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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/958/2022

ATA/102/2023 du 31.01.2023 sur JTAPI/1145/2022 ( PE ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/958/2022-PE ATA/102/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 janvier 2023

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______ recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 octobre 2022 (JTAPI/1145/2022)


EN FAIT

A. a. Madame A______, née le ______ 1978, est ressortissante des Philippines.

b. Le 27 août 2019, elle a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande de régularisation de ses conditions de séjour sous l’angle du cas de rigueur, subsidiairement de l’« opération Papyrus ».

c. Par décision du 25 février 2022, l’OCPM a refusé d’accéder à la requête de Mme A______ et par conséquent de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM et a prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 25 avril 2022 pour quitter le territoire.

B. a. Par acte du 26 mars 2022, Mme A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, subsidiairement au renvoi de la cause à l’OCPM pour nouvel examen de son dossier.

b. Par jugement du 31 octobre 2022, le TAPI a rejeté le recours. Selon le suivi des envois de la Poste, le pli contenant ce jugement a été réceptionné par le mandataire de Mme A______ le 4 novembre 2022 à 10h01.

C. a. Par acte posté le 14 décembre 2022 à 10h22, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant préalablement à la confirmation de l'effet suspensif attaché au recours, et principalement à l'annulation du jugement attaqué, à ce qu'il soit ordonné à l'OCPM de soumettre son dossier au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) avec un préavis positif, et à ce qu'il soit renoncé à la renvoyer de Suisse.

Son avocat lui avait transmis le jugement attaqué en lui disant qu'elle avait jusqu'au 3 décembre 2022 pour « rassembler CHF 1'500.- pour déposer un recours ». Elle avait déjà dû payer CHF 6'000.- depuis le début de la procédure et n'avait pas cette somme à disposition. Quand elle avait réussi à trouver une solution le 6 décembre 2022, il lui avait dit que c'était trop tard. Depuis, elle avait appris qu'elle aurait pu demander à bénéficier de l'assistance juridique, mais son avocat ne lui en avait pas parlé. Elle avait ainsi manqué le délai pour recourir et demandait une restitution de délai au sens de l'art. 16 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

b. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2.             Se pose la question du respect du délai de recours, la recourante demandant à bénéficier d'une restitution de délai au sens de l'art. 16 al. 3 LPA.

2.1 Selon l'art. 62 al. 1 let. a et b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le délai de recours contre une décision finale est de trente jours. Il court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 62 al. 3 1ère phr. LPA).

2.2 La décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution (art. 62 al. 4 LPA).

2.3 Les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 1ère phr. LPA).

2.4 En procédure administrative, lorsqu’un administré a constitué un avocat ou désigné un autre mandataire qualifié au sens de l’art. 9 LPA, cela entraîne la création d’un domicile de notification à l’adresse de ceux-ci Si l’administré, l’avocat ou le mandataire veulent qu’il en soit autrement, il leur appartient alors de l’indiquer clairement à l’autorité administrative (ATA/224/2020 du 25 février 2020 consid. 3b et l'arrêt cité).

2.5 La responsabilité du mandant ne saurait être dissociée de celle de son mandataire. En effet, le premier est responsable des actes de celui qui le représente et répond de toute faute de ses auxiliaires (ATA/271/2014 du 15 avril 2014 consid. 4).

2.6 Par ailleurs, selon la jurisprudence fédérale, les actes du représentant sont opposables au représenté comme les siens propres ; ce principe vaut également en droit public (arrêt du Tribunal fédéral 2C_280/2013 du 6 avril 2013 ; ATA/89/2018 du 30 janvier 2018 consid. 2).

3.             3.1 Les délais de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 ; ATA/96/2021 du 26 janvier 2021 consid. 3a).

3.2 Les cas de force majeure sont réservés, conformément à l'art. 16 al. 1 2ème phr. LPA. Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (SJ 1999 I 119 ; ATA/871/2019 du 7 mai 2019 et les références citées).

3.3 Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et la jurisprudence citée ; ATA/1028/2016 du 6 décembre 2016 consid. 4 ; ATA/735/2015 du 14 juillet 2015 consid. 3b et la jurisprudence citée), partant de son représentant. Il doit être de nature telle que le respect des délais aurait exigé la prise de dispositions que l'on ne peut raisonnablement attendre de la part d'un homme d'affaires avisé (ATA/633/2022 du 14 juin 2022 consid. 2a).

Le délai imparti par l’autorité peut être prolongé pour des motifs fondés si la partie en fait la demande avant son expiration (art. 16 al. 2 LPA). La restitution pour inobservation d’un délai imparti par l’autorité peut être accordée si la requérante ou le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d’agir dans le délai fixé. La demande motivée doit être présentée dans les dix jours à compter de celui où l’empêchement a cessé (art. 16 al. 3 LPA). L'art. 16 al. 3 LPA ne s'applique toutefois qu'aux délais fixés par l'autorité, et non aux délais légaux (ATA/1097/2022 du 1er novembre 2022 consid. 6b ; ATA/608/2016 du 12 juillet 2016 consid. 3).

4.             En l'espèce, le jugement du TAPI a été envoyé par pli recommandé. Selon le suivi des envois de la Poste, l'avocat constitué par la recourante l'a reçu le vendredi 4 novembre 2022, si bien que le délai de recours a commencé à courir le lendemain, soit le samedi 5 novembre 2022.

Dès lors, le délai de recours, qui tombait en principe le dimanche 4 décembre 2022, a été reporté au lendemain, premier jour ouvrable utile, et est donc arrivé à échéance le lundi 5 décembre 2022 à minuit. Le recours, posté le 14 décembre 2022, est ainsi manifestement tardif, ce que la recourante reconnaît elle-même.

Le motif invoqué à l’appui de la demande de restitution de délai est une mauvaise compréhension entre la recourante et son avocat, ou une mauvaise information de la part de celui-ci. Il ne s’agit à l’évidence pas d’un motif comparable aux cas de force majeure cités ci-dessus. Par ailleurs, la référence au bas du jugement querellé aux art. 62 al. 1 let. a et 65 LPA ne constitue pas une fausse indication des voies de recours. En effet, tant la voie du recours à la chambre administrative que le délai de trente jours prévu aux dispositions précitées sont correctes. Quant à l'existence de l'assistance juridique, elle avait été signalée à la recourante dans le premier courrier que lui avait envoyé le greffe du TAPI, le 28 mars 2022.

Aucun motif ne permettant de retenir l’existence d’un empêchement imprévisible intervenu en dehors de la sphère d’influence du recourant et, singulièrement de son conseil, le délai de recours ne saurait être restitué en application de l’art. 16 al. 1 LPA. Partant, le recours sera déclaré irrecevable, sans échange d’écritures conformément à l'art. 72 LPA.

5.             Malgré l'issue du recours, compte tenu des circonstances, il sera renoncé à la perception d'un émolument (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du recours, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 14 décembre 2022 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 octobre 2022 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Balzli

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.