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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/192/2024

JTAPI/989/2024 du 07.10.2024 ( ICC ) , REJETE

Descripteurs : VALEUR FISCALE;SOCIÉTÉ ANONYME;ACTION(PAPIER-VALEUR)
Normes : LHID.14.al1; LIPP.49.al2
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/192/2024 ICC

JTAPI/989/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 octobre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Martin AHLSTROM, avocat, avec élection de domicile

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

 


 

EN FAIT

1.             En 2019, Monsieur A______ détenait 80 % du capital-actions de la société B______ SA (ci-après : B______), dont le but social est l’importation, la vente et la distribution de produits liés au tabac. Il en est le directeur avec signature individuelle. Le ______ 2018, B______ a transféré son siège de Genève dans le canton de Vaud.

2.             Dans sa déclaration fiscale 2019, le contribuable a indiqué la valeur de sa participation dans B______ pour CHF 1'198'080.-.

3.             Par bordereau du 1er mars 2021, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a fixé la valeur de cette participation à CHF 2'116'000.-, en application de la circulaire n° 28 de la Conférence suisse des impôts (intitulée « Instructions concernant l'estimation des titres non cotés en vue de l'impôt sur la fortune » ; ci-après : la circulaire n° 28).

4.             Par réclamation du 1er avril 2021, le contribuable a contesté cette estimation, faisant valoir que sans son activité et ses compétences, la société ne pouvait fonctionner et qu’en conséquence, il lui serait impossible de vendre ses actions au prix estimé par l'AFC-GE. Aussi, principalement, la valeur de sa participation dans B______ devait être fixée à 80 % de sa valeur nominale de CHF 100'000.-. Subsidiairement, la valeur comptable devait être retenue, soit 80 % de CHF 944'645.-.

5.             Le 2 juillet 2021, à la demande de l'AFC-GE, le contribuable a précisé que Monsieur C______ et lui-même étaient les seuls actionnaires de B______, à concurrence de respectivement 20 % et 80 % et que celle-ci ne comptait que trois salariés, soit lui-même, M. C______ et Monsieur D______. Il a joint une liste des rémunérations des trois salariés.

6.             Le 26 janvier 2022, l'AFC-GE a indiqué au contribuable avoir fixé sa participation dans B______ à CHF 2'055'200.-, soit CHF 25'690.- par action, en application de la circulaire n° 28.

7.             Dans sa détermination du 4 février 2022, le contribuable a maintenu ses conclusions, faisant valoir en substance que l’application de cette circulaire dans le cas d’espèce aboutissait à un résultat disproportionné et choquant dès lors que la valeur marchande de B______ correspondait à celle de « son stock et de ses actifs ».

8.             Par décision sur réclamation du 6 décembre 2023, comportant la mention « Date de notification : 18 décembre 2023 » et expédiée par pli simple, l'AFC-GE a ramené la valeur de la participation litigieuse à CHF 1'771'280.-, expliquant que le rendement de B______ ne reposait pas exclusivement sur la performance du contribuable, mais également sur celle des autres salariés et que les valeurs nominales et comptables étaient exclues dès lors qu’il s’agissait d’une société commerciale.

9.             Par acte déposé le 17 janvier 2024, précisant que cette décision lui avait été « notifiée le 18 décembre 2023 au domicile élu », le contribuable a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à l’annulation de cette décision et à ce que la valeur de sa participation B______ soit fixée à CHF 80'000.- (valeur nominale), sous suite des dépens. Subsidiairement, il a conclu à ce que cette valeur soit arrêtée à CHF 755'716.- (valeur comptable).

Il était seul entrepreneur effectif de B______, avec la fonction de directeur et, à ce titre, percevait un salaire confortable et des dividendes. Il connaissait les fournisseurs depuis de nombreuses années, la clientèle lui était « personnellement liée » et il avait un « contact privilégié » avec elle. M. C______ exerçait un rôle administratif (comptabilité et gestion des commandes). Il en allait de même des « autres employés ». Il était l'acteur « clé » de la société.

B______ ne disposait pas de bureaux, mais uniquement d'un local pour le stock de cigares. Sans lui, elle perdrait toute valeur et cesserait son activité à très brève échéance.

