Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/565/2025 du 26.05.2025 ( OCPM ) , REJETE
ATTAQUE
En droit
Par ces motifs
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 26 mai 2025
| ||||
dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Mirolub VOUTOV, avocat, avec élection de domicile
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Monsieur A______, né le ______ 1980, est ressortissant indien.
2. Par courrier daté du 28 septembre 2023, reçu le 6 octobre 2023, M. A______, sous la plume de son conseil, a déposé une demande d’autorisation de séjour en sa faveur auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : l’OCPM).
Il avait travaillé en qualité de cuisiner au sein du café-restaurant « B______ » (ci-après : le café-restaurant) dès le 17 mai 2022. Actuellement, il ne travaillait pas, raison pour laquelle il requérait qu’une autorisation provisoire lui soit délivrée afin de pouvoir à nouveau être employé au sein du café-restaurant.
À l’appui de sa demande, il a notamment produit :
- un formulaire M, daté et signé, où il indiquait être marié et père d’un enfant, précisant que sa famille ne viendrait pas à Genève et qu’il était arrivé à Genève le 1er janvier 2003 ;
- copies de son passeport délivré à C______(ITALIE) en 2016 et de son curriculum vitae ;
- copies de son contrat de travail, de ses bulletins de salaires des mois de mai à décembre 2022 et de février à août 2023, de son certificat de salaire pour la période du 17 mai au 31 décembre 2022 et de l’attestation-quittance 2022 concernant l’impôt à la source ;
- son certificat assurance AVS-AI démontrant le paiement de cotisations en 2009, 2010 et 2018, comme en attestait son extrait de compte individuel, ainsi qu'un extrait vierge du registre des poursuites et faillites le concernant ;
- une facture D______ relative à son inscription à un test de langue ;
- une lettre de motivation de son employeur et une attestation de Madame E______, datée du 20 septembre 2023, à teneur de laquelle il était décrit comme un homme de confiance.
3. Le 17 octobre 2023, l’OCPM a requis la production de pièces complémentaires, notamment des informations quant à son épouse et leur enfant, une attestation de niveau A1 CECR à l’oral de français, une déclaration par laquelle il attestait ne pas avoir déposé de demande d’autorisation de séjour dans un pays UE/AELE et des justificatifs de résidence à Genève pour les années 2013 à 2021 (deux par année).
4. Le 6 novembre 2023, M. A______ a partiellement répondu à cette demande.
5. Le 21 novembre 2023, sous la plume de son conseil, M. A______ a enjoint l’OCPM de rendre rapidement une décision quant à sa demande d’autorisation provisoire de travail déposée le 27 septembre 2023, réitérée dans son courrier du 6 novembre 2023. Il attendait une réponse depuis deux mois environ et risquait donc de passer à côté de cette offre d’emploi.
6. Le 24 novembre 2023, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser d’accéder à sa demande de régularisation de ses conditions de séjour déposée le 6 octobre 2023 ; un délai de trente jours lui a été imparti pour faire valoir ses observations par écrit.
Vu son manque de clarté, sa demande d’autorisation provisoire de travail pouvait être interprétée de deux manières ; soit il s’agissait d’une demande en vue d’exercer une activité lucrative salariée au sens des art. 18 à 26a de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), soit il s’agissait d’une demande d’autorisation de séjour délivrée en dérogation aux conditions d’admission des art. 18 à 26a LEI dans le but de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité au sens de l’art. 30 al. 1 let. b LEI.
Dans le cas où sa demande devait être interprétée selon les art. 18ss LEI, il lui était rappelé que celle-ci impliquait une prise d’unité sur le contingent cantonal et était soumise à émolument. Cette compétence était du seul ressort du service de la main d’œuvre étrangère de l’office cantonal de l’inspection des relations de travail
(ci-après : OCIRT), dont la décision était réservée. Il appartenait à son employeur d’introduire une demande en sa faveur auprès de dite autorité.
Sans démarche en ce sens, de la part de son employeur, dans un délai de 30 jours, sa requête serait traitée exclusivement sous l’angle du cas de rigueur selon
l’art. 30 al. 1 let. b LEI.
7. Le 7 février 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a réitéré sa demande d’autorisation de travail provisoire.
Son employeur avait également fait une demande d’autorisation de travail pour son compte, demande à laquelle il n'avait pas non plus été répondu.
8. Le 16 février 2024, l’OCPM a informé M. A______ qu’il était autorisé à travailler au sein du café-restaurant durant l’instruction de son dossier. L’autorisation de travail - sous la forme d’un courriel - était délivrée jusqu’à droit connu s'agissant de sa demande d’autorisation de séjour et était révocable en tout temps. Elle n’était valable que sur le canton de Genève.
9. Par décision du 20 février 2024, l’OCPM a refusé de régulariser les conditions de séjour de M. A______ et, par conséquent, de soumettre son dossier avec un préavis favorable au secrétariat d’État aux migrations (ci‑après : SEM). Il a prononcé son renvoi de Suisse et lui a imparti un délai au 20 mai 2024 pour quitter le territoire helvétique et le territoire des États membres de l’Union européenne et des États associés à Schengen, conformément à l’art. 64 al. 1 let. c LEI.
M. A______ mentionnait être arrivé en Suisse en 2003. Cependant, il n’avait été en mesure de valider sa durée de séjour que depuis le mois d’octobre 2022. Ainsi, il n’avait pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse, ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence. Quand bien même il pourrait justifier d’un séjour antérieur à 2013, il avait été absent, à tout le moins, neuf ans. Partant, il ne comptabilisait qu’une seule année de séjour en Suisse.
En outre, l'intéressé avait mentionné être titulaire d’un permis de résidence italien, mais affirmait dans le même temps résider sur le territoire suisse depuis 2003. Non seulement il n’était pas en mesure d’y justifier sa présence durant les années 2013 à 2021, mais cela était également en contradiction avec l’établissement de son passeport en 2012 à C______(ITALIE), l’obtention de son permis de séjour italien, ainsi que le renouvellement de son passeport à C______(ITALIE) en 2016. Ce faisceau d’indices permettait d’établir qu’il avait son centre d’intérêt en Italie durant cette période. De ce fait, il n’avait pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu’il ne puisse plus envisager un retour en Inde ni que sa réintégration sociale et professionnelle serait fortement compromise. Il maîtrisait la langue et la culture de son pays d’origine et y avait vécu toute son enfance, son adolescence et la majeure partie de sa vie d’adulte. L’expérience professionnelle acquise en Suisse et les connaissances de la langue française pourraient être mises en valeur dans le cadre de sa réintégration en Inde, même s’il était certes probable qu’il se trouverait là-bas dans une situation personnelle et économique sensiblement moins favorable que celle qu’il connaissait à Genève.
L’attestation des HUG produite mentionnait certes qu’il avait été suivi au service de médecine de premier secours du 7 novembre 2011 jusqu’à ce jour, mais aucune attestation indiquant toutes les dates exactes des rendez-vous de suivi n’avait été transmise. Dans ces conditions, les années de séjour entre 2013 et 2021 ne pouvait pas être validées. S’agissant de ses connaissances de français, aucune attestation de langue n’avait été produite, de sorte qu’il devait être considéré que M. A______ ne disposait pas des connaissances de la langue française de niveau minimum A1 du cadre européen commun de référence.
Ainsi, M. A______ ne remplissait pas les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).
10. Par acte du 22 mars 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ (ci-après : le recourant) a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation et au renvoi de son dossier à l’OCPM afin qu’un permis de séjour avec activité lucrative lui soit octroyé, sous suite de frais et dépens.
Préalablement, il demandait à ce qu'un délai de trente jours, dès la notification de la décision relative à sa demande d’assistance juridique, lui soit accordé pour compléter son recours, dans la mesure où il l’avait déposé le 21 mars 2024 et que dite demande n’avait pas encore fait l’objet d’une décision. De plus, il devait rassembler de nombreuses pièces complémentaires pertinentes, notamment s'agissant de sa situation personnelle et financière, de ses qualités professionnelles, ainsi que de son état de santé.
Les faits avaient été établis de manière incomplète par l’OCPM. En effet, la prise en considération de plusieurs éléments importants relatifs à sa situation personnelle actuelle ne ressortait pas du dossier. D’abord, il vivait en Suisse depuis 2003, malgré un séjour de quelques années en Italie, contrairement à ce qui avait été retenu par l’OCPM dans la décision querellée. Il avait travaillé en Suisse durant plusieurs années et œuvrait dans un domaine où existait une pénurie de travailleurs.
Au vu de ses problèmes de santé, l’existence d’un cas de rigueur était avérée dans la mesure où un éventuel renvoi aurait des conséquences qui pourraient mettre en danger son bien- être.
Tous ses amis proches se trouvaient en Suisse, il n’avait plus de liens affectifs avec son pays d’origine dès lors qu’il l’avait quitté vingt ans auparavant.
Une obligation abrupte de retourner dans son pays d'origine aurait nécessairement des conséquences très négatives sur son état de santé tant physique que psychique vu notamment les différents suivis médicaux dont il bénéficiait, ainsi que les rendez-vous médicaux prochainement prévus. Ainsi, un départ forcé le mettrait dans une situation de grave détresse personnelle.
Concernant son droit à une autorisation de séjour avec activité lucrative, il travaillait en qualité de cuisinier au sein du café-restaurant. Une pénurie de cuisiniers sévissait dans le canton de Genève, ce qui avait conduit les autorités à retirer cette profession de la liste relative aux obligations d’annonce. De plus, il était dans l’attente de documents démontrant que les conditions de l’art. 18 LEI étaient remplies.
11. Le 11 avril 2023, le recourant, sous la plume de son conseil, a sollicité une nouvelle prolongation du délai initial de trente jours pour compléter son recours, demande à laquelle le tribunal a accédé.
12. Le 26 avril 2024, par le biais de son conseil, le recourant a complété son recours ; il persistait intégralement dans les termes de ses conclusions.
À cet effet, il a produit des bulletins de salaire pour la période du 16 février au 31 mars 2024, démontrant ainsi qu’il avait à nouveau été engagé par le café-restaurant, ainsi que des échanges de courriels des 16 et 17 avril 2024 avec la caisse d’assurance-maladie F______.
13. Dans ses observations du 24 juin 2024, l’OCPM a conclu au rejet du recours. Les arguments invoqués n’étant pas de nature à modifier sa position.
Le recourant avait déposé une demande de régularisation sous l’angle du cas de rigueur en septembre 2023, alléguant, entre autres, résider à Genève depuis l’année 2003 et être bien intégré. Il avait toutefois échoué à démontrer un séjour continu de dix ans en Suisse au moment du dépôt de sa demande. De plus, sur la base du dossier, il présentait des liens importants avec l’Italie. En effet, il déclarait y avoir travaillé quelques années dans le domaine de la restauration. Par ailleurs, plusieurs transferts d’argent vers l'Italie avaient été constatés. Pour finir, et selon les propres déclarations de ce dernier, il serait au bénéfice d’un permis de résidence italien. À cet égard, il était constaté que son passeport national indien avait été émis par les autorités de ce pays [Italie], une première fois en 2012, puis renouvelé en 2016. La procédure d’obtention d’un permis de séjour italien avait certainement requis de la part du recourant une domiciliation ou un séjour justifié dans ce pays afin de permettre la délivrance d’un titre de séjour, ce qui avait eu, en tout état de cause, pour conséquence d’interrompre son séjour à Genève durant les années concernées, soit entre 2013 et 2021. Le recourant ne pouvait ainsi justifier d’une résidence régulière et continue d’une durée de dix ans sur le territoire helvétique.
Quant aux preuves apportées, on devait se questionner sur l’identité figurant sur certains documents, soit l’identité de Monsieur G______ né le ______ 1980. Cette identité figurait sur les documents suivants : l’attestation des Transports publics genevois (ci-après : TPG), les deux attestations émises par les Hôpitaux universitaire de Genève (ci-après : HUG) et le certificat de salaire pour l’année 2022. Cette identité ne correspondant pas à celle du recourant (selon son passeport national au dossier), ces documents ne pouvaient pas être pris en compte.
Pour finir, en l’absence d’une ascension professionnelle remarquable et d’attaches profondes avec la Suisse, la situation du recourant ne permettait pas de reconnaître un cas de rigueur. En outre, le recourant n'avait pas démontré à satisfaction de droit, en quoi son retour en Italie, voire en Inde, le mettrait dans une situation d’extrême détresse au sens où l’entendait la jurisprudence topique.
Enfin, le recourant semblait se prévaloir des dispositions relatives à une autorisation de séjour en vue de l’exercice d’une activité lucrative au sens des art. 18 et ss LEI. S'il souhaitait effectivement que sa demande soit traitée sous l’angle de l’intérêt économique, il lui appartenait de déposer une demande complète dans ce sens, en y joignant les justificatifs requis. L’examen de cette demande ne relevait pas de sa compétence, mais l'OCPM se chargerait, dès réception de la demande de l’employeur, de la transmettre à l’OCIRT pour examen.
14. Par jugement du 8 juillet 2024, le tribunal de police a condamné M. A______ pour entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et exercice d’une activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI).
15. Le 19 juillet 2024, le recourant a répliqué sous la plume de son conseil.
Il n’avait pas interrompu son séjour en Suisse ; le renouvellement de son passeport ne plaidait aucunement en faveur de cette hypothèse dès lors que cette démarche ne prenait que quelques jours. Quant à l’identité « G______ », son nom avait été orthographié de façon différente et sa date de naissance n’était pas correcte, mais il s’agissait bien de lui [A______]. Il sollicitait de l'autorité intimée qu’elle communiquât au tribunal les informations en sa possession qui démontraient que G______ était une personne différente, dans la mesure où elle n’alléguait pas que figurait un résident ayant cette identité dans ses registres malgré le fait qu’il [G______] résidait ou avait résidé à Genève. Par ailleurs, plusieurs documents faisant partie de son dossier médical mentionnaient également l’identité
« G______ ».
Il produirait, le 22 juillet 2024, directement auprès du greffe du tribunal vu son volume, un troisième chargé de pièces à l'appui de ses déterminations. En effet, nombre de documents exposaient qu’il souffrait de nombreux problèmes de santé nécessitant un suivi régulier. Il ressortait en particulier desdites pièces qu’il avait bénéficié d’un suivi médical régulier auprès des HUG entre le 31 décembre 2014 et le 21 mai 2024. Enfin, chacun des médecins ayant délivré les certificats médicaux à produire était en mesure de confirmer qu’il était bel et bien le patient examiné, bien que le prénom figurant sur lesdits certificats différait de celui figurant sur son passeport indien.
16. Le 15 août 2024, l’OCPM a informé le tribunal ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.
17. Le 28 novembre 2024, le tribunal a imparti au recourant un délai au 3 décembre 2024, non prolongeable, pour lui faire parvenir le « troisième chargé de pièces annoncé dans sa réplique du 19 juillet 2024 ».
18. Par courrier du 4 décembre 2024, le recourant, sous la plume de son conseil, a transmis au tribunal son troisième chargé de pièces, lequel comprenait :
- un récapitulatif des rendez-vous et interventions médicales HUG pour la période du 23 mai 2011 au 5 mai 2012 ;
- un récapitulatif des rendez-vous et interventions médicales HUG pour la période du 4 avril 2016 au 21 mai 2024 ;
- les consultations du service de médecine de premier recours pour la période du 4 avril 2016 au 27 septembre 2017 ;
- une consultation du service de médecine de premier recours pour le 31 décembre 2024 pour son asthme ;
- les consultations ambulatoires mobiles de soins communautaires pour la période du 10 novembre 2017 au 27 septembre [2018] ;
- son bulletin de salaire pour le mois de mai 2024 ;
- un tableau « Genres de profession soumis à l’obligations d’annonce » pour 2021 et 2023.
19. Le 12 décembre 2024, l’OCPM s’est déterminé.
À titre liminaire, il réitérait son questionnement au sujet des différentes identités figurant sur les pièces fournies par le recourant. En effet, à la lecture du dossier, il pouvait être compris que le recourant usait de deux, voire trois identités auprès de différentes autorités suisses. Autrement dit, l’une desdites identités était celle figurant sur le passeport national du recourant qui lui avait été transmis, laquelle correspondait au nom, prénom et à la date de naissance mentionnés en objet de son courrier. Une autre identité, à savoir G______, né le ______ 1980 figurait par exemple sur l’attestation des TPG, sur certains documents émis par les HUG, ainsi que sur son extrait de compte AVS individuel et la documentation y relative. Enfin, l’identité A______, né le ______ 1980 apparaissait sur d’autres documents émis par les HUG (cf. pièces 18 à 22, chargé de pièces n° 3).
Les pièces produites le 4 décembre 2024, compte tenu de l'ensemble des éléments figurant au dossier, ne permettaient pas de déterminer à satisfaction de droit que le recourant avait bel et bien résidé à Genève de manière ininterrompue durant dix ans et que, par ailleurs, son centre d’intérêt se trouvait être à Genève ou qu'il l’avait été pour la période concernée. En effet, il était rappelé que le recourant avait lui-même déclaré être titulaire d'un titre de séjour italien – précisant que ce document ne se trouvait pas dans leur dossier –, que des démarches administratives avaient été réalisées en Italie, notamment en lien avec l'obtention du titre de séjour et le renouvellement du passeport du recourant, enfin, selon l'attestation établie par H______, de l'argent avait été envoyé en Italie.
Enfin, il était lieu de relever qu’il ressortait du dossier que le recourant était marié avec Madame I______, ressortissant indienne et père d’un enfant né en Inde le ______ 2017. Selon les éléments en leur possession, il pouvait être compris que ces derniers résidaient hors de Suisse.
20. Dans le délai prolongé, par duplique du 22 janvier 2025, sous la plume de son conseil, le recourant a persisté intégralement dans les termes de ses conclusions.
Comme il l'avait déjà expliqué, son nom avait certes été orthographié de façon différente, mais il n'avait jamais cherché à tromper les autorités sur son identité. À cet égard, l’éventuel emploi de plusieurs identités ne lui aurait été d’aucune utilité dans la mesure où il n’existait aucune raison de se cacher ou de prétendre être une autre personne, étant précisé qu'il n’avait jamais été recherché par les autorités suisses, n’avait jamais bénéficié d’aide sociale et ne saurait donc retirer aucun bénéfice d’un tel procédé. Les inscriptions auprès des HUG et des TP, ainsi que de la centrale AVS avaient été effectuées par des tiers, à l’aide de son passeport national qui avait été remis à l’OCPM, sans qu’il ait pu intervenir pour modifier les données en question, de sorte qu’on ne saurait lui reprocher des erreurs commises par des tiers. Il avait par ailleurs entamé les démarches nécessaires pour rectifier ses données personnelles auprès des entreprises précitées.
En ce qui concernait son séjour en Suisse, il ressortait des documents remis au tribunal qu’il avait passé plus de dix ans en Suisse depuis 2010, même si l’on venait retenir qu’il avait passé un an en Italie pour obtenir son permis italien. En effet, l’attestation de H______ du 4 octobre 2023, le résumé des interventions des HUG du 8 mars 2024, les attestation d’achat d’abonnements des [TPG], ainsi que l’attestation de suivi des HUG du 26 décembre 2024 démontraient clairement qu’il était présent sur le territoire suisse à partir de 2010. S’agissant de son épouse et de son enfant, il n'était pas « rentré » dans son pays d'origine et ne les avait plus vus depuis de nombreuses années.
En annexe, étaient produites les pièces suivantes :
- une copie de son Swiss pass ;
- deux attestations d’achat d’abonnements des TPG, datées du 26 et 27 décembre 2024 ;
- une attestation de suivi du département de médecine de premier recours des HUG du 26 décembre 2024 ;
- un certificat AVS/AI ;
- deux certificats de salaire pour 2023 et 2024 ;
- des bulletins de salaire pour la période avril-décembre 2024 ;
- une attestation de quittance 2023 concernant l’impôt à la source ;
- une carte d’assurance-maladie F______ ;
- une facture de primes d’assurance maladie et justificatifs de primes d’assurance maladie pour décembre 2024 et janvier 2025.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d’étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).
4. Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/53/2025 du 14 janvier 2025 consid. 4).
5. Les griefs et arguments formulés par les parties ainsi que les éléments résultant des pièces figurant au dossier seront repris et discutés, en tant que besoin, dans la partie « en droit » ci-dessous (ATF 147 IV 249 consid. 2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_300/ 2024 du 13 janvier 2025 consid. 3.2 ; 1C_622/2023 du 6 janvier 2025 consid. 2.1).
6. La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants de l’Inde.
7. L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (cf. ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_641/2018 du 3 août 2018 consid. 3 ; 2C_53/2017 du 21 juillet 2017 consid. 5.1 ; ATA/504/2023 du 16 mai 2023 consid. 3.2). La contestation ne peut donc excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/538/2025 du 13 mai 2025 consid. 2.1).
8. Au fond, le recourant prétend qu’une autorisation de séjour pour activité lucrative devrait lui être accordée, notamment en raison du fait qu’il travaille en tant que cuisinier au sein du café-restaurant.
Cela étant, force est de constater que l’objet du litige ne concerne que sa demande de régularisation sous l’angle du cas de rigueur. S’il estime remplir les conditions d’une autorisation de séjour pour activité lucrative, il lui revient de déposer une demande en ce sens auprès de l’OCIRT afin qu’il instruise cette question. Partant, il ne revient pas au tribunal d’examiner dans le cadre de la présente procédure si le recourant pourrait bénéficier d’une autorisation de séjour avec activité lucrative au sens de l’art. 18 LEI, étant précisé, à toutes fins utiles, qu’en raison de sa formulation potestative, cette norme ne confère aucun droit au recourant (arrêts du Tribunal fédéral 2C_798/2018 du 17 septembre 2018 consid. 4.1 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3) et que les autorités compétentes bénéficient d’un large pouvoir d’appréciation dans le cadre de son application (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.1). Par ailleurs, il ressort du dossier que l’OCIRT a accédé à sa demande d’autorisation provisoire de travail comme le confirme son courriel du 16 février 2024. Au surplus, l'on relèvera que l’OCPM a, à plusieurs reprises, attiré l'attention du recourant sur le fait qu’il n’était pas compétent pour lui délivrer dite autorisation de séjour pour activité lucrative.
9. À teneur de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d’admission, prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment dans le but de tenir compte de cas individuels d’une extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs.
L’art. 31 al. 1 OASA, qui précise les critères déterminants pour la reconnaissance d’un cas individuel d’extrême gravité au sens de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, dispose que, lors de l’appréciation du cas, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant (let. a), du respect de l’ordre juridique suisse par celui-ci (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) et de ses possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).
Le critère de l’intégration du requérant se base sur le respect de la sécurité et de l’ordre public, le respect des valeurs de la Constitution, les compétences linguistiques, la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation (art. 58a LEI).
10. Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral
F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3), d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).
11. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L’autorité doit néanmoins procéder à l’examen de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce pour déterminer l’existence d’un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a).
12. Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.7 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et les références citées).
La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4d et les références citées).
13. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remar-quable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 5.4).
14. S’agissant de la condition de la durée totale du séjour, elle constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. Il s’agit d’un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e). En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 9.1 et les références citées ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4f). Par durée assez longue, on entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017). Le Tribunal fédéral a en outre considéré que l’on ne saurait inclure dans la notion de séjour légal les périodes où la présence de l’intéressé est seulement tolérée en Suisse et qu’après la révocation de l’autorisation de séjour, la procédure de recours engagée n’emporte pas non plus une telle conséquence sur le séjour (arrêt 2C_926/2010 du 21 juillet 2011).
15. En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).
Il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnais-sance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ;
F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3).
16. L’intégration socio-culturelle n’est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ;
C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l’engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d’une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ;
C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2).
17. Selon la jurisprudence, seuls de graves problèmes de santé nécessitant, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales d’urgence indisponibles dans le pays d’origine peuvent, selon les circonstances, justifier la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité au sens de l’art. 30 al. 1 let. b LEI ; en revanche, le seul fait de pouvoir obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une dérogation aux conditions d’admission. De plus, une grave maladie (à supposer qu’elle ne puisse être soignée dans le pays d’origine) ne saurait justifier, à elle seule, la reconnaissance d’un cas de rigueur au sens des dispositions précitées, l’aspect médical ne constituant qu’un élément parmi d’autres (durée du séjour, intégration socioprofessionnelle et formations accomplies en Suisse, présence d’enfants scolarisés en Suisse et degré de scolarité atteint, attaches familiales en Suisse et à l’étranger, etc.) à prendre en considération (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATAF 2021 VII/6 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral
F-3004/2022 du 13 janvier 2025 consid. 9.5.2).
Compte tenu de la jurisprudence constante du Tribunal administratif fédéral en la matière (ATAF 2020 VII/2 consid. 9.6.2 et les références citées), si les motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d’un cas de rigueur, encore faut-il que l’intéressé ait démontré souffrir d’une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d’urgence, indisponibles dans le pays d’origine, de sorte qu’un départ de Suisse serait susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé (arrêt F-199/2024 du 13 février 2025 consid. 8.5).
Les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 83 al. 4 LEI et une personne qui ne peut se prévaloir que d’arguments d’ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d’origine et souffrant de la même maladie (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4125/206 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1).
18. Celui qui place l’autorité devant le fait accompli doit s’attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d’éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/543/2022 du 24 mai 2022 consid. 4c).
19. Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).
Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d’un droit à l’autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l’inverse aurait pour effet de déduire de l’art. 96 LEI un droit à l’obtention ou au renouvellement de l’autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).
20. En l’espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal parvient à la conclusion que l’autorité intimée n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que le recourant ne satisfait pas aux conditions strictes requises par les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA pour la reconnaissance d’un cas de rigueur.
S’agissant tout d’abord de la durée de son séjour, si le recourant indique être arrivé en Suisse en 2003, il ne démontre pas, à satisfaction de droit, y avoir séjourné de manière ininterrompue depuis lors. En effet, à teneur notamment des attestations d’abonnements TPG qu'il a lui-même produites, ce dernier s’est vraisemblablement absenté de Suisse de 2012 à 2019, mais à tout le moins, de 2012 à 2016, selon le récapitulatif de ses rendez-vous médicaux. Dans tous les cas, le tribunal retiendra que le recourant, à qui le fardeau de la preuve incombe, n'a pas suffisamment prouvé son séjour continu en Suisse. À ce qui précède s'ajoute le fait que ce dernier a fait renouveler son passeport en Italie en 2016, État dans lequel il a indiqué avoir été où être au bénéfice d’un titre de séjour, démontrant ce faisant y avoir séjourné durant un certain temps. Au vu de ces indices convergents, il y a lieu de retenir que le recourant a, au plus, séjourné de manière continue en Suisse de 2016 à ce jour. Ce séjour, qui peut être qualifié de long, doit cependant être fortement relativisé dès lors que le recourant a séjourné de manière illégale en Suisse et qu’il y réside actuellement à la faveur d’une tolérance des autorités depuis le dépôt de sa demande de régularisation en novembre 2023. En tout état de cause, il sera ici rappelé que le recourant ne peut tirer parti de la seule durée de son séjour, qui n’est qu’un élément parmi d’autres à prendre en compte, pour bénéficier d’une dérogation aux conditions d’admission.
Le tribunal ne tiendra pas compte du fait que le nom du recourant est orthographié différemment et que sa date de naissance diffère sur certains documents qu’il a lui-même produits au motif que ces offres de preuves ne suffisent pas à admettre un cas de rigueur en sa faveur comme exposé ci-dessous.
En effet, il sera retenu, d'une part, que l'intégration socioprofessionnelle du recourant ne justifie pas, à elle seule, l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Certes, ce dernier n’émarge pas à l’aide sociale, exerce une activité lucrative lui permettant de subvenir à ses besoins et parle le français. Cependant, une telle situation ne revêt aucun caractère exceptionnel. Par ailleurs, le recourant, qui travaille dans le domaine de la restauration, n’établit pas avoir acquis des connaissances et qualifications si spécifiques pendant son séjour qu’il ne pourrait pas les mettre à profit ailleurs, notamment en Inde.
D'autre part, sous l’angle de l’intégration socioculturelle en Suisse, le recourant ne démontre pas l’existence de liens amicaux et affectifs à Genève d’une intensité telle qu’il ne pourrait être exigé de lui qu'il conserve ses contacts par les moyens de télécommunication modernes une fois de retour en Inde. Il n'apparaît pas non plus qu'il soit fortement investi dans la vie culturelle ou associative genevoise. Force est ainsi de constater que le recourant ne parvient pas à démontrer que sa relation avec la Suisse serait si étroite et profonde que l’on ne pourrait exiger de lui qu'il retourne dans son pays d’origine.
Enfin, arrivé en Suisse, selon ses dires à l’âge de 23 ans, le recourant a passé toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte dans son pays d’origine. Il y maîtrise dès lors manifestement la langue, ainsi que les us et coutumes. Il y a par ailleurs des attaches puisqu'il s’y est marié en 2015 avec Mme I______ et a eu un enfant avec celle-ci, qui réside également en Inde. À teneur des pièces produites, il envoie régulièrement de l’argent à destination de l’Inde, à sa femme notamment, alors qu'il allègue dans le même temps ne plus avoir d’attaches avec son pays d’origine, ni aucun contact avec son enfant et sa femme.
Dans ces circonstances, sa réintégration ne parait pas gravement compromise et rien n’indique que les difficultés auxquelles il pourrait faire face en cas de retour dans son pays d’origine seraient plus lourdes que celles que rencontrent d’autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d’origine au terme d’un séjour régulier en Suisse, étant rappelé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étranger aux conditions de vie de leurs pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n’a pas établi.
Il faut enfin rappeler que celui qui place l’autorité devant le fait accompli doit s’attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d’éviter les inconvénients qui en découlent pour lui. Ainsi, le recourant ne pouvait ignorer, au vu de son statut illicite en Suisse, qu’il pourrait à tout moment être amené à devoir renoncer, en cas de refus de la régularisation de ses conditions de séjour, à tout ce qu’il y avait mis en place, y compris son activité professionnelle.
Pour le surplus, les difficultés d’ordre général qu’il pourrait rencontrer en Inde, afin notamment de retrouver un emploi, ne sauraient constituer une situation rigoureuse au sens de la jurisprudence précitée. À cet égard, rien n’indique d’ailleurs que l’expérience professionnelle qu’il a acquise en Suisse ne pourrait pas constituer un atout susceptible de favoriser sa réintégration sur le marché de l’emploi dans son pays d’origine.
Concernant son état de santé, le recourant souffre de différentes pathologies, soit d’un alcoolisme chronique avec sevrage depuis début septembre 2016, d’un pyrosis, de problèmes urinaires, d’asthme, d’une anémie hypochrome microcytaire régénérative, d’une dyspepsie, d'un pré diabète, d'une maladie cœliaque et d’une épigastralgie depuis 2018. À cet effet, il est suivi de manière régulière aux HUG comme le démontrent les pièces qu’il a produites. Toutefois, il sied de rappeler que, comme indiqué supra, les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l’exécution du renvoi et qu’une personne qui ne peut se prévaloir que d’arguments d’ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans leur pays d’origine et souffrant de la même maladie. Dans le cas présent, il n’est pas démontré que les soins essentiels et nécessaires au recourant ne seraient pas disponibles dans son pays d’origine, étant rappelé que le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier l’octroi d’une autorisation de séjour. Partant, il sera constaté, conformément à la jurisprudence, que l’état de santé du recourant ne saurait fonder, à lui seul, l’octroi d’un titre de séjour.
Ainsi, ni l’état de santé du recourant, ni la durée de son séjour sur le territoire, ni encore les inconvénients d’ordre socioprofessionnel auxquels il pourrait être éventuellement confronté en Inde ne constituent des circonstances si singulières qu’il faudrait considérer qu’il se trouve dans une situation de détresse personnelle justifiant l’octroi d’une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n’a pas établi.
En conclusion, l’OCPM n’a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation (art. 96 LEI) en refusant de délivrer l’autorisation de séjour sollicitée.
21. Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l’autorisation, bien que requise, est révoquée ou n’est pas prolongée après un séjour autorisé.
Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d’une autorisation de séjour, l’autorité ne disposant à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).
22. Le recourant n’obtenant pas d’autorisation de séjour, c’est à bon droit que l’autorité intimée a prononcé son renvoi de Suisse. Il n’apparaît en outre pas que l’exécution de son renvoi ne serait pas possible, serait illicite ou qu’elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).
23. Infondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.
24. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
25. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
26. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d’État aux migrations.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 22 mars 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 20 février 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Laetitia MEIER DROZ
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.
| Genève, le |
| Le greffier |