Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2164/2008

ACOM/90/2008 du 13.08.2008 ( CRUNI ) , REJETE

Recours TF déposé le 07.10.2008, rendu le 11.12.2008, REJETE, 2C_730/08
Résumé : (élimination)
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

A/2164/2008-CRUNI ACOM/90/2008

DÉCISION

DE

LA COMMISSION DE RECOURS DE L’UNIVERSITÉ

du 13 août 2008

 

dans la cause

 

 

 

Monsieur M______
représenté par Me Jacques Emery, avocat

 

 

contre

 

 

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 

et

 

 

FACULTÉ DES SCIENCES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES

 

 

(Elimination)


EN FAIT

1. Le 29 mars 2007, Monsieur M______, de nationalité allemande, domicilié 21, avenue Y______ à Genève, a déposé une demande d'immatriculation à l'université de Genève afin de suivre, dès l'année académique 2007-2008, les enseignements du baccalauréat universitaire en relations internationales à la faculté des sciences économiques et sociales (ci-après : SES).

2. Compte tenu de ses études universitaires antérieures, M. M______ a été admis et il a été mis au bénéfice d'une équivalence pour un cours d'économie politique I qu'il avait préalablement suivi à l'université de Neuchâtel. Les modalités de déroulement de son cursus ont été précisées par le doyen de la faculté dans un courrier du 20 décembre 2007 faisant référence notamment à l'article 8 du règlement d'études de la faculté.

3. En janvier 2008, M. M______ a demandé à ce que d'autres cours suivis à l'université de Magdebourg soient également pris en considération.

4. Lors de la session d'examens de février 2008, M. M______ était inscrit pour huit examens. Il s'est présenté à six d'entre eux. Il était absent pour les deux autres, soit la gestion d'entreprise et les outils informatiques, sans aucune excuse ni motif quelconque.

Les six examens précités concernaient des branches obligatoires alors que les deux examens auxquels il ne s'était pas présenté correspondaient à des branches facultatives.

5. Le 8 février 2008, l'université a adressé à M. M______ le relevé de notation de cette session mentionnant qu'il était exclu de la faculté en raison de ses absences non justifiées à l'occasion des deux examens précités, et cela par application de l'article 21 alinéa 1 lettre a du règlement de la faculté.

Au pied de cette décision, il était indiqué que celle-ci pouvait faire l'objet d'une opposition dans les trente jours auprès du doyen.

6. Après avoir pris contact avec la conseillère aux études, M. M______ a signé, le 21 février 2008, un formulaire afin de faire opposition à cette décision. Il reconnaissait sa négligence. Ses absences étaient dues à ses expériences au sein d'autres facultés précédemment. Il ne pensait pas que ces deux absences auraient de telles conséquences. Il faisait part de sa motivation et demandait l'indulgence face à son manque d'expérience et sa méconnaissance des règles. Il sollicitait la levée de son exclusion.

7. Par décision du 14 mai 2008, le doyen de la faculté a signifié à M. M______, par pli recommandé, que sur rapport de la commission chargée d'instruire les oppositions, le conseil décanal avait décidé de rejeter son opposition en application de l'article 21 alinéa 1 lettre a précité. M. M______ n'avait invoqué aucune circonstance qui puisse être considérée comme un élément ou une circonstance extraordinaire au sens de l'article 22 alinéa 3 du règlement de l'université du 7 septembre 1988 (RU - C 1 30.06). L'égalité de traitement interdisait toute mesure exceptionnelle. La décision d'exclusion était ainsi maintenue.

8. Par acte posté le 16 juin 2008, M. M______ représenté par un avocat, a recouru auprès de la commission de recours de l'université (ci-après : CRUNI) et conclu à l'annulation de la décision attaquée. Outre les matières obligatoires, le recourant avait choisi des branches facultatives, telles la gestion d'entreprise et les outils informatiques. Lors de son inscription, il n'avait reçu ni le règlement de l'université ni celui relatif aux études du baccalauréat universitaire en relations internationales. Il avait suivi les cours dans toutes les matières pour lesquelles il était inscrit aux examens. Ne s'estimant pas prêt pour les matières facultatives et pensant pouvoir effectuer les examens le semestre suivant, il ne s'était présenté qu'aux examens relatifs aux matières obligatoires. Dans son opposition, il avait invoqué la bonne foi et sa croyance que les deux cours concernés étant facultatifs, il n'avait pas l'obligation de se présenter aux examens concernant ces cours facultatifs. Il sollicitait préalablement la restitution de l'effet suspensif et principalement l'annulation de la décision. Le règlement de la faculté ne reposait sur aucune base légale ; il se trouvait en contradiction manifeste avec le texte de la loi sur l'université du 26 mai 1973 (LU – C 1 30) et avec celui du RU relatif à celle-ci. L'article 21 du règlement de la faculté assimilait à un échec définitif l'absence sans motif valable d'un étudiant à un examen allant ainsi bien au-delà de la notion d'échec contenue dans le RU.

Si la base légale dudit règlement devait être admise, alors il conviendrait d'interpréter de manière téléologique l'article 21 du règlement de la faculté dont le texte n'était pas clair car rien ne permettait de penser qu'il s'appliquait aux examens facultatifs. Enfin, cette décision violait le principe d'égalité devant la loi consacré par l'article 8 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) : un étudiant ne se présentant pas à des examens obligatoires était sanctionné en raison de son désintérêt pour ses études, alors qu'un étudiant qui ne se présentait pas à deux examens facultatifs en raison de la mauvaise compréhension d'un texte, mais qui disposait des connaissances suffisantes pour poursuivre ses études, se trouvaient dans des situations dissemblables.

9. Le 26 juin 2008, la faculté s'est opposée à la restitution de l'effet suspensif.

10. Par décision du 3 juillet 2008 de la présidente de la CRUNI, la demande d'effet suspensif a été rejetée.

11. Le 22 juillet 2008, l'université a conclu au rejet du recours. Le recourant était soumis au règlement d'études adopté par le rectorat le 18 décembre 2007 avec effet au 1er septembre 2007. Ce règlement n'était nullement contraire à la LU pas plus qu'au RU. Ces textes étaient disponibles sur le site de l'université de Genève ainsi que sur celui du canton de Genève. Ils n'étaient pas distribués aux étudiants. Par référence à l'article 22 alinéa 2 RU énonçant deux hypothèses dans lesquelles les étudiants étaient éliminés, la faculté avait le pouvoir réglementaire d'assimiler à un échec la non-présentation d'un étudiant sans juste motif à un examen auquel il était dûment inscrit.

Il n'y avait pas lieu d'établir de différence entre les examens relatifs à des matières obligatoires ou à celles facultatives. Si le recourant avait mal compris le système d'études, il ne pouvait le reprocher à la faculté et la conseillère aux études était là pour l'aider. Il avait d'ailleurs eu recours à elle à plusieurs reprises.

Le règlement étant clair, il n'y avait pas lieu de l'interpréter. Le grief de violation d'égalité devant la loi devait être écarté.

Le recourant n'invoquait aucune circonstance exceptionnelle à l'appui de sa demande d'annulation de l'élimination.

12. L'université a produit le dossier du recourant et le règlement d'études en cause.

EN DROIT

1. Interjeté le 16 juin 2008 contre la décision sur opposition du 14 mai 2008 reçue le 16 mai 2008, le recours adressé à l'autorité compétente soit la CRUNI est recevable (art. 62 de la loi sur l’université du 26 mai 1973 - LU – C 1 30 ; art. 88 et 90 du règlement de l’université du 7 septembre 1988 - RU – C 1 30.06 ; art. 26 et 27 du règlement interne relatif aux procédures d’opposition et de recours du 25 février 1977 - RIOR).

2. a. Les conditions d'élimination des étudiants sont fixées par le règlement de l'université (art. 63D al. 3 LU). L'article 22 alinéa 2 RU dispose que l'étudiant qui échoue à un examen ou à une session d'examens auxquels il ne peut plus se présenter en vertu du règlement d'études (let. a) ou qui ne subit pas ses examens et ne termine pas ses études dans les délais fixés par le règlement d'études (let. b) est éliminé.

b. Le recourant est soumis au règlement d'études du baccalauréat universitaire en relations internationales 2007-2008 (ci-après  : REBU), entré en vigueur le 1er septembre 2007, même si celui-ci n'a été adopté par le rectorat que le 18 décembre 2007. C'est d'ailleurs en application de l'article 8 REBU que le recourant a bénéficié d'une équivalence, comme cela ressort expressément de la décision du doyen du 20 décembre 2007.

3. Le recourant conteste que le règlement de la faculté repose sur une base légale. L'article 63D LU prévoit expressément que les conditions d'élimination sont fixées par le RU et il convient de déterminer si, en prévoyant que l'absence non motivée à un examen équivaut à un échec définitif, comme le prévoit l'article 21 alinéa 1 lettre a du règlement, la faculté est allée au-delà du pouvoir réglementaire que lui confère l'article 22 alinéa 2 lettre A RU lequel prévoit l'élimination d'un étudiant qui ne subit pas les examen et ne termine pas ses études dans les délais fixés par le règlement d’études.

Le baccalauréat universitaire en relations internationales est décerné conjointement par la faculté SES, la faculté de droit et la faculté des lettres. Il est divisé en deux parties permettant d’acquérir respectivement 60 et 120 crédits, soit 180 au total, d’une durée de six à huit semestres (art. 1 al. 2, 10 al. 1 à 4, 11 al. 1 REBU).

