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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2831/2024

JTAPI/937/2024 du 19.09.2024 ( MC ) , ADMIS PARTIELLEMENT

Descripteurs : INTERDICTION DE PÉNÉTRER DANS UNE ZONE
Normes : LEI.74
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2831/2024 MC

JTAPI/937/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INST+ANCE

du 19 septembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Charles ARCHINARD, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


EN FAIT

1.            Monsieur A______, né le ______ (alias A______, né le ______ 2001 et A______, né le ______ 1999), est originaire du Nigéria. M. A______ est connu des services de police et de la justice suisse, notamment pour des infractions de délit et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) (trafic de marijuana et de cocaïne) et à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), pour lesquelles il a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public du canton de Genève du 2 novembre 2018, puis du 14 janvier 2019 et enfin du 29 mars 2019, étant précisé qu'il a encore fait l'objet, ultérieurement, d'autres condamnations pour opposition aux actes des autorités (art. 286a du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0) et pour infraction aux dispositions de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) sur l'entrée et le séjour en Suisse.

2.            Le 29 mars 2019, il a fait l'objet d'une interdiction de pénétrer dans l'ensemble du territoire genevois, prise à son encontre par le commissaire de police pour une durée de douze mois, après avoir été condamné pour trafic de cocaïne.

3.            Le 23 août 2024, M. A______ a été interpellé par les services de police, alors qu'il était démuni de documents d'identité, pour avoir vendu une pilule d'ecstasy à un individu contre la somme de CHF 20.-, échange ayant pu être observé par la police. Lors de son audition, l'intéressé a nié les faits, malgré les observations de la police. S'agissant de sa situation personnelle, il a indiqué n'avoir aucun lien particulier ni aucune famille en Suisse, et vivre en France voisine en y effectuant des "petits boulots".

4.            Le 24 août 2024, M. A______, après avoir été entendu par le procureur, a été condamné, par ordonnance pénale du Ministère public, en référence aux éléments de son arrestation, notamment pour infractions contre la LStup et la LEI, à une peine privative de liberté de 40 jours.

5.            Le 24 août 2024, en application de l'art. 74 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr), le commissaire de police a prononcé à l'encontre de M. A______ une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée (interdiction d'accès au canton de Genève) pour une durée de 24 mois.

6.            M. A______ a formé opposition contre cette décision devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), sous la plume de son conseil, par courrier du 2 septembre 2024.

7.            Lors de l'audience de ce jour, M. A______ a en substance expliqué qu'il avait une amie à Genève depuis environ deux ans, avec laquelle il avait des projets sérieux. Elle venait parfois le trouver à C______ (France), où il vivait, mais ne pouvait le faire tout le temps car elle travaillait. Il avait également des amis à Genève, qui étaient comme sa famille. Sous réserve du fait qu'elle vivait dans le quartier de B______ et qu'il s'agissait d'une ressortissante française, il ne souhaitait pas donner davantage d'information à son sujet, pour lui éviter d'éventuelles difficultés, bien qu'il n'eût pas de raison spécifique de penser qu'elle pourrait en avoir.

8.            Son conseil a remis au tribunal copie de l'opposition formée par M. A______ contre l'ordonnance de condamnation du 24 août 2024 et a conclu à ce que la durée de la décision litigieuse soit réduite à douze mois et son périmètre à celui du centre-ville de Genève.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner sur opposition la légalité et l’adéquation de l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prononcée par le commissaire de police à l'encontre d'un ressortissant étranger (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. a de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             L'opposition ayant été formée dans le délai de dix jours courant dès la notification de la mesure querellée, elle est recevable sous l'angle de l'art. 8 al. 1 LaLEtr.

3.             Statuant ce jour, le tribunal respecte en outre le délai de vingt jours que lui impose l'art. 9 al. 1 let. b LaLEtr.

4.             Selon l'art. 74 al. 1 LEI, qui a repris l'art. 13e de l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE- RS 142.20 ; cf. message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale sur les étrangers du 8 mars 2002 in FF 2002 3469, p. 3570), l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée dans les cas suivants :

a. l'étranger n'est pas titulaire d'une autorisation de courte durée, d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation d'établissement et trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics ; cette mesure vise notamment à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants ;

b. l'étranger est frappé d'une décision de renvoi ou d'expulsion entrée en force et des éléments concrets font redouter qu'il ne quittera pas la Suisse dans le délai prescrit ou il n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire ;

c. l'exécution du renvoi ou de l'expulsion a été reportée (art. 69 al. 3 LEI).

5.             Conformément à l'art. 74 al. 2 LEI, la compétence d'ordonner ces mesures incombe au canton qui exécute le renvoi ou l'expulsion ; s'agissant de personnes séjournant dans un centre d'enregistrement ou dans un centre spécifique au sens de l'art. 26 al. 1bis de la loi sur l’asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31), cette compétence ressortit au canton sur le territoire duquel se trouve le centre ; l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée peut aussi être prononcée par le canton dans lequel est située cette région.

6.             De son côté, l'art. 6 al. 3 LaLEtr précise que l'étranger peut être contraint à ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou à ne pas pénétrer dans une région déterminée, aux conditions prévues à l'art. 74 LEI, notamment suite à une condamnation pour vol, brigandage, lésions corporelles intentionnelles, dommage à la propriété ou pour une infraction à la LStup.

7.             Les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée répondent à deux préoccupations. Elles permettent d'intervenir pour protéger la sécurité et l'ordre publics - plus particulièrement dans les domaines qui ne peuvent guère être couverts par le droit pénal - à l'encontre de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage. En outre, elles peuvent être ordonnées à l'égard d'étrangers dont le renvoi est durablement entravé et pour lesquels il est nécessaire de les tenir éloignés d'un endroit déterminé ou de pouvoir les surveiller (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 rendu sous l'égide de l'art. 13 aLSEE, remplacé par l'art. 74 al. 1 LEI - cf. supra).

8.             L'étranger est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire s'il n'observe pas les mesures qui lui sont imposées dans ce cadre (cf. art. 119 LEI).

9.             Les mesures prévues par l'art. 74 al. 1 LEI visent à prévenir les atteintes à la sécurité et à l'ordre publics plutôt qu'à sanctionner un comportement déterminé de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 2a).

D'après la jurisprudence, le simple soupçon qu'un étranger puisse commettre des infractions dans le milieu de la drogue justifie même une mesure prise en application de l'art. 74 al. 1 let. a LEI (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 ; 2C_437/2009 du 27 octobre 2009 consid. 2.1 ; 2A.347/2003 du 24 novembre 2003 consid. 2.2). En outre, de tels soupçons peuvent découler du seul fait de la possession de stupéfiants destinés à sa propre consommation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 ; 2A.148/2003 du 30 mai 2003 consid. 3.3). Les étrangers qui sont mêlés au commerce des stupéfiants doivent s'attendre à faire l'objet de mesures d'éloignement, la protection de la collectivité publique face au développement du marché de la drogue présentant incontestablement un intérêt public prépondérant justifiant l'éloignement d'un étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_530/2007 du 21 novembre 2007 consid. 5).

10.         En l'espèce, nonobstant son opposition à l'ordonnance pénale prononcée par le Ministère public du canton de Genève le 24 août 2024, M. A______ ne semble pas contester pouvoir faire l'objet d'une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée, dès lors que lors de l'audience de ce jour devant le tribunal, il n'a conclu qu'à la réduction de la durée de cette mesure.

En tout état, après analyse des différents éléments du dossier et indépendamment de l'ordonnance pénale du 24 août 2024, qui n'est pas entrée en force étant donné l'opposition dont elle fait l'objet, le tribunal arrive à la conclusion que le soupçon sur lequel s'appuie la mesure litigieuse est suffisamment fondé. En effet, les circonstances de l'arrestation de M. A______ par la police le 23 août 2024 font planer un doute sérieux sur son implication dans un trafic de stupéfiants, étant relevé en outre qu'il a déjà été arrêté et condamné à trois reprises pour de semblables infractions et que la mesure d'interdiction prise à son encontre le 29 mars 2019 mentionne que deux de ces arrestations ont eu lieu respectivement à la rue de la Coulouvrenière et sur le quai des Forces Motrices, dans le même périmètre – connu comme lieu de deal –, que celui où il a à nouveau été arrêté le 23 août 2024.

11.         Compte tenu de ce qui précède, la mesure litigieuse s'avère correctement fondée quant au principe.

12.         Les mesures d'assignation à un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent respecter le principe de la proportionnalité énoncé à l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101) (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4), lequel se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/3019/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

Pour être conforme au principe de la proportionnalité, une restriction d'un droit fondamental, en l'occurrence la liberté de mouvement, doit être apte à atteindre le but visé, ce qui ne peut être obtenu par une mesure moins incisive. Il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 137 I 167 consid. 3.6 ; 136 I 197 consid. 4.4.4 : arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1).

Les mesures d'assignation à un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent ainsi être nécessaires et suffisantes pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés ; les moyens doivent être proportionnés au but poursuivi, au regard notamment de la délimitation géographique et de la durée de la mesure (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2002 consid. 2c).

Le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles ; elles ne peuvent en outre pas être ordonnées pour une durée indéterminée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c). Cela étant, le périmètre d'interdiction peut inclure l'ensemble du territoire d'une ville (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.2 ; 2A.647/2006 du 12 février 2007 consid. 3.3 pour les villes d'Olten et de Soleure ; 2A.347/2003 du 24 novembre 2003 consid. 4.2 pour la ville de Berne).

Les étrangers dépourvus d'autorisation de séjour n'ont pas le droit à une liberté totale de mouvement. S'agissant d'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle, le seuil pour ordonner les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée n'a pas été placé très haut. Pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics, il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police. Des indices concrets de délits commis dans le milieu de la drogue suffisent, de même que la violation grossière des règles classiques de la cohabitation sociale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 et la référence citée ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 2b et les références citées ; ATA/45/2014 du 27 janvier 2014 ; ATA/778/2012 du 14 novembre 2012).

13.         Dans un jugement récent (JTAPI/68/2024 du 29 janvier 2024), le tribunal a passé en revue la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (CJCA) rendue en 2023, constatant que certains cas de très peu de gravité, c'est-à-dire n'impliquant qu'une seule condamnation pour un vol d'importance relative ou pour le trafic de quelques grammes de drogues dures, font l'objet, de la part du commissaire de police, d'interdictions territoriales pour une durée de six mois, tandis que le même type de situation peut parfois faire l'objet d'interdictions territoriales pour une durée de douze mois. Des cas plus graves, impliquant deux ou trois, voire plusieurs condamnations pénales, ainsi que des situations dans lesquelles des interdictions territoriales avaient déjà été prononcées une première fois (et dans certains cas violées) ont, quant à eux, fait parfois l'objet d'interdictions territoriales pour des durées de douze à dix-huit mois, et non pas systématiquement pour des durées de vingt-quatre mois.

Dans le même jugement susmentionné du 29 janvier 2024, le tribunal a également rappelé qu'il avait récemment réduit de dix-huit à six mois une mesure d'éloignement du territoire du canton de Genève prise à l'encontre d'une personne condamnée à une seule reprise en Suisse, pour faux dans les certificats et infractions contre la LEI, et contre laquelle deux autres procédures pénales étaient en cours, dont l'une concernait une infraction contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) (JTAPI/1453/2023 du 21 décembre 2023), ce jugement n'ayant pas fait l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative. Par conséquent, le tribunal, dans l'affaire objet du JTAPI/68/2024, a à nouveau réduit de douze à six mois la durée de l'interdiction territoriale, constatant que l'on avait affaire à des troubles de très peu de gravité contre l'ordre public liés au vol d'une faible somme d'argent (CHF 60.-) et d'un téléphone portable usagé, ainsi qu'à l'obtention d'un prestation d'assurance sociale que le Tribunal de police avait qualifiée de peu de gravité. Sur recours du commissaire de police, la chambre administrative a confirmé ce jugement en relevant que "Cette réduction permet de tenir dûment compte des particularités du cas d’espèce. Contrairement aux exemples que cite le recourant, l’intimé n’a pas participé à un trafic de drogues ni acquis des stupéfiants pour sa propre consommation, soit des infractions susceptibles de porter une atteinte importante à la sécurité et l’ordre publics" (ATA/232/2024 du 20 février 2024 consid. 3.5).

Il résulte de ce dernier considérant que la chambre administrative entend établir une différence de traitement, quant à la durée d'une mesure d'interdiction de pénétrer sur le territoire du canton de Genève, selon que la personne concernée a commis une infraction telle qu'un vol de peu d'importance ou selon qu'elle a participé à un trafic de stupéfiants.

14.         Enfin, il faut souligner que la jurisprudence fédérale (ATF 145 IV 312 c. 2.1.1 p. 315 ; 125 IV 90 c. 3 p. 102) considère qu'à teneur des études scientifiques menées sur la toxicité et les risques de dépendance, l'ecstasy devrait plutôt être rangée parmi les drogues douces comme le cannabis, et non pas parmi les drogues dures, de sorte que dans le cas d'un trafic de drogue portant sur de l'ecstasy, le cas aggravé résultant de la mise en danger de la santé de nombreuses personnes ne peut pas être réalisé (ATF 145 IV 312 c. 2.1.1 p. 315).

15.         Dans le cas d'espèce, M. A______ ne démontre pas avoir de liens avec le canton de Genève, puisque la réalité de la relation suivie qu'il entretiendrait avec une femme domiciliée à Genève ne repose pas sur le moindre indice. Pour autant, l'absence de lien avec le canton de Genève n'autorise pas à faire abstraction du principe de proportionnalité dans l'étendue temporelle et géographique de la mesure. En tous les cas, l'ensemble des circonstances doivent être prises en considération pour déterminer la portée de l'interdiction territoriale.

Le soupçon qui pèse sur M. A______ concerne le fait d'avoir vendu une pilule d'ecstasy à un consommateur le 23 août 2024. Comme relevé ci-dessus, cette drogue doit être considérée comme une drogue douce et de surcroît, le trafic dont il est question porterait sur une seule pilule, qui représente une quantité minime de drogue. En soit, au vu de la jurisprudence rappelée ci-dessus, ces éléments relèvent d'une infraction de très faible gravité et, s'il ne fallait tenir compte que d'eux, ne sauraient en tous les cas justifier une mesure d'éloignement d'une durée de 24 mois, mais plutôt de six mois. Cela étant, on ne saurait non plus faire abstraction de la précédente mesure d'éloignement prononcée contre M. A______ le 29 mars 2019 pour une durée de douze mois. La relative ancienneté de cette mesure, qui remonte à plus de cinq ans, de même que la faible gravité de l'infraction pour laquelle M. A______ est soupçonné dans le cas d'espèce, justifie que l'interdiction qui doit être prononcée contre lui n'excède à nouveau pas douze mois. Quant à son étendue géographique, on ne voit pas en quoi M. A______, qui n'a pas démontré avoir de liens particuliers avec le canton de Genève (étant relevé qu'il n'a en l'état ni titre de séjour, ni visa l'autorisant à entrer en Suisse), aurait un intérêt à pouvoir y pénétrer. Il ne se justifie donc pas de restreindre la mesure au centre-ville de Genève.

16.         Partant, le tribunal confirmera l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise à l'encontre de M. A______, mais en la réduisant à une durée de douze mois.

17.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

18.         Un éventuel recours déposé contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif (art. 10 al. 1 LaLEtr).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable l'opposition formée le 2 septembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 24 août 2024 pour une durée de 24 mois ;

2.             l'admet partiellement ;

3.             confirme la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 24 août 2024 à l'encontre de Monsieur A______, mais la réduit à une durée de douze mois ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant ;

5.             dit qu’un éventuel recours contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier