Aller au contenu principal

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/1673/2020

ACJC/303/2021 du 05.03.2021 sur JTPI/9584/2020 ( SDF ) , RENVOYE

Normes : Cst.29.al2; CC.176; CC.163
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1673/2020 ACJC/303/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 5 MARS 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante et intimée d'un jugement rendu par la 10ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 6 août 2020, comparant par Me BG______, avocat, ______, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé et appelant, comparant par Me Karin Grobet Thorens, avocate, rue Verdaine 13, case postale 3776, 1211 Genève 3, en l'étude de laquelle il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/9584/2020 du 6 août 2020, reçu par les parties le 10 août 2020, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment autorisé B______ et A______ à vivre séparés (chiffre 2 du dispositif), attribué à cette dernière la jouissance exclusive du domicile conjugal sis [no.] ______, route 1______ à Genève (ci-après : domicile conjugal [à C______]) et du mobilier le garnissant (ch. 3), ordonné à celle-ci de donner accès à B______ audit domicile, afin qu'il puisse récupérer ses effets personnels et ses documents administratifs, à l'exclusion de tout autre bien (ch. 4), ordonné à celui-ci d'en restituer immédiatement les clés à son épouse, cette injonction étant prononcée sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP (ch. 5 et 6), condamné B______ à verser à A______, par mois et d'avance, à titre de contribution à son entretien, 65'000 fr. dès le 1er février 2020, sous déduction de 30'000 fr. versés le 6 mars 2020, 10'521 fr. versés le 18 mai 2020 et 30'000 fr. versés le 18 juin 2020 (ch. 7), arrêté les frais judiciaires à 10'800 fr., compensés partiellement avec les avances de frais versées par B______ en 200 fr. et par A______ en 1'000 fr. et mis à la charge des parties à raison de la moitié chacun (ch. 8), condamné B______ à payer 5'200 fr. à l'Etat (ch. 9) et A______ à payer 4'400 fr. à l'Etat (ch. 10), dit qu'il n'y avait pas lieu à l'allocation de dépens (ch. 11) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 12).

B. a. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 20 août 2020, A______ forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut, sous suite de frais, au renvoi de la cause au Tribunal pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.

A titre subsidiaire, elle conclut à ce que la production des pièces requises par ses soins en première instance dans ses bordereaux des 30 janvier, 20 mars et 29 mai 2020 soit ordonnée (devant la Cour), à ce qu'un délai lui soit octroyé pour modifier et compléter son mémoire d'appel, une fois ces pièces versées au dossier, à l'annulation du ch. 7 du dispositif du jugement et, cela fait, à la condamnation de son époux à lui verser, par mois et d'avance, 150'000 fr. au titre de contribution à son entretien, à compter du 1er février 2020, sous déduction de 30'000 fr. versés le 6 mars 2020, 10'521 fr. versés le 18 mai 2020 et 30'000 fr. versés le 18 juin 2020, ainsi qu'à lui verser une provisio ad litem de 70'000 fr.

Elle allègue des faits nouveaux (précisions quant à ses charges alléguées en première instance).

b. Par acte expédié au greffe de la Cour le 20 août 2020, B______ forme également appel contre le jugement du 6 août 2020, dont il sollicite l'annulation des chiffres 3, 4, 5, 6 et 7 de son dispositif. Il conclut, sous suite de frais partagés par moitié, à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement, à titre de contribution à l'entretien de son épouse, de laisser à celle-ci la jouissance du domicile conjugal et d'en assumer l'entier des frais, y compris de jardinage et de femme de ménage, ainsi que de lui verser 8'000 fr. par mois, sous imputation des sommes déjà versées à ce titre. Il conclut par ailleurs à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'il occupera la [maison dite] "E______".

A titre subsidiaire, il conclut, sous suite de frais partagés par moitié, à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement, à titre de contribution à l'entretien de son épouse, de laisser à celle-ci la jouissance du domicile conjugal et de lui verser 20'000 fr. par mois, sous imputation des sommes déjà versées à ce titre, à charge pour elle de s'acquitter de toutes les charges relatives au domicile conjugal, en particulier des frais hypothécaires, des frais accessoires (eau, chauffage, électricité) et des salaires du personnel de maison. Il conclut par ailleurs à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'il occupera la [maison] "E______" et de son engagement de ne perturber en rien la jouissance du domicile conjugal exercée par son épouse, sauf à s'y rendre occasionnellement, après l'avoir avertie, pour prendre des effets personnels.

Il a sollicité la suspension de l'effet exécutoire attaché au dispositif du jugement. Celle-ci a été admise par arrêt du 21 septembre 2020 pour ce qui est du chiffre 7 en tant qu'il l'a condamné à payer à son épouse 65'000 fr. par mois pour la période du 1er février au 31 juillet 2020. Elle a été refusée pour le surplus, étant dit qu'il serait statué sur les frais avec l'arrêt au fond.

Il allègue des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles (deux factures de juillet 2020 relatives au domicile conjugal, dont il ressort des frais d'eau, électricité et gaz de 3'000 fr. par mois). Il soutient avoir été empêché d'y procéder en première instance en raison de son confinement en Italie (COVID-19), ce qui l'avait privé de son accès auxdites pièces.

c. Le 16 septembre 2020, B______ allègue des faits nouveaux et produit une pièce nouvelle (versement de 30'000 fr. le 9 septembre 2020 en faveur de son épouse, à titre de contribution à son entretien, exécuté par D______ SPA, faute pour lui de disposer de liquidités, avec la référence suivante : "indemnité trimestrielle selon accord").

d. Dans sa réponse du 18 septembre 2020, A______ conclut au rejet de l'appel de son époux, sous suite de frais.

e. Dans sa réponse du 21 septembre 2020, B______ conclut au rejet de l'appel de son épouse. Il reprend nouvellement à titre principal sa conclusion subsidiaire tendant à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement de ne perturber en rien la jouissance du domicile conjugal exercée par son épouse, sauf à s'y rendre occasionnellement, et après l'avoir avertie, pour prendre des effets personnels. Il formule deux conclusions nouvelles, à savoir la condamnation de la précitée aux peines prévues à l'art. 292 CPC dans l'hypothèse où elle devait lui interdire d'accéder au domicile conjugal pour y récupérer ses effets personnels et à lui restituer immédiatement le véhicule de marque F______ sous la menace de cette peine.

Il allègue les faits nouveaux et produit les pièces nouvelles suivants :

- captures d'écran de réseaux sociaux démontrant selon lui que les dépenses de sa compagne "influenceuse" étaient prises en charge par des sponsors;

- échanges des parties du 28 août au 17 septembre 2020 dont il ressort ce qui suit : B______ a sollicité un accès au domicile conjugal le 1er septembre 2020 pour récupérer notamment un service de table G______ et de l'argenterie, des casseroles, un appareil à repasser, des draps et linges, ses valises, ses affaires de toilettes, ses boutons de manchettes et bijoux, un appareil de gymnastique, les photos de ses parents, une collection d'icônes et une pièce de sa collection "H______". A______ a refusé. Les motifs en étaient qu'elle avait fait déposer l'ensemble des effets personnels de son époux dans la [maison] "E______", laquelle était entièrement équipée, et que son époux avait déjà vidé le domicile conjugal en son absence d'une partie des biens le garnissant en janvier 2020;

- son courrier à son épouse du 17 septembre 2020 de mise en demeure de restituer un véhicule de marque F______ immatriculé à son nom dont il était propriétaire, son épouse étant pour sa part propriétaire d'un véhicule de marque I______ immatriculé à son propre nom.

f. Dans sa réplique du 5 octobre 2020, B______ allègue des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles (échange de courriers des parties des 25 et 30 septembre 2020 aux termes desquels le précité a relevé que son épouse était sur le point de procéder au changement des serrures de la propriété de J______ [France], ce à quoi A______ a répondu qu'elle bénéficiait de l'usufruit sur ce bien).

g. Par mémoire de réplique et duplique du 5 octobre 2020, A______ requiert la production de nouvelles pièces en mains de son époux relatives notamment à son acquisition le 10 décembre 2018 d'une montre K______ de 220'000 fr., aux frais dont il s'est acquittés en lien avec la propriété de J______ par le biais de L______ INC (385 EUR de sécurité pour juillet 2020 et 6'650 EUR de « pisciniste » pour avril à septembre 2020) ainsi qu'aux patrimoines de [des fondations] M______ et N______.

Elle allègue des faits nouveaux, soit notamment avoir été la seule utilisatrice du véhicule de marque F______ toujours stationné au domicile conjugal que lui avait offert son époux, que le 10 décembre 2018, il avait acquis une montre K______ au prix de 220'000 fr. ainsi qu'une montre au prix de 40'000 fr. qu'il lui avait offerte, que L______ INC avait procédé aux deux versements visés au paragraphe précédent et que M______ avait transféré 50'000 fr. le 13 septembre 2019 à la fondation N______ (dont il serait bénéficiaire).

h. Dans une seconde duplique du 22 octobre 2020, A______ allègue des faits nouveaux relatifs au contexte de la séparation du couple, notamment que son époux avait emporté en Italie des biens à son insu et continuait de vouloir décider de ses dépenses en refusant de s'acquitter de la contribution d'entretien, ce qui entrainait des effets graves sur sa santé.

i. Dans sa duplique du 22 octobre 2020, B______ allègue des faits nouveaux, notamment la démission de la gouvernante de sa propriété de J______, son annonce à son épouse de sa décision de vendre ce bien (faute de liquidités) et sa proposition adressée en vain à celle-ci en vue de régler leur séparation (versement de 3'000'000 fr. au moment de la vente de la propriété précitée et du domicile conjugal qu'il avait décidé de vendre également; contribution à son entretien de 10'000 fr. par mois à vie ; don des bijoux dont elle était en possession).

Il produit des pièces nouvelles liées aux faits ci-dessus, soit un échange des parties des 15 et 19 octobre 2020.

j. Le 27 octobre 2020,B______ s'est déterminé sur la duplique de son épouse du 22 octobre 2020.

k. Par plis du 28 octobre 2020, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

l. Le 2 novembre 2020, A______ a requis la tenue d'une audience, au motif que les parties n'avaient jamais été entendues, malgré ses requêtes dans ce sens en première instance, ce qui était contraire à l'art. 273 CPC.

m. A______ et B______ ont encore allégué des faits nouveaux, par courriers du 1er décembre 2020 de la première et du 3 décembre 2020 du second. La précitée a fait valoir que son époux refusait de s'acquitter depuis août 2020 de la contribution d'entretien résultant du jugement entrepris et se soustrayait à toute tentative de notification d'un commandement de payer. Le second a répondu avoir opposé la compensation aux prétentions de son épouse, en raison de ses versements à la précitée et de son paiement des charges de celle-ci directement à des tiers depuis décembre 2019.

C. a. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

A______, née le ______ 1950, et B______, né le ______ 1955, tous deux en Italie, sont originaires de O______ (VD). Ils ont contracté mariage le ______ 1994 aux Etats-Unis et ont conclu devant notaire à Genève le 7 décembre 1994 un contrat de mariage en séparation de biens.

Aucun enfant n'est issu de cette union. A______ est mère de deux enfants nés d'un premier lit, aujourd'hui majeurs.

B______ allègue avoir annoncé à son épouse à la fin de l'année 2019 avoir entretenu durant la vie commune une relation dont deux enfants sont nés (âgés d'environ quatre et six ans selon A______).

A la suite de cette annonce, depuis le 15 décembre 2019, les parties vivent séparées. L'époux s'est constitué un nouveau logement dans la maison dite "E______", sise chemin 4______ [no.] ______, [code postal] C______ [GE], à proximité immédiate du domicile conjugal, dans lequel est demeurée son épouse.

b. Le 27 janvier 2020, B______ a saisi le Tribunal d'une requête de mesures protectrices de l'union conjugale. Il a conclu notamment à ce que le Tribunal lui donne acte de son engagement à verser, par mois et d'avance, 8'000 fr. en mains de son épouse, à titre de contribution à son entretien, sous imputation des sommes déjà versées à ce titre, à lui laisser la jouissance du domicile conjugal dont il est propriétaire ainsi qu'à assumer lui-même l'entier des frais liés audit domicile, y compris les frais de jardinage et de femme de ménage. Il a, par ailleurs, conclu à ce que le Tribunal lui donne acte qu'il occupera la [maison] "E______" et de son engagement de ne perturber en rien la jouissance du domicile conjugal par A______, sauf à s'y rendre occasionnellement pour prendre des effets personnels.

Le 30 janvier 2020, A______ a, elle aussi, formé une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, assortie d'une requête de mesures superprovisionnelles. A ce dernier titre et sur mesures protectrices de l'union conjugale, elle a conclu notamment à ce que le Tribunal lui attribue la jouissance exclusive du domicile conjugal, à charge pour elle de s'acquitter des charges, ordonne à B______ de quitter ce domicile dans un délai de 5 jours dès le prononcé du jugement, en emportant ses effets personnels uniquement ainsi qu'à lui restituer immédiatement toutes les clés de celui-ci qu'il détient, sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP. Par ailleurs, elle a conclu à ce que le Tribunal dise que B______ contribuera à son entretien, par mois et d'avance, la première fois le 1er février 2020, d'un montant qui ne saurait être inférieur à 150'000 fr., ordonne qu'un inventaire conservatoire du patrimoine de B______ soit dressé et condamne celui-ci à lui verser une provisio ad litem de 70'000 fr.

A l'appui de ses allégations relatives aux ressources de son époux et aux postes du train de vie des parties durant la vie commune, elle a produit une note manuscrite non datée du précité (ci-après : la note manuscrite). Elle a par ailleurs requis la production d'un grand nombre de pièces en mains de celui-ci, de l'administration fédérale des contributions et de sept banques destinées à démontrer les ressources de son époux et les dépenses impliquées par le train de vie du couple.

c. Le 31 janvier 2020, la requête de mesures superprovisionnelles a été rejetée.

d. Le 28 février 2020, B______ a sollicité une prolongation au 31 mars 2020 du délai qui lui était imparti pour répondre et déposer toutes pièces utiles. Les motifs en étaient le nombre important d'allégués et de pièces déposées à l'appui de la requête formée à son encontre et le déménagement au 15 mars 2020 de l'étude de son conseil. Le Tribunal a prolongé le délai au 20 mars 2020.

e. Le 11 mars 2020, B______ a sollicité une prolongation au 7 avril 2020 de ce délai, étant retenu en quarantaine en Italie (COVID-19). Si les mesures prises par ce pays en raison de l'épidémie devaient être prolongées au-delà de la date annoncée du 3 avril 2020, son conseil disposerait du temps nécessaire pour s'organiser.

Le 18 mars 2020, il a sollicité une prolongation au 29 mai 2020 du délai, invoquant les circonstances exceptionnelles prévalant à ce stade dans le pays, le déménagement déjà évoqué et son impossibilité de quitter le territoire italien.

f. Le 20 mars 2020, A______ s'est déterminée sur la requête de son époux du 27 janvier 2020. Elle a produit des pièces complémentaires et requis la production en mains de celui-ci des factures relatives à la rénovation de sa voiture de collection de marque P______.

Elle a formé une requête de mesures superprovisionnelles tendant à l'attribution en sa faveur de la jouissance du domicile conjugal, la condamnation de B______ à lui verser certains montants à titre de contribution à son entretien (en sus de la prise en charge directe d'"autres frais liés au maintien et à l'entretien du patrimoine des parties") et à ce qu'il soit donné ordre à celui-ci de débloquer les cartes de crédit qu'elle utilisait.

Cette requête a été rejetée le 31 mars 2020, faute d'urgence. S'agissant du domicile conjugal, B______ était confiné en Italie aux dires de A______. Pour le surplus, celle-ci ne rendait pas vraisemblable être dans l'impossibilité de couvrir ses charges incompressibles par ses propres moyens ou par le versement du précité en sa faveur de 30'000 fr. trimestriellement et sa prise en charge directe des autres frais de son épouse.

g. Auparavant, par courrier du 23 mars 2020, B______ avait fait parvenir au Tribunal la preuve de ses deux versements de chacun 30'000 fr. en faveur de son épouse au titre de contribution à son entretien exécutés les 2 décembre 2019 et 6 mars 2020 par L______ INC.

h. Par ordonnance du 31 mars 2020, le Tribunal a prolongé au 25 mai 2020 le délai imparti aux parties pour répondre et produire leurs pièces. Il a convoqué celles-ci à une audience de comparution personnelle fixée au 3 juin 2020, leur a imparti un délai au 25 mai 2020 pour lui faire savoir si elles renonçaient à cette audience et dit qu'en cas de renonciation commune, la cause serait gardée à juger au fond à l'issue d'un délai de 10 jours dès la transmission par le greffe du Tribunal des dernières déterminations écrites des parties.

i. Le 19 mai 2020, A______ a informé le Tribunal qu'elle souhaitait la tenue d'une audience.

j. Dans sa réponse du 25 mai 2020 à la requête de son épouse du 30 janvier 2020, B______ a persisté dans ses conclusions. Il a informé le Tribunal qu'il demeurait confiné en Italie et ne pourrait être présent à l'audience du 3 juin 2020. Il n'était pas prévu que ce pays ouvre sa frontière avec la Suisse à cette date. Au vu des difficultés qu'impliquait cette situation dans la défense de ses intérêts, il se réservait le droit de pouvoir compléter ses explications et produire toutes pièces utiles par la suite, dans la mesure où il n'y avait actuellement pas accès.

Le même jour, A______ a fait parvenir au Tribunal un bordereau de pièces et sollicité qu'il soit donné suite aux réquisitions de pièces qu'elle avait formulées dans sa requête en mesures protectrices de l'union conjugale en vue de l'audience à venir.

k. Par ordonnance du 26 mai 2020, le Tribunal a rejeté la requête de la précitée tendant au prononcé d'une ordonnance préparatoire enjoignant B______ à produire des pièces. Le Tribunal a également refusé d'ordonner un second échange d'écritures avec production de pièces, comme le sollicitait celui-ci.

Il a informé les parties qu'en raison de la pandémie (COVID-19), en application des art. 124 CPC et 5 de l'ordonnance du 16 avril 2020 COVID-19 justice et droit procédural (le juge peut renoncer unilatéralement aux débats ou procéder exclusivement par écrit, s'il y a urgence, qu'il n'est pas exigible de recourir à la vidéoconférence et qu'il n'existe pas de justes motifs faisant obstacle à la renonciation à toute audience), il serait renoncé à la tenue de débats, la procédure ayant à se dérouler exclusivement par écrit, malgré l'opposition de A______ (les trois conditions précitées étant réalisées). L'audience appointée au 3 juin 2020 était annulée et la cause allait être gardée à juger à l'issue d'un délai de 10 jours dès la transmission par le greffe des dernières déterminations écrites des parties. Cette solution conjuguait "respect de l'égalité des armes de chaque partie, célérité et simplicité et résout[solvait] du même coup la problématique de l'empêchement de comparaître allégué par B______".

Le Tribunal a rappelé à A______ le délai prolongé au 29 mai 2020 pour le dépôt de ses déterminations relatives à la requête de sa partie adverse.

l. Par pli du 29 mai 2020, A______ a fait parvenir au Tribunal ses déterminations et un bordereau de pièces. Elle a requis la production de pièces complémentaires en mains de son époux destinées à démontrer la capacité financière de celui-ci (cadeaux à sa compagne et entretien de celle-ci; bénéficiaires de [la fondation] M______).

m. Par courrier du 5 juin 2020, A______ a fait parvenir au Tribunal des « déterminations spontanées » accompagnées d'une note de frais et honoraires de son conseil de 58'522 fr. 20 couvrant la période du 10 décembre 2019 au 5 mai 2020.

n. Par courrier du 8 juin 2020, B______ a pris position quant aux déterminations de son épouse et versé à la procédure deux nouvelles pièces.

o. Le 11 juin 2020, A______ a informé le Tribunal que son époux ne s'acquittait plus du montant de 30'000 fr. qu'il lui versait trimestriellement. Elle a produit un document faisant état de mouvements sur un compte bancaire durant une période courant de septembre 2017 à mai 2020.

Le 19 juin 2020, B______ a contesté cette allégation en produisant un relevé d'un virement de 30'000 fr. exécuté la veille par D______ SPA en faveur de son épouse.

p. Le 19 juin 2020, le Tribunal a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger. Celles-ci ont chacune encore adressé à celui-ci un courrier, les 23 et 30 juin 2020.

D. La situation personnelle et financière des parties est la suivante :

Ressources

a.a B______ exerce une activité de gérant de fortune, sous la forme d'une entreprise individuelle. Sa situation financière est particulièrement opaque. Selon son épouse, il est à la tête d'un patrimoine de dizaines ou centaines de millions de francs et il bénéficie de revenus annuels de plusieurs millions de francs. Le précité conteste la plupart des allégués de son épouse relatifs à ses ressources.

Il a fait partie du classement des ______ personnes les plus riches de Suisse du magazine Q______ (éditions 2010, 2012, 2013 et 2015). Sa fortune de 100 à 200 millions de francs y a été qualifiée de stable. Il y a été décrit comme se trouvant à la tête de la société R______ SA à Genève (active dans la gestion de fortune et le "family office"), dont le centre opérationnel se situait dans un "superbe immeuble au coeur ______ de Genève" (édition 2012) et dont l'activité était exercée à 80% à l'étranger (édition 2015).

A______ allègue que les revenus annuels de B______ s'élèvent à 2'800'000 fr. au minimum.

A l'appui de cette allégation, elle produit notamment la note manuscrite établie par son époux à une date inconnue et dont la teneur à cet égard est la suivante, pour ce qui est déchiffrable (notamment la monnaie n'en ressort pas clairement) :

"Ricavi [revenus]: 2'800'000"

 

" - 1'800'000

L______ INC 450'000

80'000

40'000

90'000

240'000

2'620'000

+ RUSSI [russes] 250'000

2'870'000"

A______ fait valoir l'actualité de cette note manuscrite. Selon elle, le poste "L______ INC" (250'000) était, en effet, tiré de l'activité de directeur de son époux au sein d'une société S______ LTD (Royaume-Uni) qui exploitait le casino T______ (U______ [Royaume-Uni]). Or, il avait débuté cette activité le 5 octobre 2018 en remplacement d'une personne de nationalité russe (« certainement V______ »), dernier point qui ressort effectivement des pièces qu'elle a produites. Elle expose que son époux a prêté son nom au précité moyennant rémunération car ce dernier n'était plus en mesure d'exercer cette position dirigeante. Elle ajoute que le montant de 2'800'000 fr. était largement sous-évalué.

B______ soutient avoir rédigé cette note manuscrite en 2011, de sorte qu'elle serait dépourvue de pertinence. Il expose avoir certes exercé une « activité professionnelle fructueuse dans le cadre de la finance ». Cela étant, ses revenus avaient substantiellement diminué ces dernières années. Sans produire de pièces à l'appui, il allègue que le poste de revenus en question (250'000) fait référence à une opération réalisée en 2010 avec des partenaires russes consistant en un rachat d'une filiale estonienne de [la banque russe] W______.

L'administration fédérale des contributions suspecte B______ de ne pas déclarer l'entier de ses revenus et a ouvert à son encontre une procédure administrative et pénale. Il a été inculpé au côté de X______ SA et de L______ INC en raison de soupçons de soustraction continue de montants importants d'impôts et usage de faux commis pour les périodes fiscales 2001 à 2013. Les autorités fiscales ont retenu ce qui suit : « Les valeurs patrimoniales illicites provenant de la soustraction de l'impôt sur le revenu sont revenues à B______, celles provenant de la soustraction de l'impôt sur le bénéfice sont revenues à L______ INC et à X______ SA, voire à B______. Il existe le soupçon que les valeurs patrimoniales illicites (l'économie d'impôt) ont profité à B______ à hauteur de 4'500'000 fr.».

B______ est directeur de X______ SA ([sis au no.] 1 rue 2______, Genève) dont le but consiste notamment dans des opérations immobilières, financières, de crédit, de bourse, de gestion de fortune, de placement de titres, de gestion et d'administration. Selon A______, il est également actionnaire, si ce n'est de l'entier, de la majorité, des actions de cette société - historiquement sa société immobilière - laquelle détient l'immeuble sis [aux nos.] 1 - 3, rue 2______ à Genève, où se trouvent les locaux de la banque précitée. Elle expose que la société détenait également l'immeuble sis [no.] ______, rue 3______ à Genève, qu'elle a vendu en 2018 au prix de 72'500'000 fr. Elle serait titulaire d'un compte bancaire auprès de AD______ à AE______ [TI], dont le solde s'élèverait à 4'500'000 fr. au minimum.

Il est « director » de L______ INC (Îles Vierges Britanniques), fonction non rémunérée selon lui. Comme l'a relevé le Tribunal, il a toutefois allégué que S______ LTD était dirigée par V______, personnalité politique lituanienne (et non russe), et que les revenus qu'il percevait lui-même dans ce cadre étaient inclus dans la rémunération versée par L______ INC, laquelle était mentionnée dans les déclarations fiscales, ce que le Tribunal a souligné ne pas avoir constaté. Le premier juge a par ailleurs retenu que la note manuscrite dont B______ affirme qu'elle date de 2011 fait état de 450'000 fr. de revenus associés à « L______ INC ». Selon le premier juge, il apparaissait dès lors invraisemblable qu'il ne détienne plus de participations dans cette société depuis 2002, comme il le soutenait, ce d'autant plus que celle-ci avait fait virer 30'000 fr. à son épouse à titre de contribution à son entretien les 2 décembre 2019 et 6 mars 2020.

Il détient, directement selon lui, 10% des parts de D______ SPA (Italie). Le Tribunal a souligné que B______ soutenait n'en tirer aucuns revenus, alors qu'elle lui aurait (à l'en croire) racheté ses actions dans X______ SA au prix de 5'612'845 EUR. Selon le Tribunal, au vu des biens immobiliers que possédait apparemment D______ SPA en BH______ (Italie), il était vraisemblable qu'elle lui rapportait de très importants revenus. Il est significatif à cet égard que la somme de 30'000 fr. versée par B______ à son épouse le 9 septembre 2020 à titre de contribution à son entretien l'ait été par D______ SPA et que le précité s'en soit justifié par un prétendu manque de liquidités.

A______ allègue que son époux est bénéficiaire de fondations de famille, dont M______ (Liechtenstein), Y______ et N______ (lieu d'enregistrement inconnu). Le Tribunal a retenu que [la fondation] M______ apparaissait intéresser les autorités fiscales suisses. Elle détiendrait 90% des actions de D______ SPA. Selon B______, M______ appartenait à sa mère, décédée en 2007 et dont la succession avait été liquidée en 2017. Il apparaissait, selon le premier juge, invraisemblable qu'il n'en soit pas actuellement, si ce n'est le seul, à tout le moins l'un des principaux bénéficiaires. Dans un communiqué de [la banque] Z______ de janvier 2008, il était désigné comme étant l'une des personnes « derrière » ladite fondation (« La participation de la famille [de] A______ - M. B______, Mme A______ et M. AA______ - représentée par B______, est passée en dessous de 3% du capital-actions et des droits de vote. Les détenteurs directs de cette participation étaient constitués de la Fondation M______ c/o AB______ [société], ______, Liechtenstein ainsi que de X______ SA, ______ Genève. La famille [de] A______ ne détient plus d'actions »).

B______ est président du conseil d'administration et actionnaire de la moitié du capital-actions de R______ SA ([sise au no.] 1 rue 2______, Genève) dont le but est notamment la gestion de fortune, l'activité de courtier sur les marchés financiers, la gestion dans les domaines financier et administratif, la prise de participations dans des sociétés, la représentation fiduciaire et la mise sur pied d'intermédiation financière et d'investissements ainsi que la création de fondations et autres structures.

Il est directeur et actionnaire de AC______ SA (3, rue 2______, Genève), laquelle est propriétaire de la [maison dite] "E______" qu'il dit occuper. Le but de cette société consiste notamment dans des opérations de finance, de crédit, de bourse, de gestion de fortune, de placement de titres, dans la gestion de participations dans des sociétés, les conseils en matière de gestion, la prise de participations immobilières, la transaction sur le marché des capitaux et l'accomplissement de tâches en relation avec la souscription et le placement de titres, la prise de participation dans des sociétés et toutes opérations de négoce ainsi que de conseils en matière de bijouterie, orfèvrerie et pierres précieuses.

B______ est associé-gérant et détenteur de la moitié des parts de AF______ SARL, dont le but est notamment l'exploitation d'une régie immobilière et l'achat ainsi que la vente de biens immobiliers.

Selon son épouse, il entretiendrait des liens directs avec AG______ LTD (Iles Vierges Britanniques) et AH______ (lieu d'enregistrement inconnu), lesquelles détenaient des comptes auprès de [la banque] AI______ (Genève), dernière société dont il était membre du conseil d'administration et détiendrait des parts.

La précitée allègue que son époux est titulaire de plusieurs cartes de crédits et comptes auprès de banques sises à Genève et à l'étranger, dont la banque précitée, AJ______, AK______, AL______ (Italie), AM______ (Italie), AN______ (Italie) et AO______ (Angleterre).

B______ est propriétaire du domicile conjugal sis à C______, estimé à 14'000'000 fr. au minimum à teneur d'un projet de courrier d'un conseil de l'intéressé de mars 2017 à l'Administration fédérale des contributions. Selon son épouse, il est propriétaire également d'autres immeubles au travers de ses sociétés.

Selon A______, son époux est propriétaire, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des deux domaines suivants situés en BH______ (Italie) : un domaine agricole et viticole de 1'100 hectares (AP______ [D______ SPA]), comprenant 50 hectares de vignes, un cellier de 5'000 m2 (250'000 bouteilles par an), des oliviers et un moulin traditionnel produisant de l'huile pressée à froid; un club de polo (AQ______ [D______ SPA]), comprenant trois terrains accueillant des compétitions de polo, un terrain d'entrainement, des écuries accueillant jusqu'à 410 chevaux (dont 30 pur-sang appartenant au domaine), un centre de convention et un fitness. Ces deux biens incluaient trois relais destinés à l'hébergement de touristes, soit AR______ (une demeure principale [dix chambres] et une seconde demeure [Villa AS______ avec quatre suites totalisant 450 m2, restaurant et piscine]), AT______ (ferme rénovée comportant des chambres, une véranda, une piscine et un spa) et Villa AU______ (huit chambres avec salles de bain, salle à manger et séjour, cuisine équipée, grande terrasse, trois appartements privatifs et piscine). B______ a allégué que les biens précités ne lui appartenaient pas et que les chevaux étaient la propriété de M______, ce qu'il a offert de démontrer par absence de preuve du contraire et par ses déclarations.

A______ allègue que son époux détient une collection de montres de marque de grande valeur, une collection de véhicules de luxe (F______, AV______ et P______) et une collection de tableaux de maître, dont des AW______, estimée à plus de 25'000'000 fr. B______ soutient que ces oeuvres appartiennent à [la fondation] M______, ce qu'il offre de démontrer par ses déclarations.

B______ a publié sur les réseaux sociaux en avril 2019 la photographie d'une P______ accompagnée du commentaire suivant : "new toy". Son épouse soutient que le prix de ce véhicule est de 400'000 fr. au minimum. En février 2020, il a reçu au domicile conjugal un courrier du président de K______ SA GENEVE lui faisant part du fait qu'il souhaitait le remercier personnellement de son acquisition récente d'une nouvelle montre K______ ("davvero speciale"), ce qui démontre, selon A______, qu'il devait s'agir d'une montre valant 200'000 fr. au minimum.

Dans sa requête, A______ a allégué s'être vue offrir par son époux de nombreux bijoux de valeurs. Elle a produit une liste descriptive de bijoux et montres de femme au nom des époux, comportant une photographie et une estimation de chacun d'eux dont le total s'élève à 13 millions de francs. B______ a contesté cette allégation en soutenant que nombre d'entre eux appartenaient à M______, ce qu'il a offert de démontrer par ses déclarations.

a.b B______ soutient qu'à compter de 2015, il a rencontré des « difficultés financières et professionnelles » et a vu « l'essentiel de ses biens séquestrés dans le cadre d'un litige l'opposant à l'administration fiscale fédérale ». Le domicile conjugal - acquis en 1992 grâce à une donation de feu sa mère - ainsi que plusieurs comptes bancaires avaient été séquestrés. Dans le cadre de cette procédure intentée par l'administration fiscale (en cours d'instruction), il contestait « totalement les prétentions de l'administration fiscale s'agissant en particulier d'aspects liés à la fondation M______ » ainsi que les prétentions « émises par le fisc à l'égard de sociétés dont [il] a[vait] été ou [était] actionnaire en partie et/ou avec lesquelles il a[vait] un rapport de compte courant dans le cadre de son activité professionnelle ».

Il fait valoir les bénéfices tirés de son activité en 2017 et 2018, lesquels s'étaient élevés respectivement à 215'551 fr. et 231'148 fr., ce qui découlait de ses déclarations fiscales.

Il expose que ses ressources ne sont pas inépuisables et que les séquestres sont en vigueur, de sorte qu'« afin de tenter de maintenir un train de vie confortable au couple », il a réalisé de nombreux biens, soit :

-  en décembre 2018, sa participation de 14% dans X______ SA à D______ SPA au prix de EUR 5'612'845 payable par des avances en compte courant (lesquelles lui avaient « permis de continuer, pour un temps, à subvenir aux dépenses du couple »); cette dernière société appartenait « à 90% à la fondation M______ de feue sa mère, Madame AX______, décédée en 2007 et dont la succession a[vait] été liquidée en 2017, fondation dont il n'[était] aucunement le bénéficiaire ».

-  en février 2018, une partie de ses actions dans R______ SA à AA______ au prix de EUR 500'000;

-  « la plupart des sociétés qu'il avait créées, à compter de 2006, [dans lesquelles il avait] conservé uniquement un rôle de consultant»; alors qu'il avait vendu « certains de ses actifs, mais pas encore encaissé les sommes y relatives, il avait disposé d'une ligne de crédits auprès de sociétés où il avait conservé un rôle de représentant, reportée en dette et dûment remboursée régulièrement, comme en attestaient les déclarations fiscales qu'il avait produites. Ainsi, la vente de ses participations dans la banque Z______ a[vait] porté des liquidités entre 2014 et 2019, la collection de bijoux vendus via [les sociétés] AY______, AZ______ et BA______ entre 2014 et 2020, sa participation dans X______ SA entre 2018 et 2019 et la participation dans R______ SA entre 2017 et 2018, à quoi [s'étaient] ajoutées la vente de deux voitures P______ en 2018 et deux montres de la marque K______ en 2017. L'ensemble de ces liquidités [avaient] permis d'une part de rembourser les comptes courants auprès de L______ INC et de la fondation M______, tout comme ils [avaient] permis au requérant d'assumer les frais du couple »;

-  entre février et mai 2017, des bijoux hérités de sa mère ou acquis des décennies auparavant, pour des centaines de milliers de francs, avec le concours de AZ______ (315'744 fr.), AY______ (317'348 fr.) et BA______ (340'000 fr.).

Par ailleurs, B______ allègue avoir pris en charge les honoraires des mandataires mis en oeuvre dans le cadre de la procédure fiscale (400'000 fr. à ce stade), ce qui profitait à son épouse, solidairement responsable d'une éventuelle créance fiscale. Enfin, la situation liée au COVID-19 avait durement impacté ses finances. La fondation familiale qui gérait des hôtels avait vu ses revenus réduits à néant, tout en devant en supporter les charges. Les sociétés exploitant ces structures allaient connaître un bilan financier d'autant moins favorable. Il ne disposait que d'une participation de 10% dans l'une d'elles (D______ SPA) et aucun dividende n'était versé.

b. A______ a allégué avoir cessé de travailler en 1994, dépendre financièrement de son époux et ne pas disposer des revenus lui permettant de s'acquitter des frais d'avocat nécessaires à la défense de ses intérêts. Dans sa requête du 31 janvier 2020, elle a offert de le rendre vraisemblable par son interrogatoire. Dans sa réponse du 25 mai 2020, B______ a contesté cette allégation et prétendu que son épouse disposait de ressources. Aux termes de la déclaration fiscale 2018 des époux, A______ disposait auprès de la "AI______" d'actifs (liquides) de l'ordre d'un million de francs suisses. Le 11 juin 2020, afin de démontrer l'arrêt des versements de son époux en sa faveur, A______ a produit un extrait de compte, dont le nom de la banque ne ressort pas, portant sur la période courant de septembre 2017 à mai 2020 et faisant état de soldes inférieurs à 65'000 fr.

Train de vie durant la vie commune et charges actuelles nécessaires à le maintenir

c. Le Tribunal a retenu que, selon la convention des parties, B______ finançait seul le train de vie très élevé du couple durant la vie commune.

A______ a exposé n'avoir jamais eu accès au contrôle des finances du couple, ce que B______ n'a pas contesté. Selon elle, son époux disposait de comptes dans la plupart des établissements où ils effectuaient leurs dépenses, dont il réglait directement les notes, il lui remettait des sommes en espèces pour ses autres dépenses et il avait dévié le courrier postal depuis la séparation.

A l'appui de ses allégations quant au train de vie des parties durant la vie commune, A______ produit notamment la note manuscrite de son époux dont il a été question supra (cf. consid. a.a) et dont la teneur à cet égard est la suivante, pour ce qui est déchiffrable (notamment la monnaie n'en ressort pas clairement) :

"Costi [coûts] 1'250'000

 

Mutuo [intérêts hypothécaires]

Tasse [impôts] 250'000

1'500'000

Ricavi [revenus] 2'800'000

Saldo [solde] 1'300'000 Mio"

Le poste ci-dessus "Costi" de 1'250'000 est décomposé comme suit:

"C______ 200'000

Ass BB______ 100'000

A______ 120'000

J______ 120'000

BC______ 100'000

Cash C______ 120'000

Domestici [domestiques] 70'000

Assicurazione [assurances] 100'000

B______ 120'000

1'050'000

 

AC______ SA 100'000

R______ SA 100'000

1'250'000"

d.a En offrant à titre de preuve principalement cette note manuscrite, A______ a estimé à 150'125 fr. au total ses charges mensuelles actuelles nécessaires à maintenir son train de vie durant la vie commune.

Ce montant comprend 73'275 fr. en lien avec la propriété de C______, soit 20'850 fr. d'hypothèques et impôts, 14'375 fr. de personnel de maison (deux employés déclarés en Italie), 5'000 fr. de jardinier, 5'000 fr. de « pisciniste », 1'250 fr. de frais de jardin, 8'400 fr. d'assurances immobilières et 8'400 fr. d'autres assurances ainsi que 10'000 fr. d'entretien courant.

Il inclut également 10'000 fr. en lien avec la propriété de J______ [France] (versés par son époux sur son compte auprès de [la banque] BD______). A______ allègue que les époux possèdent un bateau dont les frais s'élèvent à 110'000 fr. par an et 1'000 fr. de l'heure pour l'essence.

Il englobe enfin 66'850 fr. en lien avec son entretien personnel, soit 3'000 fr. de nourriture, 2'000 fr. de restaurants, 600 fr. d'assurance maladie, 550 fr. de physiothérapeute, 1'000 fr. de pharmacie et produits ménagers, 1'000 fr. d'autres frais de soins, 6'700 fr. de shopping, 1'000 fr. de chauffeur, 1'000 fr. d'entretien des trois véhicules qu'elle utiliserait (une BE______ immatriculée au nom d'une société de son époux, une F______ immatriculée au nom de ce dernier et une I______ immatriculée à son nom), 15'000 fr. de vacances à BC______ [BE] (dont la location d'un appartement à hauteur de 100'000 fr. pour la saison, soit 8'333 fr. par mois sur douze mois), 25'000 fr. de frais de vacances (notamment aux USA et à BI______ [Italie]) et 10'000 fr. d'argent de poche.

d.b B______ a contesté ces postes, intégralement ou partiellement.

En offrant de le démontrer par ses déclarations, il a soutenu assumer l'intégralité des frais relatifs au domicile conjugal, dont une partie, notamment liée au personnel, était avancée par AP______ [D______ SPA] qu'il remboursait par la suite. Il en était ainsi notamment des deux employés de maison (dont le salaire s'élevait pour chacun à 2'500 EUR versé douze fois l'an) et du jardinier (dont le salaire se montait à un montant du même ordre et que le propriétaire du bien adjacent, AC______ SA SA, prenait en charge à hauteur de la moitié).

Il a contesté la charge allégée par son épouse en lien avec sa propriété de trois chambres avec jardin et piscine sise à J______ au lieu-dit « BF______ » (dans un quartier huppé selon lui) (dont il a produit un acte authentique de 1997 démontrant le droit d'usufruitière de son épouse et son propre droit de propriété acquis à cette date moyennant 3'000'000 de francs français). Il a produit deux ordres de virement de 10'000 EUR chacun en faveur de son épouse. Ces paiements ont été exécutés le 10 décembre 2019 par L______ INC et le 18 mai 2020 par "R______ SA" (sise semble-t-il aux EMIRATS ARABES UNIS). Dans son écriture du 25 mai 2020, il a soutenu que cette charge se montait à 30'000 fr. par an. Le 8 juin 2020, il a relevé que le compte BD______ de la précitée était crédité tous les cinq ou six mois de 10'000 EUR, ce qui suffisait à couvrir les charges liées à ce bien que son épouse (usufruitière) pouvait au demeurant louer à cette fin.

Pour ce qui était du chalet à BC______, le précité soutient exclusivement, sans produire de pièce, en avoir résilié le contrat de location pour fin 2019 (en raison de ses difficultés financières).

Il réglait par ailleurs directement les coûts liés à la santé de son épouse, dont ses frais d'acupuncture et de massage, lesquels se montaient, selon les déclarations fiscales, à 600 fr. par mois.

Il versait en sus durant la vie commune (et continuait à verser depuis la séparation) 30'000 fr. trimestriellement à son épouse pour ses "frais additionnels".

Sous réserve de son argumentation en lien avec ses ressources exposée ci-dessus (cf. consid. a.a et a.b), B______ ne s'est pas déterminé sur les dépenses du couple listées et chiffrées par ses soins dans sa note manuscrite.

e. B______ n'a pas articulé ses charges actuelles nécessaires à maintenir son train de vie durant la vie commune.

Domicile conjugal et mobilier le garnissant

f. A______ a allégué se trouver fragilisée par les incursions de son époux dans le domicile conjugal auxquelles elle s'opposait en vain. Logeant depuis la séparation des parties dans la [maison dite] « E______ » réservée aux invités (lorsqu'il se trouvait à Genève), B______ s'était permis de se rendre dans la maison principale à 1h38 du matin en compagnie de sa maîtresse (une « influenceuse ») sans désactiver l'alarme. Les épreuves que lui faisait subir son mari entraînaient une dégradation de sa santé. Le 13 janvier 2020, elle avait dû être transportée en urgence à l'hôpital. Il était urgent que son époux quitte la propriété de C______ et que la jouissance exclusive sur ce bien lui soit attribuée. Elle risquait de subir les rechutes d'un deuxième cancer opéré en janvier 2011.

B______ a admis s'être rendu depuis mi-décembre 2019 à cinq ou six reprises dans la villa conjugale. Il en avait averti son épouse, n'y était resté que quelques minutes (le temps de récupérer des habits et/ou médicaments), s'y était rendu seul et ne l'avait pas croisée. Il consentait à l'attribution à celle-ci de la jouissance dudit domicile, mais souhaitait pouvoir continuer à y accéder occasionnellement, en la prévenant à l'avance.

g. A______ allègue que son époux, avant la séparation (juin 2019), a profité d'une période d'absence pour emporter en Italie une partie du mobilier de valeur et des tableaux garnissant le domicile conjugal au motif que ceux-ci appartenaient à M______. Il en aurait emporté d'autres, y compris des bijoux appartenant à son épouse, après la séparation (janvier 2020).

EN DROIT

1. 1.1 Selon l'art. 308 al. 1 let. b CPC, l'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles, telles que les décisions sur mesures protectrices de l'union conjugale prononcées en procédure sommaire (art. 175 et ss CC; 271 et ss CPC), dans les causes dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Interjetés dans la forme et le délai prescrits (art. 311 et 314 CPC) et portant sur des conclusions qui, capitalisées selon l'art. 92 al. 2 CPC, sont supérieures à 10'000 fr., les appels sont recevables.

Les appels seront traités dans le même arrêt (art. 125 CPC), A______ étant désignée en qualité d'appelante et B______ en qualité d'intimé.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La procédure, qui porte sur la contribution d'entretien, l'attribution de la jouissance du domicile conjugal et l'octroi d'une provisio ad litem en faveur du conjoint, est soumise à la maxime de disposition (art. 58 CPC; ATF 128 III 411 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_831/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.4) et à la maxime inquisitoire sociale (art. 272 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_645/2016 du 18 mai 2017 consid. 3.2.3).

La maxime inquisitoire ne dispense pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs propres thèses. Il leur incombe ainsi de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_762/2013 du 27 mars 2014 consid. 4.1).

2. L'appelante reproche au Tribunal une violation de son droit d'être entendue. Il aurait refusé à tort, dans son ordonnance du 26 mai 2020, de donner suite à sa requête du 30 janvier 2020 tendant à la production de pièces en vue de la démonstration des ressources de son époux et de ses propres charges nécessaires à maintenir son train de vie durant la vie commune (150'125 fr. par mois), tout en retenant par la suite, dans le jugement entrepris, qu'elle n'avait pas suffisamment rendu vraisemblables ces dernières, avec pour conséquence que la contribution d'entretien devait être établie ex aequo et bono (65'000 fr. par mois). Elle conclut au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelles instruction et décision dans le sens des considérants.

Compte tenu de sa nature formelle, ce grief est examiné en premier lieu.

2.1.1 Le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) comprend pour l'intéressé celui de se déterminer avant qu'une décision ne soit prise qui touche sa situation juridique, d'offrir des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 136 I 265 consid. 3.2; 135 II 286 consid. 5.1; 132 II 485 consid. 3.2; 127 I 54 consid. 2b). Le droit d'être entendu ne s'oppose pas à ce que l'autorité mette un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction (arrêt du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1). Il sert à établir correctement les faits, mais constitue également un droit indissociable de la personnalité garantissant à un particulier de participer à la prise d'une décision qui touche sa position juridique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_643/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.3). Ce droit - dont le respect doit être examiné en premier lieu (ATF 124 I 49 consid.1) et avec un plein pouvoir d'examen (ATF 140 III 1 consid. 3.1.1) - est une garantie constitutionnelle de nature formelle, dont la violation entraîne, par principe, l'annulation de la décision attaquée, sans égard aux chances de succès du recours au fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1). En d'autres termes, si l'autorité précédente a violé des garanties formelles de procédure, la cassation de sa décision demeure la règle, dans la mesure où les justiciables peuvent, en principe, se prévaloir de la garantie du double degré de juridiction (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 et 2.7).

2.1.2 Les mesures protectrices de l'union conjugale sont ordonnées à la suite d'une procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve et limitation du degré de la preuve à la simple vraisemblance, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité. Il suffit donc que les faits soient rendus plausibles (ATF 145 III 213 consid. 6.1.3; 138 III 636 consid. 4.3.2;
130 III 321 consid. 5; 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêts du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 1.5; 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1 et 5A_508/2011 du 21 novembre 2011 consid. 1.3). Il incombe à chaque époux de communiquer tous les renseignements relatifs à sa situation personnelle et économique, accompagnés des justificatifs utiles, permettant ensuite d'arrêter la contribution en faveur de la famille (Bräm/Hasenböhler, Commentaire zurichois, n. 8-10 ad art. 180 CC). Tous les moyens de preuve sont en principe admissibles (art. 254 al. 2 let. c CPC), étant précisé que ceux dont l'administration ne peut intervenir immédiatement ne doivent être ordonnés que dans des circonstances exceptionnelles (arrêts du Tribunal fédéral 5A_12/2013 précité consid. 2.2 et 5A_905/2011 du 28 mars 2012 consid. 2.5; Hohl, Procédure civile, tome II, 2010, n. 1556 et 1900 et ss, p. 283 et 349). Lorsque, contrairement à ce qu'on serait en droit d'attendre d'elle, une partie refuse de collaborer à l'administration des preuves, celle-ci peut être close et le juge se prononce dans le cadre de l'appréciation des preuves disponibles. Le recourant qui entend s'en prendre à cette appréciation anticipée des preuves doit alors en démontrer le caractère arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_12/2013 précité consid. 5.1).

2.2 En l'espèce, dans son ordonnance du 26 mai 2020, le Tribunal a retenu que la requête de l'appelante était incompatible avec la nature sommaire de la procédure et l'exigence de célérité en découlant. En outre, tout indiquait que l'intimé ne produirait pas les pièces requises, du moins pas dans un délai raisonnable, alors que le début de la procédure datait de janvier 2020. L'appelante, quant à elle, avait néanmoins été en mesure de chiffrer ses conclusions en estimant les charges composant le train de vie antérieur des parties et avait produit certaines pièces dans ce cadre. Enfin, le Tribunal a retenu qu'il devait forger son opinion sous l'angle de la vraisemblance en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles. Les parties avaient le devoir de participer activement à l'établissement des faits pertinents, le Tribunal étant libre de tirer toute conséquence utile en cas de défaillance à ce devoir.

Comme l'a ensuite relevé le Tribunal dans le jugement entrepris, le dossier à ce stade (qui comprenait en particulier la principale pièce produite par l'appelante, soit la note manuscrite de son époux) ne permettait toutefois pas au juge de se forger une opinion (précise) s'agissant des dépenses du couple durant la vie commune, cela même sous l'angle de la vraisemblance. Pour certains postes de dépenses, la pièce précitée, non datée, est difficilement déchiffrable, peu détaillée au vu des montants élevés qui y sont indiqués, la monnaie n'en ressort pas clairement et il y est fait référence à des sociétés contrôlées par l'intimé sans mention de la dépense prise en charge par celles-ci ("AC______ SA"; "R______ SA") ou à des éléments indéterminés ("BB______").

Cela étant, il ne pouvait (et ne peut) en l'état en être tiré aucune conséquence utile au détriment de ni l'une, ni l'autre des parties.

En effet, contrairement à ce que soutient l'intimé et au cas faisant l'objet de la jurisprudence qu'il cite (ACJC/1250/2015 du 16 octobre 2015 consid. 4.2 confirmé par le Tribunal fédéral dans un arrêt 5A_932/2015 du 10 mai 2016 consid. 4.4), le premier juge a retenu avec raison que l'appelante a allégué de manière suffisamment détaillée et chiffrée le montant des dépenses du couple durant la vie commune (en se fondant en particulier sur la note manuscrite précitée).

Elle a par ailleurs exposé de façon crédible, sans que l'intimé ne le conteste, ne jamais avoir eu accès aux aspects financiers et administratifs complexes du couple, cela même s'agissant de ses dépenses personnelles (espèces remises par l'intimé à son épouse; paiements directs par le précité sur les comptes ouverts auprès des établissements; paiements par des sociétés sous son contrôle). Ce point est confirmé par les allégations de l'intimé, selon lesquelles il s'acquittait - par l'intermédiaire ou non de sociétés - directement auprès des tiers de l'ensemble des dépenses des parties, y compris notamment celles liées à la santé de son épouse, telles que l'acupuncture ou les massages (cf. supra, En fait, let. D. d.b). Il l'est également par les conclusions du précité (paiement direct aux tiers par ses soins des charges de son épouse) qui tendent à faire perdurer son contrôle et l'opacité de sa situation financière.

L'appelante n'a ensuite pas manqué (en vain) de solliciter en temps utile la production des pièces en mains de son époux et de tiers susceptibles de rendre suffisamment vraisemblables les différents postes qu'elle a articulés composant le train de vie antérieur des parties en se fondant sur la pièce dont elle disposait (la note manuscrite établie par son époux).

L'intimé, pour sa part, s'est abstenu de fournir les éléments permettant de faire la lumière sur les dépenses du couple durant la vie commune, étant pourtant seul en leur possession et tenu de communiquer toutes pièces utiles en vue d'établir la situation financière des parties. Vraisemblablement pour les besoins de la cause, il s'est borné à contester partiellement les charges alléguées par son épouse et/ou uniquement leurs montants, plaidant ce faisant en sa défaveur. Quant aux dépenses mentionnées sur sa note manuscrite, il s'est contenté de soutenir que ce document datait de 2011 et n'était plus d'actualité, au vu de la baisse de ses revenus intervenue depuis lors (qu'il n'a toutefois pas rendu vraisemblable; cf. infra, consid. 5). Il n'a pas explicité, ni contesté les postes de dépenses y figurant et/ou leur montant, que ce soit avec ou sans pièces à l'appui. Il ne lui a toutefois pas été ordonné de produire les pièces requises par son épouse et les parties n'ont au surplus pas été entendues par le Tribunal. Le comportement procédural précité de l'intimé ne saurait donc suffire à retenir un refus de collaborer à l'administration des preuves au sens strict.

Dans ces circonstances, après avoir à juste titre relevé qu'il incombait aux parties de collaborer à l'établissement des faits, à défaut de quoi le juge était libre d'en tirer toute conséquence utile, c'est à tort que le Tribunal n'a pas donné suite à la requête de l'appelante tendant à la production de pièces et a estimé, sans motivation, la contribution d'entretien à 65'000 fr. par mois. Ce faisant, il s'est écarté en grande partie des charges qu'elle a alléguées (à hauteur de 150'125 fr. par mois) et de celles admises par l'intimé (selon ses conclusions, à hauteur de 20'000 fr. par mois, sans compter la jouissance du domicile conjugal). Faute d'éléments au dossier et d'instruction suffisante, il a dû y procéder sans détailler les postes que la contribution était censée couvrir et sans statuer sur la partie en charge de s'acquitter de certaines dépenses, notamment des intérêts hypothécaires liés au domicile conjugal. L'intimé reproche d'ailleurs lui-même avec raison au premier juge d'avoir fixé de façon arbitraire la contribution d'entretien.

En conclusion, le grief de l'appelante est fondé, de sorte qu'il convient d'annuler le chiffre 7 du dispositif du jugement entrepris. Eu égard au principe de la garantie du double degré de juridiction, la cause sera renvoyée au Tribunal sur ce point afin qu'il entre en matière sur la requête de l'appelante tendant à la production de pièces. Afin de garantir à la précitée la possibilité d'offrir les preuves nécessaires à rendre vraisemblables ses charges alléguées en lien avec le maintien de son train de vie antérieur, le premier juge statuera sur celles des pièces requises dont il convient d'ordonner la production en mains de l'intimé, voire de tiers à supposer que cela se justifie. A cet effet, le Tribunal pourra entendre les parties et solliciter leur collaboration, eu égard notamment aux différents postes de dépenses figurant dans la note manuscrite de l'intimé produite par l'appelante à l'appui de ses allégations. Après avoir ordonné la production desdites pièces, en fonction du résultat de cette instruction, notamment l'éventuel défaut du respect par l'une et/ou l'autre des parties de leurs incombances dans ce cadre, le Tribunal sera, cette fois, en mesure, le cas échéant, d'en tirer toute conséquence utile.

En revanche, il n'y aura pas lieu de faire suite à la requête de l'appelante tendant à la production des pièces nécessaires à rendre vraisemblable la capacité contributive suffisante de l'intimé, faute d'incidence sur l'issue du litige (cf. infra, consid. 5).

Au vu de cette issue, il ne sera pas donné suite non plus à la conclusion subsidiaire de l'appelante tendant à ce que la production des pièces requises en vain par ses soins en première instance soit ordonnée devant la Cour.

3. Les parties allèguent des faits nouveaux, produisent des pièces nouvelles et formulent des conclusions nouvelles.

3.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Aux termes de l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b).

En règle générale, les nova doivent être introduits en appel dans le cadre du premier échange d'écritures. Exceptionnellement, des nova peuvent être invoqués, aux conditions de l'art. 317 al. 1 CPC, à un stade ultérieur. Tel est notamment le cas lorsque l'autorité d'appel a ordonné un second échange d'écritures (art. 316 al. 2 CPC) ou des débats (art. 316 al. 1 CPC) ou encore si elle laisse le dossier de côté sans en clore formellement l'instruction. En revanche, à partir du début des délibérations, les parties ne peuvent plus introduire de nova, même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC sont réunies (arrêts du Tribunal fédéral 5A_763/2018 du 1er juillet 2019 consid. 2.1.3.2; 5A_478/2016 du 10 mars 2017 consid. 4.2.2; 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.2).

3.2 En l'espèce, les faits nouveaux allégués par l'appelante portant sur les circonstances de la séparation des parties, qui auraient pu être invoqués en première instance, sont irrecevables et au demeurant sans incidence sur l'issue du litige.

La question de la recevabilité des précisions qu'elle apporte à ses charges et des pièces nouvelles produites par l'intimé (ainsi que des faits qu'elles contiennent) relatives aux frais d'eau, d'électricité et de gaz du domicile conjugal peut demeurer ouverte au vu de l'issue du litige.

Le courrier de mise en demeure de l'intimé du 17 septembre 2020 de restituer le véhicule de marque F______ et les faits qu'il contient sont irrecevables. Ce courrier aurait pu être adressé à son épouse auparavant. La conclusion nouvelle du précité tendant à la restitution de ce bien est en conséquence irrecevable également, faute d'être fondée sur un fait nouveau (recevable). Les faits nouveaux invoqués par l'appelante en lien avec ce véhicule pour faire suite à cette conclusion nouvelle irrecevable de son adverse partie suivent le même sort.

Les faits nouveaux et pièces nouvelles allégués, respectivement produites par les parties en lien avec le prétendu financement par l'intimé du train de vie de sa compagne sont irrecevables. Les parties n'exposent pas les raisons qui les auraient empêchées de faire valoir ces éléments en première instance. Il en est de même des faits nouveaux allégués par l'appelante portant sur le prétendu train de vie actuel somptueux de l'intimé (en particulier ses acquisitions de luxe le 18 décembre 2018 pour les parties), les frais élevés du train de vie des parties durant la vie commune dont il continuerait de s'acquitter actuellement par le biais de sociétés (frais de J______ [France]) et les fondations auxquelles il serait lié. La réquisition de la précitée tendant à la production de pièces nouvelles destinées à rendre vraisemblable ces faits est irrecevable également (faute d'être fondée sur des faits nouveaux recevables). En tout état, ces faits nouveaux et pièces nouvelles (produites ou requises) sont dépourvus d'incidence sur l'issue du litige. Il ressort déjà des autres éléments du dossier, comme l'a retenu le premier juge, que le précité n'a pas rendu vraisemblable la baisse alléguée de ses ressources l'empêchant de maintenir le train de vie des parties durant la vie commune (cf. infra, consid. 5).

En revanche, les faits nouveaux allégués et pièce nouvelle produite par l'intimé en lien avec le versement de 30'000 fr. exécuté le 9 septembre 2020 par D______ SPA en faveur de son épouse sont recevables. Il en est de même de ses allégations et pièces nouvelles (échanges des parties du 28 août au 17 septembre 2020) en lien avec le refus (nouveau) de la précitée de lui permettre l'accès au domicile conjugal conformément au jugement entrepris. Partant, sa conclusion nouvelle tendant à la condamnation de celle-ci aux peines prévues à l'art. 292 CPC dans l'hypothèse où elle devait lui interdire cet accès, fondée sur ce fait nouveau, est recevable également.

La question de la recevabilité des faits nouveaux et pièces nouvelles allégués, respectivement produites par l'intimé en lien avec la propriété de J______ (démission de la gouvernante, changement des serrures et décision de vente) peut demeurer ouverte. Les éléments visés sont sans incidence sur l'issue du litige et le précité n'en tire d'ailleurs ni argument, ni conclusion. Il en est de même s'agissant des faits nouveaux et pièces nouvelles qu'il allègue, respectivement produit en lien avec sa proposition transactionnelle.

Les courriers des parties des 1er et 3 décembre 2020, postérieurs à la mise en délibération de la cause (dont les parties ont été informées par plis du 28 octobre 2020), sont irrecevables, de même que les faits nouveaux qu'ils contiennent (refus de s'acquitter de la contribution d'entretien, soustraction à toute tentative de notification d'un commandement de payer et compensation opposée). Ces faits nouveaux sont au demeurant sans incidence sur l'issue du litige.

La conclusion de l'appelante tendant à la tenue d'une audience devant la Cour, formulée tardivement en appel pour la première fois par courrier du 2 novembre 2020, est irrecevable. Rien ne justifie qu'elle n'ait pas été formulée dans son acte d'appel et la précitée ne fournit d'ailleurs aucun motif à cet égard. En tout état, cette conclusion est postérieure à la mise en délibération de la cause (dont les parties ont été informées par plis du 28 octobre 2020). Il est relevé qu'au vu de l'issue du litige, à savoir le renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants s'agissant du chiffre 7 du dispositif du jugement entrepris, il appartiendra au Tribunal de statuer sur la question de la tenue d'une audience conformément à l'art. 273 CPC.

4. L'intimé formule deux griefs et une conclusion nouvelle en lien avec l'attribution par le Tribunal de la jouissance du domicile conjugal.

4.1.1 Selon l'art. 176 al. 1 ch. 2 CC, à la requête de l'un des conjoints et si la suspension de la vie commune est fondée, le juge prend les mesures en ce qui concerne le logement et le mobilier de ménage.

Lorsque les époux n'arrivent pas à s'entendre sur l'attribution du logement et/ou du mobilier du ménage, le juge des mesures protectrices de l'union conjugale décide en fonction d'une libre appréciation de toutes les circonstances pertinentes de chaque cas d'espèce. Il convient d'adopter la réglementation qui paraît la plus appropriée à chaque situation, sans s'arrêter aux rapports contractuels ou de propriété de chaque époux sur le(s) bien(s) en question. L'attribution du domicile conjugal s'entend - sauf prescription contraire et sous réserve des effets strictement personnels de chaque époux - avec ses meubles d'origine. La notion de mobilier du ménage doit être interprétée de manière large. Il comprend non seulement les meubles et ustensiles nécessaires à la vie familiale (tapis, appareils ménagers, vaisselle, literie, etc.), mais également les autres biens et appareils utilisés par la famille (télévision, radio, véhicules automobiles, etc.), que ceux-ci soient propriété des époux, en prêt ou en location. Le critère d'attribution réside dans l'utilité qu'en retire chaque époux. Dans tous les cas (logement et mobilier du ménage), la décision d'attribution ne modifie pas le statut des époux en matière de droits réels ou de droit des obligations (Chaix, CR CC I, 2010, n. 13 et 14 ad art. 176 CC).

La notion de mobilier du ménage comprend les oeuvres d'art ou les antiquités si elles ont été acquises pour décorer la maison et non pas simplement comme un investissement en capital. Toutefois, les effets personnels, les vêtements, les équipements de sport ou les outils professionnels que chaque membre de la famille peut réclamer pour lui-même ne sont pas considérés comme du mobilier du ménage (Vetterli, FamKomm Scheidung, 2017, n. 19 ad art. 176 CC).

4.1.2 Lorsqu'il rend une décision finale, le tribunal ordonne des mesures d'exécution sur requête de la partie qui a eu gain de cause (art. 236 al. 3 CPC). Cela doit permettre de gagner du temps au stade de l'exécution forcée (art. 337 al. 1 CPC), par exemple en prévoyant déjà des mesures selon l'art. 343 CPC (Tappy, CR, CPC, 2019, n. 20 ad art. 236 CPC). Lorsque la décision prescrit une obligation de faire, de s'abstenir ou de tolérer, le tribunal de l'exécution peut assortir la décision de la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP (art. 343 al. 1 let. a CPC). Selon l'art. 292 CP, celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d'une amende. Cette mesure n'a pas de caractère pénal, mais relève de la contrainte indirecte. Elle vise à briser la résistance du débiteur récalcitrant et à obtenir qu'il s'exécute (Jeandin, CR, CPC, 2019, n. 7 ss ad art. 343 CPC). Dans l'hypothèse où des circonstances font apparaître que l'exécution de la décision sera exécutée sans problème, il n'apparaît pas insoutenable de renoncer à menacer la partie qui succombe de la sanction prévue par cette norme pénale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_839/2010 du 9 août 2011 consid. 6.3).

4.2 En l'espèce, en première instance, l'appelante a conclu à l'attribution en sa faveur de la jouissance exclusive du domicile conjugal et à ce qu''il soit donné ordre à l'intimé de quitter ce domicile, en emportant ses effets personnels uniquement ainsi que de lui restituer les clés de celui-ci qu'il détient. L'intimé a conclu à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à laisser à son épouse la jouissance de ce domicile et à ne perturber en rien cette jouissance, sauf à s'y rendre occasionnellement pour prendre des effets personnels.

Le Tribunal a retenu que les allées et venues qu'admettait encore effectuer occasionnellement l'intimé au sein du domicile conjugal étaient source de conflits entre les parties et que le droit suisse ne prévoyait pas que le juge puisse attribuer la jouissance exclusive du logement conjugal tout en la soumettant à des réserves. La demande de l'intimé à pouvoir encore accéder selon son gré au logement conjugal était contraire au but de la loi qui était de régler la vie séparée des époux. Rien n'empêchait au demeurant le précité de récupérer en une seule fois l'intégralité de ses effets personnels. Le Tribunal attribuerait ainsi à l'appelante la jouissance exclusive du domicile conjugal ainsi que du mobilier le garnissant. Les conclusions de l'appelante suggérant que des biens appartenant au précité se trouvaient encore au domicile conjugal, il serait ordonné à celle-ci d'y donner accès à son époux, afin qu'il puisse récupérer ses effets personnels et documents administratifs, à l'exclusion de tout autre bien.

4.2.1 En premier lieu, l'intimé réitère sa conclusion de première instance tendant à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement de ne perturber en rien la jouissance exclusive de la villa attribuée à son épouse, sauf à s'y rendre occasionnellement, et après l'avoir avertie, pour prendre des effets personnels. Cela étant, il n'émet pas la moindre critique à l'encontre du jugement entrepris à cet égard, sauf à faire valoir le caractère spacieux du domicile. Il ne sera donc pas entré en matière sur ce grief et le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé sur ce point sans autres développements.

4.2.2 En second lieu, l'intimé reproche au Tribunal d'avoir attribué le mobilier du domicile conjugal à son épouse. Aucune des parties n'y avait conclu, de sorte que celui-ci avait statué ultra petita. Par ailleurs, il était propriétaire ou la fondation M______ de la plus grande partie de ce mobilier et celui-ci était composé d'objets de luxe. Dans ce cadre, il conclut (de façon irrecevable; cf. supra, consid. 2.2) à la restitution d'un véhicule (F______).

En concluant à ce que le Tribunal donne l'ordre à son époux non seulement de quitter le domicile, mais également d'emporter ses effets personnels uniquement, l'appelante visait tant l'attribution en sa faveur de la jouissance exclusive du logement que celle du mobilier le garnissant (sous réserve des effets strictement personnels de son époux). Le premier juge n'a donc pas statué ultra petita. Par ailleurs, la question des droits réels des parties sur les objets concernés n'est pas pertinente et demeurera ouverte. Contrairement à ce que l'intimé soutient enfin, il n'en va pas différemment lorsque les biens concernés ont le caractère de mobilier de luxe. Selon lui, une telle qualification aurait pour conséquence que ce mobilier ne peut suivre le sort du domicile conjugal en sa qualité de mobilier du ménage, mais doit être attribué à leur propriétaire. Il ne rend pas vraisemblable, ni d'ailleurs n'allègue que ces biens auraient été acquis comme un investissement en capital. En tout état, il lui appartenait d'individualiser les meubles sur lesquels il entendait exercer une jouissance exclusive, voire revendiquer ceux-ci à l'encontre de l'appelante (art. 641 al. 2 CC). Or, il n'y a pas procédé en première instance et y procède tardivement (et donc de façon irrecevable) devant la Cour s'agissant du véhicule de marque F______. Le grief de l'intimé étant infondé, le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

4.2.3 En dernier lieu, l'intimé conclut nouvellement à ce que l'ordre donné à son épouse de lui permettre d'accéder au domicile conjugal pour y récupérer ses effets personnels soit assorti de la menace de la peine prévue à l'art. 292 CPC.

Le premier juge a donné cet ordre à l'appelante au motif que ses conclusions suggéraient que des biens appartenant à son époux se trouvaient encore au domicile conjugal. L'intimé ne conteste pas ce que fait valoir la précitée, comme il découle des courriers des parties produits par l'intimé devant la Cour, à savoir qu'à la suite du jugement entrepris, elle a fait déposer les effets personnels de l'intimé dans la [maison dite] « E______ ». Il ressort par ailleurs des pièces précitées que les biens qu'entend encore récupérer l'intimé ne constituent pas des effets personnels au sens strict du jugement entrepris, mais plutôt des biens dont il a été spécifié par le Tribunal qu'ils ne pouvaient être emportés à l'occasion de l'accès litigieux. Dans ces circonstances, les effets personnels de l'intimé lui ayant été remis, il convient d'admettre que celle-ci a exécuté, dans son résultat (bien que par un moyen différent), l'obligation de tolérer qui lui a été imposée par le Tribunal. Il ne se justifie en conséquence pas de faire droit à la conclusion nouvelle de l'intimé. Cela sans compter que celui-ci ne conteste pas les allégations de l'appelante, selon lesquelles, avant et après la séparation (juin 2019 et janvier 2020), il a emporté en Italie une partie du mobilier de valeur, des tableaux garnissant le domicile conjugal et des bijoux, au motif que ceux-ci appartenaient à [la fondation] M______. Le chiffre 4 du jugement entrepris sera, partant, confirmé.

5. L'intimé critique le jugement entrepris s'agissant de la question de sa capacité contributive. Il fait grief au Tribunal d'avoir retenu qu'il était en mesure de couvrir, sans avoir à entamer sa fortune, tant ses propres charges que l'entier de la prétention de l'appelante.

5.1 Si la suspension de la vie commune est fondée, le juge fixe la contribution pécuniaire à verser par l'une des parties à l'autre (art. 176 al. 1 ch. 1 CC).

Tant que dure le mariage, les conjoints doivent contribuer, chacun selon ses facultés (art. 163 al. 2 CC), aux frais supplémentaires engendrés par l'existence parallèle de deux ménages; si la situation financière des époux le permet encore, le standard de vie antérieur, choisi d'un commun accord, doit être maintenu pour les deux parties (ATF 119 II 314 consid. 4b/aa; arrêts du Tribunal fédéral 5A_236/2011 du 18 octobre 2011 consid. 4.2.3 et 5A_710/2009 du 22 février 2010 consid. 4.1).

Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur la reprise de la vie commune, l'art. 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux en mesures protectrices de l'union conjugale. Pour fixer la contribution due à l'entretien du conjoint, selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge doit partir de la convention, expresse ou tacite, que les époux ont conclue au sujet de la répartition des tâches et des ressources entre eux durant la vie commune (ATF 137 III 385 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_930/2019 du 16 septembre 2020 consid. 4.2).

En cas de situation économique favorable, dans laquelle les frais supplémentaires liés à l'existence de deux ménages séparés sont couverts, l'époux créancier peut prétendre à ce que la pension soit fixée de façon telle que son train de vie antérieur, qui constitue la limite supérieure du droit à l'entretien afin de ne pas anticiper sur la répartition de la fortune, soit maintenu; il faut se fonder sur les dépenses nécessaires au maintien de ce train de vie, méthode qui implique un calcul concret. Il appartient au créancier de préciser les dépenses nécessaires à son train de vie et de rendre celles-ci vraisemblables, le juge statuant sur la base des justificatifs immédiatement disponibles (arrêts du Tribunal fédéral 5A_534/2019 du 31 janvier 2020 consid. 4.1 et les références citées; 5A_864/2018 du 23 mai 2019 consid. 2.1).

Dans un ménage fortuné, il n'est pas insoutenable de prendre en considération des dépenses de luxe pour fixer la contribution d'entretien, seules étant exclues celles qui, de par leur nature ou leur montant, sont tellement insolites qu'on ne peut raisonnablement pas les faire entrer dans la notion d'entretien; savoir si une dépense est insolite ou exorbitante relève du pouvoir d'appréciation du juge (arrêts du Tribunal fédéral 5A_315/2016 du 7 février 2017 consid. 5.1; 5A_386/2014 et 5A_434/2014 du 1er décembre 2014 consid. 4.3).

Le revenu de la fortune est pris en considération au même titre que le revenu de l'activité lucrative (ATF 117 II 16 consid. 1b). Si les revenus (du travail et de la fortune) suffisent à l'entretien des conjoints, la substance de la fortune n'est normalement pas prise en considération. Dans le cas contraire, l'entretien peut être assuré par des prélèvements dans la fortune des époux, le cas échéant même par les biens propres, que ce soit en mesures provisionnelles ou dans la procédure au fond. Savoir si et dans quelle mesure il peut être exigé du débirentier qu'il entame sa fortune pour assurer l'entretien courant doit être apprécié au regard des circonstances concrètes. Sont notamment d'une importance significative le standard de vie antérieur, lequel peut éventuellement devoir être diminué, l'importance de la fortune et la durée pendant laquelle il est nécessaire de recourir à celle-ci. Pour respecter le principe d'égalité entre les époux, l'on ne saurait cependant exiger d'un conjoint qu'il entame sa fortune pour assurer l'entretien courant que si l'on
impose à l'autre d'en faire autant, à moins qu'il n'en soit dépourvu (arrêts du Tribunal fédéral 5A_608/2019 du 16 janvier 2020 consid. 4.2.1 et les références citées; 5A_524/2017 du 9 octobre 2017 consid. 5.1.3).

5.2.1 En l'espèce, le Tribunal a retenu, sur la base d'éléments qu'il a énumérés (cf. supra, En fait, let. D.a), que l'intimé celait vraisemblablement l'essentiel de ses revenus et de sa fortune. Les revenus annuels de 200'000 fr. qu'il admettait percevoir ne constituaient vraisemblablement qu'une infime partie de ses revenus réels (tirés de ses activités et de sa fortune). Le précité n'avait même pas pris la peine de chiffrer ses propres charges. Il était en mesure de couvrir, sans avoir à entamer sa fortune, tant ses propres charges que l'entier de la prétention de l'appelante. La capacité contributive de l'intimé ne faisant aucun doute et celui-ci ne contestant pas qu'il était, selon la convention des parties, le seul à participer à l'entretien du ménage durant la vie commune, la seule question qui se posait était de savoir quel était le train de vie de l'appelante du temps de la vie commune.

L'intimé reproche au premier juge de s'être écarté de ses déclarations fiscales, alors qu'il n'avait pas été rendu vraisemblable qu'il disposerait de sources de revenus ou d'éléments de fortune non déclarés. Il n'appartenait pas au juge civil de se substituer au juge administratif. Si l'administration fiscale devait avoir gain de cause dans le litige qui l'opposait à lui, l'appelante pourrait solliciter une modification de la contribution d'entretien. Son rôle inscrit au Registre du commerce en lien avec des sociétés n'était pas relevant. Il disposait d'une relation de compte courant avec L______ INC, étant débiteur de celle-ci, et avec D______ SPA, étant créancier de cette dernière. Par ailleurs, pour maintenir le train de vie du couple, il cumulait des dettes auprès de sociétés et réalisait sa fortune qui diminuait au fil du temps. La mise à contribution de celle-ci pour s'acquitter de la contribution d'entretien impliquait que son épouse mette à contribution la sienne.

Ces griefs ne sont pas fondés. L'intimé ne fournit aucun élément ni aucun titre permettant de retenir qu'il n'est plus en mesure d'assurer le train de vie des parties, comme il le faisait par le passé. Les éléments mêmes qu'il fait valoir (cf. supra, En fait, let. D.a.b) et ses acquisitions de luxe depuis 2015 ([la voiture de la marque] P______ en avril 2019 et [la montre de la marque] K______ en février 2020) tendent plutôt à confirmer que tel n'est pas le cas. Il en est de même de ses déclarations fiscales, dont le premier juge s'est écarté à juste titre. Il a été rendu vraisemblable, précisément par le litige opposant l'intimé à l'administration fiscale, que les montages que celui-ci a mis en place, en particulier au moyen des sociétés auxquelles il est lié, tendent à occulter sa situation financière réelle. Le fait que les autorités administratives n'auraient pas statué définitivement sur cette question n'y change rien. Les juges civil et administratif ne sont liés, ni l'un, ni l'autre, par leurs décisions respectives prononcées dans le cadre des procédures indépendantes ouvertes devant eux. Ils ne se substituent ainsi pas l'un l'autre lorsqu'ils rendent leurs décisions respectives. Rien n'empêche donc que la seule ouverture d'une procédure en matière fiscale puisse être une circonstance déterminante aux yeux du juge civil lorsqu'il forge sa conviction. Même si d'ailleurs l'autorité administrative n'obtenait en définitive pas gain de cause dans ce litige, cela n'empêcherait pas encore le juge civil de s'écarter des déclarations fiscales du précité. Par ailleurs, la capacité de l'intimé à maintenir le train de vie antérieur des parties sans entamer sa fortune a été retenue. C'est donc à tort qu'il soutient que celle de l'appelante devrait être mise à contribution. Au demeurant, s'il devait être admis, comme il le fait valoir, qu'il se voit contraint depuis 2015, en vue de maintenir le train de vie du couple, de puiser dans sa fortune, il n'y aurait pas lieu d'exiger de l'appelante qu'elle en fasse de même, au vu de la disparité de leurs fortunes respectives.

Faute pour l'intimé de développer d'autres griefs s'agissant de sa capacité contributive, le jugement entrepris sera confirmé sur ce point, sans de plus amples développements.

5.2.2 Il n'y a pas lieu d'examiner les griefs des parties en lien avec les charges de l'appelante nécessaires à maintenir son train de vie antérieur à la séparation, dès lors que sur ce point la cause est renvoyée au Tribunal.

6. L'appelante fait grief au Tribunal de lui avoir dénié le droit à une provisio ad litem.

6.1 L'obligation d'une partie de faire à l'autre l'avance des frais du procès pour lui permettre de sauvegarder ses intérêts découle du devoir général d'entretienou d'assistance des conjoints (art. 159 al. 3 et 163 CC; ATF 117 II 127 consid. 6).

La fixation d'une provisio ad litem par le juge présuppose l'incapacité du conjoint demandeur de faire face par ses propres moyens aux frais du procès (arrêts du Tribunal fédéral 5A_590/2019 du 13 février 2020 consid. 3.3 et 4A_808/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.1). Les contributions d'entretien ont en principe pour but de couvrir les besoins courants des bénéficiaires, et non de servir, comme la provisio ad litem, à assumer les frais du procès en divorce (arrêts du Tribunal fédéral 4A_808/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.1; 5A_372/2015 du 29 septembre 2015 consid. 4.1 et 5A_448/2009 du 25 mai 2010 consid. 8.2). Se trouve dans le besoin celui qui ne pourrait pas assumer les frais d'un procès sans recourir à des moyens qui lui sont nécessaires pour couvrir son entretien courant et celui de sa famille. L'appréciation de cette circonstance intervient sur la base de l'examen d'ensemble de la situation économique de la partie requérante, c'est-à-dire d'une part de toutes ses charges et d'autre part de sa situation de revenus et de fortune (De Luze/Page/Stoudmann, Droit de la famille, Code annoté, n° 2.5 ad art. 163 CC).

6.2 En l'espèce, le Tribunal a retenu que l'appelante n'avait pas fourni d'informations suffisantes et fiables quant à l'état de ses liquidités, de sorte qu'elle n'avait pas rendu vraisemblable avoir manqué des moyens financiers suffisants pour sauvegarder ses intérêts dans la procédure. Elle n'avait en particulier pas justifié de sa fortune par la production d'extraits de ses comptes bancaires. En outre, la déclaration fiscale 2018 des époux mentionnait des actifs (liquides) lui appartenant de plus d'un million de francs suisses.

L'appelante reproche au Tribunal de s'être fondé sur cette décision de taxation qui ne reflétait pas sa situation actuelle, au vu de l'extrait de son compte bancaire relatif aux deux dernières années produit le 11 juin 2020. Celui-ci démontrait qu'elle n'avait pas les moyens de s'acquitter de ses frais d'avocat. En tout état, l'intimé ne soutenait pas le contraire, de sorte que le Tribunal avait violé la maxime des débats.

Le grief de l'appelante n'est pas fondé. Aux termes de la déclaration fiscale précitée, la fortune de plus d'un million de francs appartenant à celle-ci se trouvait auprès de [la banque] "AI______". Or, l'appelante n'expose pas ce qui serait advenu de ce montant, ni ne rend vraisemblable qu'elle n'en disposerait plus. Il ne découle pas du document produit le 11 juin 2020 (à la fin de la procédure de première instance pour démontrer l'arrêt allégué des versements de son époux en sa faveur) qu'il s'agirait d'un relevé de son compte auprès de la banque précitée, ce qu'elle ne prétend d'ailleurs pas. Par ailleurs, contrairement à ce qu'elle soutient, l'intimé a contesté (dans sa réponse à la requête de son épouse déposée en première instance) l'allégation de l'appelante, selon laquelle elle ne disposerait pas des moyens nécessaires à assurer la défense de ses intérêts. Il a allégué dans ce cadre qu'elle disposait de ressources. Au demeurant, contrairement à ce qu'elle soutient également, en matière de provisio ad litem, la maxime inquisitoire sociale est applicable et non la maxime des débats.

Le ch. 12 du dispositif du jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

7. 7.1 Les frais (frais judiciaires et dépens) sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 95 et 106 al. 1 1ère phrase CPC). Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC). Le juge peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

7.2 En l'espèce, au vu de la valeur litigieuse et de la complexité du litige, les frais judiciaires des appels croisés et de la requête d'effet suspensif seront fixés à 10'200 fr. (art. 19 LaCC; art. 2, 31, 35 et 37 RTFMC). Ils seront mis à la charge des parties par moitié s'agissant du montant de 10'000 fr. (art. 107 al. 1 let. c CPC), le solde de 200 fr. relatif à la requête d'effet suspensif étant mis à la charge de l'intimé, vu son issue (art. 106 al. 1 1ère phrase CPC). Ils seront partiellement compensés avec les avances fournies par les parties, soit 1'200 fr. pour l'intimé et 1'000 fr. pour l'appelante, qui restent acquises à l'Etat. Les parties seront en conséquence condamnées à verser le solde à l'Etat, soit 4'000 fr. chacune (art. 111 al. 1 CPC).

Pour des motifs d'équité liés à la nature du litige, les parties conserveront leurs propres dépens à leur charge (art. 95 al. 1 let. b et al. 3, 104 al. 1 et 107 al. 1 let. c CPC).

7.3 La cause doit être renvoyée au Tribunal pour instruction complémentaire et nouvelle décision sur la contribution d'entretien. Il se justifie dès lors d'annuler les chiffres 8 à 11 du dispositif du jugement entrepris et d'inviter le Tribunal à statuer sur l'ensemble des frais judiciaires et dépens de première instance dans le jugement qu'il rendra au terme de la procédure de renvoi.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevables les appels interjetés le 20 août 2020 par A______ contre le jugement JTPI/9584/2020 rendu le 6 août 2020 par le Tribunal de première instance dans la cause C/1673/2020 et par B______ contre les chiffres 3, 4, 5, 6 et 7 du dispositif de ce jugement.

Au fond :

Annule les chiffres 7 à 11 du dispositif de ce jugement.

Renvoie la cause au Tribunal de première instance pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.

Dit que le Tribunal statuera sur l'ensemble des frais judiciaires et dépens de première instance dans le jugement qui sera rendu au terme de la procédure de renvoi.

Confirme le jugement attaqué pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 10'20 fr., les met à la charge de B______ à hauteur de 5'200 fr. et de A______ à hauteur de 5'000 fr. et dit qu'ils sont partiellement compensés avec les avances effectuées par les parties, qui restent acquises à l'Etat de Genève.

Condamne B______ et A______à payer à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du pouvoir judiciaire, la somme de 4'000 fr. chacun à titre de solde de frais judiciaires d'appel.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Nathalie LANDRY-BARTHE et Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Jessica ATHMOUNI


 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.