En matière de contrôle des connaissances, une session ordinaire d’examens est organisée au terme de chaque semestre et une session extraordinaire en automne pour les étudiants ayant échoué aux sessions ordinaires, absents pour de justes motifs ayant annoncé leur retrait, conformément à l’article 17 alinéa 2 du REBU.

Le retrait aux examens de la première partie est exclu (art. 13, 17 al. 1 REBU).

Est enfin exclu de la faculté, en particulier, l’étudiant qui, sans dispense ou sans motif valable, ne s’est pas présenté à la totalité des examens de première partie lors des sessions ordinaires (art. 21 al. 1 let. a REBU ; ACOM/34/2008 du 2 avril 2008).

Or, le recourant ne s’est pas présenté à la totalité des examens de première partie lors des sessions ordinaires, sans aucun motif valable ni aucune dispense, aucune distinction n’étant opérée entre les branches facultatives et celles obligatoires.

En conséquence, le recourant ne satisfait pas aux conditions d’application de l’article 22 alinéa 2 lettre b RU, lequel couvre l’hypothèse de l’article 21 alinéa 1 REBU.

L’allégué du recourant, selon lequel cette dernière disposition instaurerait une cause d’échec non prévue par le RU, sera donc écarté

4. A cet égard, il sied de rappeler au préalable que la CRUNI a relevé en maintes occasions que l’étudiant qui ne satisfaisait pas aux conditions posées par le RU était éliminé et non exclu de la faculté. Elle a laissé indécise la question de savoir si le règlement d’études du baccalauréat universitaire qui consacre désormais cette exclusion était compatible avec l’article 22 RU (ACOM/45/2007 du 22 mai 2007).

Vu l’issue du présent litige, la question souffre de demeurer ouverte.

5. a. Il reste à examiner si le recourant peut bénéficier de circonstances exceptionnelles.

b. Selon l’article 22 alinéa 3 RU, il doit être tenu compte des situations exceptionnelles lors d’une décision d’élimination. Selon une jurisprudence constante, une situation peut être qualifiée d’exceptionnelle lorsqu’elle est particulièrement grave et difficile pour l’étudiant. Lorsque de telles circonstances sont retenues, la situation ne revêt un caractère exceptionnel que si les effets perturbateurs ont été dûment prouvés par le recourant. Cette jurisprudence est conforme au principe de l’instruction d’office (ACOM/41/2005 du 9 juin 2004 consid. 7c ; ACOM/13/2005 du 7 mars 2005, consid. 5). Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d’un large pouvoir d’appréciation, dont la CRUNI ne censure que l’abus (ACOM/69/2008 du 29 mai 2008et les références citées).

c. Selon la jurisprudence constante de la CRUNI, de graves problèmes de santé sont considérés comme des situations exceptionnelles (ACOM/50/2002 du 17 mai 2002) à condition toutefois que les effets perturbateurs aient été prouvés et qu’un rapport de causalité soit démontré par l’étudiant (ACOM/119/2002 du 1er novembre 2002). Quant aux difficultés financières ou économiques, elles ne sont pas suffisantes pour justifier une situation exceptionnelle. La CRUNI a, en effet, toujours considéré que de telles difficultés, comme le fait d'exercer une activité lucrative en sus de ses études, n'étaient pas exceptionnelles, même si elles constituaient à n'en pas douter une contrainte (ACOM/20/2005 du 7 mars 2005 consid. 5 et les références citées).

d. La CRUNI a aussi jugé que n’était pas non plus exceptionnel au sens de l’article 22 alinéa 3 RU (cf. ACOM/66/2008 du 28 mai 2008 et les références citées), le fait de devoir faire face à des problèmes financiers et familiaux qui, s’ils peuvent apparaître malheureux, font partie d’une réalité commune à de très nombreux étudiants (ACOM/81/2008 du 3 juillet 2008).

Le recourant n’allègue aucune circonstance d’une telle nature dont il n’aurait pas été tenu compte.

6. Enfin, le grief de violation du principe d’égalité de traitement sera écarté, le règlement n’opérant aucune distinction entre les examens obligatoires et ceux, facultatifs.

7. En conséquence, le recours sera rejeté.

Vu la nature du litige aucun émolument ne sera perçu (art. 33 RIOR). Vu l’issue de celui-ci, il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COMMISSION DE RECOURS DE L’UNIVERSITÉ

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 juin 2008 par Monsieur M______ contre la décision de l'Université de Genève du 14 mai 2008 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux articles 113 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Jacques Emery, avocat du recourant, à la faculté des sciences économiques et sociales, au service juridique de l’université, ainsi qu’au département de l’instruction publique.

Siégeants : Madame Hurni, présidente ;
Messieurs Schulthess et Bernard, membres

 

Au nom de la commission de recours de l’université :

la greffière :

 

 

 

C. Barnaoui-Blatter

 

la vice-présidente :

 

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :