Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/1314/2024

JTAPI/372/2024 du 22.04.2024 ( MC ) , CONFIRME

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.75.al1.letc; LEI.76.al1.letb.ch1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1314/2024 MC

JTAPI/372/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 22 avril 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Mevlon ALIU, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, également connu sous d'autres identités, né le ______ 1989, est originaire du Sénégal.

2.             Entre le 26 novembre 2015 et le 21 août 2016, il a été condamné à trois reprises pour entrée illégale, séjour illégal, délit et crime contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) ; trafic de stupéfiants).

3.             M. A______ a fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse prononcée par le secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM), notifiée le 3 juillet 2019 et valable jusqu'au 18 janvier 2021.

4.             Le 3 juillet 2019, M. A______ a à nouveau occupé les forces de l'ordre genevoises dans le cadre d'un trafic de cocaïne, été arrêté, puis maintenu en arrestation provisoire, après que l'interdiction d'entrée en Suisse prononcée par le SEM à son encontre et valable jusqu'au 18 janvier 2021 lui eut été notifiée.

5.             Par arrêt du 3 août 2020, la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève a reconnu M. A______ coupable d'infraction à l'art. 19 al. 1 let. b, c et d et al. 2 let. a LStup, d'entrée illégale et de séjour illégal et l'a condamné à une peine privative de liberté de 28 mois (sous déduction de 336 jours de détention avant jugement). Simultanément, elle a ordonné son expulsion du territoire suisse pour une durée de huit ans, ainsi que son maintien en détention pour des motifs de sûreté.

6.             Dans la mesure où M. A______ était alors démuni de passeport, une demande de soutien à l'exécution de son renvoi a été effectuée le 8 octobre 2020.

7.             Le 29 octobre 2020, M. A______ s'est vu notifier, par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), une décision de non-report de la mesure d'expulsion judiciaire prononcée à son encontre, après avoir eu l'occasion de faire valoir son droit d'être entendu, dans le cadre duquel il a indiqué souhaiter être refoulé en Espagne.

8.             Par jugement du 23 décembre 2020, parvenu à la connaissance des autorités chargées de l'exécution des renvois le 4 janvier 2021, le Tribunal d'application des peines et des mesures a ordonné la libération conditionnelle de M. A______ pour le 7 janvier 2021.

9.             Le 7 janvier 2021, à sa sortie de prison, M. A______ a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

10.         Le même jour, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de trois mois.

11.         Par jugement JTAPI/9/2021 du 8 janvier 2021, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a confirmé l'ordre de mise en détention administrative précité pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 6 mars 2021 inclus.

12.         Le 29 janvier 2021, M. A______ a été renvoyé en Espagne, après que les autorités ibériques eurent consenti à sa réadmission dans ce pays où il disposait alors d'un titre de séjour valable jusqu'au 27 décembre 2021.

13.         Le 13 février 2022, M. A______ a une fois de plus été arrêté par la police, à Genève, alors qu'il se trouvait, avec un compatriote, dans un véhicule où étaient dissimulés, dans un vide-poche situé sous le siège passager qu'il occupait, 102.86 grammes brut de cocaïne et après qu'il eut tenté de se légitimer au moyen d'une carte d'identité appartement à son cousin.

14.         Lors de son audition par la police, M. A______, bien que testé positif à la cocaïne sur plusieurs parties de son corps, a en substance nié avoir un quelconque lien avec une histoire de drogue, tout en précisant qu'il en consommait occasionnellement et de manière festive ; il a en revanche admis qu'il savait ne pas avoir le droit d'être en Suisse. A cet égard, il a expliqué qu'il était venu à B______ (France) le 11 février 2022 en provenance d'Espagne pour un anniversaire, qu'il était arrivé à C______ (France) la veille, soit le 12 février 2022, et qu'il avait accompagné le conducteur de la voiture dans laquelle il avait été appréhendé en Suisse pour ne pas attendre au froid, à la gare d'C______ (France).

15.         Prévenu d'infractions à LStup (trafic de stupéfiants), de rupture de ban selon l'art. 291 du code pénal suisse (Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0)) et de faux certificats (252 CP), M. A______ a été, sur ordre du commissaire de police, mis à disposition du Ministère public, lequel a sollicité et obtenu auprès du Tribunal d’application des peines et des mesures sa mise en détention provisoire à la prison de Champ-Dollon.