La décision entreprise violait les lois fiscales applicables, le droit de propriété, l’interdiction de l’arbitraire et le principe de la capacité contributive. La législation genevoise ne prévoyait pas de tenir compte de la valeur de rendement pour l'établissement de la valeur vénale. Faute de base légale se référant à la valeur de rendement, seule la « valeur vénale » était applicable. La méthode des praticiens préconisée par la circulaire n° 28 n’était pas prévue par la loi. De plus, elle ne trouvait aucune justification en l’espèce et aboutissait à un résultat arbitraire, puisqu'elle conduisait à l’imposer sur une fortune « purement virtuelle ». Il était déjà imposé lourdement sur son salaire et ses dividendes, à quoi s’ajoutait un impôt sur la fortune sur ses titres qu'il ne pourrait jamais vendre à la valeur fixée par l'AFC-GE. Ce procédé aboutissait en réalité à une double taxation, voire à un impôt confiscatoire.

10.         Le 25 mars 2024, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Le recourant n'était pas le seul acteur de B______. L'estimation des titres en cause avait été effectuée en respectant les principes d'évaluation exposés dans la circulaire n° 28. Il n'y avait donc pas d'arbitraire dans cette estimation. Il n'y avait pas non plus lieu d'appliquer le bouclier fiscal dans la taxation ICC 2019 du recourant.

11.         Par réplique du 25 avril 2024, respectivement duplique du 28 mai suivant, les parties ont campé sur leurs positions respectives.

 

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l'AFC-GE (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17).

2.             Interjeté dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable, sous cet angle, au sens de l'art. 49 LPFisc.

S’agissant de la question de savoir si le recours a été déposé en temps utile, il convient tout d’abord de relever que la mention « Date de notification : 18 décembre 2023 » figurant sur la décision litigieuse datée du 6 décembre 2023 parait incompatible tant avec le caractère impératif du délai de recours de 30 jours fixé par cette disposition qu’avec le principe de l’égalité de traitement, dans la mesure où elle est susceptible d’induire en erreur les contribuables, en ce sens qu’ils pourraient se fonder plutôt sur elle qu’à la date à laquelle ils ont effectivement reçu la décision, pour calculer le dies a quo dudit délai.

En l’occurrence, étant donné que la date d’expédition de la décision litigieuse est inconnue (cf. ATA/1373/2018 du 18 décembre 2018 consid. 7c, ATA/461/2018 du 8 mai 2018 consid. 10, ATA/687/2017 du 20 juin 2017 consid. 6c, selon lesquels, en cas d'envoi de décisions sous pli simple, comme en l’espèce, on admet que la décision entreprise a été réceptionnée quelques jours après son expédition), il y a lieu de se fonder sur la déclaration du recourant (cf. ATF 142 IV 125 consid. 4.3 ; 129 I 8 consid. 2.2 ; 124 V 400 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_634/2015 du 26 avril 2016 consid. 2.1), selon laquelle il l’a reçue le 18 décembre 2023. Aussi, il y a lieu de retenir que le présent acte de recours, déposé le 17 janvier 2024, l’a été en temps utile.

Ainsi, sous cet angle également, le recours est recevable.

3.             Le recourant conteste l’évaluation de la participation qu’il détient dans B______, considérant en particulier que la méthode d’évaluation préconisée par la circulaire n° 28 n’est pas prévue par la loi.

4.             Selon l’art. 13 al. 1 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14), l’impôt sur la fortune a pour objet l’ensemble de la fortune nette. Selon l’art. 14 al. 1 LHID, la fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée.

5.             La valeur vénale est la valeur marchande objective d’un actif à un moment donné. Il s’agit de la valeur qu’un acheteur paierait normalement dans des circonstances normales (arrêt du Tribunal fédéral 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 consid. 5.1 ; ATA/261/2024 du 27 février 2024 consid. 3.1).

6.             Dans le canton de Genève, la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), prévoit également que l’impôt sur la fortune a pour objet l’ensemble de la fortune nette après déductions sociales (art. 46), qui comprend notamment les actions, les obligations et les valeurs mobilières de toute nature (art. 47 let. b).

Selon l’art. 49 LIPP, l’état de la fortune mobilière et immobilière est établi au 31 décembre de l’année pour laquelle l’impôt est dû (al. 1). La fortune est estimée en général à la valeur vénale (al. 2). La formulation de ce dernier alinéa ne s'oppose pas à la prise en compte de la valeur de rendement pour déterminer la valeur vénale des titres non cotés en bourse, comme le prévoyait d'ailleurs expressément l'ancien droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2009 (cf. art. 5 de l'ancienne loi du 22 septembre 2000 sur l'imposition des personnes physiques - Impôt sur la fortune [aLIPP-III] ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_328/2019 du 16 septembre 2019 consid. 4.4 ss).

7.             L’évaluation des titres non cotés a fait l’objet de la circulaire n° 28. La Conférence suisse des impôts édite annuellement un commentaire (ci-après : commentaire) en lien avec cette circulaire pour refléter la pratique et tenir compte de la jurisprudence.

La circulaire n° 28, qui a rencontré l’approbation du Tribunal fédéral (arrêts 2C_59/2022 du 15 septembre 2022 ; 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 ; 2C_132/2020 du 26 novembre 2020 consid. 8.1.2, non publié in ATF 147 II 155 et les arrêts cités), a pour objectif l’estimation uniforme en Suisse, pour l’impôt sur la fortune, des titres nationaux et étrangers qui ne sont négociés dans aucune bourse.

Les principes d’estimation doivent être choisis de manière à ce que le résultat se rapproche au mieux de la réalité économique, la circulaire n° 28 contenant des instructions à cet égard, auxquelles il peut être dérogé, pour des motifs d’égalité de traitement, lorsque leur application se révélerait contraire au droit ou si la valeur vénale d’un titre peut être ainsi mieux évaluée (commentaire, p. 2).

Les titres et participations non cotés sont estimés selon les présentes Instructions, mais au minimum à leur valeur comptable. On peut s’écarter de cette règle dans des cas justifiés (ch. 24 al. 1 de la circulaire n° 28).

C’est ainsi l’approche « technique » ou « juridique » qui est déterminante pour la détermination de la valeur vénale et non une approche « économique » subjective. Ainsi, le contribuable concerné ne peut pas soutenir une valeur patrimoniale qui se baserait sur des circonstances individuelles (par exemple suite à la présentation d’une convention d’actionnaires) (décision de la commission cantonale de recours en matière d’impôts du canton de Zurich du 21 octobre 2015 en la cause 1 ST.2015.35 ; commentaire, p. 3).

8.             S’agissant de l’évaluation des sociétés commerciales, industrielles et de services, le ch. 34 de la circulaire n° 28 prescrit que la valeur de l’entreprise résulte de la moyenne pondérée entre la valeur de rendement (ch. 7 à 10) qui est doublée, d’une part, et la valeur substantielle (ch. 11 à 14) déterminée selon le principe de continuation de l’exploitation, d’autre part. Des événements exceptionnels, déjà prévisibles le jour déterminant - par exemple des restructurations avec des conséquences durables sur la valeur de rendement -, peuvent être pris en compte de manière appropriée lors de l’établissement de la valeur de rendement (ch. 8 par. 3).

Le commentaire précise que dans des cas exceptionnels, une entreprise ne peut être aliénée ou difficilement aliénable à la valeur de rendement, par exemple lorsque son rendement repose exclusivement ou presque exclusivement sur la performance d’une personne unique détenant la totalité ou la majorité des droits de participation de celle-ci (participations > 50%). Si la création de valeur de l’entreprise est obtenue uniquement par le détenteur d’une participation majoritaire et si l’entreprise n’emploie pas d’autres personnes, hormis quelques personnes occupées à des tâches d’administration et de logistique, l’autorité d’estimation peut, sur demande de l’entreprise, prendre en considération cette situation par une pondération simple de la valeur de rendement (c’est-à-dire non doublée) et de la valeur de substance. Une fois déterminée de cette manière, la valeur de l’entreprise est appliquée à tous les titres émis, notamment pour les actionnaires minoritaires. Il ne peut être appliqué aucune déduction forfaitaire supplémentaire (p. 10).

9.             Dans l’arrêt 2C_132/2020 précité, le Tribunal fédéral a rappelé : « La circulaire n° 28 prévoit que la méthode d'estimation générale des titres non cotés des sociétés commerciales, industrielles et de services, dans la mesure où ils n'ont jamais été transférés, s'effectue par la moyenne pondérée entre la valeur de rendement doublée et la valeur intrinsèque déterminée selon le principe de la continuation (…). Cette méthode est généralement appelée "méthode des praticiens" (…) ».

La jurisprudence considère par ailleurs que l’exigence de la densité normative n’est pas absolue, car on ne saurait exiger du législateur qu’il renonce totalement à recourir à des notions générales, comportant une part nécessaire d’interprétation. Cela tient en premier lieu à la nature générale et abstraite inhérente à toute règle de droit, et à la nécessité qui en découle de laisser aux autorités d’application une certaine marge de manœuvre lors de la concrétisation de la norme. Pour déterminer quel degré de précision l’on est en droit d’exiger de la loi, il faut tenir compte du cercle de ses destinataires et de la gravité des atteintes qu’elle autorise aux droits fondamentaux (ATF 143 I 253 consid. 6.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_719/2020 du 30 juin 2021 consid. 5.3.2).

Elle retient aussi qu’en prévoyant des règles unifiées d’estimation des titres non cotés en vue de leur imposition sur la fortune dans un domaine où les cantons jouissent d’un large pouvoir d’appréciation, la circulaire n° 28 poursuit un but d’harmonisation fiscale horizontale et concrétise ainsi l’art. 14 al. 1 LHID (arrêt du Tribunal fédéral 2C_826/2015 du 5 janvier 2017 consid. 4.3).

Elle ajoute que si l’évaluation selon la valeur vénale est obligatoire pour les cantons, la LHID ne prescrit toutefois pas au législateur cantonal une méthode d’évaluation précise pour déterminer cette valeur et que les cantons disposent donc en la matière d’une marge de manœuvre importante pour élaborer et appliquer leur réglementation, aussi bien dans le choix de la méthode de calcul applicable que pour déterminer, sur le vu du caractère potestatif de l’art. 14 al. 1 2ème phr. LHID, dans quelle mesure la valeur de rendement doit être prise en considération dans l’estimation. Ainsi, la valeur de rendement peut être prise en considération de manière appropriée, mais sans justifier n’importe quel écart avec la valeur vénale (ATF 134 II 207 consid. 3.6 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_401/2020 du 28 juillet 2021 consid. 4.1.1, destiné à publication ; 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 consid. 5.1).

Elle précise que la circulaire n° 28 prend en compte les éléments déterminants pour l’évaluation des titres non cotés et qu’elle est appropriée pour l’estimation des sociétés en vue de l’imposition sur la fortune des actionnaires, sans pour autant exclure que d’autres méthodes d’évaluation reconnues puissent, isolément, s’avérer appropriées. En tant que directive faisant partie des ordonnances administratives, qui s’adressent aux administrations fiscales cantonales afin d’unifier et de rationaliser la pratique, d’assurer l’égalité de traitement, le bon fonctionnement de l’administration et la sécurité juridique, la circulaire n° 28 ne constitue pas du droit et ne lie pas le juge (arrêt du Tribunal fédéral 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 consid. 5.3). Ces autorités ne s’en écartent que dans la mesure où elles contreviennent au sens et au but de la loi (ATA/1518/2017 du 21 novembre 2017).

10.         En matière fiscale, le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d’impôts. Il lui appartient non seulement de les alléguer, mais encore d’en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l’échec de cette preuve, ces règles s’appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.5 ; ATA/1239/2021 du 1er novembre 2021 consid. 5a ; ATA/1223/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3c).

En particulier, si l’estimation des titres est effectuée sur la base de la circulaire, il convient alors de supposer que l’estimation aboutit à une valeur vénale correcte et que, par ce calcul, le fisc a apporté une preuve suffisante. Si un contribuable est d’un avis contraire, il lui appartient d’apporter ses propres preuves (cf. p. 3 s des commentaires). La preuve de l'existence de circonstances justifiant de s’écarter de la méthode générale d’estimation contenue dans la circulaire et de l'inadéquation à leur situation du mode de calcul figurant dans cette dernière doit ainsi être apportée par le contribuable (ATA/303/2013 du 14 mai 2013 consid. 4 ; ATA/483/2012 du 31 juillet 2012 consid. 6).

11.         En l’espèce, le grief du recourant relatif à l’inapplicabilité de la circulaire n° 28 tombe à faux. Certes, l’art. 14 al. 1 LHID et les normes topiques cantonales précitées ne s’y réfèrent pas, mais une jurisprudence constante y renvoie pour concrétiser la valeur vénale des titres non cotés, soulignant qu’elle poursuit un but d’harmonisation fiscale horizontale et concrétise ainsi l’art. 14 al. 1 LHID. Il n’y a pas lieu de s’écarter de cette jurisprudence.

La position du recourant quant à l’arbitraire de la circulaire n° 28 ne peut également pas être suivie. Celle-ci opère en effet une distinction entre les sociétés dont la valeur de rendement repose exclusivement ou presque exclusivement sur la performance d’une personne unique détenant la totalité ou la majorité des droits de participation et celles qui n’ont pas cette particularité. En l’espèce, la situation particulière de B______, soit le fait que ses revenus ne seraient générés que par le recourant, n’est pas établie. En effet, ce dernier n’a fourni aucun élément de preuve permettant de le confirmer. Au contraire, il ressort de la liste des rémunérations qu’il a produite au stade de la réclamation (cf. pièce n° 5 du chargé de l'AFC-GE) que le montant de son salaire est proche de celui de la rémunération perçue par l’administrateur de B______, M. C______, ce qui laisse penser que ce dernier contribue également à la création de la valeur de l’entreprise et que son activité ne se limite pas à la « comptabilité et gestion des commandes ». Il y a donc lieu de considérer que c’est également sur lui que repose le chiffre d’affaires de B______. Ainsi, aucun élément objectif ne permet d'admettre que le rendement de B______ reposerait sur la seule performance individuelle du recourant, de sorte que l'AFC-GE n'avait pas à procéder à une pondération simple de sa valeur de rendement et de sa valeur substantielle. Le recourant semble certes avoir un rôle primordial dans son entreprise, mais il n'est pas le seul à fournir à sa clientèle les prestations facturées, puisque celles-ci dépendent aussi de l'activité déployée par les deux autres personnes mentionnées sur la liste des rémunérations. Sans leur collaboration, il est vraisemblable que l'activité principale de l'entreprise cesserait du jour au lendemain, étant donné que le recourant ne serait pas en mesure de continuer à assumer ses fonctions dirigeantes et en même temps celles de ces collaborateurs auprès de la clientèle. Inversement, si le recourant était subitement dans l'incapacité de travailler, il n’est pas certain que la société serait empêchée de poursuivre ses activités avec ces mêmes collaborateurs au sein des entreprises clientes. En d'autres termes, il convient en l’occurrence de parler plutôt de complémentarité entre l'activité déployée par le recourant et celle des autres collaborateurs.

S’agissant de la prise en compte de la valeur de rendement, il n’est pas contestable qu’il en soit tenu compte pour établir la valeur vénale, ainsi que retenu à réitérées reprises par la jurisprudence. Le Tribunal fédéral a au surplus relevé à ce sujet qu’une évaluation reposant exclusivement sur la valeur substantielle aurait pour effet de parvenir de manière systématique à une évaluation très faible des titres des sociétés de services dont la valeur dépend de l’activité de leur actionnaire unique et qu’il était douteux qu’une telle méthode respecte le principe de l’évaluation à la valeur vénale prévue par l’art. 14 LHID (arrêt 2C_866/2019 consid. 6.2.3). Dans le même ordre d’idée, prendre en compte la valeur de rendement pour établir la valeur vénale est peut-être discutable d’un point de vue économique, mais non pour cela forcément arbitraire.

Pour le surplus, l’on ne perçoit pas en quoi la capacité contributive du recourant et son droit à la propriété seraient violés par l’impôt qui lui est réclamé sur une fortune dont la valeur vénale a été fixée conformément à la loi, étant relevé que le montant de cet impôt est de loin inférieur à celui de son revenu imposable en 2019 et qu’il n’entame donc pas cette fortune.

Enfin, le grief du recourant relatif à l’imposition confiscatoire parait manifestement mal fondé dès lors que l’ICC qu’il doit pour l’année 2019 (CHF 32'199,05) n’excède de toute évidence pas 60% de son revenu net imposable (CHF 109'174.-) de sorte que les conditions du bouclier fiscal de l’art. 60 al. 1 LIPP ne sont pas réunies.

12.         Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

13.         En application des art. 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

14.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 17 janvier 2024 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 6 décembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Gwénaëlle GATTONI, présidente, Pascal DE LUCIA et Philippe FONTAINE, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier