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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4164/2024

JTAPI/1280/2024 du 19.12.2024 ( MC ) , ADMIS

recours terminé sans jugement

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);PROLONGATION;DEMANDE ADRESSÉE À L'AUTORITÉ;DROIT D'ASILE
Normes : LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.75.al1.leth; LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4; LEI.75.al1.letf
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4164/2024 MC

JTAPI/1280/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 19 décembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Adrano ANTONIETTI, avocat

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______ (alias B______), né le ______ 1989, est ressortissant de Tunisie.

2.             Il est entré en Suisse, démuni de documents d'identité, en 2023.

3.             A teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, il a été condamné, entre le 25 août 2023 et le 12 octobre 2024, à six reprises, notamment pour vol au sens de l'art. 139 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (RS −311.0), entrée et séjour illégaux au sens de l’art. 115 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI − RS 142.20), consommation de stupéfiants selon l'art. 19a ch. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup − RS 812.121) et délit contre la loi sur les armes au sens de l'art. 33 al. 1 let. a de loi fédérale sur les armes, les accessoires d’armes et les munitions du 20 juin 1997 (LArm – RS 514.54).

4.             Le 18 mars 2024, par décision déclarée exécutoire nonobstant recours, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) a ordonné son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai de départ immédiat.

5.             Dans le cadre de l'audition conduite par la Brigade migration et retour le 4 juillet 2024, M. A______ a déclaré avoir fait une demande auprès des autorités de la ville de C______ en vue de régulariser son séjour en France suite à la naissance de son fils le ______ 2023 et son mariage religieux avec son épouse dans cette ville. Il était disposé à quitter la Suisse par ses propres moyens une fois qu'il aurait payé ses diverses amendes. S'agissant de sa situation personnelle, il n'avait pas d'adresse de notification en Suisse, été toxicomane et suivi par un médecin.

6.             Le 22 juillet 2024, alors qu'il était incarcéré à la prison de Champ-Dollon, les autorités genevoises ont requis le soutien administratif du secrétariat d’Etat aux migrations (ci-après : SEM) en vue de l'identification formelle de M. A______ et l'obtention d'un document de voyage le concernant.

7.             Le 19 septembre 2024, sur réquisition de l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières, les autorités françaises ont indiqué que l'intéressé n'avait aucun droit de séjour en France et était démuni de documents d'identité.

8.             Le 12 octobre 2024, le commissaire de police a notifié à l'intéressé une interdiction de pénétrer sur l'ensemble du territoire du canton de Genève (art. 119 LEI) pour une durée de 18 mois.

9.             Le 23 octobre 2024, le SEM a informé les autorités genevoises que M. A______ avait été formellement identifié par la Tunisie pays et qu'un vol en sa faveur, à destination de ce pays, pouvait être réservé auprès de swissREPAT.

10.         M. A______ a été arrêté par les services de police le 18 novembre 2024 à la rue de l'Ancien-Port 14, 1201 Genève, alors qu'il venait de consommer de la cocaïne. Entendu par la police, il a déclaré dormir à proximité du D______ et subvenir à ses besoins grâce aux aides financières dispensées par cet établissement. Prévenu d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b, 119 al. 1 LEI ainsi qu'à l'art. 19a ch. 1 LStup, l'intéressé a été mis à disposition du Ministère public, sur ordre du commissaire de police.

11.         Le 19 novembre 2024, entendu par le Ministère public, l'intéressé a confirmé ses précédentes déclarations à la police. Il s'était rendu à E______ (VD) après sa condamnation du 12 octobre 2024 et n'avait pas quitté la Suisse. Il était revenu à Genève sept à dix jours avant son arrestation de la veille, pour y voir sa femme et son fils. Il consommait du crack quand il en trouvait. Il savait qu'il n'avait pas le droit d'être en Suisse. Il avait fait une erreur et n'y reviendrait pas.

12.         A l'issue de son audition, le Ministère public a condamné M. A______ par ordonnance pénale, à une peine privative de liberté d'ensemble de 100 jours, ainsi qu'à une amende de CHF 300.-, pour séjour illégal, non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminé et consommation de stupéfiants. Il a été mis à disposition des services de police.

13.         Le 19 novembre 2024, à 16h53, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de six semaines.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré être en bonne santé et poursuivre un traitement à base de méthadone. Il s'opposait à son renvoi en Tunisie, car il avait un problème avec la famille de sa femme.

14.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

15.         Entendu le 22 novembre 2024 par le tribunal, M. A______ a déclaré être malade et consommer de la drogue. Il avait mal à la moitié gauche de son visage. Il ne comprenait pas pourquoi il était en détention administrative. Il n'avait personne en Tunisie. Sa famille était en France et en Italie. Il savait qu’il n’avait pas le droit d'être en Suisse. Il était revenu à Genève malgré l'interdiction pour y voir son fils et sa femme qu'il n'avait pas vus depuis quatre mois. Il consommait de l'héroïne et du crack depuis quatre ans. Il était en France depuis 2020. Son fils, F______, était né le ______ 2023. Sa femme, née le ______ 1981, s'appelait G______. Ils étaient domiciliés à H______ (France). A son arrivée en France, il avait travaillé pour le frère de sa femme. S’il était autorisé à retourner en France, il pourrait recommencer à travailler pour lui. Il était exact que son passeport et sa carte d'identité tunisiens se trouvaient à son domicile. Il avait deux sœurs qui vivaient à I______. Sa mère habitait maintenant en Italie avec son frère. Depuis deux mois, il n'avait appelé personne car il était beaucoup trop mal à cause de la drogue. Il prenait de la méthadone et du valium. Il voulait retourner en Italie vers sa famille. En Suisse, vivait la sœur de sa mère. Il la voyait de temps en temps, mais il n’avait pas le droit d'aller chez elle. Il n’avait pas d'autre famille à Genève. Il n’était pas d'accord de retourner en Tunisie. Sa femme et son fils étaient en France.

16.         Par décision du 22 novembre 2024, le tribunal a confirmé l'ordre de mise en détention administrative du commissaire de police pour une durée de six semaines, soit jusqu'au 30 décembre 2024 (JTAPI/1151/2024).

17.         Un vol à destination de la Tunisie en faveur de M. A______ a été réservé pour le 23 décembre 2024. Ce vol a été annulé suite à la demande d'asile déposée par l'intéressé le 11 décembre 2024.

18.         Par requête motivée du 16 décembre 2024, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

Il était dans l'attente de la réponse du SEM quant à la demande d'asile déposée par l'intéressé. La détention constituait l'unique moyen de mener à terme le rapatriement de M. A______. Une telle durée ne violait pas le principe de proportionnalité eu égard au comportement adopté par l'intéressé.

19.         Devant le tribunal, lors de l'audience du 19 décembre 2024, la représentante du commissaire de police a déclaré ne pas avoir reçu de nouvelles du SEM suite à la demande d'asile déposée par M. A______. Le délai de réponse dépendait des motifs invoqués par le requérant et des pièces déposées. Le dossier de M. A______ était prioritaire.

M. A______ a déclaré que lorsqu'il était en liberté, il dormait soit dehors, soit au D______, soit chez sa tante qui vivait à côté de chez J______. Sa seule famille en Suisse était cette tante chez qui il pourrait vivre s'il était libéré. Il ne travaillait pas en Suisse. Il travaillait en France comme peintre en bâtiment et gagnait environ EUR 65.- par jour. Pour manger, il allait à l'K______ ou au L______. Il n'avait pas d'argent. Il avait déposé une demande d'asile car il avait un problème grave en Tunisie avec sa famille et celle de son ex-compagne. Le frère de sa femme ainsi que son frère étaient en prison. Son frère était mort suite à l'incendie causé par son beau-frère en cellule. Sa famille pensait qu'il connaissait les raisons du décès de son frère et qu'il l'avait caché. Il n'avait donc plus aucun contact avec sa famille. Comme il avait déposé plainte contre son beau-frère, sa belle-famille lui avait blessé la jambe. Il avait un certificat médical en Italie. Il ne voulait pas retourner en Tunisie. Il avait déposé une demande d'asile en France. Il était marié en France et il avait un bébé. Il souhaitait retourner en France, où il n'avait pas de permis de séjour, pour voir son fils. S'il était venu en Suisse, c'était pour se soigner de ses addictions. Il avait fait une erreur mais la Suisse était le seul endroit où il pouvait être aidé et se soigner. Il ne se sentait pas bien et avait besoin d'être aidé. Il prenait des médicaments. Il n'avait pas d'attestation de sa tante indiquant qu'elle était prête à l'héberger. Son conseil a plaidé et conclu, principalement, à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement, à ce que sa détention soit prolongée pour une durée maximale d'un mois.

La représentante du commissaire de police a plaidé et conclu à la confirmation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).

3.             En l'occurrence, le 16 décembre 2024, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

4.             Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.

5.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

6.             Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, en lien avec l'art. 75 al. 1 let. h LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée lorsqu'elle a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d’une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a).

7.             La détention administrative est aussi possible si des éléments concrets font craindre que ladite personne entende se soustraire à son refoulement, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

8.             Ces deux dernières dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

9.             Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c’est-à-dire la réalisation de l’un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2).

10.         Lorsqu’il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s’il existe des garanties que l’étranger prêtera son concours à l’exécution du refoulement, soit qu’il se conformera aux instructions de l’autorité et regagnera son pays d’origine le moment venu, c’est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d’une certaine marge d’appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).

11.         L’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI permet par ailleurs à l’autorité de mettre en détention la personne concernée pour les motifs cités à l’art. 75 al. 1 let. a, b, c, f, g, h ou i LEI.

12.         L’art. 75 al. 1 let. f LEI prévoit qu’afin d’assurer l’exécution d’une procédure de renvoi ou d’expulsion ou d’une procédure pénale pouvant entraîner une expulsion obligatoire au sens des art. 66a ou 66abis CP, l’autorité cantonale compétente peut ordonner la détention pendant la préparation de la décision sur le séjour, pour une durée de six mois au plus, d’une personne qui n’est pas titulaire d’une autorisation de courte durée, de séjour ou d’établissement, si elle séjourne illégalement en Suisse et dépose une demande d’asile dans le but manifeste d’empêcher l’exécution d’un renvoi ou d’une expulsion ; tel peut être le cas notamment lorsque le dépôt de la demande d’asile aurait été possible et raisonnablement exigible auparavant et que la demande est déposée en relation chronologique étroite avec une mesure de détention, une procédure pénale, l’exécution d’une peine ou la promulgation d’une décision de renvoi.

13.         En l’espèce, M. A______ fait l'objet d'une décision de renvoi de Suisse, définitive et exécutoire, prononcée le 18 mars 2024. Il fait par ailleurs l'objet d'une interdiction de pénétrer sur l'ensemble du territoire genevois pour une durée de 18 mois, valablement notifiée. Il n'a pas respecté ces mesures dès lors qu'il a été une nouvelle fois arrêté le 18 novembre 2024 à Genève. Il a en outre été condamné pour vol, soit un crime (art. 10 al. 2 CP). De surcroît, il n'a eu de cesse, de 2023 à octobre 2024, de commettre des infractions pénales et de s'opposer à son départ vers son pays d'origine. Dépourvu de tout document d'identité, il n'a ni ressources financières, ni liens avec la Suisse. Concernant la demande d'asile qu'il a déposée, aucun élément au dossier ne permet de retenir que les chances de succès seraient réelles. Il apparaît d'ailleurs hautement vraisemblable que cette demande n'ait pour seul but que d'empêcher l'exécution de son renvoi. L'assurance de son départ effectif de Suisse répond en outre à un intérêt public certain vu ses nombreuses condamnations. Dès lors, il existe des indices concrets faisant craindre que s'il était remis en liberté, M. A______ disparaîtrait dans la clandestinité dans le but de se soustraire à son renvoi, situation visée par les art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI.

Partant, les conditions légales de la détention sont remplies.

14.         La détention administrative en matière de droit des étrangers doit dans tous les cas respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

15.         En l'espèce, les autorités sont dans l'attente de l'issue de la procédure d'asile. L'intérêt public au départ de l'intéressé n'a pas disparu et aucune mesure moins incisive que la détention administrative n'est susceptible d'assurer son renvoi dans son pays d'origine. Il sied de rappeler que M. A______ n'a fourni aucune garantie que sa tante serait prête à l'héberger chez elle et quand bien-même, une assignation ne serait pas propre à pallier le risque de fuite, respectivement de passage dans la clandestinité. La détention, seule mesure propre à s'assurer du renvoi effectif de M. A______, respecte par conséquent le principe de la proportionnalité.

16.         Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010).

17.         En l’espèce, les autorités avaient réservé un vol en faveur de l'intéressé, à destination de la Tunisie, pour le 23 décembre 2024. Ce vol a dû être annulé en raison de la demande d'asile déposée par M. A______. Le principe de célérité posé par l'art. 76 al. 4 LEI est ainsi respecté. C'est par ailleurs à juste titre que l'OCPM attend l'issue de la procédure d'asile pour réserver un nouveau vol et on ne saurait lui faire grief de violer le principe de célérité pour ce motif.

18.         Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

19.         Dans tous les cas, la durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).

20.         En l'espèce, la durée de détention respecte le cadre légal et n'apparaît pas disproportionnée, étant précisé que la détention de M. A______ prendrait fin s'il acceptait de coopérer et de prendre un vol à destination de l'Algérie.

21.         Enfin, l'état de santé de M. A______ n'apparaît pas de nature à empêcher son renvoi vers l'Algérie. En effet, rien n'indique qu'il ne pourrait pas voyager ni qu'il ne puisse pas poursuivre son traitement médical contre les addictions, dans son pays d'origine. Au contraire, il apparaît, à première vue, que son suivi pourrait très bien être effectué en Algérie. En tout état, M. A______ échoue à démontrer tant ses problèmes de santé que l'impossibilité de se soigner en Algérie, étant relevé qu'il n'a fourni aucune pièce en ces sens. Son renvoi est donc exigible au sens de l'art. 83 al. 4 LEI.

22.         Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______ sera admise pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 30 mars 2025.

23.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 16 décembre 2024 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 30 mars 2025, inclus ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au SEM.

Genève, le

 

Le greffier