16.         Par jugement du 25 août 2022, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a déclaré M. A______ coupable d'infraction grave à la LStup (art. 19 al. 1 let. b, c, d et al. 2 let. a LStup ; soit délits contre la LStup et crime contre la LStup, avec mise en danger de la santé de nombreuses personnes), de faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum 255 CP) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) ; simultanément, il a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de 20 ans (art. 66a  al. 1 let. o et 66b al. 1 CP), ainsi que son maintien en détention pour des motifs de sûreté afin de garantir l'exécution de la peine et de l'expulsion prononcée, après l'avoir condamné à une peine privative de liberté de 24 mois, sous déduction de 194 jours de détention avant jugement. Ce jugement a fait l'objet d'un appel.

17.         Le 20 janvier 2023, M. A______ a été libéré de la prison de Champ-Dollon.

18.         Par arrêt du 20 janvier 2023, la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice a annulé le jugement du 25 août 2022 du Tribunal de police précité et, statuant à nouveau, a acquitté M. A______ du chef d'infraction grave à la LStup (art. 19 al. 1 let. b, et d et al. 2 let. a LStup), l'a déclaré coupable d'infraction à la LStup (art. 19 al. 1 let c LStup), de faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum 255 CP) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et l'a condamné à une peine privative de liberté de neuf mois, sous déduction de 342 jours de détention avant jugement.

19.         Le 19 avril 2024, M. A______ a été arrêté par les services de police genevois, à la place Saint-François, après qu'il eut tenté de se soustraire à un contrôle d'identité, alors qu'il sortait du commerce MAXI BAZAR avec sa prétendue compagne, Mme D______.

20.         La fouille de M. A______, porteur d'un titre de séjour émis par les autorités espagnoles valable jusqu'au 27 décembre 2026, a notamment permis de découvrir, en sus de la somme de CHF 182.45 et d'un téléphone non signalé volé, un sachet de poudre blanche d'un poids brut de 23.4 grammes correspondant à de la cocaïne d'un niveau de pureté de 67%, de trois boulettes de cocaïne conditionnées pour la vente d'un poids total de 3 grammes et d'une petite balance électronique. La perquisition du domicile de Mme D______ a abouti à la découverte du passeport sénégalais de M. A______.

21.         M. A______ a en substance expliqué qu'il avait fui devant la police pour ne pas être arrêté la veille de l'anniversaire du fils qu'il avait eu avec Mme D______ et que cela n'avait rien à voir avec son statut, car il était « légal » à Genève, étant donné qu'il avait été acquitté lors de son dernier procès. S'agissant de la drogue trouvée en sa possession, M. A______ a fait savoir qu'il répondrait à cette question devant le procureur et en présence de son avocat, tout en précisant ne pas se livrer au trafic de stupéfiants et ne consommer de la cocaïne qu'occasionnellement et seulement en Espagne, pays où il était retourné depuis sa dernière arrestation, en Suisse, par la police et où il était resté alors plus d'une année ; il y avait travaillé dans une usine pour un salaire mensuel de EUR 1'200.- à EUR 1'300.-. Il était revenu à Genève à Noël et se trouvait sur le territoire helvétique depuis la veille; il était venu d'C______ (France), spécialement pour amener son fils à la crèche et être présent à l'occasion de son anniversaire.

22.         Prévenu d'infraction la LStup, de rupture de ban (art. 291 CP), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP) et d'infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), M. A______ a été, sur ordre du commissaire de police, mis à disposition du Ministère public, lequel l'a condamné, par ordonnance pénale, pour les faits pénalement répréhensibles ayant conduit à son arrestation, en l’occurrence et notamment pour infractions à la LStup (trafic de de cocaïne), pour rupture de ban et pour empêchement d'accomplir un acte officiel, puis remis en mains des services de police en vue d'exécuter à nouveau son expulsion pénale de Suisse d'une durée de huit ans.

23.         Lesdits services de police ont immédiatement demandé au SEM de soumettre une demande de réadmission de l'intéressé aux autorités espagnoles, conformément aux modalités de l'Accord du 17 novembre 2003 entre la Confédération suisse et le Royaume d’Espagne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière (RS 0.142.113.329; entrée en vigueur: 12 janvier 2005).

24.         La réservation d'un vol en faveur de M. A______ à destination de l'Espagne sera effectuée dès l'acceptation par ce pays de la demande de réadmission émanant de la Suisse. En cas de refus par l'Espagne de réadmettre M. A______ sur son territoire, ce dernier sera refoulé dans son pays d'origine.

25.         Le 21 avril 2024, à 16h10, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de six semaines, retenant notamment comme motif de détention que le précité avait franchi la frontière malgré une interdiction d'entrer en Suisse.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il était d'accord de retourner en Espagne, mais qu'il s'opposait à son renvoi au Sénégal.

26.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

27.         Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a déclaré que, comme il l’avait expliqué à la police, il croyait que son acquittement par la chambre pénale le 20 janvier 2023 entraînait la suppression de la mesure d’expulsion dont il faisait l’objet. Il prenait note de la remarque du tribunal à ce sujet, qui lui faisait observer que cet acquittement était postérieur à son retour en Suisse en février 2022.

Le conseil de M. A______ a expliqué qu’à son avis le problème était différent. Ce que M. A______ voulait exprimer, c’était le fait que cet acquittement et surtout le fait que l’arrêt du 20 janvier 2023 ne prononçait pas une nouvelle mesure d’expulsion, l’avait amené à croire qu’il pouvait désormais séjourner en Suisse et que c’était ce qui expliquait qu’il ne soit pas reparti après cet arrêt.

Sur question du tribunal, M. A______ a expliqué que Madame D______, qui vivait à Genève à ______[GE], était la mère de son enfant, E______, né le ______ 2022. Compte tenu de ce lien, il ne lui était pas possible d’envisager un retour au Sénégal mais il pouvait accepter un renvoi en Espagne.

Le représentant du commissaire de police a expliqué, sur question de Me ALIU, qu’il n’était pas disposé à envisager une mesure de contrainte moins incisive que la détention administrative. Sur question de Me ALIU, de savoir s’il serait envisageable de réduire la durée de la détention, il a expliqué que si l’accord de réadmission avec l’Espagne prévoyait que les autorités de ce pays répondaient en principe sous 24 heures aux autorités suisses, la pratique montrait qu’en l’occurrence, il fallait plutôt s’attendre à une réponse vers la fin de la semaine. A partir de là, il faudrait encore laisser aux autorités le temps nécessaire pour organiser pratiquement le renvoi à destination de l’Espagne. Cela signifierait un délai supplémentaire d’environ une semaine. Cependant, il faudrait encore réserver l’éventualité, qui se réalisait dans certains cas, que les autorités espagnoles refusent la réadmission malgré un titre de séjour en apparence valable.

M. A______, sur question de son conseil, a indiqué qu’il était arrivé en Espagne en 2005, dans le cadre d’un regroupement familial.

Le représentant du commissaire de police a plaidé et conclu à la confirmation de l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de six semaines.

Le conseil de M. A______ a plaidé et conclu à la mise en liberté immédiate de mon client, subsidiairement à toute autre mesure moins incisive, plus subsidiairement à la réduction de sa détention administrative à une durée de deux semaines.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 21 avril 2024 à 16h00.

3.            À teneur de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI (cum art. 75 al. 1 let. c LEI), après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment si elle a franchi la frontière malgré une interdiction d’entrer en Suisse et n'a pu être renvoyée immédiatement. Il découle de la jurisprudence qu'une décision d'expulsion pénale au sens des art. 66a ou 66abis CP vaut comme interdiction d'entrée pour la durée prononcée par le juge pénal (ATA/615/2022 du 9 juin 2022 consid. 2a ; ATA/730/2021 du 8 juillet 2021 consid. 4 ; ATA/179/2018 du 27 février 2018 consid. 4).

4.            En l'espèce, M. A______ a fait l'objet d'une mesure d'expulsion judiciaire prononcée par la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice prononcée par arrêt du 3 août 2020 et valable durant 8 ans, soit jusqu'en 2028. Après avoir été expulsé en Espagne le 29 janvier 2021, il a été à nouveau arrêté par la police à Genève le 3 février 2022. Il a donc enfreint l'interdiction d'entrer en Suisse que constituait son expulsion judiciaire, toujours valable à cette date. Il convient de préciser que les explications données par M. A______ sur l’erreur qu’il aurait commise en pensant que son acquittement du 20 janvier 2023 entraînait l’annulation de son expulsion judiciaire sont sans pertinence par rapport à ce qui précède. En effet, ce n’est pas le fait que M. A______ a poursuivi son séjour en Suisse après cet acquittement qui est pris en considération dans l’examen de la légalité de sa détention administrative, mais le fait qu’il soit revenu en Suisse malgré cette expulsion, étant relevé que ce retour est antérieur à l’acquittement sur lequel il fonde son erreur sur sa situation juridique. Il en va de même concernant le fait que sa dernière arrestation, le 19 avril 2024, ne l’impliquerait pas pour du trafic de stupéfiants, mais pour sa propre consommation de drogue : ces éléments sont sans pertinence par rapport aux motifs déjà évoqués plus haut concernant la légalité de sa détention.

5.            Les conditions légales de sa détention administrative sont donc réalisées à teneur des dispositions légales susmentionnées, ce qui légitime cette dernière sur le principe.

6.             Selon le texte de l'art. 76 al. 1 LEI, l'autorité "peut" prononcer la détention administrative lorsque les conditions légales sont réunies. L'utilisation de la forme potestative signifie qu'elle n'en a pas l'obligation et que, dans la marge d'appréciation dont elle dispose dans l'application de la loi, elle se doit d'examiner la proportionnalité de la mesure qu'elle envisage de prendre.

7.             Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

8.             Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).

9.            Par ailleurs, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

10.        En l'espèce, M. A______ conteste tout d’abord la proportionnalité au sens strict de sa détention administrative, considérant qu’il avait toujours déclaré son accord au fait de quitter sans délai le territoire suisse. Or, de telles déclarations ont été contredites par l’attitude de M. A______, qui est malgré tout revenu en Suisse nonobstant l’expulsion pénale dont il faisait l’objet et qui est valable jusqu’en 2028. C’est donc d’après ses actes qu’il faut apprécier la question de savoir si M. A______ se conformerait à son obligation de quitter la Suisse au cas où il serait remis en liberté, la réponse étant assurément négative au vu de son comportement. Par conséquent, seule sa détention administrative apparaît propre à assurer l’exécution de son expulsion.

Le fait qu’il ait pour projet d’épouser la mère de son enfant et de reconnaître ce dernier, ou encore qu’il soit en train d’effectuer en Espagne des démarches en vue de sa naturalisation, n’est pas propre à relativiser la nécessité d’exécuter une expulsion prononcée par un jugement entré en force.

Enfin, quant à la durée de la détention administrative, que le commissaire de police a prononcée pour une durée de six semaines, il apparaît, sur la base des explications données à l’audience par le représentant du commissaire de police, que cette durée est disproportionnée, puisqu’une réponse des autorités espagnoles devrait parvenir dans le courant de la semaine et qu’à supposer que cette réponse soit positive, une semaine supplémentaire devrait être suffisante pour la réservation d’un vol à destination de l’Espagne. Par conséquent, on ne voit pas à priori l’intérêt d’une détention d’une durée de six semaines. Quant à l’hypothèse que les autorités espagnoles refusent la réadmission de M. A______ ou que celui-ci refuse de prendre l’avion à destination de l’Espagne, une durée totale de six semaines apparaît vraisemblablement insuffisante pour effectuer les démarches supplémentaires que ces deux hypothèses nécessiteraient. Par conséquent, une réduction de la détention administrative à quatre semaines apparaît davantage proportionnée et permettra plus rapidement, cas échéant, de contrôler à nouveau, en fonction de l’évolution de la situation, la poursuite éventuelle de la détention de M. A______.

11.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______, mais pour une durée de quatre semaines.

12.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 21 avril 2024 à 16h10 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de quatre semaines, soit jusqu'au 17 mai 2024 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière