déposé le 13 janvier 2012, l’AFC-GE a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation et à la confirmation (recte : au rétablissement) de ses décisions du 14 octobre 2010.

19) Le 11 février 2013, la présidente du Conseil supérieur de la magistrature (ci-après : CSM) a écrit à la présidente de la chambre administrative. Monsieur AC______, juge assesseur auprès du TAPI, ayant siégé lors de la délibération du jugement précité, s’avérait être domicilié dans le canton de Vaud depuis le mois de septembre 2010, de sorte que depuis lors, il ne remplissait plus les conditions d’éligibilité.

20) Par arrêt du 5 mars 2013 (ATA/137/2013), la chambre administrative a partiellement admis le recours de l’AFC-GE, annulé le jugement du TAPI du 5 décembre 2011 et renvoyé la cause à ce dernier pour nouveau jugement, celui-ci devant être délibéré dans une composition régulière.

Depuis septembre 2010, M. AC______ n’avait pas l’exercice des droits politiques à Genève. Le TAPI avait par conséquent siégé le 5 décembre 2011 dans une composition irrégulière.

21) Statuant à nouveau, le TAPI a admis le recours de A______ par jugement du 14 juin 2013, et renvoyé le dossier à l’AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation ICC et IFD 2003 et 2004 dans le sens des considérants.

La méthode du prix de revient majoré (« cost plus ») que l’AFC-GE avait appliquée pour déterminer le montant des honoraires admissibles facturés par D______ SA n’était pas adéquate, au vu de la circulaire n° 4 « Imposition des sociétés de service » de l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) du 19 mars 2004 (ci-après : la circulaire n° 4). La détermination de la marge bénéficiaire des sociétés de service devait s’effectuer selon des fourchettes appropriées pour chaque cas d’espèce, en application du principe de pleine concurrence. Faute pour l’AFC-GE d’avoir fourni des éléments de comparaison dans le domaine d’activité en cause, il n’apparaissait pas que les pourcentages de marge bénéficiaire de 37 et 49 % calculés aient été insolites. Les comptes 2003 et 2004 de A______ et de D______ SA n’apportaient pas davantage d’informations sur l’existence d’une distribution dissimulée de bénéfice. L’AFC-GE n’avait pas établi de manière concluante l’existence d’une prestation appréciable en argent à l’actionnaire, comme cela lui incombait en application des règles de répartition du fardeau de la preuve en matière de dissimulation de bénéfice. Partant, les reprises litigieuses effectuées sur l’ICC et l’IFD 2003 et 2004 étaient annulées.

22) Le 26 juin 2013, l’AFC-GE a recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative, concluant à son annulation et à la confirmation (recte : au rétablissement) de ses décisions du 14 octobre 2010.

La TAPI n’avait pas examiné le grief selon lequel des clients tiers n’accepteraient jamais de payer des honoraires afférents à la refacturation d’intérêts et de frais sur des dettes qui finançaient des participations n’ayant manifestement aucun lien avec la réalisation des prestations de services rendus.

Il se contredisait en affirmant, d’une part, que A______ niait avoir pris à sa charge les intérêts sur l’emprunt en question, alors que, d’autre part, il relevait dans la partie « en fait » que selon la contribuable, la participation de D______ SA dans sa société était un actif nécessaire à la réalisation des services rendus. Si l’on suivait ce raisonnement, alors l’emprunt qui avait financé cette participation constituait également un passif nécessaire à la réalisation des services rendus, ce qui rendait plus vraisemblable encore le fait que, d’une manière ou d’une autre, la charge des intérêts sur cet emprunt avait été refacturée à A______. Il en découlait que cette charge n’était pas justifiée par l’usage commercial dans la mesure où les dettes qui finançaient des participations n’avaient manifestement aucun lien avec la réalisation des prestations des services rendus. Si l’intimée entendait contester cette argumentation, il lui appartenait d’apporter la preuve qu’elle n’avait pas pris à sa charge les intérêts sur l’emprunt en question.

La circulaire n° 4 précisait que la méthode du « cost plus » n’était certes plus une méthode adéquate pour des services de nature financière ou des fonctions de management, mais qu’elle pouvait l’être à titre tout à fait exceptionnel. En l’espèce, elle considérait que cette exception s’appliquait pour la démonstration chiffrée qu’elle avait effectuée. Les pourcentages de marge bénéficiaire de 37 % et 49 % étaient insolites dans la mesure où ils étaient entre sept et dix fois plus élevés que la marge usuelle de 5 % appliquée encore actuellement par la grande majorité des sociétés de service sur la base de la méthode du « cost plus ». L’ampleur de l’écart entre la marge bénéficiaire pratiquée par D______ SA et la marge bénéficiaire usuelle de 5 % appliquée par la plupart des sociétés de service déployant leurs activités en faveur d’autres sociétés du groupe auquel elles sont rattachées, était telle qu’elle constituait un indice suffisamment concluant pour permettre d’établir l’existence d’une prestation appréciable en argent à l’actionnaire, consentie par A______.

23) Le même jour, le juge délégué a transmis le recours aux parties en leur fixant un délai pour répondre au 11 juillet 2013 pour le TAPI, et au 26 juillet 2013 pour A______ et l’AFC-CH.

24) Le 10 juillet 2013, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d’observations.

25) Dans sa réponse du 15 juillet 2013, A______ a conclu au rejet du recours et à la condamnation de l’AFC-GE au versement d’une allocation de CHF 6’000.- pour couvrir les frais de sa mandataire.

Elle avait apporté la preuve que les charges financières de D______ SA ne lui avaient pas été refacturées. Toutes les preuves nécessaires figuraient dans son recours du 15 novembre 2010. L’AFC-GE avait choisi arbitrairement d’appliquer la méthode du « cost + 5 ». Elle n’en avait d’ailleurs fait mention pour la première fois que dans sa réponse au TAPI du 30 mai 2011, et non dans ses décisions sur réclamation. L’AFC-GE démontrait elle-même par ses calculs que cette méthode était utilisée de manière arbitraire, dès lors qu’elle aboutissait à des différences en faveur de la société de CHF 15’440.- pour 2003 et en défaveur de CHF 26’164.- pour 2004 par rapport aux montants repris, et cela, sans justification de calculs précis.

Il appartenait en principe à l’autorité fiscale de prouver l’existence de prestations appréciables en argent sans contre-prestation. Elle n’avait donc pas à supporter les conséquences d’un manque de preuves de la part de l’AFC-GE, à moins que l’on puisse lui reprocher une violation de ses devoirs de collaboration. Or, elle y avait toujours satisfait.

En soutenant que malgré les principes ressortant de la circulaire n° 4, c’était par « mesure de simplification et faute d’être en mesure de proposer valablement une méthode autre que celle du cost plus 5 % qui soit plus conforme aux prix de pleine concurrence », l’AFC-GE ne faisait que persister dans ses arguments, n’apportait aucun élément de fait nouveau et ne prouvait en rien l’existence d’une prestation appréciable en argent.

26) Le 29 juillet 2013, le juge délégué a communiqué la détermination de A______ aux parties.

27) Aucune d’elles n’ayant formulé de requête complémentaire dans le délai imparti au 8 août 2013, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17).

S’agissant des règles de procédure, la LPA est applicable dans la mesure où la LPFisc n’y déroge pas (art. 2 al. 2 LPFisc).

2) Selon la recourante, les honoraires facturés par D______ SA à la contribuable sont excessifs. Cela impliquerait des reprises sur bénéfice de CHF 140’286.- pour 2003 et de CHF 148’531.- pour 2004 au titre de distribution dissimulée du bénéfice de la part de A______ à sa société-mère, qui la détient à 100 %.

Elle estime qu’en l’espèce, la méthode du coût majoré peut être employée pour déterminer la marge bénéficiaire admise de D______ SA, pour les services rendus à la contribuable.

3) Aux termes de l’art. 57 LIFD, l’impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Selon l’art. 58 al. 1 LIFD, le bénéfice net imposable comprend notamment le solde du compte de résultats (let. a), ainsi que tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultats, qui ne servent pas à couvrir des dépenses justifiées par l’usage commercial (let. b). Au nombre de ces prélèvements figurent les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l’usage commercial (let. b, 5ème tiret).

En matière d’ICC, la LHID dispose que l’impôt sur le bénéfice a pour objet l’ensemble du bénéfice net, y compris les charges non justifiées par l’usage commercial portées au débit du compte de résultats (art. 24 al. 1 let. a LHID). L’art. 12 let. h LIPM prévoit quant à lui que les allocations volontaires à des tiers et les prestations de toute nature fournies gratuitement à des tiers ou à des actionnaires de la société sont considérées comme bénéfice net imposable. Bien qu’elles ne le mentionnent pas expressément, les deux dispositions susmentionnées visent notamment les distributions dissimulées de bénéfice, soit des prélèvements qui ne sont pas conformes au droit commercial et qui doivent donc être réintégrés au bénéfice imposable. Ainsi, même s’il est rédigé différemment de l’art. 24 al. 1 let. a LHID, l’art. 12 let. h LIPM est conforme à cette disposition (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_18/2011 du 31 mai 2011 consid. 5.1 et les références citées).

4) Le droit fiscal suisse ne connaît pas de régime spécial pour les groupes de sociétés. Les sociétés d’un groupe formant une unité économique doivent ainsi être traitées comme des sujets indépendants (ATA/684/2010 du 5 octobre 2010). Les opérations entre les sociétés d’un groupe doivent intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence (principe du « dealing at arm’s length »). Cela vaut tant pour le choix des formes juridiques que pour la fixation des montants (ATF 119 Ib 116 consid. 2 p. 119 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_291/2013 et 2C_292/2013 du 26 novembre 2013 consid. 4.1 ; 2C_834/2011 du 6 juillet 2012 consid. 2.3 ; 2C_895/2008 du 9 juin 2009 consid. 4.2 ; 2A.588/2006 du 19 avril 2007 consid. 4.2 ; 2A.355/2004 du 20 juin 2005 consid. 2.2).

5) Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il y a prestation appréciable en argent - également qualifiée de distribution dissimulée de bénéfice - devant être réintégrée dans le bénéfice imposable de la société, lorsque les quatre conditions cumulatives suivantes sont réalisées : 1) la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante et se trouve, par là même, appauvrie ; 2) cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne la touchant de près ; 3) elle n’aurait pas été accordée dans de telles conditions à un tiers ; 4) la disproportion entre la prestation et la contreprestation est manifeste, de telle sorte que le caractère insolite de la prestation est reconnaissable par les organes de la société (ATF 119 Ib 431 consid. 2b p. 435 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_386/2012 et 2C_387/2012 du 16 novembre 2012 consid. 5 ; 2C_18/2011 du 31 mai 2011 consid. 5.1 ; 2C_421/2009 du 11 janvier 2010 consid. 3.1 ; ATA/346/2014 du 13 mai 2014 et la jurisprudence citée).

6) a. Pour juger de la disproportion d’une prestation effectuée en faveur d’un porteur de parts, par une société apparentée à celui-ci (1ère des quatre conditions précitées), il convient d’examiner si ladite prestation aurait été octroyée dans la même mesure, à un tiers étranger à la société. Autrement dit, il s’agit de vérifier si le principe de pleine concurrence est satisfait. Dans l’affirmative, la prestation est réputée reposer effectivement sur le rapport contractuel concerné et toute distribution dissimulée de bénéfice peut être écartée (Robert DANON, Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l’impôt fédéral direct, 2008, p. 746 n. 107 ad art. 57-58 et les références citées).

b. La mise en œuvre du principe de pleine concurrence suppose l’identification de la valeur vénale du bien transféré ou du service rendu. Lorsqu’il existe un marché libre, les prix de celui-ci sont déterminants et permettent une comparaison effective avec les prix appliqués entre sociétés associées (ATF 140 II 88 consid 4.2).

Selon la circulaire n° 4, s’il n’existe pas de marché libre permettant une comparaison effective, la détermination de la marge bénéficiaire imposable des sociétés de service doit s’effectuer en application du principe de pleine concurrence (« at arm’s length principle »), sur la base de prestations comparables entre tiers (« méthode du prix comparable ») et au moyen de fourchettes de marges appropriées pour chaque cas d’espèce. Le principe « at arm’s lenght » est aussi applicable s’agissant de choisir la méthode de détermination de la marge bénéficiaire. Toute société qui estime que la détermination de sa marge bénéficiaire actuelle est trop élevée doit apporter la preuve documentée que le maintien de cette marge serait contraire aux principes qui précèdent. Ce n’est que dans ce cas exceptionnel que les administrations cantonales seraient autorisées à fixer une marge inférieure.

c. À défaut de transaction comparable, la détermination du prix de pleine concurrence s’effectue selon d’autres méthodes, telles que la méthode du coût majoré (« cost plus ») ou celle du prix de revente, qui font partie, à côté de la méthode du prix comparable précitée, des méthodes traditionnelles fondées sur les transactions selon la classification opérée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière de prix de transfert (Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales, Editions OCDE, 2010, p. 67 ss ; ATF 140 II 88 précité et les références citées).

La méthode du coût majoré consiste à déterminer les coûts supportés par la société qui fournit la prestation, à quoi s’ajoute une marge bénéficiaire considérée comme un bénéfice minimal compte tenu des fonctions exercées et des conditions du marché. Cette marge bénéficiaire équivaut, selon une lettre-circulaire de l’AFC-CH du 17 septembre 1997, aujourd’hui remplacée par la circulaire n° 4, à 5 % du total des prix de revient, ou 1/12ème du total des salaires (ATF 140 II 88 précité consid. 4.2). Si la comparaison avec des tiers fait apparaître des taux plus élevés, ces derniers sont déterminants et doivent être appliqués (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_603/2012 du 10 décembre 2012 consid. 5.2).

Sous réserve de cas exceptionnels, la méthode du coût majoré n’est aujourd’hui plus employée pour des services de nature financière ou des fonctions de management, la circulaire n° 4 considérant cette méthode comme inadéquate (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_291/2013 et 2C_292/2013 du 26 novembre 2013 consid. 4.2).

7) a. Selon un principe consacré, il incombe à l’autorité fiscale de démontrer l’existence d’éléments créant ou augmentant la charge fiscale, alors que le contribuable supporte le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. S’agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d’en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l’échec de cette preuve (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; ATF 121 II 257 consid. 4 c.aa ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_477/2009 du 8 janvier 2010 consid. 3.5 et 2C_199/2009 du 14 septembre 2009 consid. 3.1 ; ATA/339/2014 du 13 mai 2014 ; ATA/232/2014 du 8 avril 2014 ; ATA/532/2013 du 27 août 2013 et les références citées).

b. En ce qui concerne les prestations appréciables en argent faites par la société à ses actionnaires sans contre-prestation, c’est en principe à l’autorité fiscale qu’il appartient de les prouver. Le contribuable n’a donc pas à supporter les conséquences d’un manque de preuves, à moins qu’on ne puisse lui reprocher une violation de ses devoirs de collaboration (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_589/2013 et 2C_590/2013 du 17 janvier 2014 consid. 7.2 ; 2C_60/2013 et 2C_61/2013 du 14 août 2013 consid. 6.1 ; 2C_76/2009 du 23 juillet 2009 consid. 2.2).

c. Si cette preuve est apportée, il appartient à la société contribuable d’établir que la prestation constitue une charge justifiée par l’usage commercial. Certes, il ne saurait être question que les autorités fiscales se prononcent sur l’opportunité de tel poste de charges, en substituant leur propre appréciation à celle de la direction de l’entreprise. Néanmoins, la société contribuable doit prouver que les prestations en question sont justifiées par l’usage commercial, afin que les autorités fiscales puissent s’assurer que seuls des motifs commerciaux, et non les étroites relations personnelles et économiques entre la société et le bénéficiaire de la prestation, ont conduit à la prestation (ATF 119 Ib 431 consid. 2c ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_386/2012 et 2C_387/2012 précités consid. 5 ; 2A.249/2003 du 14 mai 2004 consid. 3.2 ; ATA/138/2014 du 11 mars 2014 ; ATA/829/2013 du 17 décembre 2013).

8) En l’espèce, il s’agit d’examiner si les conditions permettant de retenir que les prestations litigieuses constituent une distribution dissimulée du bénéfice sont réalisées, étant rappelé que la charge de cette preuve incombe à l’AFC-GE.

La première condition consiste à établir que H______ SA aurait effectué une prestation sans obtenir de prestation correspondante de la part de D______ SA. Pour 2003, la contribuable a versé à D______ SA un total d’honoraires de CHF 448’813.-. Pour 2004, ces honoraires se sont élevés à CHF 519’629.-. En échange, comme cela ressort de la convention signée entre les deux sociétés, D______ SA a fourni à A______ des services d’«assistance dans la gestion stratégique et dans la gestion informatique en mettant à sa disposition du personnel hautement qualifié ». Par lettre du 28 juin 2005 et à la demande de l’AFC-GE, la contribuable a par ailleurs expliqué par des exemples concrets les bénéfices que le savoir-faire de MM. J______ et K______ avaient eu sur le chiffre d’affaires de la société. Il ressort en outre des comptes des sociétés E______ SA et D______ SA que les intérêts du prêt ayant permis l’acquisition de la participation de D______ SA dans A______ figurent à l’actif de E______ SA, respectivement au passif de D______ SA.

L’AFC-GE soutient quant à elle que les honoraires facturés par D______ SA à la contribuable sont excessifs et se fonde sur la méthode du prix majoré pour déterminer la marge bénéficiaire que D______ SA aurait dû appliquer.

Comme le relève à juste titre l’AFC-GE, cette méthode n’est pas totalement prohibée par la circulaire n° 4. Toutefois, comme cela ressort du texte clair de cette dernière et de la jurisprudence y relative du Tribunal fédéral, la méthode du prix majoré ne doit être employée qu’en dernier recours. Elle ne peut, en effet, être envisagée que lorsqu’il n’existe pas de marché libre permettant une comparaison effective avec les prix appliqués entre sociétés associées et lorsque, à défaut de transaction comparable, la méthode du prix comparable ne peut pas non plus trouver application. Or, il ne ressort pas du dossier que l’AFC-GE ait tenté de démontrer par le biais d’une autre méthode le caractère excessif des honoraires contestés, ni qu’elle ait cherché à expliquer pourquoi seule la méthode du prix majoré devait s’appliquer in casu, se contentant de soutenir au contraire qu’en l’espèce, elle permettait de démontrer que le taux de marge appliqué par D______ SA était insolite.

Il ressort de ce qui précède que l’AFC-GE n’a pas suffisamment démontré, comme il lui appartenait de le faire, que les honoraires litigieux ont été versés par la contribuable sans contre-prestation correspondante. De plus, il ne ressort pas de ce qui précède que la contribuable aurait manqué à ses devoirs de collaboration, justifiant un renversement du fardeau de la preuve. A______ a, au contraire, fourni tous les éléments dont elle disposait pour justifier son point de vue, l’AFC-GE n’expliquant d’ailleurs pas pourquoi elle a écarté les informations contenues dans le courrier de l’intimée du 28 juin 2005.

Dès lors que la première des conditions cumulatives précitées fait défaut, il y a lieu d’admettre que les honoraires payés à D______ SA par la contribuable n’étaient pas excessifs et ne constituaient dès lors pas une distribution dissimulée de bénéfice. Partant, les reprises effectuées sur les taxations ICC et IFD 2003 et 2004 par l’AFC-GE n’avaient pas lieu d’être et doivent être annulées.

9) Mal fondé, le recours sera rejeté et le jugement du TAPI confirmé.

10) Malgré l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu, en application de l’art. 87 al. 1 2ème phr. LPA. Une indemnité de procédure de CHF 1’500.- sera allouée à A______ (actuellement B______ SA) au titre de participation à ses frais de mandataire devant la chambre de céans (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 juin 2013 par l’administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 juin 2013 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1’500.- à B______ SA à la charge de l’État de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à l’administration fiscale cantonale, à B______ SA, représentée par Fiduciaire Verifid SA, mandataire, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Dumartheray et Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :